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16/12/2020

Pif revient avec "Pif le Mag" et… trois gadgets écolos

Pif Hebdo.jpgLe 1er numéro du nouveau magazine Pif, "durable et connecté", sort mercredi 16 décembre, sous licence avec "L'Humanité". Vendu 5,90 euros, il sera trimestriel. C'est le pari d'une renaissance pour un titre dont les récentes résurrections ont échoué.

Le célèbre chien humaniste revient avant Noël et le magazine s'annonce déjà collector. Mercredi sortira le 1er numéro du nouveau Pif le Mag. Il sera trimestriel (avec, en plus, un numéro annuel spécial BD et jeux) et se veut "durable et connecté". Vendu 5,90 euros et comptant 84 pages (plus 4 détachables pour le jeu de l'oie), il sera imprimé à 120.000 exemplaires et veut toucher les... "super-jeunes de 6 à 120 ans". Au sommaire : des BD inédites dont les aventures de PifPifou, Placid et Muzo ou encore Concombre masqué, Hercul'otté... Mais aussi six planches de Rahan inédites depuis 1979. Un nouveau personnage apparaîtra, Pifi, fils de Pif ; et Hercule sera évidemment de la partie. Parmi les autres contenus de ce premier numéro : un reportage sur Tara Océan, le bateau qui sauve la planète, des activités, des jeux, des gags et des interviews.

Première personnalité interrogée : Nikos Aliagas. L'animateur de TF1, parrain de ce retour, lance une opération avec le Secours populaire dans le premier numéro : offrir un jouet à ceux qui n'en ont pas. Il y raconte aussi son enfance ainsi que The Voice et The Voice Kids. "Vive Pif", a-t-il tweeté ce samedi soir. "C'est un retour à l'enfance, une madeleine de Proust", indique Nikos dans une vidéo promotionnelle. Il se souvient que sa maman lui promettait "un Pif à la fin de la semaine" s'il était "un bon élève".

De son côté, Pif, lui-même, est interviewé dans L'Humanité Dimanche car Pif le Mag est édité par la société Pif & Hercule, sous licence L'Humanité. "Je suis plus humaniste que jamais, confie-t-il. Vous me connaissez, l'injustice m'insupporte." Le héros, né en 1948 dans les colonnes de L'Humanité sous le crayon de Arnal à l'initiative des éditions Vaillant, veut être en phase avec le monde d'aujourd'hui et porte désormais un sac à dos vert.

Des gadgets "écolos"

Si le magazine ne s'appelle plus Pif Gadget, il y aura toujours ce qui a fait une partie du succès du magazine. Cette fois, il n'y aura pas un mais trois "trois gadgets écolos" : un sapin à planter (comme en 1975), un jeu de l'oie sans plastique et une appli magique et gratuite qui permettra de découvrir Pifga, l'avatar numérique de Pif. Tous sont donc 100% écolo, sans plastique et respectent la biodiversité, ce qui est une des marques de fabrique de ce nouveau Pif. "Par exemple, nous ne distribuerons pas de pois sauteurs du Mexique ou de pifises [petites bestioles connues sous le nom d'artémias salinas], confie Adrien Nibourel, l'un des maîtres d'oeuvre du projet et rédacteur en chef BD du titre. Les animaux, ils seront dans les BD. Il n'y aura pas non plus de jouets plastiques made in China." Le sapin de 15 cm est fourni dans le cadre d'un partenariat avec Jardiland. Et d'autres alliances ont été scellées avec, notamment, 30 Millions d'amis, l'Académie du climat ou The Explorers. En projet : un emballage écologique pour les prochains mois. 

En parallèle, et pour fêter ce retour, se tiendra à partir de mardi une exposition "Pif le chien au secours de la planète" en gare de Paris Saint-Lazare.  

Ce retour de Pif n'est pas le premier. Créé en 1969, Pif Gadget a connu un très grand succès dans les années 1970-80. L'hebdomadaire s'est interrompu de 1993 à 2004, puis a reparu en mensuel jusqu'en novembre 2008, puis sous forme de hors-série en juin 2015. De juin 2015 à octobre 2017, c'est Super Pif qui a pris la place pendant neuf numéros. Fin juin 2018, une opération de financement participatif pour un nouveau lancement avait été initiée en vain. Et avait laissé beaucoup de fans déçus de la non-concrétisation du projet. 

Lire aussi - Patrick Le Hyaric, directeur de L'Humanité : "Il faut faire vivre les valeurs historiques de Pif"

Ce retour sera-t-il réussi ?

"Le magazine est aujourd’hui édité par les Editions Vaillant qui renaissent pour l’occasion, grâce à la volonté et la passion de Frédéric Lefebvre et Bernard Chaussegros, précise Adrien Nibourel. Ils sont des grands nostalgiques des années Pif et ont souhaité relancer le magazine pour faire découvrir aux nouvelles générations tous les personnages qui ont bercé leur enfance." Un contrat de licence a été signé avec L'Humanité. Des partenariats très forts avec le journal de Jean Jaurès, qui a donné naissance à Pif le chien, sont déjà initiés. La régie publicitaire a par ailleurs été confiée à Comédiance qui gère la publicité du groupe Humanité et le réglage du magazine à Otto Borscha en relation avec les MLP qui le distribuent.

Reste à savoir si Pif, le Mag trouvera son public. "Il y a un attachement viscéral de certains au Pif des débuts, alors il y aura forcément des déçus, explique Adrien Nibourel. Chacun à son Pif, plus ou moins militant, plus ou moins aventurier, et en a une idée précise. Il s'agit de trouver un équilibre entre le Pif historique et celui du monde actuel avec ses nouveaux défis, écologiques notamment." De jeunes dessinateurs croqueront les personnages. Levadoux, 31 ans, devient le nouveau dessinateur de Pif ; Clem, 28 ans, celle de Placid et Muzo ; ALix L. assurera jeux et illustrations ; tandis que Gotié, dessinera Hercul’otté et est l'auteur des dessins de Nikos dans le premier numéro. "Il était temps qu'avec ma joyeuse bande, on reprenne du service", scande ainsi le nouveau Pif dans L'Humanité Dimanche.

Sources Le Journal du Dimanche

19:16 Publié dans Actualités, Médias | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pif | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

08/11/2020

Le sénateur communiste Eric Bocquet propose une taxe exceptionnelle pour contraindre Amazon à la solidarité avec les commerces de proximité

amazon.jpgLe sénateur communiste Éric Bocquet détaille la proposition d’une « contribution de solidarité » imposée aux « grands gagnants » de la crise qu’il a défendue au palais du Luxembourg cette semaine. Entretien.

Vous avez proposé cette semaine au gouvernement une taxe exceptionnelle sur Amazon. Quel serait son objectif ?

Eric Bocquet : Il s’agit d’alimenter un fonds d’aide d’urgence aux commerces de proximité impactés par la pandémie. Car, à l’inverse de ces derniers, les grands groupes du numérique bénéficient du confinement, notamment Amazon s’agissant de la distribution de marchandises, les livres, mais pas seulement.

Les résultats d’Amazon sont absolument astronomiques cette année : 73 % de valorisation boursière depuis janvier 2020, pour atteindre les 1 650 milliards de dollars, l’équivalent du PIB de la Russie. Au premier trimestre, ses rentes ont augmenté de 26 %.

L’idée est donc d’instaurer un principe de vases communicants. Une régulation est nécessaire : il faut solliciter la minorité de grands gagnants de cette pandémie pour soutenir la majorité de ceux qui en sont les perdants. Concrètement, il serait aisé pour l’État d’évaluer le chiffre d’affaires d’Amazon, puisqu’il paie la TVA. Il ne resterait qu’à définir un taux et une assiette pour mettre en œuvre cette contribution de solidarité que nous proposons.

La mobilisation s’accroît contre l’implantation de nouveaux entrepôts notamment dans le Grand Est. Quelle est l’ampleur de la distorsion par rapport au commerce de proximité ?

Eric Bocquet : Le deuxième scandale est fiscal : les trois quarts des bénéfices d’Amazon ne sont soumis à aucune imposition parce que l’entreprise a implanté deux filiales au Luxembourg.

Le tout, évidemment, avec l’accord bienveillant de ce pays qui pratique, au cœur de l’Europe, la concurrence fiscale à l’extrême. Amazon a d’ailleurs été désigné par les spécialistes comme l’entreprise du numérique qui a la politique fiscale la plus agressive. Comme l’Union européenne (UE) ne veut pas se mettre d’accord sur la taxation des Gafa (Google, Apple, Facebook et Amazon - NDLR) et laisse chacun jouer son propre plan fiscal, on est de fait dans une logique de compétition pour attirer les capitaux, les grands groupes en proposant des montages scandaleux qui créent une distorsion incroyable.

L’hypocrisie de l’UE touche à son comble avec beaucoup de discours sur cette question ou celle de la taxation des transactions financières, mais jamais rien qui avance. Le prétexte est toujours le même : ce serait trop compliqué. Les règles du jeu doivent changer, en particulier celle de l’unanimité. Sans remettre en cause la souveraineté fiscale des États, une majorité d’entre eux devrait pouvoir imposer des règles justes et équitables y compris aux multinationales.

Il est plus que tant d’ouvrir le chantier de l’harmonisation fiscale, sans lequel la règle de la concurrence libre et non faussée restera de mise. Le résultat est là : les financiers sont gagnants, les États et les peuples, eux, sont perdants.

Le gouvernement répond qu’il travaille à une taxe Gafa au niveau européen, qui, à défaut d’accord, serait instaurée en France. Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, est même allé jusqu’à les considérer comme « des adversaires des États ». Pourquoi cela ne vous paraît pas suffisant ?

Eric Bocquet : Il ne faudrait pas s’arrêter au discours. Les prises de position volontaristes de Bruno Le Maire, nous les avons déjà entendues : on allait voir ce qu’on allait voir. Mais quand l’Allemagne dit non et que les États-Unis menacent de rétorsions les exportations françaises, on capitule. L’OCDE n’y arrive pas, le G20 non plus, l’UE ne veut pas y arriver.

Depuis 10-15 ans on nous raconte les mêmes sornettes et la situation s’aggrave. Il faut engager le rapport de force. L’opinion – le consommateur, le contribuable, l’électeur – doit s’emparer de ces sujets parce qu’on ne fera pas bouger les États sans volonté populaire forte d’avancer vers la justice fiscale. L’UE, et ses 500 millions d’habitants, n’est pas une petite entité dans le monde. Si elle décide d’entrer unie dans cette bagarre qu’est l‘économie, elle peut peser mais encore faut-il vouloir mener ce combat ensemble et dans l’intérêt général.

 Je suis en revanche d’accord avec Bruno Le Maire lorsqu’il dit que ces grands groupes sont dangereux pour les États. Amazon investit dans la santé, Google s’intéresse à l’éducation… Ces groupes-là ont la puissance financière de beaucoup de pays, l’étape politique suivante est un monde où les affaires de 7 milliards d’humains sont gérées en direct – et sans impôts – par une centaine de multinationales en fonction, bien sûr, de leurs intérêts et non pas de l’intérêt général. C’est un enjeu politique et démocratique de fond.

Entretien réalisé par Julia Hamlaoui, l'Humanité

12:30 Publié dans Actualités, Economie, Entretiens, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : eric bocquet, amazon, commerce | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

29/10/2020

À Gaza : Ziad Medoukh, un géant de la non-violence

Ziad.jpgPortrait

Ziad Medoukh

Fondateur du Centre de la paix de Gaza

Directeur du département de français de l’université de Gaza, le Palestinien Ziad Medoukh apprend aussi à ses étudiants les armes de la non-violence.

  • Anne-Bénédicte Hoffner,

    « Mes poèmes ne soulagent point nos peines, mais ma poésie défend la vie./Elle est elle-même une résistance ! » Dès qu’il trouve un moment de calme, c’est en vers et en français que Ziad Medoukh s’échappe de Gaza, étroite bande de terre palestinienne, coincée entre la Méditerranée et les barbelés israéliens. « Je compose mes poèmes de Gaza ma prison :/Gaza est l’âme libre du poète/Gaza est le sourire brûlant des innocents/Gaza est l’étoile magique de l’espoir/Qui trouve dans la poésie l’échappatoire/Nécessaire à sa survie. »

    Géant débonnaire aux sourcils broussailleux et à la vigoureuse poignée de main, Ziad Medoukh est l’homme des contraires, des associations improbables. Le titre de son dernier livre en témoigne : Être non-violent à Gaza (1). Directeur du département de français de l’université Al-Aqsa de Gaza, récompensé par plusieurs prix littéraires et même les palmes académiques, il est un amoureux fou de la France et de la langue française qu’il a apprise en Algérie, en pleine décennie noire, auprès des Kabyles de Tizi Ouzou. Quelques années plus tard, un master en sciences du langage à Grenoble lui permit d’en parfaire la maîtrise, et, comme il l’avait déjà fait en Algérie, de parcourir l’Hexagone du nord au sud. « Je n’aime pas l’enfermement », résume-t-il.

    « La langue du témoignage et de la résistance »

    Depuis, le français est pour lui « la langue de la paix et de l’espoir, la langue du témoignage et de la résistance ». Son seul regret ? Ne pas avoir réussi à partager sa passion avec sa femme et ses cinq garçons, qui ont tous choisi d’apprendre l’anglais. « Ils ne me voient pas assez à la maison et ils pensent que c’est la France qui leur a pris leur père », confesse-t-il, mi-amusé mi-contrit.

    Lorsqu’il parvient à décrocher un permis pour voyager, « tous les trois ou quatre ans environ », c’est vers Paris qu’il s’envole, non plus pour visiter ses monuments ou goûter sa cuisine, mais pour participer à des colloques, retrouver ses nombreux amis, cinéastes, écrivains ou journalistes, et toujours défendre sa deuxième passion : « la résistance non-violente ».

    Lui qui vit au quotidien l’injustice et la violence a créé en 2004, au sein de son université, le Centre de la paix. Parce qu’il sait que, pour être efficaces, « les artisans de la non-violence doivent s’insérer profondément dans la vie socio-économique locale », il emmène ses étudiants aider les agriculteurs pendant la récolte des fruits et légumes, donner un coup de main aux pêcheurs, et il les invite à s’impliquer dans un programme de soutien psychologique aux enfants traumatisés. Le Hamas n’apprécie guère la mixité de mise dans toutes les activités mais Ziad Medoukh tient bon. Mieux, il partage ses initiatives sur une chaîne YouTube : « Gaza la vie ».

    « Je suis musulman, croyant et pratiquant, mais j’accepte l’autre »

    Dans une région où la religion est omniprésente, voire envahissante, il entretient avec elle un rapport de prudente distance. « Il y a trois questions que je ne pose jamais : l’origine, la religion et l’appartenance politique, raconte-t-il en riant, avant d’accepter de se livrer à ce sujet. Je suis musulman, croyant et pratiquant, mais j’accepte l’autre. C’est la force de mon islam, celui que mon père m’a appris. »

    Avec l’échec de la résistance armée palestinienne, Ziad Medoukh veut croire que le contexte est porteur. Il en veut pour preuve la Grande marche du retour, mouvement lancé le 30 mars 2018 dans le cadre de la commémoration de la Nakba, l’exode palestinien de 1948 lors de la première guerre israélo-arabe. Chaque vendredi dans la bande de Gaza, 10 à 15 000 habitants, parfois plus, se dirigent vers les « zones tampons » gardées par les soldats israéliens « non pas pour les affronter mais pour les défier, et exiger la levée du blocus », explique-t-il : ils s’y installent pour des pique-niques, agrémentés de concerts ou de danses.

    « Le gouvernement israélien redoute la non-violence palestinienne, car elle pourrait lui faire perdre la prétendue légitimité de ses représailles violentes », assure-t-il, tout en déplorant le manque de soutien de l’Autorité palestinienne comme des « factions » qui dominent Gaza. « Contrairement à ce que beaucoup de gens croient, l’action non-violente est un choix plus difficile que la violence », reconnaît-il.

    Quant à lui, il semble imperturbable, un roc dans la tempête de violence et de désespérance. Il assure ne jamais pleurer « sauf parfois devant un film ». « Ma force ? Elle vient de l’intérieur, de la conviction que je suis à ma place là-bas. Même pour 1 million d’euros, je ne viendrai pas m’installer en France. Je ne vais pas laisser les jeunes affronter cette situation seuls. »

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    « La pierre est tombée de ma main »

    La découverte de la non-violence a été instinctive pour Ziad Medoukh. Jeune homme, il a suivi ses camarades de classe partis « lancer des pierres sur les soldats israéliens qui se trouvaient dans ma ville et répondaient par des balles réelles ». « Mais soudain, la pierre est tombée de ma main et j’ai commencé à réfléchir à d’autres moyens de résister contre les occupants de notre terre », raconte-t-il dans son livre. Après s’être documenté et avoir découvert les principes élaborés par Gandhi contre l’occupation britannique, Ziad Medoukh s’est promis de consacrer sa vie « à résister par l’éducation, la culture, la non-violence et le travail auprès des jeunes ».

    (1) Éditions Culture et Paix, 192 p., 13 €.

 

17:53 Publié dans Actualités, Entretiens, Histoire, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ziad medoukh | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

24/10/2020

Boualem Sansal écrivain Algérien : L’islamisme a déclaré la guerre au monde, aux pays musulmans, à l’Occident

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Après l’assassinat de Samuel Paty, l’écrivain algérien Boualem Sansal revient sur l’expérience du terrorisme dans son pays pour appeler les gouvernements occidentaux à prendre conscience de la menace sans céder aux sirènes de la division.

La Marseillaise : Comment avez-vous reçu la nouvelle de ce meurtre d’un enseignant en France ?

Boualem Sansal : J’étais horrifié, mais pas surpris. L’islamisme a déclaré la guerre au monde, aux pays musulmans, à l’Occident. Il a ciblé la France à partir des années 90 et a continué crescendo. Il y aura d’autres attentats, toujours plus horribles, pour briser toute résistance. Les politiques engagées pour le « domestiquer » sont ridicules, voire criminelles. L’islamisme veut la victoire totale, la soumission, rien ne l’arrêtera. Il faut l’éradiquer au plus vite, le pays ne peut indéfiniment vivre sous la menace et la peur.

Que peuvent les démocraties occidentales contre la montée de cet obscurantisme ?

B.S. : Pour elles, tout cela est nouveau, il faut le temps de l’apprentissage. Quand l’islamisme est arrivé en Algérie au début des années 80, nous avons passé des mois à nous demander ce qu’était cette chose. Eux se disaient les vrais musulmans, missionnés par Allah pour nous ramener à Lui. Après avoir longtemps tergiversé et tenté de l’amadouer en cédant à toutes ses demandes comme le fait le gouvernement français, le pouvoir algérien est passé à l’offensive de la manière qu’on sait : arrestations massives, internements, enlèvements, exécutions extrajudiciaires... Les démocraties occidentales ne peuvent évidemment pas user de ces méthodes, elles doivent inventer les leurs. À mon avis, trois choses sont à repenser : l’école, la question de l’islam de [et en] France, les relations avec les pays émetteurs d’islam et d’islamisme.

Vous disiez dans une interview en 2018 « pour les bien-pensants, critiquer l’islamisme, c’est critiquer l’islam ». Redoutez-vous aujourd’hui une stigmatisation des musulmans ?

B.S. : Évidemment mais en vérité, les musulmans français ne se sentent nullement stigmatisés. Un grand nombre d’entre eux sont laïques, à peine pratiquants, voire athées. Ceux qui parlent de stigmatisation sont les islamistes, fréristes, radicaux, salafistes, pour culpabiliser ceux qui les dénoncent, et les bien-pensants de la gauche qui ont trouvé un intérêt à faire ami-ami avec eux.

Que pensez-vous du traitement politique de ces sujets en France ?

B.S. : Je ne vois aucun traitement politique de l’islamisme en France. C’est le « wait and see », la politique de l’autruche, la pleurniche pour apitoyer les tueurs. Le Front national, lui, s’en est emparé pour les instrumentaliser, passant de la dénonciation de l’émigration à celle des musulmans. Cela lui a permis de dépouiller la droite et la gauche de ses troupes.

Que pensez-vous du projet de loi sur le séparatisme ?

B.S. : Encore une fois, le gouvernement se trompe de sujet, il n’y a pas séparatisme en France, il y a une guerre pour détruire la France et installer à la place une république islamique. Les islamistes ont réussi, ils ont semé une telle confusion qu’on ne sait plus qui est son ennemi. Le gouvernement accuse les habitants de certaines banlieues de séparatisme alors qu’il devrait se porter à leur secours pour les libérer de la tutelle des gangs et des barbus. Il est grandement responsable des malheurs du pays, il a manqué de vigilance, de courage, de compétence, il a mal nommé les choses. Il y a aussi le fait que les pays européens, dirigés par des technocrates, sont de simples satellites de l’UE, elle-même pilotée par des technocrates. Ces gens n’ont pas le sens du long terme dans lequel l’islamisme s’inscrit si naturellement.

Plusieurs de vos livres tentent d’expliquer ce qui a mené à la montée de l’islamisme en Algérie. Est-ce comparable avec ce qui nous arrive en France ?

B.S. : L’islam politique s’adapte à chaque pays. L’Algérie est un pays musulman à 100 %, gouverné par une junte militaire brutale et corrompue, avec une jeunesse révoltée et une économie fragile. Au vu de cela, il a opté pour une prise du pouvoir par la rue et par la guerre. Pour la France, il a opté pour une stratégie de prise du pouvoir par l’entrisme, l’agit-prop, le contrôle et l’élargissement de la communauté musulmane, le terrorisme ponctuel. C’est une stratégie de long terme.

À quoi pensez-vous quand vous parlez d’entrisme ?

B.S. : L’entrisme des islamistes, c’est l’infiltration de ses spécialistes dans les institutions sensibles ; c’est s’attirer la sympathie de certaines populations et les enrôler : enfants, étudiants, sportifs, artistes, intellectuels, syndicats, commerçants, délinquants dans les quartiers et les prisons ; c’est le contrôle de certaines activités pourvoyeuses d’argent, les trafics, le commerce du halal ; c’est parallèlement promouvoir un islam dit modéré, un islam des Lumières, pour séduire, convertir, ce qui permet de rendre les amalgames, les blasphèmes particulièrement odieux aux yeux des honnêtes gens.

Vous habitez en Algérie. Où en sont les islamistes là-bas ?

B.S. : Quand ils ont compris qu’ils ne réussiraient pas à prendre le pouvoir par les armes, ils ont changé de stratégie, ils ont accepté l’offre du pouvoir : déposer les armes et réintégrer la société en échange d’une amnistie et d’une indemnisation généreuse. Aujourd’hui, ils occupent le terrain, font fructifier leur trésor de guerre et continuent le djihad en construisant des milliers de mosquées, toutes bien équipées pour attirer les gens.

Comment réagissent la jeunesse, les intellectuels ?

B.S. : Les islamistes ont gagné, personne ne les conteste. En revanche, ils dénoncent massivement le pouvoir dans le cadre du Hirak. Ceux qui ne supportent pas de voir leur pays partagé entre islamistes et militaires essaient d’émigrer ou se marginalisent et vivent en vase clos.

Source La Marseillaise

10:24 Publié dans Actualités, Connaissances, Entretiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : attentat, islam, france, algérie | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!