07/08/2007
ENTRETIEN AVEC AVRAHAM BURG
A l’occasion de la parution du livre du député travailliste Avraham Burg
Avraham Burg est le fils de Yossef Burg, qui fut l’un des leaders du PNR (Parti National-Religieux). Lui-même a continué la tradition familiale d’engagement dans la vie politique, mais il s’est dirigé vers le parti travailliste. La Kippa sur sa tête ne le gênait pas.
Mais Avraham (Avrom ainsi qu’on l’appelle) n’est pas bien dans sa peau. Il le dit et le publie dans un livre. Pour lui, le rêve sioniste s’est effondré. Il a renouvelé son passeport étranger, et prend une position défaitiste assez révoltante, digne d’un enfant de la bourgeoisie locale attiré par le monde Goy et ses attraits. Il prône une position d’extrême gauche, toute d’ouverture vers les Arabes, et est très actif en leur faveur.
Erets Israël, sa spiritualité et sa Tora ? Cela n’a jamais été son centre d’intérêt. Il restait le côté matériel de cette expérience : il est très conscient que dans ce domaine, d’autres nations réussissent beaucoup mieux… Les résultats sont très piteux, Avrom.
Quelques extraits d’une interview publiée dans Haarets sous le titre fort évocateur de « Quitter le ghetto sioniste » par Ari Shavit - texte repris du site www.upjf.org.
- Avrom Burg, j’ai lu votre nouveau livre, «Vaincre Hitler», comme une séparation d’avec le sionisme. Ai-je tort ? Êtes-vous encore sioniste ?
« Je suis un être humain, je suis un Juif et je suis un Israélien. Le sionisme a été l’instrument qui m’a fait passer de la condition juive à la condition israélienne. Je crois que c’est Ben-Gourion qui a dit : le mouvement sioniste est l’échafaudage utilisé pour la construction d’une maison, après la création de l’Etat sioniste, il devra être démonté. »
- Cela veut-il dire que vous ne considérez plus la notion d’Etat juif comme acceptable ?
« Elle ne peut plus marcher. Définir l’Etat d’Israël comme un Etat juif, c’est la clé de sa fin. Un Etat juif : c’est de l’explosif. C’est de la dynamite. »
- Devons-nous amender la Loi du Retour ?
« Nous devons entamer la discussion. La Loi du Retour est une loi apologétique. Elle est l’image inversée d’Hitler. Je ne veux pas qu’Hitler définisse mon identité. »
- L’Agence Juive doit-elle être dissoute ?
« Dans le passé, quand j’étais président de l’Agence Juive, j’ai suggéré de changer son nom d’Agence Juive pour la Terre d’Israël, en celui d’Agence Juive pour la Société israélienne. Il y a place pour des moyens philanthropiques. Mais au centre de son expérience, elle doit s’occuper de tous les citoyens d’Israël, y compris des Arabes. »
- Vous écrivez dans votre livre que, si le sionisme est un sionisme catastrophique, alors vous ne serez plus seulement post-sioniste, mais antisioniste. Et j’observe que, depuis les années 1940, l’élément catastrophique a été inséparable du sionisme. Il s’ensuit que vous êtes antisioniste.
« Quand j’étais enfant, j’étais un Juif, ou, dans le langage qui prévalait alors : un garçon juif. Je fréquentais un 'Héder [école juive]. J’étais éduqué par d’anciens étudiants de Yéchiva. Par la suite, durant la majeure partie de ma vie, j’ai été un Israélien. Le langage, les signes, les goûts, les lieux. Tout. Aujourd’hui, cela ne me suffit pas. Dans ma situation présente, je suis au-delà de l’Israélien. Des trois identités qui me composent – humaine, juive, et israélienne -, je perçois que l’élément israélien dépossède les deux autres. »
- Face à cela, votre attitude est conciliatrice et humaniste. Mais, outre cette approche, vous développez une attitude très dure à l’égard de l’israélité et des Israéliens. Vous dites des choses terribles à notre propos.
« Je pense que j’ai écrit un livre d’amour. L’amour fait mal. Si j’écrivais sur le Nicaragua, cela me serait égal. Mais je viens d’un lieu de terrible souffrance. Je vois mon amour se flétrir sous mes yeux. Je vois ma société, l’endroit où j’ai été élevé et mon foyer, en cours de destruction. »
- Amour ? Vous écrivez que les Israéliens ne comprennent que la force. Si quelqu’un s’aventurait à écrire que les Arabes ne comprennent que la force, ou que les Turcs ne comprennent que la force, il serait immédiatement condamné comme raciste. Vous dites qu’Israël est un ghetto sioniste, un lieu d’impérialisme et de brutalité, un pays qui ne croit qu’en lui-même.
« L’occupation est une toute petite partie du problème. Israël est une société apeurée. Pour chercher la source de l’obsession de la force et l’éradiquer, il faut s’occuper des peurs. Et la méta-peur, la peur primordiale, ce sont les six millions de Juifs qui ont péri dans l’Holocauste. »
- C’est la thèse du livre. Vous n’êtes pas le premier à la proposer, mais vous la formulez de manière très intense. Nous sommes des estropiés psychiques, prétendez-vous. Nous sommes saisis par la terreur et la peur, et nous recourons à la force parce qu’Hitler nous a causé un profond dommage psychique.« Oui. »
- Eh bien, je vous rétorque que votre description est faussée. Ce n’est pas comme si nous vivions en Islande, tout en imaginant que nous sommes environnés de nazis qui, en réalité, ont disparu il y a soixante ans. Nous sommes environnés de véritables menaces. Nous sommes un des pays les plus menacés au monde.
« Le véritable désaccord israélien, aujourd’hui, est entre ceux qui croient et ceux qui ont peur. La grande victoire de la droite israélienne dans le combat pour gagner l’âme politique israélienne réside dans la manière dont elle l’a presque totalement imprégnée d’une paranoïa sans limites. Je reconnais qu’il y a des difficultés. Mais sont-elles absolues ? Tout ennemi est-il Auschwitz ? Le 'Hamas est-il un fléau ? »
- Pendant que nous parlons, Ahmadinejad affirme que nos jours sont comptés. Il promet de nous éradiquer. Certes, il n’est pas Hitler, mais il n’est pas un mirage non plus. Il constitue une vraie menace. Il est le monde réel, un monde que vous voulez ignorer. Dans votre livre vous faites les questions et les réponses. Par exemple, vous écrivez : « Je sens très fort qu’il y a pas mal de chances qu’une future Knesset d’Israël… interdise les relations sexuelles avec des Arabes, recourre à des mesures administratives pour empêcher les Arabes d’employer des Juifs, des femmes et des ouvriers juifs, à des tâches de nettoyage… comme les Lois de Nuremberg… Tout cela se produira, et cela se produit déjà. » N’êtes-vous pas allé trop loin, Avrom ?
« Je pense que nous sommes une société qui, dans sa tête, vit par l’épée… Ce n’est pas fortuitement que je fais la comparaison avec l’Allemagne, parce que notre sentiment d’être obligés de vivre à la pointe de l’épée provient de l’Allemagne. Ce dont ils nous ont privés durant les 12 années de nazisme nécessite une très grande épée. Voyez la barrière. La barrière de séparation est une barrière contre la paranoïa. Et elle est née dans mon milieu. Dans mon école de pensée, avec mon ‘Hayim Ramon. Quelle est l’idée sous-jacente à cela ? Que je construirai un grand mur et que le problème sera résolu, parce que je ne les vois plus [les Palestiniens]. Vous savez, le parti travailliste a toujours vu le contexte historique et constitué une culture de dialogue, mais ici, nous avons une terrible étroitesse d’esprit. La barrière délimite physiquement la fin de l’Europe. Elle dit que c’est ici que finit l’Europe. Elle dit que vous êtes le bastion avancé de l’Europe et que la barrière vous sépare des barbares. Comme le mur romain. Comme la Muraille de Chine. Mais c’est extrêmement pathétique. Et c’est un acte de divorce d’avec la vision de l’intégration. Il y a quelque chose de très xénophobe dans ce processus. D’extrêmement fou. Et cela se produit précisément à une époque où l’Europe elle-même, et le monde avec elle, a progressé de manière extrêmement impressionnante en intégrant les leçons de l’Holocauste, et a provoqué une avancée majeure dans le comportement normatif des nations. »
La vérité, c’est que vous êtes un européiste notoire. Vous vivez à Nataf, mais vous êtes entièrement de Bruxelles [en tant que siège du Parlement européen]. Le prophète de Bruxelles.
« Tout à fait. Tout à fait. Je considère l’Union européenne comme une utopie biblique. Je ne sais pas combien de temps cela tiendra, mais c’est stupéfiant. C’est entièrement juif. »
- Et cette admiration que vous exprimez envers l’Europe n’est pas accidentelle, parce que l’un des points fascinants de votre livre, c’est que le Sabra Avrom Burg tourne le dos à son identité de Sabra et se rallie très profondément à une sorte de romantisme yekke [allusion aux Juifs d’origine allemande, ainsi surnommés]. L’Israël sioniste donne, dans votre livre, l’impression d’être un vulgaire baron, tandis que la Communauté Juive allemande est l’idéal et le comble de la perfection.
18:50 Publié dans Entretiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Iraël, Nazisme, Allemagne, sionimse, Avraham Burg | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |
06/08/2007
Les jeunes Allemands notent leurs profs sur le Net
Et en effet, plus de 200000 jeunes usagers se sont d’ores et déjà enregistrés auprès du site iconoclaste, qui n’a que six mois d’existence. Ils y ont noté et classé sur des grilles de cotation quelques 150000 enseignants. Tant et si bien que des profs mécontents sont allés demander à un juge de Cologne de limiter la marge de manœuvre des quatre audacieux fondateurs. "Les opinions de nos élèves rendues publiques sans notre consentement via internet portent atteinte à notre sphère privée", ont-ils, vainement, plaidé car, au nom de la liberté d’expression, le tribunal ne les a pas suivis.
Cette décision favorable de la justice permet au site de continuer à proposer aux scolaires qui le veulent de noter et classer leurs enseignants –dont ils ne donnent que le nom, la matière enseignée et l’établissement- selon neuf critères à pondérer de 1 (très bon) à 6 (très mauvais): branché/drôle, aimé, motivé, humain, relax, intéressant, facile pour l’examen, équitable dans la notation et... sexy. Une note totale permet ensuite de classer chacun des élus dans un palmarès.
Pour Heinz-Peter Meidinger, le président de l’association allemande des enseignants, ces critères d’évaluation formulés de cette manière ne signifient pas grand-chose. "Qu’un examen soit rendu facile ou non par un examinateur n’est pas un critère puisque c’est le curriculum de l’élève qui doit être apprécié", insiste-t-il pour souligner qu’il n’accorde que peu d’importance à ce système d’évaluation promu par les initiateurs du site.
Mais pour Wolfgang Hagemann, un psychothérapeute spécialiste du stress chez les enseignants et qui exerce dans un collège près d’Aix-la-Chapelle, le site présente un danger pour les enseignants car "il y a un manque de dialogue" et ceux-ci n’ont plus aucune protection face aux critiques que leurs élèves postent sur internet.
Ce problème a obligé Barbara Sommer, la ministre de l’Education du Land de Rhénanie-Nord-Westphalie, où le site est le mieux implanté, à déclarer publiquement que les résultats de ce site d’évaluation n’ont aucun impact sur l’évolution des carrières des enseignants. Elle a aussi prévenu que tout mobbing (discrédit) d’un enseignant serait poursuivi en justice.
Du côté des quatre étudiants créateurs de spickmich (idiomatisme intraduisible qui renvoie à la tricherie), c’est l’euphorie à la vue du succès croissant rencontré par leur site. Auto-financé, sans revenus publicitaires et d’accès gratuit, ils défendent leur création en soulignant que "c’est la première fois qu’une possibilité est offerte aux élèves de montrer aux enseignants ce qu’ils pensent de leurs prestations en cours".
Mais ce vertueux optimisme n’est pas à l’abri des manipulations puisque, récemment, un enseignant de Hannovre, cultivant l’art du faux nez, s’est fait passer pour un collégien et a forcé les notes qu’il a attribuées à ses collègues enseignants. Au bout de quelques jours, sept d’entre eux se sont retrouvés parmi les dix premiers du palmarès des "meilleurs profs d’Allemagne".
15:25 Publié dans Actualités | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : professeurs, Allemagne, notes | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |