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29/04/2011

La fourmi et le rouleau compresseur japonais

rabe.jpgAvec son deuxième long métrage, l’Allemand Florian Gallenberger nous fait revivre le massacre de Nankin en 1937 à travers le portrait d’un héros. John Rabe, le juste de Nankin de Florian Gallenberger. Allemagne. 2 h 10.

Personne en France ne semble connaître l’histoire de John Rabe. Guère plus en Allemagne, tout au moins jusqu’en 2003, date à laquelle cet homme mort dans l’oubli en 1950 a fait l’objet d’un hommage national, amplifié par la sortie de ce film l’an dernier qui, à l’équivalent germanique de nos césars, a obtenu sept nominations débouchant sur quatre statuettes dont celle du meilleur film et celle du meilleur acteur pour Ulrich Tukur, l’admirable interprète de la Vie des autres. En revanche, en Chine, John Rabe serait, affirme le dossier de presse, l’Allemand le plus connu sur place avec Marx et Engels, ce qui, vu le culte porté aux deux autres, serait un sommet absolu. En tout cas, force est de constater que le corps de Rabe a été transféré avec les honneurs de Berlin à Nankin en 1997, que le New York Times l’a surnommé le « Schindler de la Chine » et que, d’après le réalisateur, lui-même a été étroitement surveillé et freiné dans ses initiatives tant les Chinois désiraient être les seuls à apporter leur vision de cette page de l’histoire. Un rappel des faits s’impose donc, tels que vus par le film.

Une véritable hagiographie

rabe1.jpgNé en 1882 à Hambourg, John Rabe arrive en Chine en 1908, travaille dans la filiale chinoise de Siemens de 1911 à 1938, dont il devient gérant de la société en 1931. Alors que la politique allemande favorise l’alliance avec ce Japon qui va envahir la Chine, Siemens Chine, en charge de la construction d’un générateur gigantesque et d’un barrage, est sur le point de passer sous la férule d’un nazi convaincu quand survient le bombardement de Nankin en décembre 1937. Rabe, à la veille de son éviction de la société et de son rappel à Berlin, est choisi par les diplomates étrangers pour prendre la direction de la zone de sécurité pour civils instaurée afin de protéger la population chinoise. Voici donc un homme qui, pour s’en tenir au tout début du film, va ouvrir les portes de Siemens à la population et l’inviter à se réfugier sous un vaste drapeau nazi afin que les Japonais ne la bombardent pas.

On l’aura compris, ce film est, bien au-delà de la biographie, une véritable hagiographie, ce qu’on peut admettre quand on sait que Rabe (prononcer à la française) a été crédité du salut d’un quart de millions de Chinois. D’où ce succès de l’œuvre, au demeurant explicable. La cause est noble et méritait d’être exhumée. Le budget est impressionnant et la distribution itou, qui réunit Ulrich Tukur (John Rabe), Daniel Brühl, le comédien de Good Bye, Lenin ! (docteur Georg Rosen, juif allemand ayant mené une carrière de diplomate qui va aider Rabe à établir la zone de sécurité), Steve Buscemi (le docteur américain à la tête de l’hôpital de Nankin), Anne Consigny (la directrice de l’université de jeunes filles) et bien d’autres. Les contributions techniques sont exemptes de reproche. De l’académisme à son meilleur, qui devrait largement émouvoir.

Jean Roy, l'Humanité

 


John Rabe, Le juste de Nankin

11:25 Publié dans Actualités, Cinéma, Connaissances, Planète | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinema, japon, chine, john rabe | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

04/03/2011

Gaz de schiste : un pompage radioactif ?

gaz-schiste-reer-L-1.pngLe New York Times a publié sur son site 30 000 pages de documents secrets portant sur les gaz non conventionnels. Ils révèlent 
les risques 
de radioactivité liés aux forages par fracturation hydraulique.

C’est la goutte d’eau radioactive qui fait déborder le gaz. Dans son édition datée du 26 février, le New York Times consacre tout un dossier à l’exploitation des gaz dits non conventionnels (GNC), lequel ajoute à la charge déjà vive portée contre le gaz de schiste. Outre les dangers sanitaires déjà connus, le quotidien américain révèle que les eaux usées issues de ces forages affichent des taux de radioactivité susceptibles de contaminer les eaux potables. Mieux – ou pire, c’est selon –, le quotidien met en ligne 30 000 pages de rapports secrets, collectés auprès de l’Agence de protection de l’environnement (EPA), des autorités régulatrices et de l’industrie gazière. Il en ressort que les nombreuses alertes lancées à ce sujet ont été maintenues sous silence. Sur la base d’une étude réalisée en 2009 et jamais rendue publique, « beaucoup de scientifiques de l’EPA ont averti que les déchets issus de ces forages sont une menace pour l’eau potable », note le quotidien, soulignant que l’agence n’a rien entrepris en conséquence.

Bref rappel. Les gaz de schiste sont piégés dans la roche à très grande profondeur (entre 1 500 et 3 000 mètres). Afin de les libérer, il faut la fracturer en y insufflant, à très haute pression, un mélange d’eau, de sable et de produits chimiques. C’est la technique dite de fracturation hydraulique, déjà décriée en ce qu’elle consomme une quantité faramineuse d’eau – entre 15 et 20 millions de litres par puits –, mixée à des produits connus pour être cancérigènes ou encore mutagènes.

 la pennsylvanie  particulièrement menacée

gaz.jpgLes documents du New York Times révèlent un nouveau danger : celui de la radioactivité, donc, qui contaminerait les eaux de forages quand ceux-ci traversent des couches d’uranium ou de radium. Des millions de litres, qui, une fois remontés à la surface, sont transférés dans des stations d’épuration, dont beaucoup s’avèrent, selon l’étude de 2009, techniquement incapables de nettoyer totalement les eaux de leur radioactivité.

 Et la boucle est bouclée : ces eaux sont rejetées dans les rivières, dont le débit, selon d’autres études, ne suffit pas à diluer totalement la radioactivité. « Les risques sont particulièrement sévères en Pennsylvanie », où le nombre de puits est passé de 36 000 en 2000 à 71 000 aujourd’hui, synthétise le NYT. « Le niveau de radioactivité des eaux usées s’est parfois révélé des centaines, voire des milliers de fois supérieur au seuil autorisé pour les eaux potables. (1) » Entre 2008 et 2009, les foreurs ont transporté au moins la moitié des déchets aux stations d’épuration publiques, « dont les opérateurs reconnaissent qu’ils sont nettement moins capables de nettoyer les polluants radioactifs que les autres substances toxiques ».

 Cela ne les a pas empêchés de les déverser dans la Monongahela River ou la Delaware River. La première alimente en eau potable un bassin de 800 000 habitants, dont ceux de Pittsburgh. La seconde approvisionne, dans l’est de l’État, quelque 15 millions d’habitants, dont ceux de Philadelphie.

L’air, aussi, est en danger

Le New York Times indique que la pollution atmosphérique 
due aux forages de gaz non conventionnels est une menace croissante. Ainsi, le Wyoming, en 2009, a-t-il échoué pour 
la première fois de son histoire à respecter des normes 
fédérales de qualité de l’air. En cause : des vapeurs contenant 
du benzène et du toluène, provenant d’environ 27 000 puits, 
pour la plupart forés au cours des cinq dernières années.

(1) Aucune norme n’existe concernant les eaux usées, précise le NYT.

Marie-Noëlle Bertrand pour l'Humanité

10:04 Publié dans Actualités, Connaissances, Planète | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gaz de shiste, danger, new york times | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

19/02/2011

DES CRANES SERVAIENT A BOIRE IL Y'A 15 000 ANS

crane.jpgDes hommes préhistoriques vivant en Angleterre utilisaient comme coupe à boire des crânes humains qu'ils avaient auparavant évidés et sculptés, ont révélé des scientifiques du Musée d'histoire naturelle de Londres.

Trois crânes taillés, vieux de 14 700 ans et appartenant à deux adultes et un enfant de trois ans, ont été découverts dans une grotte du sud-ouest de l'Angleterre, dans la région du Somerset, a annoncé l'institution britannique.

Les entailles sur les crânes montrent que les têtes étaient méticuleusement nettoyées peu de temps après la mort. Les crânes étaient ensuite modifiés en enlevant les os du visage et la base du crâne, explique Silvia Bello, spécialiste en fossiles humains au musée, dans un communiqué.

Ces crânes étaient scrupuleusement sculptés en forme de bol, un travail minutieux si on considère les outils dont disposaient les êtres humains à cette époque, ajoute-t-elle.

« On soupçonnait que les premiers hommes avaient une grande aptitude à manipuler des corps humains une fois qu'ils étaient morts, mais notre recherche révèle à quel point ils étaient aussi de grands anatomistes », estime-t-elle.

Objets de rituels

Compte tenu de l'attention portée à la préservation de la boîte crânienne, il est probable que ces bols étaient destinés à un rite symbolique et qu'ils n'avaient pas seulement une fonction utilitaire, avance Mme Bello.

Les chercheurs affirment disposer d'éléments prouvant que les hommes qui ont sculpté ces crânes mangeaient la moelle humaine, mais le cannibalisme ne semblait pas la principale raison de vider ces têtes.

Les scientifiques savaient déjà que des boîtes crâniennes avaient été utilisées comme récipients dans d'autres régions du monde, notamment chez les Vikings en Scandinavie. Toutefois, les exemplaires de ces crânes sont extrêmement rares, affirment les chercheurs dans leur étude parue dans la revue PLoS One.

Les crânes sculptés du Somerset sont les premiers trouvés en Grande-Bretagne et les plus vieux exemples jamais découverts dans le monde, selon les chercheurs.

Radio-Canada.ca

17:34 Publié dans Actualités, Connaissances, Planète | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : archéologie, crâne, boire | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

21/01/2011

LA LONGUE MARCHE DE ANDRE CHASSAIGNE

chasagne.jpgPour le communiste André Chassaigne, candidat à l'investiture du Front de gauche en 2012, ce n'est pas gagné! Le PCF soutient à peine ce drôle de "coco". Et la voix de l'Auvergne a du mal à passer face au très médiatique Jean Luc Mélenchon.

 André Chassaigne, 60 ans, admirateur de Karl Marx et d'Alexandre Vialatte, est un homme pugnace. Candidat à l'investiture du Front de gauche face à l'assourdissant Jean-Luc Mélenchon, le député communiste du Puy-de-Dôme bat la campagne, depuis l'été 2010, dans une semi-clandestinité savamment entretenue par la direction du Parti communiste, pour qui les urnes des scrutins présidentiels ne sont plus que funéraires, et par les médias nationaux, aveuglés par les têtes d'affiche de la politique spectacle.  

Moustache conquérante, verbe coloré, le grand timonier de Saint-Amant-Roche-Savine, 537 habitants, tourne donc dans les salles des fêtes quand le moindre éternuement de son rival du Parti de gauche tourne sur Youtube. "On suit toujours le sens de l'histoire quand on la pousse devant soi", écrivait Alexandre Vialatte. Alors, il pousse, le Dédé. Jusqu'à ce que les bras lui en tombent. 

Ah! Si la partie se jouait seulement entre les volcans d'Auvergne et ses chers monts du Forez... Ils ne sont pas nombreux, les villages de 500 âmes qui peuvent s'enorgueillir d'avoir abrité deux spécimens comme Alexandre Vialatte et André Chassaigne. Le premier se réfugia à Saint-Amant-Roche-Savine durant la guerre, où il rédigea en six semaines Le Fidèle Berger; le second y a entamé une carrière politique qui, ici, force le respect, et même l'admiration, droite et gauche confondues. 

André Chassaigne, monsieur 65 %

Il faut le voir, jour de marché, à Thiers, les joues rougies à force d'embrassades, trinquant au comptoir du Central avec son ami Chambriard, patron d'une grande coutellerie, pas franchement porté sur la révolution prolétarienne. "Ses scores aux dernières élections, c'est pas les voix du PC, c'est les voix à Dédé!" proclame le coutelier, en se resservant un coup de blanc. De fait, les résultats de André Chassaigne lors des scrutins des dix dernières années défient les lois de l'algèbre électorale et de l'inexorable déclin communiste.  

Elu député en 2002, réélu en 2007 avec plus de 65 % des suffrages, il s'est offert le luxe d'établir le record national des têtes de liste du Front de gauche, avec 14,2 % des voix au premier tour des régionales de 2010. Son secret? "Je vis mon communisme tel que je le conçois", explique ce fils d'ouvrier de Michelin, émancipé des dogmes du passé et des raideurs d'apparatchiks.  

L'ancien professeur de français, qui a préféré l'école normale des instituteurs à l'école du Parti, ne met jamais les pieds place du Colonel-Fabien. Il pousse même la singularité jusqu'à s'être découvert, sur le tard, un fort penchant pour l'écologie: après la lutte des classes, la fonte des glaces! En guerroyant, jour et nuit, à l'Assemblée nationale, André Chassaigne a donné son nom à un amendement anti-OGM. Un communiste vert, c'est nouveau, ça sort tout juste de terre. 

Le voici, maintenant, solidement calé dans le siège passager de sa 607 noire, au côté de Corinne, son attachée parlementaire, son chauffeur, sa boussole. La ferme de Marinette se cache au bout d'un chemin de terre, sur la route de Bertignat. La nuit va tomber, c'est l'heure de sortir la gnôle et les doléances. Au terme d'une vie de labeur, Marinette vient de passer le tablier à ses enfants. Elle touche royalement 540 euros de retraite. 

Jean Lasalle (MoDem) lui donne sa procuration

Denis, son fils, martèle la toile cirée en expliquant qu'il a renoncé à obtenir l'homologation européenne pour vendre ses fromages. Trop de paperasses à remplir quand on est encore à l'étable, pour soigner les vaches, après 10 heures du soir. Du coup, il n'a plus le droit de commercialiser sa fourme fermière à plus de 80 kilomètres de chez lui. Et le fromager de Vichy, à 87 kilomètres, se ravitaille désormais en Italie. "Il faut que je note ça, grommelle André Chassaigne. J'en parlerai à l'Assemblée." Et il en parlera. Il en parle toujours. C'est sa force.  

"A coup sûr, il figure parmi les dix députés les plus actifs de l'Hémicycle", souligne Jean Lassalle, son collègue et ami du Modem. Il fait le job, ''Dédé le rouge''. Il le fait si bien que c'est à lui que je donne procuration pour voter à ma place quand François Bayrou n'est pas disponible..." 

Au mois de juin prochain, la direction du PC soumettra au vote de ses militants le nom d'un candidat pour représenter le Front de gauche à l'élection présidentielle. André Chassaigne n'est pas dupe: Jean-Luc Mélenchon, "ce professionnel de la parole", a toutes les chances d'incarner l'homme providentiel. Au sein même de sa famille politique, l'élu du Puy-de-Dôme n'est soutenu que du bout des lèvres. Sa foi de laboureur peine à effacer les traces des humiliations subies par Robert Hue et Marie-George Buffet, en 2002 et en 2007, et son aura digne d'un Obama du Livradois-Forez ne brillera jamais jusqu'à Paris. 

Depuis cinq mois, il s'échine à faire passer le message d'une "candidature différente, porteuse de pluralité". Même dans L'Humanité, il a du mal à décrocher une interview. Les émissions politiques le snobent, les grands éditorialistes l'ignorent. Communiste et provincial, c'est beaucoup pour un seul homme dans la France de 2011. Il n'y a que les amuseurs pour s'intéresser à son cas. 

"Un plouc sympathique"

André Chassaigne, dont le pied-à-terre parisien est un lit de camp dans son bureau, a été invité chez Laurent Ruquier et chez Thierry Ardisson. A chaque fois, sa spontanéité, sa ferveur bonhomme ont crevé l'écran. Eric Zemmour lui a aimablement reproché de jouer au "plouc sympathique". Le plouc a diagnostiqué chez son interlocuteur "des crampes mentales", mettant les rieurs de son côté. 

Chaque jour, Jean Lassalle, qui a souffert, lui aussi, du dédain et de la condescendance, encourage son ami communiste à tenir bon. "La démarche de Chassaigne est pleine de panache, explique-t-il. S'il en bave, c'est qu'il y a un code pour exister sur la scène nationale. A Paris, la connaissance du terrain importe moins que la connaissance des règles du jeu..."  

Finalement, la vie de Dédé serait plus simple si les cadres de son parti couvaient sa candidature avec autant d'amour que ses opposants politiques. 

"Il pourrait faire un carton, façon Jacques Duclos"

Car Hervé Gaymard, l'ex-ministre UMP, lui aussi, est fan de André Chassaigne. Les deux hommes ont noué leur amitié sur les braises d'une même passion pour Alexandre Vialatte. "Dans notre société bling-bling, un type comme André Chassaigne, charpenté dans tous les sens du terme, représente quelque chose de vrai, souligne Hervé Gaymard. Je suis sûr que, dans l'opinion publique, il pourrait faire un carton, façon Jacques Duclos (NDLR: le candidat du PCF) en 1969." L'intéressé rosit sous le compliment. "C'est quelqu'un de bien, Hervé Gaymard. Je lui ai beaucoup téléphoné quand il a eu ses soucis d'appartement." 

Demain à Guéret, après-demain à Montluçon, au coeur de ces campagnes que les élites parisiennes finiront par moins connaître que la palmeraie de Marrakech, sa longue marche va reprendre. Au sortir de chaque réunion, André Chassaigne tentera de vendre quelques exemplaires de son livre, Pour une terre commune (éd. Arcane 17), grâce auquel il finance sa candidature autoproclamée. Il en a déjà écoulé 5 000. Un nouveau tirage est en cours.  

"A la librairie de Thiers, on ne le trouve plus. Il paraît que j'ai même battu Henri Potter!" relève-t-il avec une pointe de fierté. "Harry Potter...", corrige la fidèle Corinne, d'une voix faussement courroucée. Et c'est ainsi que Dédé est grand. 

ARTICLE PUBLIE DANS L'EXPRESS

19:26 Publié dans Actualités, Connaissances, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : andré chassaigne | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!