01/05/2024
Agriculture : ces nouvelles maladies qui fragilisent les élevages
En lien avec le changement climatique et transmise par un moucheron, la « maladie hémorragique épizootique », coûte cher en frais de vétérinaire et fait souffrir les vaches et leurs veaux. Par ailleurs, alors que le « H5N1 » ne semblait concerner que les volailles en Europe (1), cette infection, également nommée « grippe aviaire », touche désormais les vaches laitières aux Etats-Unis et quelques personnes à travers le monde.
Il existe en France deux types d’élevage de bovins. D’un côté, les vaches laitières passent deux fois par jour en salle de traite. De l’autre, les vaches des races à viande comme la charolaise, la limousine et la blonde d’Aquitaine allaitent leur veau pendant huit à dix mois. Dans les deux cas, nous avons montré ces dernières semaines que les éleveurs ont de plus en plus de mal à tirer un revenu de leurs longues semaines de travail. Comme un malheur n’arrive jamais seul, les frais de vétérinaire sont en train d’augmenter là où la « maladie hémorragique épizootique » (MHE) est apparue depuis septembre 2023. Il s’agit d’une maladie infectieuse transmise par un moucheron comme celui qui transmet la fièvre catarrhale ovine chez les moutons.
Au début du mois de mars 2024, on comptait un peu moins de 4.000 foyers de MHE en France avec une concentration en Occitanie et dans le sud de la région Nouvelle Aquitaine. Mais la contamination gagne du terrain dans toute la moitié ouest du pays. Présente en Amérique du nord, en Australie, en Afrique et en Asie, cette maladie progresse surtout au sud de l’’Europe, à commencer par l’Italie et l’Espagne.
De lourds et coûteux traitements vétérinaires
C’est surtout depuis l’Espagne qu’elle arrive en France. Selon le ministère de l’Agriculture, « les premières enquêtes de terrain montrent que 10 à 15% des bovins expriment des signes cliniques en cas de contamination d’un élevage par la MHE. L’atteinte des animaux se traduit notamment par de la fièvre, des ulcérations du mufle, du jetage (le nez qui coule) et des boiteries requérant parfois des traitements lourds et prolongés prodigués par l’éleveur en lien avec son vétérinaire traitant. De plus, malgré les soins prodigués, les bovins restent susceptibles de décéder des conséquences de la maladie ». Toutefois, le taux de mortalité dans les élevages contaminés ne serait que de 1% selon le ministère de l’Agriculture.
Concernant l’origine et la transmission de la maladie, on relèvera ce commentaire de Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire: « Nous le savions, l’intensification des flux d’animaux et de personnes entre les continents tout comme le dérèglement climatique seront des moteurs pour l’apparition de nouvelles maladies comme la MHE sur notre territoire. Nous devons collectivement nous préparer. Comme je m’y était engagé, le soutien financier auprès des éleveurs touchés vient sécuriser le présent et permet à la filière de se projeter sur l’avenir ».
Une progression rapide dans la moitié des départements
Partant de ce constat, mieux vaudrait que la France intervienne avec force auprès de la Commission européenne pour s’opposer aux négociations en cours sur des accords de libre-échange avec des pays tiers comme l’Australie et qu’elle s’oppose fermement à la ratification de celui signé entre la Commission européenne et les pays du Mercosur en 2019 . On sait aussi que la France vend chaque année beaucoup de ces jeunes bovins de dix mois que sont les «broutards » en Italie et en Espagne pour l’engraissement. Si la maladie prend de l’ampleur dans nos élevages de bovins allaitants, les débouchés des broutards reculeront et les prix baisseront.
Il reste aussi à voir comment la maladie progressera dans notre pays. Le ministère de l’Agriculture a publié une carte de France faisant apparaître les risques de diffusion de la MHE dans des départements d’élevage bovin à l’ouest d’une courbe qui va des Pyrénées-Orientales jusqu’en Bretagne en passant par des départements comme la Lozère, l’Aveyron, la Corrèze, l’Allier, la Haute Vienne, la Creuse, la Vendée.
Le vendredi 26 janvier, lors de son déplacement sur la ferme de Jérôme Bayle, dont le troupeau a été contaminé par la MHE en Haute-Garonne, le Premier ministre avait annoncé une enveloppe de 50 millions d’euros pour aider les éleveurs à payer les frais de vétérinaire, les remboursements pouvant passer de 80% à 90% de la facture. Cette somme a été confirmée la semaine dernière. Mais limiter les aides aux frais de vétérinaire ne suffira pas pour améliorer le revenu des éleveurs alors que le prix de la viande au départ de la ferme ne couvre pas les coûts de production daznsd beaucoup d’exploitations.
Quand la grippe aviaire frappe aussi les vaches laitières
Connue sous le sigle « H5N1 » une autre maladie contagieuse a causé d’énormes pertes dans les élevages de volailles, dont les palmipède à foie gras ces dernières années. Elle est surtout transmise par les oiseaux sauvages en migration et désignée de ce fait par les mots « grippe aviaire». Mais voilà que 889 cas de grippe aviaire transmise aux humains ont été enregistrés dans le monde entre janvier 2023 et avril 2024. Depuis deux mois, le « H5N1 » a touché plusieurs élevages de vaches laitières aux Etats-Unis. Il se dit que ces bovins ont pu être contaminés par des déjections d’oiseaux sur l’herbe des prés qu’ils broutent. Mais « il y a probablement eu des contaminations d’un troupeau à l’autre par la suite » estime Gilles Salvat, directeur de la recherche de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.
Avec le changement climatique, les pandémies ont tendance à se répandre à travers le monde. Mieux vaudrait donc produire l’essentiel de notre alimentation en France plutôt que d’importer une partie croissante de notre nourriture pour réduire le prix de revient de chaque repas pour des millions de salariés et de retraités dont le pouvoir d’achat recule. Surtout quand les actionnaires de Stellantis votent une rémunération de 100.000 € par jour à leur PDG en échange d’une forte hausse des dividendes sur les profits encaissés en 2023.
- Voir l’entretien avec le virologue Bruno Lina en pages 6 et 7 dans l’Humanité du 29 avril
Source Gérard Le Puill l'Humanité
12:14 Publié dans Actualités, Connaissances, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : élevage, maladie | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |