09/11/2024
Vendée Globe : quarante skippeurs à l’assaut de l’Everest des mers
La 10e édition du tour du monde en solitaire, sans escale ni assistance s’élance ce dimanche des Sables-d’Olonne. Retour sur les enjeux de l’épreuve la plus difficile de la course au large.
Quatre ans après un départ sans public, crise sanitaire oblige, les Sables-d’Olonne s’apprêtent à vivre un week-end animé à l’occasion du départ de la 10e édition du Vendée Globe. Ce dimanche 10 novembre, à 13 h 2, ils ne seront pas moins de quarante skippeurs, un record, à s’élancer pour un tour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance, après avoir franchi le long chenal, véritable stade nautique, devant plusieurs dizaines de milliers de spectateurs.
Pour se qualifier, les skippeurs ont disputé plusieurs transatlantiques ces trois dernières années. Tout le plateau est surentraîné et les bateaux n’ont jamais été aussi fiables. Surnommé « l’Everest des mers », le Vendée Globe représente un périple d’environ 24 300 milles en route théorique, soit 45 000 kilomètres. Réputée comme l’épreuve la plus difficile de la course au large, cette course emprunte la fameuse route des trois caps (Bonne-Espérance, Leeuwin et le célèbre Horn).
Des vitesses qui flirtent avec les 80 km/h
À bord de leur Imoca, des monocoques de 60 pieds (18,28 m), les skippeurs vont affronter les conditions les plus difficiles de la planète, avec notamment les quarantièmes rugissants et cinquantièmes hurlants des mers du Sud. « Il n’y a pas beaucoup d’humains qui vont naviguer là-bas, souligne Yannick Bestaven (Maître Coq), vainqueur il y a quatre ans et prétendant au doublé. Ce sont des endroits assez magiques : les luminosités, la faune, les albatros qui suivent le bateau… Se trouver dans ces zones où l’on est loin de toute assistance et population ajoute à l’adrénaline. »
La moitié de la flotte est équipée de foils, plans porteurs latéraux qui permettent aux voiliers de filer au-dessus de l’eau à des vitesses flirtant jusqu’à 40 nœuds (près de 80 km/h). Cette technologie coûteuse, mais également fragile, rend les bateaux plus difficiles à manier, et différencie les écuries favorites des plus petits budgets. Parmi les 13 bateaux neufs, Éric Bellion (Stand as One, lire son carnet de bord, ci-dessous) et Jean Le Cam (Tout commence en Finistère – Armor-Lux) sont les seuls à avoir pris le chemin inverse en privilégiant la performance sur des monocoques traditionnels à dérives droites.
Sam Davies, prétendante à la victoire
Après s’être partagé toutes les victoires sur les courses de préparation, Charlie Dalin (Macif), Thomas Ruyant (Vulnerable) et Yoann Richomme (Paprec Arkéa) semblent les mieux armés pour soulever le trophée. Bien classée à chaque fois, l’Anglaise Samantha Davies (Initiatives Cœur) peut aussi prétendre au podium, voire devenir la première femme à remporter cette course et la première étrangère. Son compatriote Sam Goodchild (Vulnerable) et l’Allemand Boris Herrmann seront aussi de sérieux concurrents sur lesquels il faudra compter.
La benjamine de la flotte s’appelle Violette Dorange (Devenir). Âgée de 23 ans, celle qui est l’une des six femmes engagées, un chiffre identique à l’édition précédente, souhaite avant tout « terminer ». À l’opposé, Jean Le Cam s’élancera, à 65 ans, pour son sixième Vendée Globe après avoir fini quatrième en 2021. Enfin, si les conditions le permettent, le record de l’épreuve, détenu par Armel Le Cléac’h (74 j 3 h et 35 minutes) depuis 2017, pourrait tomber à 70 jours, voire moins.
19:56 Publié dans Actualités, ACTUSe-Vidéos, Sport | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : vendée globe 2024 | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |
05/11/2024
Kamel Daoud remporte le prix Goncourt
Ce n’est pas une surprise. Kamel Daoud remporte le prix Goncourt pour son troisième roman, Houris, paru chez Gallimard. Le livre a été élu dès le premier tour de scrutin, avec six voix contre deux à Hélène Gaudy pour Archipels (l’Olivier), une à Sandrine Collette pour Madelaine avant l’aube (JC Lattès) et une au Franco-Rwandais Gaël Faye pour Jacaranda (Grasset), lequel reçoit le prix Renaudot.
Dans Houris (c’est ainsi que sont nommées les vierges censées accueillir le croyant au paradis), l’écrivain franco-algérien passe au crible la « décennie noire » de la guerre civile (1992-2002) dans son pays natal, par la voix étouffée d’une jeune Oranaise, prénommée Fajr (l’aube), mutilée parce qu’alors mal égorgée. Sa blessure court d’une oreille à l’autre sur 17 cm, la privant de cordes vocales. Aube la mutique est « porteuse de l’histoire d’une guerre entière inscrite sur sa peau ». Elle est ainsi le vivant stigmate de la violence collective qui a ravagé l’Algérie, quand des groupes islamistes affrontèrent l’armée en semant la terreur, faisant environ 200 000 morts. Victime sans voix, l’héroïne, en cette veille de l’Aïd, est enceinte d’une enfant dont elle veut avorter. L’Algérie de l’année 2018 peinte par Daoud est l’ennemie des femmes, sans exception. C’est une Algérie attaquée par les adeptes d’un islam rétrograde. Dans sa langue muette, Aube raconte, à l’enfant qui ne verra pas le jour, son histoire tragique et celle de son pays.
Une jeune héroïne privée de cordes vocales
Alors que, désormais, l’un des articles de la charte pour la paix et la réconciliation mentionne qu’il est interdit de parler de cette guerre, volontairement passée sous silence sous peine d’emprisonnement – à l’opposé de l’autre, la guerre d‘indépendance, si présente dans les têtes, dans les manuels et gravée sur les monuments –, Kamel Daoud
porte le fer dans la plaie mémorielle. Outre Aube, on découvre Aïssa Guerdi, un autre personnage de Houris. Lui, c’est à voix haute qu’il s’exprime, pour mettre des mots forts sur cet oubli volontaire, cette amnésie quasi obligatoire. Ce fils de libraire est chauffeur. Hypermnésique, lui aussi rescapé d’une des tueries de l’époque fatale, il est capable de se rappeler, des tueries, le jour, l’heure, le lieu, le nombre de victimes et leur prénom, même si, depuis 2005, plus personne ne prête attention à ce passé maudit.
Ce voyage au bout de l’horreur a valu à Kamel Daoud, ainsi qu’à son éditeur, une interdiction de participation au dernier salon d’Alger. L’écrivain, qui vit à Paris depuis 2020 après avoir obtenu sa naturalisation, a déclaré, sitôt l’annonce de son prix : « Ce livre est né parce que je suis en France. C’est un pays qui me donne la liberté d’écrire. Ce n’est pas facile de parler de guerre, il faut du temps, du deuil, de la distance. »
Kamel Daoud avait déjà reçu, en 2014, le Goncourt du premier roman pour Meursault, contre-enquête, paru chez Actes Sud. Dans ce livre, il prenait le contrepied du roman célèbre de Camus, l’Étranger, en tirant du néant l’Arabe sans nom dont le corps n’a jamais été retrouvé dans le texte initial.
19:20 Publié dans Actualités, Connaissances | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : prix goncourt, kamel daoud | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |