Aprement négocié, le code du travail, qui célèbre en toute discrétion son centenaire, reflète les combats acharnés entre le patronat et les syndicats et toucher à cette bible sociale s'avère souvent explosif.
Le 28 décembre 1910 était promulguée une loi engageant une codification des premières lois ouvrières, apparues en 1841 avant même la reconnaissance légale du fait syndical en 1884. Comme la loi du 7 décembre 1909 "garantissant le versement du salaire à intervalles réguliers" (tous les 15 jours pour les ouvriers, tous les mois pour les employés), et celle du 5 avril 1910 "sur les retraites ouvrières et paysannes à partir de 65 ans".
Il fallut toutefois attendre 1922 pour que soit achevée la rédaction du premier code du travail.
Dans sa dernière édition (2010), la 72e, publiée par la célèbre maison Dalloz, le recueil des lois, décrets et règlements régissant les relations de travail dans les entreprises privées compte 3.001 pages, appendice compris.
Il compte environ 10.000 articles, divisés en huit parties, allant des "relations individuelles de travail" à "la formation professionnelle tout au long de la vie", en passant par l'emploi ou la santé et sécurité au travail.
Pour l'inspecteur du travail Gérard Filoche, retraité depuis quelques jours, le code du travail "est fait de sueur, de larmes et de sang: chaque article, chaque alinéa, chaque décret, chaque arrêté résultat de combats et d'âpres négociations (...), il a souvent été rédigé à la virgule près".
Les grandes dates des conquêtes sociales y sont consignées, telle l'instauration des congés payés en 1936. Mais aussi les "retours de manivelle" lorsque le patronat joue du rapport de force en sa faveur, comme avec la libéralisation du travail du dimanche en 2009.
Spécialiste de l'histoire sociale, l'universitaire Stéphane Sirot distingue deux grandes périodes: du 19e siècle jusqu'au début des années 70, le code du travail retrace "plutôt un mouvement de renforcement des protections" des salariés, tandis que, "depuis une trentaine d'années" le droit du travail "n'est plus forcément synonyme de progrès".
Le patronat français l'a souvent présenté comme une lourde contrainte. "La liberté de penser s'arrête là où commence le code du travail", déclarait en 2006 la présidente du Medef, Laurence Parisot.
Le journal l'Humanité estime au contraire que le code du travail est "un procéssus législatif pour protéger les plus faibles des abus, pour protéger les enfants, les femmes, pour que tout travail mérite un juste salaire" et qu'il reste à défendre contre les attaques incessantes de la droite et du patronnat.