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03/11/2012

Rythmes scolaires : vrai débat ou écran de fumée  ?

education, enseignement, luc chatel, enseignants, vincent peillon, rythmes scolaires, jean-yves rochex, célestin freinet,Présenté comme une priorité par Vincent Peillon, l’aménagement du « temps ­scolaire » est devenu le centre de gravité de toute réflexion sur l’école. Un débat survalorisé qui, pour beaucoup de spécialistes, ne répondra pas aux causes profondes des difficultés des élèves.

Posez-lui la question et Maud, enseignante dans une école de Stains, en Seine-Saint-Denis, vous répondra du tac au tac. « La réforme des rythmes scolaires ? Franchement, je ne comprends pas qu’on s’acharne là-dessus. Pour moi, ce n’est vraiment pas la priorité. » Opinion iconoclaste ? Pas du tout. À ses côtés, Dominique, prof dans ce même établissement de quartier populaire, pense exactement la même chose. Et assure même ne pas ressentir « de difficultés particulières chez les élèves pour tenir les six heures de classe ». L’air lassé, la jeune femme finit par ajouter : « La priorité, si l’on veut lutter contre l’échec scolaire, ce devrait être surtout de s’assurer qu’il y ait déjà bien un enseignant dans chaque classe, ce qui est loin d’être le cas dans notre département… »

Étonnant. Alors que le débat sur le « temps scolaire » est devenu depuis deux ans le centre de gravité de toute réflexion sur l’école, deux profs interrogées au hasard peinent à en voir la pertinence. Elles ne sont pas les seules. Et leur réaction, largement partagée, illustre bien les sérieux doutes qui montent autour de cette réforme annoncée. Certes, elle passionne la plupart des médias, bien des parents et le secteur touristique. Mais elle inquiète aussi pas mal de spécialistes du monde éducatif, agacés de voir la question plus générale de l’échec scolaire réduite à cette simple dimension du temps scolaire. « On a l’impression que c’est un écran de fumée pour ne pas aborder des questions plus sensibles et fondamentales », résume encore Dominique.

Une course contre la montre

education, enseignement, luc chatel, enseignants, vincent peillon, rythmes scolaires, jean-yves rochex, célestin freinet,Évidemment, les chiffres répétés à longueur de rapports ne peuvent nous laisser indifférents. Comparée à ses voisins européens, la France possède, en primaire, le plus petit nombre de jours de classe par an (140) et l’un des plus grands nombres d’heures de cours (817). Moins que l’Espagne (875) ou l’Italie (891), mais bien plus que l’Angleterre (798), l’Allemagne (564) ou encore la Finlande (569), présentée souvent comme un modèle en matière d’éducation. Nos journées d’école sont donc peu nombreuses et extrêmement denses. Une caractéristique aggravée par l’instauration de la semaine de quatre jours, en 2008, et de trente ­minutes quotidiennes d’aide personnalisée, souvent glissées à l’heure du repas ou en fin d’après-midi. Résultat ? Une course contre la montre qui nuit en priorité aux élèves en difficulté.

« C’est sûr, il y a nécessité à desserrer le rythme de la semaine, convient Cédric Turco, secrétaire général adjoint du Snuipp-FSU dans le Var. Mais ce n’est pas ça, non plus, qui va permettre à tous les enfants de réussir. Les effectifs de nos maternelles tournent autour de trente élèves, la scolarisation des enfants de moins de trois ans a fait un bond de vingt ans en arrière, les réseaux d’aide aux enfants en difficulté ont été décimés, 182 collègues ne sont pas remplacés chaque jour dans le département… C’est ça, surtout, qui freine la réussite scolaire et qui nécessiterait de gros moyens humains. Or, pour l’instant, on ne les voit pas venir. »

C’est bien le problème. Depuis des mois, Vincent Peillon, dénonçant la réforme de ses prédécesseurs qui « maltraite » les enfants, a choisi de faire des rythmes scolaires l’un des axes principaux de sa refondation. Laissant penser que si les écoliers français s’ennuient et se désintéressent, c’est qu’ils croulent sous des heures de classe inadaptées à leurs rythmes biologiques. Alléger les journées et s’assurer du « bien-être physique » de l’enfant, ce serait donc la bonne solution pour « lutter contre les inégalités et l’échec scolaire ». Seulement voilà. Jusqu’ici, rien ne vient étayer cette fausse évidence. Aucune étude ne démontre l’influence directe des rythmes scolaires sur les résultats des élèves. Les travaux de Jean-Yves Rochex, professeur en sciences de l’éducation à Paris-VIII, ­incitent même à penser le contraire. Les enfants qui réussissent le mieux viennent non seulement de milieux socioculturels favorisés mais ont surtout des emplois du temps bien chargés avec de nombreuses activités artistiques et culturelles en dehors – et en plus – de l’école. En revanche, les enfants qui échouent sont, en général, ceux qui en ont le moins. « Diminuer les exigences scolaires est une impasse », assure le chercheur.

"cours le matin, sports l’après-midi "

education, enseignement, luc chatel, enseignants, vincent peillon, rythmes scolaires, jean-yves rochex, célestin freinet,Le bilan de l’expérimentation « cours le matin, sports l’après-midi » vient le confirmer. Lancée à la rentrée 2010 par Luc Chatel, cette organisation devait permettre « la réussite des élèves ainsi que l’amélioration de leur bien-être et de leur santé ». 7 000 élèves, dans 120 collèges et lycées volontaires, ont bénéficié chaque semaine de deux heures et demie de pratique sportive et de deux heures de pratique culturelle supplémentaires l’après-midi.

Résultat après un an ? Mitigé. Les élèves ont dit se sentir « mieux dans leur corps » et les parents ont affirmé que « la santé de leur enfant est restée stable ou s’est parfois améliorée ». En revanche, aucune « influence notable » sur la ponctualité, les absences et les sanctions. Ni sur les « capacités de concentration, d’attention, de mémorisation et d’effort ». Quant à la réussite scolaire, la moitié des parents d’élèves ont constaté que les résultats de leur enfant étaient « identiques à ceux de l’an dernier ». Autre exemple : ­l’Allemagne. Présentés comme « modèle », les après-midi sportifs et culturels sont rendus responsables du mauvais classement du pays aux évaluations internationales. Depuis 2004, plus de 4 milliards d’euros ont été investis pour permettre à un tiers des écoles primaires et à un quart des collèges d’offrir une journée complète de classe…

Pour beaucoup, il est ainsi vain et dangereux de chercher à réduire le débat aux caractéristiques individuelles, voire biologiques, des élèves. « Une telle problématique ne se donne guère les moyens de penser le temps scolaire en termes d’activités susceptibles non de s’adapter à ce que sont les enfants – ou supposés être –, mais de leur permettre de transformer ce qu’ils sont », écrit le chercheur. S’il s’agit de lutter contre la lassitude et l’échec scolaire, le vrai défi n’est pas de diminuer la quantité de cours offerts mais d’augmenter leur pertinence pédagogique pour accrocher tous les élèves.

À sa manière, Stéphanie, professeure à Paris, fait le même constat. « On le sait bien, en cours, la fatigue de l’enfant dépend beaucoup de ce qu’il a fait à la maison – s’il s’est couché tôt, s’il a regardé la télé avant de venir – mais aussi de sa motivation, de l’intérêt qu’il va trouver dans ce qu’on cherche à lui apprendre. Moi, ça m’est arrivé de faire des séances de français où on ne voyait pas le temps passer, même si certains dans la classe étaient sûrement crevés avant de venir ! »

Du coup, les préconisations des chronobiologistes, qui situent la « disponibilité optimale » des enfants du primaire entre 9 heures et 11 heures et entre 14 h 30 et 16 heures, apparaissent presque secondaires. Dès 1964, le célèbre pédagogue Célestin Freinet s’insurgeait contre le vrai-faux débat sur la fatigue à l’école. « Il est admis officiellement que le jeune enfant ne peut pas travailler plus de quarante minutes, et qu’il faut ensuite, dans toutes les classes, dix minutes de récréation. Or nous constatons expérimentalement que cette règle scolastique est fausse : lorsqu’il est occupé à un travail vivant qui répond à ses besoins, l’enfant ne se fatigue absolument pas et il peut s’y appliquer pendant deux ou trois heures. » Sans aller jusque-là, Cédric Turco, notre enseignant du Var, partage cette nécessité de repenser les contenus pédagogiques. « Le problème, c’est que ce sujet crucial est caché par celui des rythmes et par les conditions actuelles d’enseignement qui rendent difficile toute réflexion. »

Nécessité de repenser les contenus pédagogiques

Et les mois qui viennent, sur fond d’austérité budgétaire, s’annoncent rudes, tant le débat sur les rythmes se révèle à double détente. Mi-octobre, le gouvernement a fait ses propositions : retour à une semaine de quatre jours et demi, avec école le mercredi matin. Les enseignants assureraient trente minutes de devoirs en classe entre 15 h 30 et 16 heures, tandis que la dernière demi-heure d’activités périscolaires serait à la charge des communes. La proposition ne change pas grand-chose pour les élèves et a déçu les enseignants, sommés de travailler une matinée de plus sans aucune contrepartie. « Où sont passés l’ambitieuse réforme des rythmes scolaires et ses objectifs de réussite pour tous ? » s’interroge le Snuipp-FSU, principal syndicat du primaire.

Pour l’instant, si la réforme est « ambitieuse », c’est surtout en matière de décentralisation. À travers cette refonte des rythmes, le gouvernement cherche à obtenir une implication plus grande des collectivités locales, sans rien préciser des financements qui pourraient rééquilibrer les inégalités territoriales. « Tout cela s’articule avec l’acte III de la décentralisation, alerte Marine Roussillon, animatrice du réseau école du PCF. On risque de se diriger vers un service public plus municipal que national. Avec toutes les conséquences que cela pourrait avoir en termes de politique scolaire et de creusement des inégalités. » Cette perspective, Cédric Turco la redoute. « Vous imaginez une école primaire dans une municipalité FN ? Le caractère national de l’éducation est l’une des choses que l’on a réussi à sauver sous la droite. Ce serait quand même paradoxal qu’un gouvernement de gauche se serve des rythmes scolaires pour s’y attaquer. »

Rythme. Le rythme veille-sommeil est le principal synchroniseur des rythmes biologiques et biopsychologiques des êtres humains dans la journée et d’une journée à l’autre. Lui-même synchronisé par l’alternance du jour et de la nuit, ce rythme circadien (d’une durée 
de vingt-quatre heures) est endogène, c’est-à-dire produit par notre horloge biologique. En revanche, les chronobiologistes n’ont découvert, chez l’enfant, aucun rythme biologique ou biopsychologique 
dont la période soit 
d’une semaine ou 
d’une année. De quoi relativiser le débat sur 
la semaine de 4,5 jours...

Laurent Mouloud, l'Humanité

16/10/2012

Accès aux soins, enquête de l’UFC-Que Choisir

cartesmedecins.jpgA la veille de la clôture des négociations entre l’Assurance maladie, les médecins et les complémentaires sur les dépassements d’honoraires (auxquelles les usagers n’ont pas été conviés) et de la discussion au Parlement du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), l’UFC-Que Choisir rend publiques ce jour l’alarmante carte de l’offre médicale en France et ses 3 propositions concrètes pour garantir l’égal accès de tous aux soins.

Souvent abordés séparément, l’accès géographique aux soins et les dépassements d’honoraires (qui ont doublé en 20 ans) sont pourtant étroitement liés, et viennent conjointement affaiblir l’égalité des Français devant le système de santé. A travers l’étude exhaustive de la localisation des médecins et des tarifs pratiqués pour 4 spécialités (généralistes, ophtalmologistes, gynécologues et pédiatres), l’UFC-Que Choisir a mis au point une cartographie de l’offre médicale, commune par commune, en tenant compte de la capacité financière des usagers à se soigner. Et le résultat est sans appel : il existe une intolérable « fracture sanitaire ».

Des déserts médicaux bien installés, surtout pour les spécialistes : Si les déserts géographiques ne concernent qu’à la marge les médecins généralistes (5 % de la population), tel n’est pas le cas pour les spécialistes puisque pour les pédiatres, les gynécos ou les ophtalmos, c’est respectivement 19, 14 et 13 % de la population qui se trouve dans des déserts médicaux .

Accès aux spécialistes, la triple peine pour les moins aisés : Au-delà des déserts géographiques, si l’on ne tient compte que des médecins qui ne pratiquent pas de dépassements d’honoraires, la pénurie de médecins se démultiplie. C’est ainsi que le pourcentage de la population vivant dans un désert médical gynécologique passe de 14 à 54 % si l’on ne peut financièrement accéder qu’à un gynécologue aux tarifs de la sécurité sociale (pour les ophtalmos 13 à 45 %, les pédiatres 19 à 28 %). De même, s’agissant du délai d’attente pour un rendez-vous chez l’ophtalmo, si dans un cas sur deux on l’obtient en moins de 79 jours en acceptant les dépassements, on passe à 131 jours au tarif de la Sécurité sociale, 1 mois et demi de plus !

santé,que choisir,médecins,cartesL’exclusion sanitaire n’épargne aucune zone : Si la désertification médicale touche majoritairement les zones rurales, l’exclusion sanitaire liée à la capacité financière des usagers ignore, elle, la segmentation ville/campagne. C’est ainsi, par exemple, que les habitants de Paris, Saint-Etienne, Le Mans ou Aix-en-Provence sont bel et bien dans des zones d’accès difficile s’agissant des ophtalmos ne pratiquant pas de dépassement d’honoraires.

La présence des médecins, déjà vacillante, n’est donc pas une garantie d’accès : les dépassements d’honoraires pratiqués par une partie significative d’entre eux excluent les usagers les moins aisés. L’argument fallacieux des médecins tendant à justifier la généralisation des dépassements par la stagnation de leur rémunération ne résiste pas à l’analyse : leurs revenus, hors dépassement, ont augmenté de moitié (en plus de l’inflation) depuis 1980 !

Aux grands maux, les grands remèdes. Face à l’échec patent des politiques incitatives s’agissant de l’accès aux soins, et dans l’attente d’une remise à plat de la rémunération des actes médicaux, l’UFC-Que Choisir :

Invite les consommateurs à examiner la situation de l’offre médicale dans leur commune et à interpeller directement leurs parlementaires ;

Demande en urgence aux pouvoir publics, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale : un conventionnement sélectif des médecins (en limitant les installations de médecins dans les zones sur-dotées, ce qui permettra de combler progressivement les zones sous-dotées), une réduction des aides publiques aux médecins installés en zone sur-dotée et la disparition progressive des dépassements d’honoraires (avec une phase transitoire plafonnant les dépassements d’honoraires à 40 % du tarif de la sécurité sociale, ce qui constitue la prise en charge médiane par les contrats de complémentaire santé).

Enquête de Que Choisir

18:38 Publié dans Actualités, Connaissances, Société | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : santé, que choisir, médecins, cartes | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

07/10/2012

En Allemagne, l’espérance de vie des plus pauvres a reculé d’au moins deux ans depuis 2001

allemagne.jpgL’espérance de vie des plus pauvres – ceux qui ne disposent que des trois-quarts du revenu moyen – recule en Allemagne. Pour les personnes à bas revenus, elle est tombée de 77,5 ans en 2001 à 75,5 ans en 2011 selon les chiffres officiels. Dans les Lander de l’Est du pays c’est encore pire : l’espérance de vie est passée de 77,9 ans à 74,1 ans.

Ces chiffres ont été fournis au député Matthias Birkwald (Die Linke) en réponse à une question écrite, interpellation qui oblige le gouvernement à répondre à en fournissant toutes les données officielles.
Matthias Birkwald est un spécialiste des retraites et son interpellation éclaire d’un jour nouveau la réforme intervenue dans le système allemand de retraites. Le parlement a en effet adopté en 2007 – le gouvernement de l’époque rassemblait sociaux-démocrates du Spd et conservateurs de la Cdu – un report graduel de l’âge de la retraite à 67 ans justifié (comme en France) par l’allongement de l’espérance de vie...

Le pays est souvent montré en exemple pour son taux d’emploi des plus de 60 ans. Dans les faits, montrent les chiffres livrés hier, leur situation les expose souvent à la pauvreté.
En mars 2011, seulement 26,4 % des 60-64 ans occupaient un emploi “normal”, soumis à cotisations sociales. Et moins de 19 % de ces actifs seniors avaient un travail à temps plein.

allemagne,espérance de vie,diminution,pauvresQu’en sera-t-il demain ? Il n’y a pas de salaire minimum garanti en Allemagne et 7,6 millions de personnes ne disposent que d’un “emploi atypique”. Environ 5 millions des quelques 30 millions de travailleurs allemands sont à temps partiel.
En 2009, 2,5 millions de travailleurs – dont 600 000 retraités – étaient en contrat “mini job” payé environ 400 euros (sans cotisations patronales, sans assurance-maladie, sans droits à la retraite...).
Autant de formes de travail qui font (et feront) des retraités pauvres, premières victimes de ce recul de l’espérance de vie.

Article publié dans Viva

05/09/2012

QUEBEC : LES LIBERAUX BATTUS !

étudiants, privatisation, québec, amir khadir, jean charrest, Pauline MaroisLes indépendantistes et les libéraux sont presque à égalité en nombre de voix, obtenant entre 31% et 32% des suffrages.

Mais, en raison du système uninominal majoritaire à un tour, le PQ obtient 54 sièges, le Parti libéral du Premier ministre sortant Jean Charest en a 50, et la Coalition Avenir Québec (centre droit) de François Legault 19.

Pauline Marois (née à Québec le 29 mars 1949 ) du PQ devient nouvelle premier ministre mais avec une majorité relative.

Les deux sièges restants vont aux animateurs d'un petit parti souverainiste de gauche, Québec solidaire.

étudiants, privatisation, québec, amir khadir, jean charrest, Pauline MaroisAmir Khadir  candidat du parti Québec solidaire, coalition de la gauche progressiste au Québec, rassemblant notamment le Parti communiste Québécois nous parle de ses ambitions et des enjeux de l’élection.

Il a été brillament élu député dans sa circonscription de Mercier, qui comprend le Plateau Mont-Royal.

étudiants,privatisation,québec,amir khadir,jean charrest,pauline maroisLa deuxième députée de Québec solidaire est Mme Françoise David nouvelle élue de la circonscription montréalaise de Gouin, où elle était engagée dans une lutte serrée avec le député sortant péquiste Nicolas Girard.

Des élections se sont tenues ce 4 septembre au Québec, plus tôt que prévu. Les étudiants québécois ont-ils entrainé ce mouvement dans la population tel que Jean Charrest, le Premier ministre québécois, a été tenu d’organiser de nouvelles élections ?

Jean Charrest est pris en tenaille entre deux impératifs. L’un, responsable de la tenue un peu plus hâtive d’élections, est la commission d’enquête sur la corruption dans l’administration des contrats publics, attendue depuis deux ans et demi, et que nous avons poussée. Ses travaux ont commencé en mai, et l’essentiel des révélations doivent se produire à partir de la mi-septembre. Ce que voulait faire le gouvernement Charrest, de l’avis de tous les observateurs, c’est déclencher des élections à la fin avril dernier. Le problème, c’est que le mouvement étudiant l’en a empêché.

 Le gouvernement était donc pris en tenailles entre ce mouvement étudiant, et les révélations plus compromettantes de la commission d’enquête à venir à partir de la mi-septembre. Ce qui fait que c’est le mouvement étudiant qui a refermé la fenêtre d’opportunité, la dernière dont disposait le gouvernement Charrest, en avril-mai, le repoussant à septembre.

Une question semble revenir au centre du débat : l’indépendance du Québec. Face à la dette du Canada, face à un gouvernement québécois qui s’est discrédité, les Québécois sont-ils en train de se saisir de leur conscience souverainiste ?

Certains, dans le corps souverainiste, aimeraient que ce genre d’automatisme ou de transfert politique s’opère. Malheureusement, pour nombre d’entre nous, ce n’est pas nécessairement de cette manière là que les gens abordent les élections. Je pense que pour l’instant, l’essentiel de l’élection tourne autour des questions d’intégrité, de transparence, de la bonne gestion des fonds publics.

D’autres enjeux comme la santé, l’éducation sont des soucis majeurs, permanents d’une élection à l’autre, surgissent avec force. La question de l’indépendance, bien qu’elle soit brandie par le gouvernement Charrest, n’est pas l’objet de l’élection, tout le monde en est conscient. C’est une des raisons pour laquelle la campagne de M. Charrest, qui veut se poser en défenseur de l’unité canadienne, ne fonctionne pas très bien.

C’est aussi une des raisons qui expliquent la chute constante des libéraux dans les sondages malgré le fait que M. Charrest brandit cette « menace », plusieurs fois par semaine, devant la population disant : si vous élisez le parti québécois, c’est une autre bataille référendaire qui s’engage sur la souveraineté.

Mais ce n’est pas comme ça que la population le perçoit. Bien qu’à mon avis, avec un gouvernement canadien qui adopte des orientations de plus en plus réactionnaires, en porte-à-faux avec les grands consensus sociaux au Québec, le terrain va devenir plus fertile pour les indépendantistes, c’est certain.

Le taux de chômage est de 7,8% au Québec. Charrest a sorti un plan Grand Nord qui comporte une privatisation des biens publics. Les droits de scolarité devaient être augmentés. A votre avis, la population sent-elle une contradiction entre la politique menée et la situation dans laquelle elle est ?

Jusqu’à un certain point. Les problèmes évoqués se rejoignent. On assiste avec le gouvernement Charrest depuis de nombreuses années, à une volonté marquée de diminuer la charge de l’Etat au profit des entreprises, d’alléger la fiscalité des entreprises, mais surtout de faire surgir une fiscalité de plus en plus grande pour les investissements privés. On assiste ainsi, pour la santé, à une privatisation sournoise qui ne dit pas son nom. Le fait de vouloir endetter davantage les étudiants, c’est d’importants bénéfices et marchés captifs solvables pour les institutions prêteuses : il suffit de regarder la manne que cela représente aux Etats-Unis, la 2ème dans les crédits personnels après les hypothèques sur les maisons.

Mais comme le Québec est aussi une espèce de paradis pour les industries extractives, notamment en raison d’une vieille loi excessivement favorable aux investisseurs privés que tous les gouvernements ont échoué à réformer, depuis 150 ans, sauf entre 1874 et 1918 par un Premier ministre Honoré Mercier, très nationaliste. Le gouvernement a tablé majoritairement dessus pour ouvrir un boulevard aux investisseurs privés, pour exploiter le grand Nord à grand frais pour le contribuable puisque cela doit coûter au bas mot 25 millions d’investissements payés par le gouvernement du Québec, donc, par nos poches, pour ouvrir les routes, faire parvenir l’électricité dont ont besoin ses investisseurs pour opérer sur le territoire.

C’est vraiment l’archétype du paradis néolibéral à son mieux ! Autrement dit : un Etat complètement au diapason et au service des fonds publics, des investisseurs privés, pour générer de l’activité économique à profit privé. Jean Charrest est un artisan des politiques néolibérales des plus habiles, car il a réussi à les faire sans les gros sabots d’un Nicolas Sarkozy ou les politiques d’affrontement des autres dirigeants que l’on a connues ces 20 dernières années. C’est un type excessivement habile de ce point de vue.

étudiants,privatisation,québec,amir khadir,jean charrest,pauline maroisDans ce cadre, Québec Solidaire progresse mais son ascension est moins forte que ce à quoi on pouvait s’attendre.

Nous sommes victimes du mode de scrutin !

Malgré tout, quels thèmes, parmi ceux que vous défendez, recueillent le plus l’attention de l’opinion publique ?

D’abord, pour plus du quart des Québécois, leur premier ou deuxième choix est quand même Québec Solidaire. Les grands thèmes que nous avons réussis à mettre en avant, tout le monde en débat au Québec : des ressources naturelles, de la nécessité d’une meilleure réappropriation publique de nos ressources… On le doit grandement à Québec Solidaire. C’est un sujet que nous avons évoqué dès notre premier travail à l’Assemblée nationale en janvier 2009. Ce qui fait qu’aujourd’hui comme jamais au cours des 40 dernières années on parle de la nécessité du renvoi de la loi sur les mines et de se réapproprier les ressources naturelles.

Ensuite, les transports collectifs : l’investissement dans le transport électrique collectif, que nous avons mis en avant et que le PQ [NDLR : Parti Québécois, social démocrate et favori de l’élection] a récupéré sans y associer les budgets nécessaires. Comme c’est improvisé, ça ne tient pas la route dans leurs perspectives budgétaires globales.

Nous avons mis en avant la nécessité d’un régime de pension universel qui soit adéquat et réponde aux besoins de toutes les personnes en difficulté. Nous avons aussi mis en avant la nécessité au Québec d’un revenu minimum garanti. Ces deux sujets ne se sont toutefois pas imposés dans les débats actuels. Enfin, il y a la question de l’éducation où il y a un clivage entre nous qui proposons la gratuité de l’université et différents partis qui, à différents niveaux veulent les augmenter, ou les indexer. Bref, c’est pour ces raisons que le QS a l’appui des jeunes.

Entretien publié par l'Humanité