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05/06/2015

Charles Aznavour : « Je ne vieillis pas, je prends de l’âge ! »

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À presque quatre-vingt-onze ans, Charles Aznavour affiche une forme de jeune homme et revient avec Encores. Un album empreint de nostalgie dans lequel il chante avec émotion sa vie, ses amours et ses souvenirs, avant son retour sur scène au Palais des sports de Paris en septembre.

Charles Aznavour en veut Encores. S’il a souhaité ajouter un « s » au titre de son nouvel album, c’est parce que « ça veut dire bis ! » lance-t-il avec un sourire de jeune homme. Aznavour, qui fêtera ses quatre-vingt-onze ans le 22 mai, affiche une forme incroyable et revient avec un disque, le 51e, dans lequel il évoque les moments marquants de sa vie, son enfance (les Petits Pains au chocolat), sa jeunesse à Montmartre (la Maison rose), ses amours (T’aimer), Piaf (De la môme à Édith) ou la Résistance (Chez Fanny). Un album réalisé avec la complicité de Marc di Domenico (réalisateur de Chambre avec vue d’Henri Salvador) dont il signe les textes et, pour la première fois, les arrangements. Un beau voyage dans ses souvenirs où il laisse parler son cœur avec la voix fragile et émouvante d’un homme de son âge. Un registre empreint d’un Brin de nostalgie (son single), qu’il interprétera sur scène dès septembre. Une leçon de vie doublée d’un parcours exceptionnel de chanteur, 
fils d’immigrés arméniens, qui, après plus de soixante-dix ans de chanson, continue de garder la flamme. Chapeau et respect M. Aznavour !

Cet album, c’est un voyage dans votre passé ?

Charles Aznavour Un voyage dans les sentiments de mon passé, ce qui n’est pas pareil. Je ne parle pas de moi, mais des gens que j’ai connus comme Piaf. J’ai écrit très peu de chansons autobiographiques, même si elles le deviennent au bout d’un certain temps.

Vous chantez « Je n’attends plus rien de la vie ». Pourtant, vous paraissez tellement optimiste !

Charles Aznavour On vient du malheur et on va vers le bonheur. C’est comme ça qu’il faut voir les choses. Il faut faire des efforts pour aller vers le bonheur, s’oublier et avoir toujours de l’optimisme. Quand on n’avait rien à manger à la maison, mon père disait : « Ce n’est rien, Dieu nous le rendra. » Et il nous l’a rendu au centuple. On n’était pas particulièrement croyants, mais la phrase nous donnait de l’espoir.

Cette énergie qui vous habite, d’où vient-elle ?

Charles Aznavour Si j’avais été ce que je devais être, je serais mort depuis longtemps dans un génocide. Je suis un survivant merveilleusement heureux. Demain est important pour moi, beaucoup plus important qu’hier. Je vois devant.

Vous arrive-t-il de regretter votre jeunesse ?

Charles Aznavour On regrette des choses de sa jeunesse, mais on ne regrette pas sa jeunesse et les gens qui ont disparu. Je me souviens de ces moments passés dans le Midi chez Brialy où il y avait Le Luron, Chazot, Lapidus, un ami turc qui est mort dans un accident de voiture. On était tous amis, ouverts et pas sectaires. C’est important parce que tout d’un coup, ce n’est pas un juif, un arabe, un homosexuel, c’est un homme ou c’est une femme, voilà. C’était des amis.

Quel souvenir gardez-vous de la butte Montmartre où vous avez vécu ?

Charles Aznavour J’y ai habité longtemps. J’adore la Butte, qui est un vrai village. Il y avait la Maison rose, qui existe encore près du Lapin agile, où on a pris quelques bonnes cuites ! (rires.) On faisait les bistrots, on connaissait tous les peintres, les auteurs comme René Fallet. J’essaie de partager ces souvenirs avec ceux qui n’ont pas connu cette époque et de donner un peu de nostalgie à ceux qui ont connu la Butte et qui n’y vont plus.

Qu’est-ce qui motive votre désir d’écrire ?

Charles Aznavour En vérité, je n’étais pas fait pour écrire. Je suis sorti de classe trop tôt. Je me suis battu pour pouvoir lire. Heureusement, j’ai connu des gens qui m’ont donné des repères, Cocteau, Achard. Comme Piaf les fréquentait, je les côtoyais automatiquement. Je n’ai jamais eu honte de poser des questions. Je me souviens avoir demandé à Jean Cocteau quels livres je devais lire. Et il m’a fait une liste de vingt-cinq ouvrages. Il était très heureux de m’entendre demander cela et moi, j’ai été fier d’avoir osé le faire. Il faut oser dans la vie, ne pas violer les gens, mais leur demander gentiment les choses.

Vous êtes un chanteur internationalement reconnu, mais les débuts ont été difficiles. On vous critiquait, votre physique, votre voix…

Charles Aznavour On n’aimait rien de moi, rien de ce qui a fait mon succès ! (rires.) J’étais persuadé que j’y arriverais parce que je faisais ce qu’il fallait pour réussir. J’ai lu les livres importants, j’ai écouté, regardé ce qui se passait autour de moi. J’ai analysé beaucoup de choses dans la mesure de mes moyens de l’époque où j’étais plus jeune, où je comprenais moins bien et même un peu de travers. Et par la suite les choses ont changé.

Pourquoi avoir tenu à signer les arrangements de l’album ?

Charles Aznavour Je fais tout moi-même. Quand on rate une orchestration, ce n’est pas elle qui est ratée, c’est l’approche qui me ressemble ou pas. Cet album est orchestré par quelqu’un qui n’avait rien fait de pareil car je ne sais pas écrire la musique. Je ne sais pas la lire, tout comme le français que je ne savais pas lire. Je suis un autodidacte au piano, dont je joue bien. J’enregistre ce que je veux pour les cordes. Grâce à un logiciel qui s’appelle GarageBand, je fais la piste du piano, celle du chant et je donne le tout ensuite à quelqu’un qui sait écrire et arranger. Je travaille beaucoup, mais comme c’est un plaisir, je n’arrête pas d’avoir du plaisir ! (rires.)

Parlez-nous de la chanson Chez Fanny dans laquelle vous évoquez la Résistance ?

Charles Aznavour Fanny, elle a sûrement existé. J’avais des professeurs de mathématiques, des Arméniens, qui faisaient de la Résistance et qui ont été fusillés. Il y a eu des cas comme ça. Il faut en parler. On a tous en mémoire un bistrot où des résistants faisaient des tracts dans la cave, où après on emmenait ces gens…

Vos parents, eux aussi, ont participé à la Résistance et abrité Mélinée, l’épouse de Missak Manouchian…

Charles Aznavour Manouchian, il y avait le groupe et ceux qui aidaient. Ma mère était porteuse d’armes qu’elle cachait dans une voiture d’enfant, pour la Résistance. Récemment, j’étais avec un Israélien qui me parlait des Justes, étant donné que mes parents font partie des Justes. Je lui racontais des choses comme ça, qu’il ne savait pas sur le groupe Manouchian.

Piaf, elle, reste la plus grande artiste pour vous ?

Charles Aznavour Non seulement pour moi, mais aussi c’est la plus grande dans le monde. En Amérique, en Russie, en Suède, en Italie… elle est chantée partout et ses auteurs sont bénis. Elle est devenue une image mondiale. Elle était plus planétaire que Maurice Chevalier, qui, lui, l’a été de son vivant. Et il y a Trenet, mon modèle. À la fin, on était de vrais complices, dans le rire, la bouffe aussi ! Aujourd’hui, déconner, c’est terminé. On est devenus trop sérieux.

Vous ne donnez pas l’impression d’un homme de quatre-vingt-onze ans. Comment faites-vous ?

Charles Aznavour Mon secret est que je ne vieillis pas, je prends de l’âge ! (rires.) La nuance est énorme.

Si c’était à refaire ?

Charles Aznavour Je suis prêt à recommencer tout, même les mauvais moments où j’ai connu de bons amis. Les amis de misère sont souvent les plus intéressants, les plus sincères.

Entretien réalisé par 
Victor Hache, L'Humanité
 
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01/06/2015

Champagne, tête de veau et romantisme

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Ouvert avec une goûteuse comédie burlesque, le Ventre de Paris, au Théâtre des Bouffes du Nord, le festival romantique du Palazzetto Bru Zane invite à la redécouverte de George Onslow (1784-1853).

Ce n’est pas un hors-d’œuvre mais un repas gastronomique chanté, entre tête de veau et omelette, que le Palazzetto Bru Zane, pour son festival parisien, a offert au public du Théâtre des Bouffes du Nord, en ouverture d’une semaine qui sera dominée par la figure du compositeur George Onslow, né, comme son nom ne l’indique pas, à Clermont-Ferrand en 1783, pour une redécouverte d’une œuvre méconnue.

C’est là, en effet – ce travail de remise au jour et aux oreilles –, l’essentiel de l’activité du Palazzetto, autrement dit le centre de la musique romantique française installé à Venise, mais dont le rayonnement va désormais bien au-delà, avec un important travail d’édition de livres-disques (1), de recherche, des colloques, une aide à la formation de jeunes musiciens et, bien sûr, des concerts dans une collaboration suivie avec l’Opéra-Comique, les Bouffes du Nord ou encore l’Opéra royal de Versailles.

Pour autant, le sérieux de ce travail n’exclut pas la fantaisie, comme on en eut la preuve heureuse, vendredi donc, avec le Ventre de Paris, « comédie musicale philosophico-burlesque en un acte sur la gastronomie française », soit autour d’une table, avec trois musiciens et quatre interprètes, un florilège d’airs d’opérette du XIXe siècle évoquant avec malice, dérision, enthousiasme, sans reculer devant les effets parodiques, les plaisirs et parfois les déplaisirs de la table. Paradoxalement, si on veut, ce joyeux tourbillon offrait aussi des morceaux de musique aussi beaux qu’inattendus comme tel air joué au flageolet (l’instrument) par Mélanie Flahaut.

Côté chant, la mezzo-soprano Caroline Meng a emporté le public par sa présence physique dans une parodie cocasse de l’air du toréador de Carmen. Au total, une soirée champagne avec une vingtaine de compositeurs connus ou non (Bizet, Offenbach, Hervé, Serpette, Bruand, Mompou…).

Samedi, c’est à l’Opéra royal de Versailles, qu’était donné l’opéra-comique Uthal, d’Étienne-Nicolas Méhul (1763-1817), aujourd’hui largement oublié mais qui connut des heures de gloire avec des œuvres pour les fêtes révolutionnaires et de nombreuses compositions sous l’Empire. Uthal, d’après les poèmes du barde Ossian (inventé par le poète anglais Macpherson, au XVIIIe siècle), a cette caractéristique rare d’être une partition d’orchestre sans violons, reflétant, selon le vœu du compositeur, les brumes d’une Écosse heureusement fantasmée.

C’est là sa couleur profondément romantique, en rupture avec les clichés concernant les musiques de cette période, dont on oublie qu’avec Lesueur et Méhul, elles ouvrirent, si l’on peut dire, la voie à Berlioz.

Les concerts de cette semaine, dès ce lundi et jusqu’à vendredi, aux Bouffes du Nord, vont pour leur part faire une large place, comme on l’a dit, à Georges Onslow, que ses contemporains n’hésitèrent pas à considérer comme « le Beethoven français », mais qui en fut en tout cas une grande figure du romantisme, avec cette particularité que, s’il se forma à Hambourg, il ne quitta jamais par la suite sa ville natale de Clermont-Ferrand. On entendra essentiellement ses œuvres pour cordes (il était lui-même violoncelliste), en parcourant également le siècle, jusqu’à Debussy ou Saint-Saëns.

Maurice Ulrich, L'Humanité

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