Après un dernier tour de piste pour voter le projet de « loi d’urgence » de reconstruction post-émeutes, le dimanche 23 juillet a marqué formellement la fin de l’année législative. Voilà les députés libérés de leur obligation de présence à Paris. L’occasion, entre deux semaines de vacances, d’un retour en circonscription pour sonder les Français.
Sitôt la session terminée, le député PCF du Pas-de-Calais Jean-Marc Tellier partira avec sa caravane à la rencontre des classes populaires dans la région de Lens. Les lieux d’échanges ont été choisis pour faire écho à la préoccupation du moment : sur le parking de l’Intermarché de Noyelles-sous-Lens ou devant le Lidl de Sallaumines, l’élu communiste militera « contre la vie chère ». « On ne veut pas l’aumône ! On veut de vrais salaires et de vraies pensions », peut-on lire sur le tract qu’il compte y distribuer.
« Du plaidoyer à portée de caddie, à portée de gifles aussi »
« Déjà que les gens étaient pris à la gorge, je n’ose même pas imaginer la situation à partir du 1er août avec l’augmentation des tarifs de l’électricité », s’inquiète Jean-Marc Tellier. Sa réponse à la crise sociale ? « Faire du plaidoyer à portée de caddie, à portée de gifle aussi », sourit l’ancien maire d’Avion, dont la circonscription jouxte celle de Marine Le Pen. « S’entendre dire par un ouvrier à la retraite que la gauche l’a abandonné, forcément ça fait mal », reconnaît ce fils de mineur.
« Qu’importe l’adversité, les préjugés sur l’assistanat ou l’immigration, devant le ressentiment, on ne peut pas faire la sourde oreille », pour Philippe Brun (PS), élu de justesse face à une candidate RN dans l’Eure. De l’étude du carnet de terrain de son illustre prédécesseur Pierre Mendès France, le jeune député socialiste a tiré un enseignement : « La politique ne peut pas se faire exclusivement en chambre. »
Concrètement, cela se traduit par l’organisation de réunions hebdomadaires dans les 83 villages de sa circonscription. Mais aussi l’indémodable porte-à-porte dans les quartiers populaires de Val-de-Reuil, durement touchés par les émeutes, où près d’un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté. « Même quand on se fait engueuler, il faut savoir écouter les gens, les laisser dérouler le fil de leur colère. »
Des ateliers législatifs citoyens
Plutôt que d’apparaître comme un « donneur de leçons » – sa hantise –, Philippe Brun tient des ateliers législatifs citoyens pour coécrire des amendements sur des thématiques tels que les déserts médicaux, le handicap, ou encore les familles monoparentales. « Le texte sur les tarifs réglementés de vente d’électricité pour les PME (adopté par l’Assemblée début mai, contre l’avis du gouvernement, NDLR), je le dois à un boulanger d’Heudreville-sur-Eure, raconte-t-il. Il n’avait jamais participé à une réunion politique. Ce soir-là, il a dit ce qu’il avait sur le cœur. À commencer par son angoisse de devoir plier boutique. »
Pour ces élus, l’itinérance est une méthode, « un moyen d’ouvrir la boîte à idées », selon Christophe Blanchet (MoDem). Début août, ce député du Calvados, amateur de défis sportifs, enfourchera son vélo au départ de la station balnéaire de Merville-Franceville pour visiter les 117 communes de sa circonscription. Avec un objectif : découvrir les initiatives en faveur du développement durable. Chaque fin d’étape sera marquée par la tenue d’un débat citoyen devant la mairie de la ville d’arrivée.
Un tour de France des fermes
Dépassant les frontières de sa circonscription, le député de l’Aisne Julien Dive (LR) s’est lancé dans un tour de France des fermes, entrepris début juillet avec une douzaine de collègues. Une manière de remonter aux racines du malaise agricole, puis d’esquisser des solutions. « Face à moi, j’ai des agriculteurs qui subissent un agribashing permanent de la part de la Nupes », déplore ce jeune député de droite, qui s’inquiète d’un « rejet croissant des contraintes européennes ».
Qu’il s’agisse de paysans en polyculture élevage dans l’Indre ou de maraîchers ardéchois, les mêmes problématiques reviennent : la difficulté de s’installer, l’importation de denrées agricoles hors des standards de l’UE vécue comme « une injustice » par les producteurs, ou encore les actions de sabotage des écologistes assimilées aux pillages durant les émeutes.
À partir des doléances récoltées, Julien Dive compte rédiger un livre blanc pour l’avenir du monde agricole. Le tout en amont de la loi d’orientation et d’avenir agricole, examinée fin 2023 au Palais-Bourbon. Le retour à Paris se prépare dès maintenant.
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Dans l’hémicycle, une année pied au plancher
Depuis juin 2022, les députés ont été invités à siéger plus de 1 194 heures – contre 1 057 heures pour la session ordinaire précédente.
17 motions de censure ont été débattues et le gouvernement a engagé sa responsabilité, par le recours à l’article 49.3, à 11 reprises.
45 projets de loi et 29 propositions de loi ont été définitivement adoptés – soit vingt textes de plus que lors de la session 2022-2023, d’après les données arrêtées par la présidence de l’Assemblée nationale au 18 juillet.
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