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29/10/2020

À Gaza : Ziad Medoukh, un géant de la non-violence

Ziad.jpgPortrait

Ziad Medoukh

Fondateur du Centre de la paix de Gaza

Directeur du département de français de l’université de Gaza, le Palestinien Ziad Medoukh apprend aussi à ses étudiants les armes de la non-violence.

  • Anne-Bénédicte Hoffner,

    « Mes poèmes ne soulagent point nos peines, mais ma poésie défend la vie./Elle est elle-même une résistance ! » Dès qu’il trouve un moment de calme, c’est en vers et en français que Ziad Medoukh s’échappe de Gaza, étroite bande de terre palestinienne, coincée entre la Méditerranée et les barbelés israéliens. « Je compose mes poèmes de Gaza ma prison :/Gaza est l’âme libre du poète/Gaza est le sourire brûlant des innocents/Gaza est l’étoile magique de l’espoir/Qui trouve dans la poésie l’échappatoire/Nécessaire à sa survie. »

    Géant débonnaire aux sourcils broussailleux et à la vigoureuse poignée de main, Ziad Medoukh est l’homme des contraires, des associations improbables. Le titre de son dernier livre en témoigne : Être non-violent à Gaza (1). Directeur du département de français de l’université Al-Aqsa de Gaza, récompensé par plusieurs prix littéraires et même les palmes académiques, il est un amoureux fou de la France et de la langue française qu’il a apprise en Algérie, en pleine décennie noire, auprès des Kabyles de Tizi Ouzou. Quelques années plus tard, un master en sciences du langage à Grenoble lui permit d’en parfaire la maîtrise, et, comme il l’avait déjà fait en Algérie, de parcourir l’Hexagone du nord au sud. « Je n’aime pas l’enfermement », résume-t-il.

    « La langue du témoignage et de la résistance »

    Depuis, le français est pour lui « la langue de la paix et de l’espoir, la langue du témoignage et de la résistance ». Son seul regret ? Ne pas avoir réussi à partager sa passion avec sa femme et ses cinq garçons, qui ont tous choisi d’apprendre l’anglais. « Ils ne me voient pas assez à la maison et ils pensent que c’est la France qui leur a pris leur père », confesse-t-il, mi-amusé mi-contrit.

    Lorsqu’il parvient à décrocher un permis pour voyager, « tous les trois ou quatre ans environ », c’est vers Paris qu’il s’envole, non plus pour visiter ses monuments ou goûter sa cuisine, mais pour participer à des colloques, retrouver ses nombreux amis, cinéastes, écrivains ou journalistes, et toujours défendre sa deuxième passion : « la résistance non-violente ».

    Lui qui vit au quotidien l’injustice et la violence a créé en 2004, au sein de son université, le Centre de la paix. Parce qu’il sait que, pour être efficaces, « les artisans de la non-violence doivent s’insérer profondément dans la vie socio-économique locale », il emmène ses étudiants aider les agriculteurs pendant la récolte des fruits et légumes, donner un coup de main aux pêcheurs, et il les invite à s’impliquer dans un programme de soutien psychologique aux enfants traumatisés. Le Hamas n’apprécie guère la mixité de mise dans toutes les activités mais Ziad Medoukh tient bon. Mieux, il partage ses initiatives sur une chaîne YouTube : « Gaza la vie ».

    « Je suis musulman, croyant et pratiquant, mais j’accepte l’autre »

    Dans une région où la religion est omniprésente, voire envahissante, il entretient avec elle un rapport de prudente distance. « Il y a trois questions que je ne pose jamais : l’origine, la religion et l’appartenance politique, raconte-t-il en riant, avant d’accepter de se livrer à ce sujet. Je suis musulman, croyant et pratiquant, mais j’accepte l’autre. C’est la force de mon islam, celui que mon père m’a appris. »

    Avec l’échec de la résistance armée palestinienne, Ziad Medoukh veut croire que le contexte est porteur. Il en veut pour preuve la Grande marche du retour, mouvement lancé le 30 mars 2018 dans le cadre de la commémoration de la Nakba, l’exode palestinien de 1948 lors de la première guerre israélo-arabe. Chaque vendredi dans la bande de Gaza, 10 à 15 000 habitants, parfois plus, se dirigent vers les « zones tampons » gardées par les soldats israéliens « non pas pour les affronter mais pour les défier, et exiger la levée du blocus », explique-t-il : ils s’y installent pour des pique-niques, agrémentés de concerts ou de danses.

    « Le gouvernement israélien redoute la non-violence palestinienne, car elle pourrait lui faire perdre la prétendue légitimité de ses représailles violentes », assure-t-il, tout en déplorant le manque de soutien de l’Autorité palestinienne comme des « factions » qui dominent Gaza. « Contrairement à ce que beaucoup de gens croient, l’action non-violente est un choix plus difficile que la violence », reconnaît-il.

    Quant à lui, il semble imperturbable, un roc dans la tempête de violence et de désespérance. Il assure ne jamais pleurer « sauf parfois devant un film ». « Ma force ? Elle vient de l’intérieur, de la conviction que je suis à ma place là-bas. Même pour 1 million d’euros, je ne viendrai pas m’installer en France. Je ne vais pas laisser les jeunes affronter cette situation seuls. »

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    « La pierre est tombée de ma main »

    La découverte de la non-violence a été instinctive pour Ziad Medoukh. Jeune homme, il a suivi ses camarades de classe partis « lancer des pierres sur les soldats israéliens qui se trouvaient dans ma ville et répondaient par des balles réelles ». « Mais soudain, la pierre est tombée de ma main et j’ai commencé à réfléchir à d’autres moyens de résister contre les occupants de notre terre », raconte-t-il dans son livre. Après s’être documenté et avoir découvert les principes élaborés par Gandhi contre l’occupation britannique, Ziad Medoukh s’est promis de consacrer sa vie « à résister par l’éducation, la culture, la non-violence et le travail auprès des jeunes ».

    (1) Éditions Culture et Paix, 192 p., 13 €.

 

17:53 Publié dans Actualités, Entretiens, Histoire, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ziad medoukh | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

01/08/2017

Une journée ordinaire sans eau et sans électricité à Gaza

Ziadnuit.jpg

Témoignage de Ziad Medoukh Professeur de français, à l'université Al-Aqsa Gaza Palestine

C'est difficile pour moi citoyen palestinien de Gaza de décrire en deux ou trois pages la situation actuelle dans notre région abandonnée. Une situation catastrophique à tous les niveaux qui s’est aggravée récemment, notamment, avec la crise de l’électricité et ses conséquences dans tous les secteurs vitaux dans cette région sous blocus israélien depuis plus de dix ans.

Mais je vais essayer le plus succinctement possible de narrer une partie de mon vécu pendant des jours et des jours où Gaza était dans le noire total.

Actuellement, nous avons le droit à trois ou quatre heures d’électricité par jour, c’est insuffisant, mais on n' a pas le choix, on s’adapte avec cette situation même insupportable .

Je ne vous cache pas que, je me demande toujours, ainsi que tous les Palestiniens de Gaza: nous sommes nous un peuple anormal pour supporter cette situation inacceptable et cette souffrance qui dure et qui dure , et je me pose souvent les même questions : pourquoi nous à Gaza ? Pourquoi le monde officiel ne bouge-t-il pas? Et jusqu’à quand durera notre souffrance ?

Nous avons vécu des journées terribles dans la moitié du mois de juillet 2017, avec seulement une ou deux heures d'électricité par jour, et quelques fois, deux ou trois jours sans électricité et sans eau.

La crise a commencé en avril dernier, avec la décision israélienne de réduire la quantité d'électricité qui entre la bande de Gaza. Nous sommes passés de huit heures à quatre heures par jour, puis deux heures dès le début du mois de juillet.

Cette crise nous rappelle les événements tragiques de l'été 2014 vécus par la population civile de Gaza, même sans bombardements et sans bombes.

Ce qui aggrave notre souffrance c'est ce silence complice du monde officiel , la chape de silence que les médias entretiennent, et l'indifférence totale des organisations des droits de l'homme qui n'arrivent pas à condamner cette ignominie.

C'est vrai, notre volonté remarquable et notre patience extraordinaire, mais surtout notre adaptation avec ce contexte très difficile est un aspect très positif qui nous aide à supporter cette souffrance. Mais notre situation est de plus en plus délicate dans la bande de Gaza, une région occultée et laissée à son sort par une communauté internationale officielle sourde à nos souffrances!

Pour moi, dans ce contexte particulier, et comme deux millions de Palestiniens, nous avons vécu des jours et des jours très longs sans eau et sans électricité. J’essaie de faire mon devoir, d’envoyer des nouvelles au monde francophone, je résiste par les témoignages et le partage de notre vécu, même si difficile de répondre à tous les messages qui proviennent de beaucoup d'amis et de solidaires, car je tiens beaucoup à la solidarité internationale et le soutien indéfectible de ces solidaires de bonne volonté.

Pendant ces jours terribles, nous étions tous à Gaza sous pression, personnellement, je passais davantage de temps à mon travail à l’université. Car elle dispose d’un générateur, et durant ce temps, j’étais obligé de faire toutes les tâches de mon travail ,car chez moi, la batterie rechargeable a besoin de huit heures minimum par jour pour fonctionner. Mais avec deux heures, elle tombe souvent en panne, et pour la réparer ou en acheter une autre, qu'il faut charger, on a besoin de huit heures par jour.

Parmi les conséquences graves de cette crise, c’est le secteur de l’eau qui a été le plus touché. Ici tous les puits d'eau ont besoin d'un courant électrique pour remplir nos réservoirs qui se trouvent sur le toit de nos maisons. Pour que l'eau arrive dans les robinets à partir des réservoirs, on a besoin d'électricité. Le problème étant que parfois, même pendant le retour du courant électrique, l’eau était coupée!

Il nous est arrivé de rester plus de trois jours sans eau, inimaginable! Dans ce cas, on était obligé d'acheter de l’eau potable pour l’utilisation quotidienne. Auparavant, on achetait l’eau potable pour boire, car l’eau du robinet dans tous les foyers de Gaza n’est pas potable

On est obligé à s'adapter avec cette nouvelle situation, et il y a eu un changement dans les habitudes: par exemple on achète la nourriture au jour le jour, et on ne met rien dans les réfrigérateurs , souvent vides, on a envie de boire de l'eau fraîche avec cette vague de chaleur......mais en vain!

On ne dort pas assez, il fait très chaud, les ventilateurs et les climatiseurs ont besoin d’électricité pour fonctionner, tout est paralysé à Gaza.
Vous n'imaginez pas la joie de toute la famille, quand revient le courant électrique à n’importe quel moment du jour ou de la nuit. A n'importe quel moment, le retour du courant est une fête, tout le monde se réveille, soit pour faire fonctionner les appareils électroménagers, pour charger les portables, soit suivre les nouvelles, utiliser internet et les réseau sociaux! Dans notre contexte d’isolement, nous voulons garder le contact avec le monde!

Quand le courant électrique revient, à n’importe quel moment de la journée, le matin, le soir, à l’aube, même à 2h ou 3h du matin, un état d’urgence est décrété chez moi: personne dans la maison n’a le droit de me parler ou de me demander quoi que ce soit. La priorité est d’envoyer les nouvelles de Gaza aux amis solidaires et aux associations de soutien à la cause palestinienne. J’ai dû laissé tomber beaucoup d’obligations familiales, car je suis convaincu de l’importance de cette solidarité internationale. Je veux informer sur notre quotidien ,je n’avais pas le temps de m’occuper de mes enfants et de ma famille, ils n'osent pas me parler quand l'électricité revient!

J'ai de la peine pour mes enfants, les pauvres, ils ne vivent pas une vie normale. Pas de loisir, pas de vacances, ni de plage. La plupart des journées, ils sont dans leurs maisons ou devant leurs immeubles pour jouer et passer le temps. Bien que leur vacances scolaires aient commencé depuis deux mois, nous n'avons passé aucun jour sur la plage à cause de la pollution de la mer à Gaza.
Un aspect remarquable, est la solidarité familiale et sociale, les voisins s'entraident énormément pour fournir de l'eau, ou recharger les lampes pour les autres.

Le problème dans ce contexte : vous ne pouvez rien faire devant cette injustice, notre impuissance devant de telles souffrances, nous n’avons pas d’autre choix que de supporter et de résister en attendant un changement.

Le sentiment de l'enfermement et de l’isolement est un sentiment terrible! Et les Palestiniens de Gaza sont les mieux placés pour sentir ce sentiment , eux les enfermés dans leur prison à ciel ouvert depuis plusieurs années.

Le seul responsable de notre souffrance est l’occupation israélienne qui vise à briser la volonté remarquable et la patience extraordinaire de cette population civile de Gaza! Une population résistante et attachée à sa terre malgré toutes les mesures atroces de l’occupation contre la bande de Gaza.

On ne peut pas accuser les dirigeants palestiniens de Gaza ou de Ramallah d’avoir un rôle de responsabilité dans cette crise d’électricité, même si la division est une honte, car les deux sont impuissants et leur pouvoir sous occupation est illusoire.

Notre contexte est comme un verre où l’eau se mélange au sel comme pour donner un sens encore à l’espérance, qui nous rend forts comme le roc sur cette terre aux mille et une meurtrissures.

Les Palestiniens de Gaza sont privés de liberté sauf de leur liberté de penser. Leur seul droit est de respirer l'air souvent pollué par l'odeur des bombes de l'occupant.

En dépit de notre vécu tragique pendant cette période où Gaza a supporté l’insupportable, ce qui nous soulage est cette mobilisation et cette solidarité civile et populaire partout dans le monde avec la population de Gaza contre le blocus israélien. Nous sommes quasiment la seule région dans le monde en souffrance permanente; pour laquelle les solidaires organisent des manifestations et des rassemblements de soutien, ça calme notre colère

On peut dire qu’aucun objectif israélien de cette punition collective n' a été réalisé, notre population digne est toujours débout.

Après tout, malgré toute cette souffrance, mon message est toujours simple : c’est un message d’espoir au cœur de la douleur.

Je suis plus que jamais déterminé à continuer ma résistance quotidienne dans la bande de Gaza, comme ma population civile, à travers l’éducation et le travail avec mes jeunes pour une ouverture sur le monde. Avec le soutien des solidaires de notre cause juste, pour une Palestine de liberté et de paix durable, une paix qui passera avant tout par la justice.

13/05/2015

Ziad Medoukh : « À Gaza, on résiste pour exister et on existe pour résister »

ziad.jpgNeuf mois après la guerre de l'été 2014, dans quelle situation se trouve le peuple de Gaza aujourd'hui ? Entretien avec Ziad Medoukh, directeur du département de français de l’universite al-Aqsa dans la bande de Gaza, par Anouk Guine, maitre de conférences à la faculté des affaires internationales de l’université du Havre.

Parmi les attaques armées d’Israël contre la bande de Gaza, comment a été vécue celle de l'été 2014 ? Quel a été le bilan humain et matériel ?

Ziad Medoukh : Le bilan de 50 jours (juillet-août 2014) d’offensive militaire israélienne sur la bande de Gaza a été le suivant: 2160 morts palestiniens, dont 570 enfants, 270 femmes et 110 personnes âgées suite à des bombardements et des attaques sanglantes; 11250 blessés, dont 2000 femmes, 450 personnes âgées et 3250 enfants; plus de 7900 raids israéliens partout dans la bande de Gaza; des quartiers totalement détruits et effacés de la carte, dont 6000 maisons détruites, 9000 d’entre elles endommagées; plus de 30000 personnes sans-abri; 73 mosquées détruites et 197 endommagées; deux églises bombardées; 5 pêcheurs, 18 journalistes, 20 ambulanciers et secouristes, et 12 agents municipaux tués; cinq universités, 150 écoles publiques et 10 écoles privées bombardées; 5 écoles de l’ONU visées; 32 écoles publiques et 27 crèches et jardins d’enfants détruits; 5 hôpitaux et 29 centres médicaux bombardés; 25 ambulances et 120 usines détruites; 3 banques visées; 2 hôtels bombardés; 60 bateaux de pêche détruits; 20 organisations et associations détruites; 30 postes de polices touchés; 50 bâtiments publics et 12 chaînes de radio et de télévision bombardées; la centrale électrique détruite; 40 puits d’eau, 13 cimetières et 9 stades bombardés; 25 clubs sportifs, 15 lieux et monuments historiques, routes et terrains agricoles, infrastructures civiles importantes détruits; destruction massive partout dans la bande de Gaza; les pertes économiques dépassent 5 milliards d’euros.

Le bilan est très lourd, notre population a vécu un nouveau drame, elle a essayé de supporter cette tragédie, mais rien n’était évident devant l'ampleur de cette attaque meurtrière qui a touché tout dans la bande de Gaza, une région sous blocus et en souffrance permanente.

Dans quelle situation économique et sociale se trouve la population de Gaza après cette attaque ?

Ziad Medoukh : La situation humanitaire est catastrophique, il y a une absence de perspectives même si l’on peut se féliciter de la solidarité familiale et sociale existante. Je vous renvois à mon article.

Après cette attaque, la population se trouve dans une situation terrible sur tous les niveaux. Les Palestiniens de Gaza paient les conséquences de cette agression.

Quelles ont été les conséquences politiques sur le plan international ?

Ziad Medoukh : La mobilisation populaire de solidarité avec la Palestine lors des évènements de Gaza, n'a pas été suivie par les instances internationales. Les choses bougent, mais lentement. La reconnaissance de la Palestine par quelques parlements européens est importante, mais les Palestiniens ont besoin de concret sur le terrain : un changement, la fin de l'occupation et la création de leur Etat libre et indépendant. Les Palestiniens comptent beaucoup sur l'Europe et sur la communauté internationale qui ne bouge pas assez pour arrêter leur souffrance et proposer une fin de la colonisation.

Que font aujourd'hui les Nations Unies et les ONG pour Gaza ?

Ziad Medoukh : Au niveau économique, elles sont très actives, mais au niveau politique, elles sont impuissantes. Il y a beaucoup de convois humanitaires qui entrent à Gaza via ces ONG et organisations internationales, mais les matériaux de construction sont souvent bloqués, et ces organisations n'arrivent pas à faire pression sur les Israéliens pour ouvrir les passages ou faire entrer les produits interdits. Malgré leurs besoins énormes au niveau humanitaire et économique, les Palestiniens cherchent une solution politique.

Quelles sont les activités de soutien psychologique menées au Centre de la Paix que vous avez créé à l'université Al-Aqsa de Gaza?

Ziad Medoukh : Après la fin de l'agression israélienne en août 2014, le centre de la paix a commencé un programme de soutien psychologique, au début pour les jeunes, puis il a formé une équipe de 7 étudiants qui organisent eux-mêmes des séances de soutien psychologique pour les enfants traumatisés partout dans la bande de Gaza, afin de redonner le sourire à ces enfants qui ont beaucoup souffert pendant les bombardements. En 5 mois, le centre a organisé 20 séances dans plusieurs structures, écoles et jardins d'enfants dans toutes les villes de la bande de Gaza, des actions soutenues par des associations et des personnes de bonne volonté dans le monde francophone, et appréciées par les enfants et leurs familles. Sur ce lien, vous trouvez toutes les activités du Centre de la paix: http://www.palestine-solidarite.org/centredepaix.sommaire.htm

Vous avez été invité à plusieurs reprises en France, notamment à l'université du Havre. Vous n’avez pas de problème pour vous déplacer ?

Ziad Medoukh : Pour la deuxième fois en trois mois je n’ai pas été autorisé à quitter la bande de Gaza via le passage d'Erez pour me rendre en France via la Jordanie. Je ne vous cache pas que je reçois presque tous les mois des invitations pour me rendre à l'étranger, notamment dans les pays francophones afin de participer à des colloques, conférences universitaires et des rencontres scientifiques et littéraires. Mais le blocus et la fermeture des frontières m'empêchent de sortir de Gaza, et cela malgré les efforts du Consulat de France. Mais tout dépend de la « bonne volonté » des autorités israéliennes. En France, j'ai toujours un programme très chargé: rencontres, conférences, entretiens avec les médias, réception par des élus, mais surtout des rencontre avec les gens, les solidaires et le mouvement de solidarité avec la Palestine. Le plus important c'est l'échange avec les gens, et passer le message sur la situation actuelle dans la bande de Gaza.

Comment expliquez-vous la capacité de résilience et de résistance des Gazaouis ?

Ziad Medoukh : Les Palestiniens de Gaza ont tout perdu: maisons, proches, travail, mais il reste l’espoir. C'est avec l'espoir qu'ils vivent et qu'ils résistent et existent. Ils vivent avec une volonté remarquable et une patience extraordinaire, ils ont une capacité de s'adapter à leur situation et contexte: ils vivent, ils attendent et ils espèrent! L'espoir est une maladie en Palestine et dans la bande de Gaza. On résiste pour exister et on existe pour résister.

Comment est-ce que le peuple de Gaza a réagi à l'attentat contre Charlie Hebdo le 7 janvier ? Comment est-ce que la couverture de ce journal publiée après l'attentat a retenti à Gaza ?

Ziad Medoukh : A Gaza, presque toute la classe politique et sociale a dénoncé l'attentat meurtrier contre Charlie Hebdo, y compris le Hamas. Il y a eu plusieurs rassemblements de solidarité avec la France devant l'Institut Français de Gaza, organisés par des ONG, des universités et des personnalités. La France est considérée comme un pays ami de la Palestine, et les Français sont de plus en plus solidaires de notre cause. Après, il y a eu des manifestations contre les caricatures, et pas contre la France, organisées à Gaza par quelques petits groupes. Le problème est que les médias étrangers se sont beaucoup intéressés à ces manifestations, mais pour les rassemblements de solidarité, il n'y a pas eu une vraie couverture médiatique.

Que pensez-vous de la dernière victoire électorale de Benjamin Netanyahou ?

Ziad Medoukh : La réélection de Netanyahou est un renouvellement du racisme et de l’apartheid dans une société israélienne qui bascule de plus en plus vers la droite et l'extrême droite. Les Israéliens ont choisi le camp de la guerre et de la violence, cette élection montre que le chemin pour la paix est encore long, et que le monde entier doit bouger et assumer ses responsabilités en imposant une solution pacifique.

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02/07/2014

Ode à la mère Palestinienne

palestineenfants.jpgZiad Medoukh

Ô mère de Palestine,
Chant de notre espoir,
Origine de notre savoir,
Remède à nos blessures,
Richesse de notre terre,
Ange de notre histoire,
Sens de notre identité,
Valeur de notre justice
Symbole de notre paix
Ô toi, lumière de notre Palestine.

Tu conquiers la terre par ton sourire.
Tu défies l’occupant par ta patience.
Tu effaces nos larmes par ta ténacité
Et par la bonté de tes caresses sincères.
Tu nous protèges par ton éducation.
Tu transmets l’espoir
À tes enfants vivants dans cette immense cage
Ton cœur est si grand qu'il éclaire la lune
Tu brises le silence par tes sacrifices
Tu partages nos peines par ton amour
Tu résistes sans relâche contre l’oppresseur.

N. B: L'auteur est directeur du département de français de l’université Al-Aqsa de Gaza en Palestine, il a remporté le premier prix d'Europoésie 2014, le concours européen de la poésie, ainsi que le premier prix de la Francophonie (biographie d'après le site de saphirnews). Mon ami Aziz Fares m'apprend qu'il avait édité son livre Gaza une Paix attendue (Editions du terroir, Montréal), et que le gouvernement Canadien lui refuse le visa malgré les invitations de multiples universités.

Commentaire Inès Safi

Tableau par le peintre Palestinien Ismail Shammout