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21/02/2015

Abderrahmane Sissako : « J’ai filmé Tombouctou comme une ville symbole »

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Le film franco-mauritanien "Timbuktu" d'Abderrahmane Sissako, chronique de la vie quotidienne dans le nord du Mali sous la coupe des jihadistes, a triomphé vendredi à la 40e cérémonie des César. "Timbuktu" a reçu sept prix, dont les prestigieux trophées du meilleur film et meilleur réalisateur.

Entretien avec le réalisateur mauritanien, auteur de Timbuktu. Un film immense, intense, à la profondeur rare.

Il y a toujours un élément déclencheur, mais il n’est pas suffisant sans une prédisposition de base. En ­l’occurrence, j’étais confronté à l’occupation par les djihadistes du Sahel, ma région d’origine. En 2012, est survenue la lapidation à mort d’un couple dans la petite ville d’Aguelnok au Mali. Ils s’aimaient, ils avaient des enfants, mais leur crime était de ne pas être mariés devant Dieu.

Ce qui m’a interpellé avec force, ce n’est pas le sentiment d’une ­indifférence à l’égard de ces faits, mais plutôt le silence qui les a entourés. Lorsqu’on est ­cinéaste, qu’on a la possibilité de s’exprimer, on ne peut pas reprocher aux autres de ne pas le faire.

Le choix d’un sujet doit avoir un sens universel. Je ne viens pas d’un pays riche en possibilités de production et en réalisant un film tous les dix ans, il doit concerner l’humanité. C’est déjà ce que j’avais tenté en réalisant Bamako. Ces années sans mettre de nouveaux films à l’affiche ne me posent pas de problème mais il faut que le film s’impose à moi.

Comment le sens s’est-il élaboré ?

Abderrahmane Sissako Je me suis servi de Tombouctou comme d’une ville symbolique. Je l’ai connue comme une ville de rencontres, de partages dans laquelle prenait place un islam simple, qui n’a nul besoin de s’exhiber. Elle s’inscrit historiquement dans le patrimoine de l’humanité par la force des échanges. C’est cela qui a été pris en otage par des gens qui ne lisent pas, qui ont en chaque chose une vision courte.

J’ai voulu relater ce moment de prise en otage en partant du quotidien de ces gens dont on ne parle que s’il s’agit d’Occidentaux auxquels on peut s’identifier. On ne parle pas de la marchande de poissons que je mets en scène, des mains coupées, des interdits absurdes, des menaces de mort. Un autre « fait divers » m’a frappé, l’exécution d’un berger touareg. J’ai donc imaginé sa vie pour ne pas risquer cette occultation des drames ­humains derrière des récits distancés et globalisants. Ce qui compte pour cet homme, c’est l’amour qu’il porte à sa femme et à sa fille. Cette famille est également symbolique.

Comment les choix de mise en scène se sont-ils imposés ?

Abderrahmane Sissako Par une recherche de simplicité. Le film commence simplement. On voit les djihadistes puis on croise cette famille touareg sous sa tente. Ensuite tout va très vite. Ces gens sont dans une grande fragilité. Elle est présente dès le départ. Ce film dresse le portrait d’anonymes. La forme va elle aussi s’imposer très vite. Lorsque la mort devient un spectacle, on la banalise. Pour moi, c’était très important de réfléchir aux moyens de créer une distance entre ce qui est montré et celui qui regarde. Il fallait passer par de l’émotion. S’agissant des violences infligées, il me fallait aussi faire valoir les résistances.

Ainsi cette femme qui se fait fouetter et transforme son cri de douleur en un chant. C’est ce que ses bourreaux ne peuvent pas tuer en elle. Pour les mêmes raisons, je mets en scène ces jeunes qui jouent au foot malgré l’absurdité de son interdiction. Il ne suffit pas de le dire dans un dialogue. On les voit s’entraîner et faire mine de se livrer à une autre activité quand les djihadistes passent. Ces jeunes ont décidé de se mettre ensemble, comme ils peuvent, pour se dresser contre ce qui se passe.

Ce lieu symbolique que j’ai dû recréer parce qu’il n’était pas possible d’y tourner, je l’ai transporté en Mauritanie avec l’accord des autorités. Je l’ai peuplé de figurants venus d’ailleurs et utilisé tout ce que permet le cinéma pour pénétrer des destins si simples et courageux.

Ce sont des gens comme nous, aussi éloignés soyons-nous de leur barbarie. Tomber dans une caricature du mal, c’est inciter à le voir partout. Eux aussi sont fragiles.

Quand leur chef local se cache pour fumer, il reste humain. De même quand il ordonne à cette femme de se voiler alors qu’il est en train d’admirer sa chevelure. Cela me permet aussi de relativiser la notion de « conviction ». On parle de l’islam, pas de la prise en otage de l’islam. On pourrait dater cela du 11 Septembre mais on voit comment les choses évoluent. Il y a ceux qui doutent, ceux qui ne doutent pas, ceux utilisés pour porter les armes.

Et puis il y a le personnage de l’imam de Tombouctou, un homme qui, dans la réalité, n’a cessé de se battre contre les djihadistes, de leur demander : « Où est Dieu dans ce que vous faites ? »

C’est très important dans un pays où domine un islam majoritaire à 99,99 % et qui ne veut pas de ça. Par ailleurs, j’évoque aussi, de manière un peu furtive, que ces gens ne sont pas qu’un ramassis de fous ­furieux.

Ainsi du djihadiste français qui a du mal à tenir les propos qu’on veut lui imposer devant une caméra pour une vidéo de propagande. Afin de le rendre plus convaincant, le chef djihadiste lui dit : « Tu ne te bats pas contre les Occidentaux, dis que tu te bats contre l’injustice. »Ces phénomènes ne viennent pas de rien et il faut l’entendre. Ils n’en ont pas moins des conséquences terribles et lorsqu’on veut évoquer des choses terribles, il faut montrer ce qu’est une « normalité ».

C’est la vie de cette famille touareg. Le père Kidane est un homme qui aime les siens. Il ne possède que quelques vaches. Ce qu’il a le comble. Il peut même trouver une place pour la mort en lui. La souffrance, c’est pour lui l’image du chagrin de sa fille devenant orpheline. On va alors à l’essentiel.

Tout n’était pas écrit. D’abord le tournage a été une aventure. Nous avons multiplié les déplacements. Cela signifiait parfois deux jours de 4×4 transportant 120 personnes.

Là aussi la simplification nous a aidés.Nous vivions comme tout le monde avec nos matelas et nos nattes dans des maisonnettes louées. Ce que nous faisions avait donc du sens pour chacun, les équipes, les acteurs professionnels ou non. Ce qui avait été écrit a pris d’autres formes.

Les acteurs se sont inspirés de leurs propres vies. Ils ont trouvé les mots les plus justes dans les différentes langues parlées dans le film, le bambara, la langue des Touareg, le français, l’anglais. Les mots doivent toujours s’inscrire dans une culture donnée.Cinématographiquement, également, c’était important que la parole tourne.

Ce que l’on veut transmettre passe par la circulation des choses. Je ne voulais pas créer un flot émotionnel qui emporte tout.Je pense à ce que Frantz Fanon écrivait de ces vérités « qui n’ont pas besoin d’être jetées à la face des hommes ». Comme lui je me méfie « des enthousiasmes » et partage ce désir de créer une « auto-combustion », un feu que l’on fait naître chez le spectateur pour qu’il reparte avec quelque chose en lui.

Entretien réalisé par 
Dominique Widemann
Mercredi, 10 Décembre, 2014
L'Humanité


TIMBUKTU - Bande-annonce [VOST|HD] [NoPopCorn] par NoPopCorn

03/12/2014

LES HERITIERS, L'ECOLE DE LA VIE !

les-heritiers-affiche.jpgComment une classe de seconde en échec va gagner un concours et s’éveiller au savoir grâce à une prof hors du commun, incarnée par Ariane Ascaride.

Vous allez l'adorer. C'est la success story des sorties de la semaine. Une histoire vraie, bienveillante, qui parle de la jeunesse d'aujourd'hui et qui a inspiré un film formidable, Les Héritiers, de Marie-Castille Mention-Schaar.

En 2009, au lycée Léon-Blum de Créteil, une professeure d'histoire incroyable (Anne Anglès, dont le rôle est tenu par Ariane Ascaride), désespérée par sa classe de seconde, lui propose de participer au Concours national de la Résistance et de la Déportation. Le sujet est difficile : "Les enfants et les adolescents juifs dans le système concentrationnaire nazi".

Il s'agit d'un travail basé sur le volontariat. Les élèves, de nombreuses nationalités et confessions, sont indisciplinés, insolents, ignorants. Les conflits dans l'établissement à propos du voile, de la laïcité, de la religion… sont récurrents et mettent l'administration à l'épreuve. Alors imaginez, parler des juifs, mais aussi des Tziganes, des homosexuels, de l'histoire avec un grand H, quand elle est devenue pour les élèves "presque de l'archéologie"? Le défi était immense. Contre toute attente, ils vont le relever.

Ahmed Dramé, ex-élève, devenu acteur et scénariste

On aurait pu ne jamais entendre parler de cette aventure sans Ahmed Dramé, ex-élève, devenu acteur, coscénariste du film qui vient d'être nommé dans la catégorie Révélation aux prochains César ; sans la réalisatrice qui a eu la bonne idée de répondre au mail que le jeune homme lui avait adressé. "Il avait trouvé mon adresse sur Internet. Il était encore au lycée et voulait entrer dans le milieu du cinéma, raconte Marie-Castille Mention-Schaar. Il m'a intriguée et m'a envoyé 60 pages qui racontaient un concours de slam, avec un prof masculin, des bagarres, des fantasmes de films américains sur la banlieue et le lycée Louis-le-Grand. À l'époque, je ne comprenais pas où il voulait en venir ni l'intérêt du sujet. Mais il n'avait que 18 ans. J'ai eu envie de discuter avec lui."

De son côté, Ahmed Dramé court les castings, prend des rendez-vous, contacte des sociétés de production, ne reçoit que des réponses négatives. "Je me disais pourquoi pas moi. J'ai commencé à lire des scripts et c'est comme ça que j'ai eu l'idée d'écrire. Avant, je ne savais même pas qu'on tournait les films avec des scénarios!" Inutile de préciser que la rencontre Marie-Castille-Ahmed fait tilt. "Quand il m'a raconté son année de seconde, je l'ai adorée. J'ai tout de suite eu envie d'en faire un film. On a tous croisé des profs qui nous ont donné confiance en nous, qui ont changé quelque chose à notre vie."

Quant au thème du concours? "Il a permis la rencontre avec Léon Zyguel, déporté à Auschwitz- Birkenau à l'âge de 15 ans, qui aurait dû mourir en arrivant s'il n'avait pas changé de file pour suivre son père et son frère. Ahmed m'a dit qu'il n'avait jamais entendu le silence dans sa classe avant le jour où Léon est venu. Il a accepté de témoigner dans le film. Personne ne mouftait. On a fait une seule prise." Entendre dans sa bouche le Serment de Buchenwald reste un moment poignant.

Anne Anglès dit "vous" à ses élèves

Ahmed s'en souvient comme si c'était hier. Il a aussi retrouvé sa professeure avec bonheur en ces temps d'interviews. "On était quand même la pire des secondes, on est devenus super-motivés. Je suis le premier enfant de ma famille à avoir son baccalauréat*. C'est un peu grâce à Anne. Elle déteste qu'on lui dise qu'elle est une prof particulière, taquine-t-il. À l'époque, je la trouvais dure. Aujourd'hui, quand je nous vois là en face de vous, je me dis qu'elle a eu raison." Pédagogue, Anne Anglès dit "vous" à ses élèves et reste tout le temps debout parce que "si on s'assied, c'est vraiment mal parti". "Nous sommes payés pour transmettre un certain nombre de connaissances et beaucoup de mes collègues cherchent des solutions et les trouvent."

Pour la réalisatrice, Anne Anglès est quelqu'un qui ne baisse jamais les bras. "Elle a une approche pédagogique qui consiste à affronter la discussion quand beaucoup de professeurs choisissent l'autocensure pour éviter le débat." Ainsi, la scène où la prof explique que Mahomet figure avec d'autres personnages, en enfer sur une mosaïque de Torcello, a provoqué un tollé, à l'écran comme dans la réalité. Ariane Ascaride, formidable incarnation de cette enseignante guerrière, a pu mesurer à quel point il est difficile de se retrouver seule face à une classe d'ados. "C'est un sacré boulot pour lequel il faut de la force. Pour moi, Les Héritiers, c'est beaucoup plus qu'un film. Je suis très fière d'y avoir participé. On ne se donne pas assez le temps de regarder et d'écouter les jeunes."

Un avis que partage Marie-Castille Mention-Schaar : "Il y a un grand manque de confiance en soi chez cette jeunesse à laquelle on n'arrête pas de dire que tout va mal. On leur parle de chômage, de retraite à longueur de journée… L'adolescence est une période de questionnement nécessaire à la construction de la personnalité. C'est important d'avoir en face de soi des adultes solides qui, comme cette prof, défendent des valeurs. J'avais surtout envie de faire passer un message positif, dire qu'il n'y a pas de fatalité." La preuve, ces "Héritiers", nous aussi on les aime.

* Sur les 27 élèves de cette classe de seconde 20 ont eu le bac avec mention.

Danielle Attali - Le Journal du Dimanche


Les Héritiers : "Au départ, je détestais ma prof" par lejdd

20:36 Publié dans ACTUSe-Vidéos, Cinéma, Histoire, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : les héritiers | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

29/11/2014

MOSAIK RADIO : MUSIQUES ET INFORMATIONS

Le groupe E-Mosaïque se renforce avec une nouvelle radio présente sur tous ses blogs et qui diffusera essentiellement de la musique d'ambiance très diversifiée, des flashs d'informations, des magazines d'actualités .

L'objectif pour son maintien impératif est d'obtenir une audience cumulée d'au moins 300 heures par période de 24h. Nous comptons bien sûr sur vous pour atteindre cet objectif. L'idée est également que chacun d'entre vous devienne programmateur de cette nouvelle radio en proposant chanteurs et chansons.

Mosaik Radio, la radio de toutes les musiques, de toutes les actualités !

09/11/2014

Déclaration d’amour à des quartiers méprisés

PAPA+WAS+NOT+A+ROLLING+STONE+PHOTO3.JPG

Papa was not 
a Rolling Stone, de Sylvie Ohayon. France. 1 h 39.

Dans son film, Papa was not a Rolling Stone, tiré de son roman, Sylvie Ohayon 
fait revivre La Courneuve à l’époque du brassage social dans les années 1980.

Il y a plusieurs manières de résumer Papa was not a Rolling Stone. L’une consiste à y voir un film sur une famille biologique, avec un père aux abonnés absents, plus préoccupé par sa propre copine que par son épouse, qu’il songe à quitter au profit de l’autre.

Tout beau, tout nouveau, surtout quand on peut jouer à bon marché le coq de basse-cour. La mère, elle, est victime de la futilité de l’existence. Elle a consommé trop de chansons sirupeuses lui promettant un avenir radieux pour que cela ne laisse pas de séquelles.

Pourtant, c’est elle qui, vers la fin, sera capable du geste rédempteur et sacrificiel destiné à assurer le bonheur de sa progéniture.

Aure Atika est très convaincante dans ce rôle à contre-emploi. On peut aussi voir dans le film l’histoire de deux copines liées par une amitié profonde au-delà des brouilles quotidiennes. Le rôle de la première, Stéphanie, est tenu par Doria Achour.

C’est une belle plante passionnée de danse à qui tout réussit, même dotée de la mère dont on vient de brosser le portrait.

Stéphanie s’avère d’ailleurs capable d’obtenir la mention très bien au bac qui lui vaut l’accès en prépa à Louis-le-Grand, autrement dit un sésame pour l’avenir. Fatima, rôle tenu par la formidable Soumayé 
Bocoum, est le complément indispensable du duo, jouant à merveille son rôle de godiche : c’est la bonne copine, celle qui, faute d’avoir rencontré le prince Charles, cède aux garçons en quête de bonne fortune.

L’opposition de Stéphanie et Fatima, que tout sépare, est à la source de l’humour du film et de sa tendresse. Enfin, on peut voir ce premier long métrage comme un documentaire reconstitué, une réminiscence de ce que fut la cité des 4 000 à La Courneuve dans les années 1980, soit en un temps, et avec les modes musicales et vestimentaires qui vont avec, où l’on s’appréciait entre voisins, quelle que soit son origine ethnique. C’est sans doute sous cet aspect que le portrait est le moins convenu, même si l’on ne dénigre pas les valeurs comiques que procurent les autres dimensions.

La vie de la cité, comme elle n’est jamais montrée

À travers le personnage de 
Stéphanie, en effet, c’est sa propre histoire que raconte la réalisatrice, avec l’aide de la coscénariste Sylvie Verheyde et du producteur Michaël Gentile. 
Sylvie Ohayon a grandi à La Courneuve et a voulu raconter la vie de la cité « comme elle n’est jamais montrée à la télévision ».

On sent qu’elle parle en connaissance de cause et que son film relève du portait intime nourri de toute la complexité du réel. - See more at: http://www.humanite.fr/declaration-damour-des-quartiers-meprises-554011#sthash.vrVTxzpQ.dpuf

On sent qu’elle parle en connaissance de cause et que son film relève du portait intime nourri de toute la complexité du réél.

On sent qu’elle parle en connaissance de cause et que son film relève du portait intime nourri de toute la complexité du réel. - See more at: http://www.humanite.fr/declaration-damour-des-quartiers-meprises-554011#sthash.vrVTxzpQ.dpuf

Jean Roy L'Humanité : http://www.humanite.fr/declaration-damour-des-quartiers-meprises-554011