01/02/2008
Astérix collabo
La France Sarkozyenne, par François Taillandier
Il y avait bien eu quelques albums qui n’ajoutaient pas grand-chose à la gloire du héros ; mais la disparition prématurée du scénariste excusait cela dans une certaine mesure. Il y avait bien déjà un trafic des produits dérivés ; mais c’était la rançon de la popularité. Après, il y a eu le parc de loisirs ; mais il faisait la nique à Eurodisney, et pour avoir visité les deux, j’affirme que le nôtre est beaucoup moins tarte ; j’y voyais presque une protestation française. Après, il y a eu le film ; mais Djamel, Chabat, Darmon et les autres étaient sympathiques et drôles…
Bref : j’aurai eu toutes les indulgences envers Astérix. « Ce que j’aime en vous, ce sont mes souvenirs », a écrit je ne sais plus qui. Lorsque j’avais entre dix et quinze ans, chaque nouvelle aventure de nos Gaulois était une fête. On ne parlait que de ça, à l’école, pendant au moins quinze jours. Même les parents et les profs se jetaient sur le Bouclier arverne, Astérix légionnaire ou le Domaine des dieux. Par la suite, Astérix prit place dans nos souvenirs comme un personnage de la famille, en quelque sorte ; ou un vieux copain qu’on ne voit plus très souvent mais auquel on repense quelquefois avec nostalgie en se disant : « On se sera bien marrés… »
Et puis, au-delà des gags attendus, des calembours, des allusions transparentes au temps présent, il y avait une dimension toute simple, évidente, mais forte : Astérix, Obélix et toute la bande étaient des réfractaires. Des « irréductibles », selon l’épithète consacrée. C’est fini, bien fini. La propagande écrasante du film « le plus cher du cinéma français » (car c’est tout ce qu’on trouve à en dire) a tout laminé. J’ai vu à la télévision un réalisateur aux yeux mornes expliquer le montage de la coproduction internationale, les partenariats commerciaux, le casting fait à coups de sondages. A-t-il déjà lu Astérix, celui-là ? On n’en jurerait pas…
Chateaubriand écrivit qu’on détruit plus sûrement un peuple par la séduction que par la violence. Ce que n’avaient jamais réussi les légions romaines d’Aquarium, Babaorum, Laudanum et Petibonum, l’industrie de l’entertainment y est parvenue à la longue. Il a rendu les armes, le Gaulois bravache et rigolard ! Les pourvoyeurs des jeux du cirque le baladent dans tout l’empire, et pas même enchaîné comme le fut Vercingétorix, mais consentant et souriant. Obélix dédicace des menhirs, Assurancetourix compose des sonneries de portable, et la potion magique est en vente à McDo. Adieu, Astérix…
23:14 Publié dans Cactus | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Astérix, film, Sarkozy | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |
Commentaires
Chateaubriand parlait au XIX ème siècle. Et je ne sduis pas certain que le titty entertaitnment fonctionne uniquement par la séduction. Dans ce qu'il a d'exclusif et de totalitaire, il recèle forcément, une part de violence.
Écrit par : solko | 05/02/2008
Non pas adieu, il reste les albums, ils sont irréductiblement dans mon coeur !
Écrit par : aliscan | 02/03/2008
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