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31/07/2023

Aléas climatiques et souveraineté alimentaire

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Alors que la récolte céréalière est en cours dans les pays de l’hémisphère nord, les difficultés que rencontre l’Ukraine pour exporter du blé risquent d’être utilisées par les spéculateurs internationaux pour s’enrichir sur le dos des consommateurs, à commencer par ceux des pays pauvres. Face aux spéculations que favorise la mondialisation, via les cotations et les achats à terme, la France doit agir pour mieux assurer la souveraineté alimentaire de son peuple en favorisant la production nationale.

Publié le
Lundi 31 juillet 2023
 

Une réunion consacrée à la sécurité alimentaire mondiale s’est tenue à Rome au siège de la FAO du 24 au 26 juillet . Elle a été occultée par d’autres sujets à commencer par les incendies en Grèce, en Italie, en Algérie, en Tunisie et même en France. Au point qu’il était impossible de trouver la moindre information sur le sujet à la fin de la semaine dernière.

 Avant même la tenue de cette réunion, le prix de blé sur les marchés internationaux était reparti à la hausse, suite à la suspension par la Russie de l’accord qui permettait de faire partir d’Odessa des cargos chargés de blé en direction des pays importateurs, dont beaucoup se trouvent en Afrique. Du fait de la guerre, la production céréalière de l’Ukraine devrait aussi baisser de 10 à 15% en 2023 par rapport à 2022. 

Confusion entre milliers et millions de tonnes de blé 

alimentation,planèteLors du sommet Russie-Afrique qui s’est tenu la semaine dernière à Saint-Pétersbourg, Vladimir Poutine a suscité beaucoup de commentaires en Occident en déclarant ceci   « Dans les mois qui viennent nous seront en mesure d’assurer des livraisons gratuites de 25.000 à 50.000 tonnes de céréales au Burkina Faso, au Zimbabwe, au Mali, à la Somalie, à la République centrafricaine, et à l’Erythrée ». Dans certains médias français, on a repris ces chiffres, mais en millions de tonnes ! Certes la Russie devrait produire 123 millions de tonnes de céréales cet été, dont 78 millions de tonnes de blé. Mais on la voit mal donner la moitié de sa récolte aux pays africains.

La vraie question est de savoir si les prix des céréales vont, ou pas, se mettre à flamber dès le début de l’automne en raison du possible recul des stocks de report au niveau mondial. En France, les rendements du blé tendre s’annoncent plutôt bons dans la plupart des zones de production avec toutefois des chutes parfois sensibles des rendements dans le Berry, en Poitou-Charentes, voire en Ile-de-France. Néanmoins, la récolte est attendue autour de 35 millions de tonnes cette année contre 33,69 millions de tonnes en 2022. La moitié de ce volume sera exportable en Europe et vers certains pays tiers.

L’inde a stoppé ses exportations de riz 

Si le blé sert surtout à faire du pain, le riz est un autre aliment de base dans beaucoup de pays. Dans la seconde quinzaine de juillet, le gouvernement indien a annoncé qu’il stoppait ses exportations de riz de riz blanc non bastami afin de contenir les prix sur son marché intérieur. De ce fait, il n’est pas certain que les exportations de pays comme la Thaïlande et le Vietnam suffisent pour empêcher une flambée du prix du riz sur les marchés internationaux.

Pour plusieurs produits alimentaires de base, les prix mesurés par l’indice de l’Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture demeurent élevés et s’approchent de ceux des années 2008 et 2011 marquées par d’importantes crises alimentaires.En France aussi, le prix de la nourriture est reparti à la hausse depuis plus d’un an. Entre juillet 2022 et juin 2023, les prix des viandes ont augmenté de 12,6% dans les grandes surfaces, ceux des fruits ont augmenté de 14% et ceux des légumes de 17%; ceux des boissons de 10,8% en moyenne.

Dans une note publiée le 28 juillet, l’INSEE faisait état d’une inflation moyenne de 4,3% sur un an; mais elle était de 12,6% pour les produits alimentaires, contre 3,4% pour les produits manufacturés. Concertant les viandes, les hausses de 2022-2023 succèdent à cinq années de prix trop bas payés aux éleveurs. Cela s’est traduit par une réduction du cheptel de bovins de 10% en cinq ans, celui des porcins ayant reculé de plus de 5% durant la même période. La même tendance s’est observée dans d’autres pays membres de l’Union européenne. Ce furent aussi les conséquences des accords de libre-échange signé entre la Commission européenne et des pays tiers, dont le Canada.

Quand la pénurie fait monter les prix 

  En France, de la fin de l’été 2021 au mois de février 2022, le kilo de carcasse de porc cotait moins de 1,30€ sur le marché au cadran de Plérin dans les Côtes d’Armor. Du fait du recul de la production européenne de 5%, il cote plus de 2,30€ en moyenne depuis des mois. En France les abattages hebdomadaires de porcs charcutiers étaient en baisse de 6,1% sur les 21 premières semaines de l’année 2023 par rapport à 2022. Du coup les importations de viandes porcines et de produits transformés ont augmenté de 7,8% en moyenne mais de 26,5% en provenance d’Italie, le pays producteur du jambon de Parme.

Alors que le changement climatique rend de plus en plus incertaines les récoltes annuelles dans presque tous les pays du mondes, la France doit se pencher davantage sur les conditions à réunir pour assurer sa souveraineté alimentaire. Cela passe par des contrats annuels entre les producteurs de matières premières agricoles, les transformateurs de l’industrie agro-alimentaire et les metteurs en marché que sont les enseignes de la grande distribution. Deux lois Egalim ont même été votées dans ce but en 2018 et en 2021.

Ce fut à la demande du Président Macron lors d’un discours prononcé à Rungis le 11 octobre 2017. « Nous modifierons la loi pour inverser cette construction du prix qui doit pouvoir partir des coûts de production », disait-il ce jour-là. Mais en 2007-2008, c’est aussi l’énarque Emmanuel Macron qui fut chargé de rédiger le rapport de la Commission Attali. Rédigé sur commande du président Sarkozy à la demande de Michel-Edouard Leclerc, Macron rendit à Sarkozy un rapport conçu comme un mode opératoire pour piller les paysans. Ce fut rendu possible via le vote de la Loi de Modernisation Economique (LME) par les parlementaires de droite en 2008. En page 152 de ce rapport, Emmanuel Macron osait écrire que  « la revente à perte n’est en général qu’un prix de connivence entre certains producteurs et certaines grandes surface ». Lequel des deux discours de l’actuel président de la République faut-il croire aujourd’hui ? 

15:58 Publié dans Actualités, International, Point de vue | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alimentation, planète | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

08/06/2023

L'ARTIQUE EN DANGER

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La glace de mer de l’Arctique pourrait disparaitre plus vite que prévu 

Une nouvelle étude scientifique estime que l’Arctique pourrait être privé de sa glace de mer au mois de septembre dès 2030. Soit une décennie plutôt que ce que prévoyait jusque-là le Giec...

La mer de glace de l’Arctique pourrait payer le prix fort du réchauffement climatique bien plus tôt que prévu. Des scientifiques basés en Corée, au Canada et en Allemagne ont utilisé des données d’observation des années 1979 – 2019 pour effectuer des nouvelles simulations. Ils en ont publié les conclusions sans appel pour la planète, mardi 6 juin, dans la revue Nature Communications.

«Les résultats indiquent que le premier mois de septembre sans glace de mer interviendra dès les années 2030-2050, quels que soient les scénarios d’émission»,  assurent les chercheurs. Soit «environ une décennie plus tôt que les récentes projections du Giec», relève Seung-Ki Min, des universités sud-coréennes de Pohang et Yonsei, co-auteur de l’article. 

En clair, les 14 millions de kilomètres carrés de l’océan Arctique, recouvert de glace une majeure partie de l’année, pourraientt ne plus compter que sur des résidus négligeables en septembre, le mois où son niveau atteint déjà son minimum annuel. Or ce ne serait pas sans conséquence sur le réchauffement de la planète entière.

Des conséquences en chaîne pour la planète

Contrairement à la calotte glaciaire et aux glaciers, la fonte de cette banquise ne fait pas directement monter le niveau des océans (puisqu’elle flotte) mais sa disparition entrainerait une montée des températures accélérés dans l’Arctique puisqu’elle ne renverrait plus les rayons du soleil.

Avec des conséquences en chaîne. «Cela peut aussi accélérer le réchauffement mondial, en faisant fondre le permafrost, ainsi que la montée du niveau des océans en faisant fondre la calotte glaciaire du Groenland»,assure Seung-Ki Min. Le déclin de la mer de glace pourrait aussi «augmenter les événements météorologiques extrêmes aux latitudes moyennes, comme les canicules et les feux de forêts», ajoute-t-il.

Et les auteurs de l’étude pointent également que ce sont bien les émissions de gaz à effet de serre qui sont à l’origine du phénomène, les autres facteurs (aérosols, activité solaire et volcanique...) jouant un rôle bien plus mineur. 

Source l'Humanité, Julia Hamlaoui

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29/08/2017

Le capitalisme est incompatible avec la survie de la planète

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Humanite.fr, Jean-Jacques Régibier

Alors que les études se succèdent pour démontrer la gravité et l’étendue des atteintes à l’environnement, peut-on faire confiance au capitalisme pour réparer ce qu’il a produit ?
Non, répondent des scientifiques, militants environnementaux et eurodéputés réunis à Bruxelles par la Gauche Unitaire Européenne (1). Ils proposent d’autres alternatives.
Les mauvaises nouvelles sur le réchauffement climatique et la dégradation de l’environnement s’accumulent à un rythme alarmant depuis le début de l’été sous forme d’une avalanche d’études scientifiques qui aboutissent toutes au même diagnostic : si des mesures drastiques ne sont pas prises très vite à l’échelle mondiale, une partie de la planète risque de devenir invivable dans un délai assez bref. Certaines études concluent même qu’il est déjà trop tard pour redresser la barre.
 
Florilège non exhaustif de ces chroniques estivales d’une catastrophe planétaire annoncée :
 
- Dans la revue Nature, le climatologue français Jean Jouzel et un groupe de scientifiques, prévoient que si d’ici 3 ans les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas stabilisées, la planète passera dans un autre type climat aux conséquences « catastrophiques » : recrudescence des décès dus à la chaleur ( certaines régions de France connaitraient des températures supérieures à 50° ), des incendies, accroissement des réfugiés climatiques venant de régions particulièrement touchées comme la Corne de l’Afrique, le Moyen-Orient, le Pakistan ou l’Iran ( on compte déjà actuellement 65 millions de réfugiés climatiques sur la planète ), baisse des rendements agricoles, etc...
 
- Un rapport établi par plus de 500 scientifiques dans plus de 60 pays, (2) montre que 2016 aura été l’année de tous les records en matière de températures, d’émissions de gaz à effet de serre, de montée des océans et de terres soumises à la sécheresse.
 
- Selon le climatologue américain Michael Oppenheimer, avec le retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris, les chances de réussir à le mettre en œuvre ne dépassent pas 10% ( d’autres chercheurs parlent de 5% de chances.)
 
- Selon une étude réalisées par les chercheurs du Massachusets Institut of Technology ( MIT ) et de l’Université Loyola Marymount, la chaleur risque de rendre l’Asie du Sud-Est invivable d’ici 2100.
 
- Une évaluation scientifique effectuée en avril dernier par l’Unesco conclut que si les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas réduites très rapidement, les 24 sites coralliens classés au patrimoine mondial  auront disparu d’ici à 2100. C’est déjà le cas pour 20% d’entre eux.
 
- Début juillet, une étude menée par des chercheurs américains et mexicains (3) montre que les espèces de vertébrés reculent de manière massive sur terre, à un rythme inégalé depuis la disparition des dinosaures il y a plus de 60 millions d’années. Les chercheurs parlent de « sixième extinction de masse des animaux » et analysent les conséquences « catastrophiques » de cette « défaunation » aussi bien sur les écosystèmes que sur l’économie et la société en général.
 
- Selon article de la revue Science Advances, la fonte des glaces du Groenland, région qui se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète, va s’accélérer dans les prochaines années. Selon l’un des auteurs de cette étude, Bernd Kulessa ( Collège des sciences de l’université britannique de Swansea ), si les glaces devaient disparaître complètement, le niveau des océans monterait de 7 mètres.
Comme pour le confirmer, il y a quelques jours, un méthanier de 300 mètres battant pavillon du groupe Total, franchit le passage du Nord-Est habituellement obstrué par la banquise, sans l’aide d’un brise-glace. Ce rêve de relier l’Atlantique au Pacifique par le Détroit de Bering que caressaient depuis longtemps les pétroliers, mais aussi des états comme la Russie, est désormais une réalité.
 
- Pour couronner le tout, un institut de recherche international  travaillant sur les données fournies par l’ONU (4), nous apprend que depuis la fin du mois de juillet, la planète vit « à crédit », c’est-à-dire que l’humanité a consommé en 7 mois, toutes les ressources que la terre peut produire en une année. Circonstance aggravante : cette date fatidique arrive désormais de plus en plus tôt.
En prime, toujours au chapitre de la consommation, une autre étude nous indique que si tous les habitants du monde voulaient vivre comme un Français, il faudrait trois planètes terre pour assurer leurs besoins.
 
Le capitalisme responsable
Si toutes ces études se recoupent et se complètent sur les constats, elles s’accordent également sur leurs causes : c’est bien le développement explosif de la production et l’exploitation sans limite des ressources de la planète depuis le début de « l’ère industrielle », qui est la cause de la catastrophe en cours. Le fait que la situation se soit dégradée à très grande vitesse au cours des dernières décennies en est une preuve supplémentaire. Cette accélération est liée directement au développement du capitalisme dans les pays émergents, et plus généralement à l’extension hégémonique de ce mode de production à l’ensemble de la planète. Rappelons que la Chine, premier pays émergent, est aussi le premier pays émetteur de gaz à effet de serre, juste devant les Etats-Unis, première puissance capitaliste mondiale. « La logique de la croissance va vers l’autodestruction du système, voilà ce qui se passe quand on confie la gestion des ressources de l’humanité à des privés », juge le député européen espagnol Xabier Benito ( GUE-GVN .)
C’est également l’avis de Daniel Tanuro qui rappelle que le but du système capitaliste étant de produire de la survaleur, il n’y a pas d’autre solution que de remplacer le travail vivant par du travail mort pour lutter contre la baisse du taux de profit, donc « d’accroître de plus en plus vite la masse des marchandises, ce qui amène à consommer de plus en plus de ressources et d’énergie. » Et l’écosocialiste le répète : « la croissance capitaliste est la cause de la crise écologique, dont le chômage massif permanent est l’autre aspect.» C’est pourquoi, pour Daniel Tanuro, il est indispensable de  lier les combats sociaux et environnementaux.
Pas d’illusion non plus à se faire du côté du « capitalisme vert » promu notamment par l’Union européenne au niveau international. Pour Daniel Tanuro qui y a consacré un livre, « capitalisme vert est un oxymore. » Ce que l’on constate aujourd’hui dans les destructions qu’il opère partout sur la planète, c’est bien au contraire sa violence, dit Eleonera Forenza, qui explique par exemple comment le sud de l’Italie est ainsi devenu la décharge du Nord.
 
Quelles alternatives ?
Une fois reconnu que la voie préconisant la « modernisation » du capitalisme, son « verdissement », est une impasse ( de même que la promotion des valeurs « post-matérialistes » ou « post-classes » qui l’accompagnent ), il faut poser clairement, analyse l’historienne Stefania Barca, que « le capitalisme est le problème, » et pensez la politique a partir de cet axiome, dans des termes nouveaux par rapport à ceux du XXème siècle. « Où est-ce qu’on peut bloquer le capitalisme ? » devient une question politique centrale, explique Dorothée Haussermann, de Ende Gelände, un vaste collectif d’organisations environnementales et de groupes politiques qui concentre ses actions sur le blocage des mines de lignite et de charbon en Allemagne. « Le charbon fait partie du problème du réchauffement climatique, on doit en empêcher la production. Il faut commencer quelque part, c’est à nous de prendre les choses en mains, » explique Dorothée Haussermann.
 
En matière de changement climatique, ce n’est pas l’information qui nous manque, fait remarquer Rikard Warlenhus ( Left Party, Suède ), mais on a l’impression que changer les choses est au delà de nos possibilités. C’est, pour les raisons que l’on vient de voir, parce qu’au fond, remarque l’eurodéputé Ernest Cornelia ( GUE / Die Linke ), « imaginer la fin du capitalisme est impossible. » Pour lui, la question devient donc : « comment passer du stade actuel à l’étape suivante ? » Cette question est d’autant plus centrale que, comme l’explique Rikard Warlenhus, « les dossiers climatiques ont tendance à nous diviser. » Par exemple, explique Dorothée Häussermann, « le mouvement environnemental peut être conçu comme une menace à l’emploi.» C’est la raison pour laquelle une partie du mouvement syndical est converti au « capitalisme vert », bien qu’il soit évident que le chômage continue à augmenter, ou que de nombreux syndicats soutiennent les énergies fossiles. « Une difficulté à mettre sur le compte de 3 décennies de déclin du mouvement ouvrier », analyse l’historienne Stefana Barca, dont il faut être conscient qu’elle provoque des divisions. C’est pourquoi, ajoute-t-elle, il faut concevoir le combat pour l’environnement comme « une forme de lutte des classes au niveau planétaire entre forces du travail et capital. »
 
Constatant la vitalité des combats pour l’environnement menés partout dans le monde sous des formes et par des acteurs très différents, les intervenants insistent tous sur la nécessité de promouvoir des articulations entre tous ces mouvements et des acteurs institutionnels quand ils existent ( des villes, des régions, par exemple ), ou des syndicats, des partis, et ce, au niveau mondial. L’objectif est de se situer « à la même échelle d’action que notre adversaire », explique Rikard Warlenhus « parce que le capital dépasse la structure de l’Etat national. »
 
Le rôle crucial des femmes
De nombreux analystes soulignent également comme un point central, le rôle des femmes dans le combat écologique et social. Il ne s’agit pas de dire qu’il est bien que les femmes y participent à égalité avec les hommes ( l’égalité homme-femme est un leitmotiv  consensuel de nos sociétés, en général jamais respecté ), mais bien de repérer l’apport spécifique, déterminant et innovateur des femmes, en tant que femmes, dans les nouvelles formes de combat. La députée italienne Eleonora Forenza ( GUE-GVN ) voit dans les mobilisations qui ont suivi la catastrophe de Seveso en juillet 1976, l’événement fondateur de cet éco-féminisme. « Ce sont les femmes qui ont joué un rôle essentiel en exigeant que soient menées des études médicales, car les femmes enceintes risquaient de donner naissance à des enfants malformés. Ce sont également elles qui ont lancé les premiers appels pour l’IVG en Italie. » ( L’IVG a été légalisé en 1978, mais il est toujours très difficile de la faire appliquer, ndlr.) Cet apport des femmes au combat écologique est également majeur pour Daniel Tanuro qui explique que « la place que le patriarcat donne aux femmes, leur procure une conscience particulière. » Il rappelle que 90% de la production vivrière dans les pays du Sud est assurée par des femmes, faisant d’elles le fer de lance de tous les combats actuels liés à l’agriculture, à la propriété de la terre, aux pollutions ou au climat.
 
(1) Colloque au Parlement européen, 27 mars 2017, Bruxelles publiées dans les Proceedings of the Natural Academy of Science ( PNAS )
(3) publié en juillet par l’Agence américaine océanique et atmosphérique ( NOAA ) et L’American Meteorological Society ( AMS ),
(4) Le Global Foodprint Network, Oakland ( Californie )
(5) Daniel Tanuro, « L’impossible capitalisme vert », La Découverte.
 

10/10/2010

Nous refusons l’écologisme benêt d’Arthus-Bertrand

arthus-bertrand_s.jpg"La lutte contre le productivisme et l’économie capitaliste, pour la répartition des richesses et la relocalisation n’ont pas la moindre place dans son raisonnement."

Paul Ariès, Aurélien Bernier, Yann Fiévet et Corinne Morel-Darleux - 5 octobre 2010

Source : Courriel à Reporterre.

Les auteurs : Paul Ariès est directeur du Sarkophage, théoricien de la décroissance, et auteur de La simplicité volontaire contre le mythe de l’abondance (La Découverte) ; Aurélien Bernier est secrétaire national du M’PEP et auteur de Ne soyons pas des écologistes benêts (Mille-et-une-Nuits) ; Yann Fiévet est président d’Action Consommation et auteur de Le monde en pente douce (Golias) ;Corinne Morel-Darleu est secrétaire nationale du Parti de Gauche et conseillère régionale Rhone-Alpes, ainsi qu’auteure de L’écologie, un combat pour l’émancipation (Bruno Leprince).

Ecouter aussi : Yann Arthus-Bertrand, Hugo Chavez dit que le capitalisme est la cause du changement climatique. Qu’en pensez-vous ? http://www.reporterre.net/spip.php?...


Quand l’écologie émergea dans le débat public au cours des années 1960 et 1970, elle fut d’emblée fortement politisée. L’économie productiviste, la répartition des richesses, les rapports Nord/Sud, la lutte pour la démocratie, la dénonciation des multinationales faisaient partie intégrante du discours des principaux mouvements. Aux Etats-Unis, le militantisme de Rachel Carson ou Barry Commoner eut des effets concrets sur la législation américaine, aboutissant à l’interdiction de produits chimiques ou à la création de l’Agence pour la protection de l’environnement (EPA). Les Nations Unies ne purent éviter de lier la question environnementale à la question sociale, et la notion d’écodéveloppement portait des revendications pour protéger la planète, mais également pour mieux répartir les richesses et partager le travail.

Puis vint le tournant de la mondialisation. Le capitalisme se fit néolibéral en se réorganisant à l’échelle planétaire, afin de bénéficier des coûts de production les plus faibles et de mettre en concurrence les salariés des économies industrialisées avec les salariés des pays émergents. Repris en main par les gouvernements, le discours sur l’état de la planète changea profondément de nature. Les chocs pétroliers furent l’occasion de réclamer aux citoyens des gestes responsables pour réduire leurs consommations, moins pour des raisons écologiques que pour limiter les déficits commerciaux. Le basculement dans l’écologie individuelle était amorcé. Après l’énergie, ce fut le tri des déchets afin de permettre le recyclage, avec là aussi des motivations liées au commerce extérieur. Puis, afin de lutter contre le changement climatique, le citoyen fut mis à contribution pour réduire ses gaz à effet de serre.

Le développement durable se substitua à l’écodéveloppement pour gommer toute revendication radicale et pour faire de chaque citoyen le responsable de la dégradation de la planète. Dans cette construction idéologique, le pollueur n’est plus l’industriel qui met sur le marché de futurs déchets, mais l’acheteur qui remplit sa poubelle. Ce n’est plus le fabricant d’un produit bon marché mais polluant, c’est le ménage à faible revenu qui ne prend pas la peine d’acheter "vert". Ce ne sont plus les multinationales responsables des délocalisations dans les pays où l’on peut polluer gratuitement, mais les salariés obligés de prendre leur voiture pour aller chercher un travail de plus en plus rare et donc de plus en plus éloigné de leur lieu d’habitation.

Bien sûr, les comportements individuels doivent évoluer vers un plus grand respect de l’environnement. Il n’est pas question de le nier ni de sous-estimer l’évolution positive des mentalités. Mais l’objectif du discours dominant sur l’écologie vise tout autre chose : un véritable transfert des responsabilités.

Yann Arthus-Bertrand est-il naïf lorsqu’il porte l’image d’une écologie totalement dépolitisée, fondée sur le "tous coupables" et qu’il prétend dépasser les clivages gauche-droite avec les financements du groupe Pinault-Printemps-La Redoute ? Peut-être. En tout cas, la démarche est dangereuse. Sa dernière initiative, "10:10", fait songer à l’école des fans : tout le monde fait un geste et tout le monde gagne, avec une pensée émue pour les générations futures. La lutte contre le productivisme et l’économie capitaliste, pour la répartition des richesses et la relocalisation n’ont pas la moindre place dans son raisonnement.

Pourtant, le bilan écologique du capitalisme néolibéral est sous nos yeux. Entre 1997 et aujourd’hui, les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont progressé d’environ 25 %. La principale raison n’est pas le développement du marché intérieur des pays émergents, mais bien l’augmentation continue du commerce international, la surconsommation des pays riches et le renforcement des délocalisations. La dictature de la finance empêche quant à elle l’émergence d’activités réellement durables, basées sur des raisonnements de long terme. Et, lorsqu’il s’agit de lutter contre le changement climatique, la communauté internationale décide justement de confier aux fonds d’investissements un juteux marché des "droits à polluer", qui, de produits dérivés en manoeuvres spéculatives, nous emmène doucement mais sûrement vers un prochain krach boursier.

Loin des discours de Daniel Cohn-Bendit ou de Yann Arthus-Bertrand, l’écologie politique ne trouvera un avenir que dans une rupture franche et concrète avec le capitalisme néolibéral. Nous devons aborder les sujets qui fâchent. La répartition des richesses, avec par exemple un revenu maximum et une fiscalité de justice sociale. Le commerce international et la relocalisation de l’activité industrielle et agricole, avec des taxes écologiques et sociales sur les importations. L’asphyxie des marchés financiers, en commençant par la fermeture de la Bourse des droits à polluer. Autant de mesures qui vont à l’encontre des règles de l’Union européenne, de l’Organisation mondiale du commerce et du Fonds monétaire international, qu’il faut impérativement dénoncer. Nous laissons donc à Yann Arthus-Bertrand et ses financeurs du CAC 40 la grande cause des lumières éteintes et des robinets fermés. Notre objectif se situe à l’opposé. Il s’agit de mettre de l’écologie dans la politique et, surtout, de mettre de la politique dans l’écologie.


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