19/04/2014
Alexis Tsipras, le jeune loup de la gauche européenne
Dans les rues d’Athènes, on trouve encore des passants qui ne connaissent pas Alexis Tsipras, mais ils deviennent de plus en plus rares. Le dirigeant du parti de la gauche radicale Syriza, aujourd’hui âgé de 39 ans, a été désigné par la gauche européenne pour la représenter dans la course au poste de président de la Commission qui sera nommé une fois le nouveau Parlement élu le 25 mai prochain.
Originaire d’Athènes, Alexis Tsipras est tombé très tôt dans le bain de la politique : il n’a que 17 ans lorsque membre du parti des jeunes communistes, il prend la tête des actions de protestation contre les réformes dans l‘éducation au début des années 90. Très peu connu à l‘étranger il y a encore deux ans, il finit par se faire un nom quand son parti devient la deuxième force au Parlement grec à l’issue des élections de 2012. Ses partisans sont ceux qui ont le plus souffert de la crise financière et du plan d’austérité qui ont mis l‘économie grecque à genoux ces quatre dernières années. Débordants de colère, ils voient alors un espoir dans le leader de Syriza.
Mais incapable de former un gouvernement, il finit par prendre la tête de l’opposition grecque. Il entend continuer le combat contre l’austérité en Grèce, mais aussi sur un deuxième échelon : l’Europe.
En pleine campagne pour les européennes et pour les municipales dans son pays – deux scrutins prévus en mai -, nous le rencontrons sur l‘île de Syros, au sud-est d’Athènes. Le dirigeant politique a peu de temps à nous accorder. Sa priorité, ce jour-là, c’est de rencontrer les habitants et préparer un discours pour un meeting qui a lieu le soir même.
Leitmotiv de son intervention : l’Union européenne et en particulier la troïka, ainsi que les différents gouvernements grecs qu’il estime responsables du plan de sauvetage qui a conduit à des baisses de salaires et à des hausses d’impôts. “Nous devrions féliciter ce gouvernement et les deux précédents pour ce qu’ils ont fait depuis 2010 parce qu’ils ont réussi à anéantir les classes moyennes de ce pays et à faire grimper le taux de chômage à 30 % et à 60 % chez les jeunes !” lance Alexis Tsipras avec ironie, “ils sont aussi parvenus à faire quitter le pays à 300.000 jeunes scientifiques brillants et à faire d’eux des migrants”.
Sous l‘étiquette des Jeunes Communistes et de Syriza, Alexis Tsipras n’a eu de cesse de condamner les politiques européennes jugées néo-libérales. Mais aura-t-il les moyens de changer la donne au niveau européen ? Certains de ses proches pensent que oui. Son ami, Mantheos Tsimitakis se rappelle que dès l‘âge de 17 ans, il maîtrisait ses dossiers (sur l‘éducation à l‘époque) et “était en mesure de négocier”.
Mais pour passer du leader étudiant de 17 ans à la figure politique nationale, Alexis Tsipras a dû changer, sans évidemment parvenir à faire l’unanimité. S’il est un héros pour une partie des Grecs parce qu’il veut s’attaquer aux effets collatéraux de la politique européenne, pour l’autre partie, il représente un danger pour l’avenir du pays au sein de l’Europe.
Même s’il doit parfois tirer un trait sur sa tranquillité de père de deux fils et renoncer à la moto pour se doter de gardes du corps, Alexis Tsipras endosse avec ambition, son nouveau costume : celui de candidat de la gauche européenne à la présidence de la Commission. L’homme affirme ne pas être anti-européen, mais vouloir en finir avec les politiques de rigueur et renforcer la démocratie en Europe. “L’Europe a besoin d’un nouvel accord social, d’un new deal,” déclare-t-il.
Un new deal pour l’Europe, c’est la mesure phare portée dans cette campagne par le candidat grec. Certains économistes comme Babis Papdimitriou le voient comme le porteur d’un message plutôt que comme un prétendant sérieux au poste de président de la Commission. “La Grèce est un pays qui a beaucoup souffert, le peuple grec également”, souligne-t-il, “donc pour la gauche et ceux qui votent à gauche en Europe, le fait d’avoir un candidat grec, c’est très bien. Mais il est vrai”, ajoute-t-il, “qu’Alexis Tsipras est très éloigné de l’Europe et surtout de la manière dont l’Europe a essayé et lutte encore pour dépasser cette crise”.
Elena Panaritis, économiste et ancienne députée grecque du Pasok (Parti socialiste grec), veut de son côté nuancer l’image du leader de Syriza : “il n’est pas le Tsipras qu’il était il y a encore deux ou trois ans, il a été préparé, il a fréquenté les arcanes du pouvoir, il s’est entretenu avec des dirigeants européens”, affirme-t-elle, “il s’est aussi rapproché des entrepreneurs grecs et du secteur privé du pays”, poursuit-elle avant de conclure : “il est assurément de gauche, mais il est certainement devenu moins radical”.
Il est clair qu’Alexis Tsipras est un homme politique sur lequel il faudra compter vu sa progression dans les sondages réalisés en Grèce. Pour autant, beaucoup se demandent s’il ne pourrait pas plus devenir le prochain Premier ministre grec que le nouveau président de la Commission. “Nos adversaires politiques en Europe préfèreraient me voir diriger la Commission plutôt que le gouvernement grec !” assure le principal intéressé, sourire aux lèvres, “parce qu’ils savent bien que s’il y a un vrai changement politique radical en Grèce, ils auront beaucoup de mal à continuer de suivre leur agenda politique en Europe !”
18:03 Publié dans Actualités, Connaissances, International | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tsipars, grèce, europe, député | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |
15/06/2013
LES LARMES DE LA VIOLONISTE GRECQUE !
La brutalité d’un régime aux abois sous la pression de la troïka et de la commission européenne qui exige toujours moins de service public et toujours plus de misère, et de l’autre côté les larmes simples, émouvantes, tragiques d’un violoniste, c’est l’image aujourd’hui de la Grèce.
L’Orchestre symphonique national de ERT qui existe depuis 75 ans dans ce pays, et qui même sous le régime des colonels pouvait s’exprimer a été supprimé en même temps que 4 chaines de télévision publique et 5 radios en quelques secondes par le gouvernement de coalition socialiste et droite qui aujourd’hui dirige la Grèce.
L’ERT, paradoxe, qui est un établissement public pourtant bénéficiaire comme vient de le démontrer un rapport récent publié.
Mais en Grèce aujourd’hui, la culture, l’éducation, le pluralisme deviennent les nouveaux ennemis désignés de la finance.
A l’occasion d’un concert de soutien de l’Orchestre symphonique national à l’ERT à Athènes, les musiciens et les choristes n’ont pas pu résister à l’émotion et c’est en larmes que certains ont joué le dernier morceau : l’hymne national.
13:33 Publié dans Actualités, ACTUSe-Vidéos, International, Médias, Musique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : grèce, musicien, ert, europe, orchestre | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |
28/10/2012
Exclusif l'Humanité : En Grèce, il ne faut pas dire la vérité : journaliste recherché par la police
Nouveau rebondissement dans l’histoire de la « liste Lagarde ». Et nouvelles menaces sur la liberté d’information, en Grèce. L’Humanité a en effet été informée que l’éditeur Kostas Vaxevanis est recherché par la police. Un communiqué le confirme : il indique que, sur ordre du Procureur d’Athènes, "la police grecque exerce des recherches pour trouver et arrêter l’éditeur du magazine Hot Doc dans lequel a été publié la liste Lagarde".
- Dernière minute. L'arrestation de l’éditeur Kostas Vaxevanis est confirmée.
Que contient cette liste ? Environ 2000 noms de riches Grecs qui ont des comptes en Suisse, dans la banque HSBC, échappant ainsi au fisc de leur pays. Cette liste avait été fournie aux anciens ministres du Pasok (celui de la Défense, Evangelos Venizelos et celui des Finances, Giorgos Papaconstantinou) par Christine Lagarde lorsqu’elle était ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. Mais cette liste était visiblement vouée à disparaître. L’un des ministres, G. Papanconstantinou, déclarant qu’il ne savait plus à quel fonctionnaire il avait donné le CD contenant les noms, l’autre déclarant avoir perdu la clé USB avec les précieuses informations. Depuis, la France se tenait prête à la communiquer si le gouvernement grec la lui demandait. Il n’en fut rien.
Alors que la Grèce sombre dans une crise sans précédent, le magazine d’investigation Hot Doc a publié les noms, sans indiquer les comptes ni les sommes. Dans cette liste se trouvent des entrepreneurs ayant obtenu des subventions de l’Etat grec, avant la crise, pour ne pas fermer leurs usines – comme la famille Lamaras, magna du textile, des armateurs, des journalistes et trois personnalités politiques. Aussitôt, la police s’est mise à la recherche… de l’éditeur de la liste. « La police le recherche. Elle l’accuse de divulguer des informations personnelles », explique à humanité.fr Miguel Samotrakis, un des journalistes du magazine Hot Doc joint par téléphone. « La police est même venue dans les bureaux » poursuit le journaliste.
Kostas Vaxenakis, rapidement joint par l’Humanité, s’est dit « très inquiet ».
Bref, il ne fait pas bon dénoncer la corruption alors que des personnes impliquées dans l’affaire Siemens, par exemple (comme Michaël Christoforakos) ne sont pas inquiétées.
Alors que les mouvements sociaux se multiplient en Grèce, que la population – frappée à 25,3% par le chômage – devient chaque jour plus pauvre, et que le rejet de l’austérité est massif, ce sont désormais les journalistes qui semblent empêcher d’exercer leur métier. Déjà, en Grèce, certains ont surnommé Kostas Vaxevanis le « Julien Assange Grec ». Julien Assange est poursuivi pour la publication de documents confidentiels (câbles diplomatiques).
Cet épisode rappelle de sombres heures dans un pays sorti en 1974 de la dictature des colonels.
16:15 Publié dans Actualités, Cactus, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : l'humanité, christine lagarde, grèce, athènes, banque, hsbc | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |
08/05/2010
« Les grandes fortunes sont à l’origine des difficultés de la Grèce »
José Fort journaliste, ancien chef du service international de l’humanité.
Le gouvernement socialiste grec reprend à son compte une phrase d’Alphonse Allais : « Il faut prendre l’argent où il se trouve, c’est-à-dire chez les pauvres. Bon, d’accord, ils n’ont pas beaucoup d’argent mais il y a beaucoup de pauvres. »
Le programme dit de « rétablissement des comptes » exigé par l’Union européenne et le FMI se résume en un super plan d’austérité, une première pour les pays de la zone euro, un chantage contre le peuple grec, des mesures considérées par la plupart des commentateurs en France comme un « mal à surmonter », comme s’ils nous préparaient à subir le même sort.
Qui va souffrir de la hausse de la TVA, des baisses de salaire, du gel des embauches, des restrictions en matière de santé et d’éducation, du départ à la retraite à 67 ans sinon les plus pauvres ? Avez-vous remarqué que dans les mesures annoncées par le gouvernement grec aucune ne concerne directement les grandes fortunes ? Or ces prédateurs sont à l’origine des difficultés de la Grèce. Ils volent au fisc chaque année 20 milliards d’euros. Le New York Times en faisait récemment la caricature en signalant que 324 résidents d’Athènes avaient déclaré avoir une piscine alors qu’un survol aérien fixait le chiffre à 16 974.
Il y a plus grave. Le journal britannique The Telegraph annonçait à la fin de la semaine dernière que depuis le mois de janvier dernier d’importants mouvements de fonds étaient enregistrés depuis les banques grecques vers des banques internationales telles HSBC ou encore la Société générale. Plusieurs milliards d’euros de nouvelles liquidités ont pris le chemin de ces banques internationales, affirme The Telegraph qui estime les transferts à 5 milliards d’euros au mois de janvier, 3 en février. Au mois de mars, les transferts ont frisé selon d’autres sources les 6 milliards d’euros. La Suisse, la Grande-Bretagne et Chypre sont les principales destinations de ces fonds, la Suisse arrivant largement en tête de l’accueil des fortunes grecques. Comment expliquer le silence entretenu sur ces mouvements de fonds ? Les grandes fortunes grecques planquent leur fric et n’ont pas d’inquiétude quant à leur sort. Les pauvres paieront la note.
15:03 Publié dans Economie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : grèce, économie | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |