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19/05/2011

USA : Un système judiciaire accusatoire

usanaissance2.JPGContrairement à la France, l’instruction d’une affaire aux États-Unis est uniquement à charge.

À la différence de la France, le système judiciaire américain ne repose pas sur une procédure dite inquisitoire mais accusatoire. En France, le juge d’instruction mène une enquête à charge et à décharge avant, éventuellement, de renvoyer l’affaire devant la juridiction compétente. Aux États-Unis, le procureur rassemble des preuves uniquement à charge. C’est à l’accusé de prouver son innocence.

Concrètement, lorsqu’une personne est arrêtée sur le sol américain, elle doit être présentée dans les 24 heures à un juge. Lors de cette audience préliminaire, le juge lui notifie les charges qui pèsent sur elle et lui demande si elle plaide coupable ou non coupable. Le plaider coupable évite la tenue d’un procès et permet d’obtenir une réduction de peine à l’issue d’une transaction. Dans la seconde hypothèse, le juge doit simplement se prononcer sur la remise en liberté ou l’incarcération immédiate de l’inculpé, s’il estime qu’il existe un risque que celui-ci ne se présente pas à son procès. La libération est souvent accordée en contrepartie d’une caution financière. Elle peut être assortie d’une interdiction de sortie du territoire américain, voire d’une assignation à résidence.

Lors de cette audience, le juge peut également décider de convoquer un « grand jury » composé de 16 à 
23 citoyens. Après avoir écouté le procureur et la défense, ils indiquent s’il faut organiser un procès ou au contraire s’il convient de prononcer un non-lieu. En cas de procès, des « motions préliminaires » sont organisées entre les deux parties qui permettent d’écarter ou de prendre en compte des preuves, des témoins, des experts. Puis, un jury de 
12 personnes est sélectionné. Il délibère à l’unanimité. Le juge, lui, détermine la peine en cas de culpabilité. Cette procédure judiciaire, bien que plus rapide qu’en France, dure plusieurs mois.

Damien Roustel, l'Humanité

10:26 Publié dans Actualités, Planète | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : justice, usa, dsk | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

30/10/2008

UN CARNAGE SOCIAL AVOUE

juge1.jpgParmi les centaines de milliers d’emplois supprimés, certains font la UNE, d’autres pas, et pourtant les conséquences sont aussi dramatiques et aussi révélatrices dans tous les cas.

Se saisissant du point 213 du rapport Attali, le gouvernement, et son ministre de la justice ont décidé unilatéralement de supprimer, et sans aucune concertation comme d’habitude, la profession d’avoué, et ceci dès le 1er janvier 2010.

Cela concerne 235 cabinets, 440 officiers ministériels, et 1850 salariés dispersés dans toute la France.

Jusqu’à ce jour l’avoué est le seul représentant des parties devant la cour d’appel en matière civile et commerciale. Il ne plaide pas, mais effectue des consultations juridiques et apporte conseils. Son rôle charnière est unanimement reconnu. Les avoués ont en outre des tarifs réglementés par décret, contrairement aux honoraires libres des avocats.

Le remplacement unilatéral des avoués par des avocats va sensiblement limiter l’accès en appel aux plus riches, ou aux plus pauvres (qui bénéficient de l’aide juridictionnelle) et écarter massivement les classes dites moyennes. De plus il va fragiliser en supprimant des professionnels spécialisés la qualité de la justice rendue.

 

La brutalité de cette décision va avoir également des conséquences économiques et sociales importantes.

A l’occasion d’une rencontre de l’association nationale des personnels des avoués non syndiqués et des députés UMP, un d’entre eux a parlé de « carnage social ».

Il s’agit bien de cela. Le sort des 440 avoués est difficile (80 % refusent de devenir avocats avec une démarche clientèle qui n’est pas de leur domaine), mais celui des 1850 salariés « est un problème social très grave », de l’aveu d’un autre député UMP décidément bien lucides en comité restreint.

Ce personnel est à 90 % féminin (1), la moyenne d’âge est de 43 ans, 74 % sont endettés (20 % seulement ont une assurance perte d’emploi), le niveau d’étude est moyen (42 % des plus de 44 ans ont un niveau inférieur au bac), 96 % du personnel est en CDI, et 79 % travaille à temps complet.

Les propositions de reconversion sont aujourd’hui à peu près nulles (5 à 10 postes dans les greffes), et les cabinets d’avocats n’ont aucune intention d’intégrer ce personnel spécialisé d’après plusieurs sondages réalisés.

Sur ce dossier, comme sur bien d’autres, le pouvoir joue le rôle de l’autruche niant les conséquences de ces propres décisions. Il divise les acteurs de la justice et les usagers, et distille le mensonge comme argument.

En réponse aux questions des parlementaire Rachida Dati prétend  que « tout sera mis en œuvre pour que les collaborateurs trouvent la place dans cette nouvelle organisation » et que « l’accès au juge d ‘appel sera moins coûteux  pour les justiciables » ce qui est loin d’être prouvé.

A ce jour la discussion avec la chancellerie est au point mort et l’Elysée refuse tout rendez vous, le Président étant trop occupé par ailleurs…

 

(1) étude d’impact réalisée par IDDEM en juillet et septembre 2008

VOIR EGALEMENT VIDEO SUR UNE MANIFESTATION DES AVOUES

18:13 Publié dans Actualités | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : avoués, justice, salariés, emplois | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

22/07/2008

TRES CHER TAPIE

Tapie-Sarko.jpgJustice . Le CDR, structure publique, devra payer 285 millions à l’homme d’affaires. Ayrault et Bayrou dénoncent « la protection » accordée par Sarkozy.

Après treize ans de procédure, l’affaire Tapie rebondit encore. Le tribunal arbitral chargé de solder le litige opposant, dans le dossier Adidas, Bernard Tapie et le CDR (structure d’État chargée de gérer le passif du Crédit lyonnais), a condamné  ce dernier à verser 285 millions d’euros à l’ancien homme d’affaires.

Bernard Tapie, qui s’estimait floué d’une plus-value importante réalisée par la banque lors de la vente d’Adidas en 1993, bénéficie donc d’une indemnisation record, ponctionnée de surcroît sur les deniers publics.

Cette décision unique dans notre pays remet en cause le jugement de l’autorité suprême qu’est la Cour de cassation, ayant rendu un arrêt le 09/10/2006 qui donnait tord à Tapie. C’est substitué alors un tribunal d’exception composé de Pierre Mazeaud, Denis Bredin et Pierre Estage (dont chaque membre a reçu pour cette mission 300 000 €)  qui a rendu un jugement très favorable à Bernard Tapie, qui est secret et contraire à une décision de justice rendu clairement « au nom du peuple français ».

Pour Jean-Marc Ayrault cette affaire « ramène à des années de gabegie » alors qu’« aujourd’hui, l’argent public est rare », il s’agit « d’y voir clair compte tenu des conditions un peu obscures du versement ».

 Didier Migaud, président socialiste de la commission des finances,  a déclaré vouloir notamment comprendre pourquoi la justice de la République a été dessaisie au profit du tribunal arbitral, l’instance qui a décidé d’indemniser grassement Bernard Tapie avec de l’argent public.

Derrière cette largesse, PS et Modem voient la main de Sarkozy. « On a l’impression que, derrière, l’État est à la manoeuvre », a lâché Jean-Marc Ayrault sur France Info. Pour François Bayrou, « chaque fois que Nicolas Sarkozy a été soit au ministère des Finances, soit à la présidence de la République, comme par hasard des protections se sont déclenchées à l’endroit de Bernard Tapie. Cela envoie un message très simple : si vous êtes avec moi, vous êtes protégé et vous n’aurez qu’à vous féliciter des libéralités dont vous ferez l’objet par l’État ».

Le leader du Modem a souligné que 285 millions représentent la totalité de tous les salaires annuels des 15 000 postes d’enseignants qui vont être supprimés l’an prochain.

Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen alertent sur cette dérive affairiste, où argent, politique et judiciaire s’entremêlent dangereusement : « Une telle opération, concernant un ancien ministre, homme médiatique et politique, soutien affiché de l’actuel président de la République, est révélatrice des pratiques politiques actuelles. Comment ne pas faire le lien avec les tentatives de débauchage, vote par vote, à l’occasion du Congrès du Parlement, relatif à la révision constitutionnelle ? »

14:54 Publié dans Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tapie, sarkozy, justice | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

21/11/2007

Carte judiciaire, « une terrible occasion manquée »

Justice . Le président de l’Union syndicale des magistrats, Bruno Thouzellier, déplore l’absence de cohérence et de concertation qui a présidé à l’élaboration de la réforme Dati.

b9d631418b878aebb5e8ac4e11d6608b.jpgAprès un mois de présentation houleuse, région par région, Rachida Dati a achevé vendredi son « tour de France » de la réforme de la carte judiciaire. Au final, le projet de la garde des Sceaux prévoit la suppression d’environ 200 juridictions (23 tribunaux de grande instance et 180 tribunaux d’instance) d’ici à 2010. Et continue de susciter un vent de colère sans précédent chez les élus locaux et les personnels de justice. Président de l’USM, Bruno Thouzellier se dit « consterné » par la méthode au forceps de la ministre.

Quel est votre sentiment alors que Rachida Dati vient de terminer la présentation de sa réforme ?

Bruno Thouzellier. Les magistrats vivent cela douloureusement.

Apparemment, l’objectif de Rachida Dati était de passer en force, très vite, afin de montrer à l’opinion publique qu’elle était capable de faire quelque chose. Mais c’est nous qui travaillons tous les jours dans les juridictions et c’est nous qui, à l’avenir, serons tenus responsables des conséquences de cette réforme déplorable ! Le chantier de la carte judiciaire méritait beaucoup mieux que cette précipitation, cet aveuglement et cette volonté d’avancer à tout prix. C’est une terrible occasion manquée…

Quelles vont en être les conséquences ?

Bruno Thouzellier. Difficile de le dire. La disparition de 180 tribunaux d’instance et de 23 TGI va profondément perturber le fonctionnement de tous les autres tribunaux. Il faudra des redéploiements de personnels, de mobiliers, des redistributions de compétences… Annoncer toutes ces suppressions, c’était facile. Les mettre en oeuvre le sera beaucoup moins. Et ce, d’autant plus qu’aucun budget spécifique ne semble avoir été prévu dans les crédits de la justice, votés jeudi dernier par l’Assemblée. Cette réforme va pourtant coûter beaucoup d’argent. Ensuite, elle aura des conséquences importantes pour le justiciable, notamment avec la disparition des tribunaux d’instance qui règlent tous les petits contentieux de la vie quotidienne. Mais les effets seront encore plus lourds pour les magistrats qui, dans certains cas de tutelle, par exemple, vont devoir faire des dizaines et des dizaines de kilomètres pour aller rencontrer les usagers. Je ne parle pas, enfin, des conséquences symboliques, pour les élus et la population, qui voient disparaître un tribunal de grande instance, bien souvent installé dans leur ville depuis plus d’un siècle.

Le ministère a-t-il cherché à recueillir votre avis ?

0837664954ed984159694752a0f2e6de.jpgBruno Thouzellier. Absolument pas. Jamais la Chancellerie n’a souhaité nous recevoir pour nous expliquer le plan de réforme et entendre notre position sur cette question. La concertation a été nulle. Aussi bien avec nous qu’avec les élus, les avocats ou les fonctionnaires. Franchement, je ne crois pas qu’il y ait un autre pays en Europe où l’on oserait réformer avec aussi peu de professionnalisme, de précision et de concertation. Et ce n’est pas rendre service aux Français et à la justice que de procéder comme cela. Même les esprits les plus modérés s’échauffent devant ce blocage du gouvernement.

Une réforme de la carte judiciaire était-elle nécessaire ?

Bruno Thouzellier. Oui, bien sûr. Mais une chose est de vouloir rationaliser la carte en faisant disparaître certains tribunaux d’instance en sous-activité ; une autre est de faire de la suppression des tribunaux le postulat central de la réforme ! Depuis 1958, la population française a augmenté de 20 millions d’habitants. Et à certains endroits, c’est de création de tribunaux dont on a besoin. Au-delà, cette réforme aurait pu être l’occasion de redistribuer les compétences des TGI, de se pencher sérieusement sur leur répartition et de redécouper les ressorts des cours d’appel. Un exemple : celle d’Aix-en-Provence couvre une zone gigantesque qui va jusqu’à Nice. Tout le monde admet aujourd’hui qu’elle est totalement trombosée.

N’aurait-il pas été plus intelligent de réfléchir à la scinder en deux ? Par ailleurs, pour les cours d’appel qui n’ont pas beaucoup de travail, n’aurait-il pas été plus constructif de leur rattacher quelques TGI supplémentaires, de façon à alléger les cours voisines ? Tout ce travail de réflexion aurait dû être fait. Mais il nécessitait plus que trois mois de marche forcée.

Comment allez-vous lutter contre cette réforme ?

Bruno Thouzellier. Je pense qu’il va y avoir, non pas un deuxième tour social, mais un deuxième tour « technique ». Lorsque les aberrations de cette réforme vont être confrontées à la réalité du terrain, on sera bien obligé d’amender les choses. Et à ce moment-là, nous, les magistrats, nous aurons notre mot à dire.

Entretien réalisé par Laurent Mouloud, l'Humanité

11:05 Publié dans Entretiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : justice, catre judiciaire, USM, Thouzellier | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!