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02/03/2014

Amnesty International dénonce l’impunité d’Israël

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Dans un rapport accablant, l’ONG a recensé la mort de 22 
Palestiniens, dont 4 enfants, en 2013 en Cisjordanie occupée.

Samir Awad, seize ans, tué en janvier 2013 devant son école, ne connaîtra pas les résultats des examens qu’il venait de passer. « Ils venaient de lui tirer dans la jambe, mais il a réussi à s’enfuir… Jusqu’où peut courir un adolescent blessé ? Ils auraient pu facilement l’arrêter… mais ils ont préféré lui tirer à balles réelles dans le dos », témoigne son ami Malik Murar, seize ans. Samir, qui participait à une manifestation contre l’occupation, n’était pas armé, relève Amnesty International dans un rapport publié jeudi sur la violence de la police et de l’armée israéliennes en Cisjordanie.

>>> Lire le rapport d'Amnesty international (en anglais)

Autre histoire rapportée dans ce document accablant, celle de Yassin Al Karakyn, treize ans, d’Al-Ezariyya, à l’est de Jérusalem. Après l’avoir touché avec une balle caoutchouc-acier à la jambe, des soldats israéliens se sont précipités sur lui, le rouant de coups tout en se photographiant en train de le maltraiter. La scène a été filmée par Rami Alarya, du Alqods 
Independent Media Center. Et que dire de ces deux jeunes footballeurs, Jawhar Nasser, dix-neuf ans, et Adam Abd Al Raouf Halabiya, dix-sept ans ? Alors qu’ils revenaient d’une séance d’entraînement au stade du Roi-Fayçal, à Al-Ram, près de Jérusalem, le 31 janvier dernier, ils ont été blessés par balles aux pieds, à proximité d’un check-point, information ne figurant pas dans le rapport d’Amnesty. Ils ne pourront sans doute plus jamais jouer au football…

Ces cas sont illustratifs de cette répression au quotidien sur fonds d’exactions, commises en toute impunité. Vingt-deux civils palestiniens, dont quatre enfants ont été ainsi tués en 2013. Depuis 2011, 45 Palestiniens ont été tués et autour de 8 000, dont 1 500 enfants, « ont été blessés par des balles de métal enrobées de caoutchouc et par l’utilisation inappropriée de gaz lacrymogène », lit-on dans ce rapport. Pour Philip Luther, l’un des responsables de l’ONG : « La fréquence et la persistance du recours à la force arbitraire et abusive contre des manifestants pacifiques en 
Cisjordanie par les soldats et les policiers israéliens – ainsi que l’impunité dont ils bénéficient – laissent à penser qu’il s’agit là d’une politique délibérée. »

Une autre victime jeudi. Motazz Washaha, vingt-deux ans, a été tué hier par des soldats israéliens à Bir Zeit, près de Ramallah (Cisjordanie). Ce meurtre, car le jeune Palestinien réfugié dans sa maison n’était pas armé contrairement à ce qu’affirme l’armée israélienne, a eu lieu le jour de la publication du rapport d’Amnesty International accusant Israël d’avoir tué des dizaines de civils en Cisjordanie depuis trois ans. En décembre, l’ONG israélienne B’Tselem avait annoncé que 27 Palestiniens avaient été tués en Cisjordanie.

Lire aussi :

Hassane Zerrouky                     

Documents à télécharger:
Le rapport d'Amnesty international (en anglais)
Le rapport d'Amnesty international (en anglais)

26/02/2014

Lutter pour prendre la tête de la Commission européenne et renverser l’austérité » par Alexis Tsipras

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Président du parti grec Syriza, candidat à la présidence de la Commission Européenne.

Entretien réalisé par Fabien Perrier et publié sur l’Humanité du Dimanche

Pour la première fois, lors du scrutin européen de mai 2014, les électeurs voteront à la fois pour le député d’un parti et pour le candidat de ce parti à la présidence de la Commission européenne. Alexis Tsipras sera celui de la Gauche européenne. Il entend porter, sur leur terrain, le combat politique face aux sociaux-démocrates et aux libéraux qui ont condamné les peuples européens à l’appauvrissement. Lui prône une redistribution radicale des richesses et l’annulation d’une partie des dettes publiques. Comment compte-t-il convaincre que cette alternative est la seule possible ?

HD. Quel sera votre principal défi pour 2014 ?

Alexis Tsipras. Le premier défi est de renverser la politique d’austérité. Nous devons élaborer une sortie de crise favorable à la société et aux populations. Il faut donc annuler une part de la dette des pays, du sud de l’Europe essentiellement, et restructurer la part restante ; il faut financer des politiques de développement, celles qui créent de l’emploi à condition qu’il soit sécurisé et non précaire. Ces points centraux de la politique anti-austérité, il faut les appliquer avec le soutien de toute la société. Les partis traditionnels qui se sont partagé le pouvoir sont ceux qui ont créé les problèmes et ont conduit l’Europe dans sa crise actuelle. Quant aux idées de l’extrême-droite, elles mènent droit à la fin de la démocratie et à l’effondrement de la civilisation. En réalité, les peuples d’Europe sont en danger, la démocratie elle-même est en danger. Le néolibéralisme est une menace pour les peuples d’Europe. Et nous sommes la seule vraie alternative.

HD. Vous serez le candidat de la Gauche européenne à la présidence de la Commission européenne. Comment cette candidature vous permettra-t-elle de réaliser ce défi ?

A.T. Pour la première fois, la vraie gauche mènera la lutte sur le même terrain que les forces auxquelles elle s’oppose. Elle sera au cœur d’une bataille où, jusqu’à maintenant, ces forces tiraient profit d’être les seuls protagonistes. Nous avons donc décidé d’utiliser ce moyen qu’est la candidature à la présidence de la Commission pour défendre nos positions. Nous sommes les seuls qui exprimeront une alternative par rapport au néolibéralisme. C’est une occasion à saisir. Et quand bien même nous serions considérés comme outsiders dans cette bataille, nous pousserons cet avantage : nos opposants sont les tenants d’un système qui a failli, ils appartiennent à un système qui ne peut plus recueillir la confiance des peuples.

HD. Quel est l’état de la Grèce aujourd’hui, à l’heure où le pays prend la présidence de l’UE ?

A.T. Ce que nous vivons actuellement en Grèce revêt le visage le plus barbare que nous ayons connu depuis la guerre. C’est une tache qui ternit la civilisation européenne. Il est inacceptable d’avoir 30% de chômage officiel, et même 60% chez les jeunes ! Inacceptable que plus de 2 millions de gens vivent sous le seuil de pauvreté, ne puissent pas couvrir leurs besoins alimentaires vitaux ni se chauffer suffisamment. Récemment, une jeune fille est morte à Thessalonique parce que sa famille, qui n’avait pas les moyens de payer l’électricité, avait dû faire un brasier pour se chauffer. Dans Athènes comme dans les principales villes de Grèce, chaque jour, des femmes et des hommes correctement habillés fouillent les poubelles pour y trouver de la nourriture. En outre, l’ensemble du programme de prêt à la Grèce est une véritable faillite. Quand il a été lancé, la dette souveraine était à 120% du PIB ; elle est maintenant à 160%. Enfin, ce mémorandum et cette politique d’austérité, qui ont détruit la cohésion sociale, ont fait une autre victime : la démocratie. Pour nous, ces mesures barbares ne peuvent être appliquées dans le respect de la démocratie et des droits de l’homme. La Grèce est le miroir de l’échec de cette politique européenne erronée. Il faut agir urgemment. L’Europe actuelle n’a rien à voir avec l’Europe des visions communes de la solidarité et du progrès. C’est une Europe qui redistribue les richesses au profit des puissants et des riches, et la pauvreté, la misère, la douleur aux pauvres et aux faibles. Par conséquent, les élections que nous avons devant nous ne sont pas une confrontation politique conventionnelle. C’est un combat politique crucial pour refonder l’Europe et ses perspectives pour ses peuples.

HD. Dans ce cadre, quel sens donnez-vous, en tant que Grec, à votre candidature ?

A.T. Bien sûr, ma candidature porte un symbole particulier, parce qu’elle provient d’un pays qui est devenu le cobaye de la crise. Mais la guerre contre les peuples est menée sur tout le territoire européen. Et fait partout des victimes : chômeurs, SDF, travailleurs pauvres… Comme la Grèce est en première ligne dans cette bataille a émergé l’idée que je sois candidat. Mais quand j’ai accepté, j’ai dit que je ne serai pas un candidat de la Grèce, du Sud ou de la périphérie, mais un candidat de tous les peuples de l’Europe, car c’est la gauche qui soutient et lutte pour les droits des peuples, contre les intérêts des marchés financiers, des banques et des riches.

HD. Mais les Allemands, les Danois, les peuples du Nord… peuvent-ils l’entendre ?

A.T. A notre avis, les divisions ne sont pas géographiques mais politiques. Notre grand pari est de convaincre nos sociétés et les peuples du nord que leur vrai intérêt n’est pas de continuer les politiques qui sont imposées aujourd’hui et impliquent de recourir systématiquement à de nouveaux prêts. Parce qu’il y a ce cercle vicieux : austérité-récession-dettes-prêts. Nous voulons le casser. Notre but est de convaincre les peuples du nord qu’une solution pour les peuples du sud est aussi dans leur intérêt. Sinon, les pays du sud devront perpétuellement recourir aux prêts, sans que cela profite à l’économie réelle et la cohésion sociale, mais aux banques qui ont déjà failli et que nous continuons à financer. L’Europe de la cohésion sociale, de la solidarité et de la démocratie est l’affaire de tous les peuples. Seule une Europe démocratique et juste peut exister ; sinon, elle court à sa perte.

HD. Quelles sont, alors, vos propositions pour l’Europe et pour la Grèce ?

A.T. Il faut un « New Deal » pour l’avenir de l’Europe, c’est-à-dire financer par le budget européen des projets de développement, pour l’emploi et la cohésion sociale. Cela va de pair avec une redistribution radicale de la richesse au profit de ceux qui la produisent et de ceux qui en ont besoin : il faut prendre à ceux qui profitent du visage barbare des politiques menées aujourd’hui tout en les encourageant. Si, dans le passé, cette proposition semblait idéologique, elle s’impose comme une réponse aux questions existentielles de l’Europe. En ce qui concerne la Grèce, nous pensons que son avenir nécessite des réformes structurelles de la base productive. L’économie grecque doit être remise à flot avec des mesures à destination de ceux qui produisent la richesse. Quand les Grecs me demandent : « comment allez-vous trouver l’argent pour nous aider ? », je réponds : « nous n’allons pas trouver l’argent ! Nous allons soutenir ceux qui produisent les biens et la richesse, ceux qui font tourner la machine. Nous voulons soutenir les chercheurs, les forces productives, les agriculteurs… C’est une différence fondamentale avec les néolibéraux qui ne soutiennent que les marchés et les banques et non ceux qui font l’économie. »

Entretien réalisé par Fabien Perrier

18/02/2014

La bibliothèque idéale selon saint François Copé

littérature, censure, extrême-droite, bibliothèque, théorie du genre, livres jeunesseVoici des exemples de livres pour la Jeunesse qu'il faudrait faire disparaître, à entendre les commandements moralisateurs du patron de l'UMP. L'apostrophe de Marie-José Sirach.

D’abord, bannir des rayonnages:

Titeuf et sa bande de copains obsédés par leur zizi 
et les filles de Zep.

Tous les albums des Motordus de Pef pour outrage à la langue française.

Les Trois brigands, de Tomi Ungerer pour apologie 
de la rapine et du mensonge.

voir la bande-annonce des 3 brigands

On n’est pas des poupées! de Delphine Beauvois et Claire Cantais pour oser vanter l’égalité filles-garçons.

Ernesto, de Marguerite Duras 
pour apologie de l’insoumission à l’autorité.

Fifi Brindacier, d’Astrid Lindgren pour trouble 
à l’ordre public.

Les plantes ont-elles un zizi? de Jeanne Failevic et Véronique Pellissier, pour 
initiation camouflée aux différents systèmes 
de reproduction (voir Acte Sud Junior).

Le Petit Chaperon rouge, 
de Charles Perrault, pour relations sado-maso 
avec le loup.


Cartoon 1943 " Red Hot Riding Hood " - Tex Avery par Petites-Cocottes

Pour rigoler, la version de Tex Avery

Barbe bleue, toujours de Charles Perrault, décidément, un auteur dont il faut se méfier, 
pour apologie de la polygamie.

Comment élever 
son papa? d’Alain le Sault, pour atteinte à l’autorité 
du chef de famille.

Tous les Tintin d’Hergé pour initiation subliminale à l’homosexualité.

Je ne vois plus qu’un seul livre à conserver : 
Bécassine. C’est un peu sa cousine, non?

  • A lire aussi:

Copé ne fait plus rire

Raphaëlle Bats « Les bibliothèques, un outil d’émancipation »

Marie-José Sirach

11/02/2014

Appel de la gauche du PS: "Non à la politique de l’offre !"

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27 membres du bureau national du PS sur 72 ont signé un appel pour une autre politique. Non à la politique de l’offre ! Non à la baisse du «coût du travail» disent-ils. "Si 35 % de la direction du parti signe, cela, on peut penser que, à la base, c’est bien plus que la majorité des adhérents tellement le mécontentement est grand" écrit Gérard Filoche, également signataire.

  • Texte de l’appel :

La période est instable. De l’extrême droite qui se rassemble derrière des slogans racistes et antisémites à la droite radicalisée qui remet en cause la légitimité du Président de la République à gouverner, un front des conservatismes se constitue. Cette situation appelle une réaction forte. Une réaction essentielle pour reprendre la main, faire reculer le chômage et engager pleinement la transition écologique. Et ne pas donner l’impression que, malgré́ l’arrivée de la gauche au pouvoir, les droites et leurs « valeurs » sont en dynamique.

De toutes nos forces nous voulons que la gauche réussisse. Dix ans de politique de droite ont profondément abimé notre pays. La crise a dévasté nombre de territoires, plongé des millions de familles dans l’angoisse de la précarité ou du chômage.

A l’occasion de la campagne présidentielle, François Hollande a, à juste titre, pointé la responsabilité historique du monde de la finance dans les difficultés que traversent notre pays et notre continent. Il avait porté haut et fort l’exigence d’une réorientation de la construction européenne, en dénonçant le caractère néfaste des politiques d’austérité. Pour sortir le pays du chômage de masse, il avait proposé une feuille de route qui n’oppose pas la production à la redistribution, l’offre à la demande, l’efficacité́ économique à la justice sociale.

Cette feuille de route, c’est toujours la nôtre.

Cinq ans après la chute de Lehman Brothers, l’Union européenne subit toujours la crise et ses conséquences. Trois pays se trouvent encore sous assistance financière, le chômage atteint 12% dans la zone euro et la croissance est en berne.

C’est pourquoi nous continuons de penser qu’il est nécessaire de faire vivre la promesse de réorientation de la politique Européenne. Plus que jamais, la France doit créer les conditions d’un rapport de force favorable aux politiques de sortie de crise. La situation impose de nous dégager de la logique trop restrictive liée aux normes budgétaires et monétaires européennes.

La réduction des déficits préconisée par la Commission européenne a provoqué des coupes sombres dans des dépenses publiques et sociales essentielles. Surtout, ces «efforts» imposés aux populations n’ont pas permis de réduction de la dette publique. Elle est passée pour l’Union européenne à 27 de 62% du PIB en 2008 à 85% quatre ans plus tard. Loin de réduire la dette, l’austérité contribue à l’augmenter davantage.

Aujourd’hui, les critiques convergent pour remettre en cause des politiques socialement dangereuses et économiquement inefficaces. Les citoyens, mais aussi de grandes institutions comme le FMI, l’OCDE, le BIT, pointent l’urgence d’une relance coordonnée en Europe.

Dans ce contexte, les élections européennes revêtent une importance particulière. Refonte de la politique commerciale, instauration d’une taxe sur les transactions financières, lutte contre les paradis fiscaux, politique monétaire au service de l’économie réelle, harmonisation sociale et fiscale, relance de l’investissement par la transition énergétique notamment, meilleure répartition du travail, smic européen : les socialistes porteront ces exigences en mai prochain.

Mais nous serons d’autant plus crédibles pour le faire si nous avons administré la preuve, en France, qu’il n’y a pas qu’une seule politique possible.

Or en dépit de la salutaire rupture avec l’ère Sarkozy, l’orientation en matière de politique économique suscite des désaccords et des inquiétudes dans nos rangs.

Nous ne nous reconnaissons pas dans le discours qui tend à faire de la baisse des « charges » et du « coût du travail » la condition d’un retour de la croissance. Il n’y a pas de « charges » mais des cotisations sociales qui sont en réalité du salaire différé.

Et nous sommes inquiets quand nous découvrons que la baisse des cotisations promise aux entreprises s’accompagne d’une réduction de 50 milliards d’euros des dépenses publiques en trois ans, sans même savoir quels sont ceux qui en supporteront les conséquences. Ce qui risque de rogner sur le modèle social français dont les grands principes ont été établis à la Libération.

La focalisation exclusive sur la baisse du « coût du travail » ne constitue pas une réponse adaptée

Comme l’ensemble de l’Union européenne, la France souffre de la crise. Les libéraux, dont le patronat se fait le porte-­‐parole, associent cette crise à un problème global de compétitivité engendré par une explosion du « coût du travail ». Cette lecture nous semble contestable.

Depuis le début des années 90, des centaines de milliards d’aides, d’exonérations, de subventions ont été́ distribuées sans aucun effet sur l’emploi et la compétitivité de nos entreprises. Pire, elles ont alimenté la rente au détriment des salaires et de l’investissement. Entre 1999 et 2008, alors que les firmes allemandes ont réduit leur taux de dividendes versées de 10%, leurs homologues françaises l’ont augmenté de près de 50%. Le « coût du capital » n’a jamais été aussi élevé.

L’industrie française se délite et les politiques libérales de ces 20 dernières années n’ont fait qu’en précipiter la chute, croyant pouvoir créer une « France sans usine », renonçant à toute politique industrielle ambitieuse. Le renouveau industriel nécessite un renforcement de notre « compétitivité hors-coût » qui ne sera rendue possible que par des aides ciblées et d’une réorientation des bénéfices de la rente vers l’investissement productif.

Or, on ne peut que constater la victoire de la finance sur la production. C’est la conséquence de la concentration de la richesse entre les mains d’un nombre de plus en plus petit. Aujourd’hui, alors que 10 % de la population concentre 60 % du patrimoine, les banques imposent aux entreprises des règles qui donnent la priorité́ à l’accroissement systématique des marges. Dès lors, il ne faut pas s’étonner du mouvement de concentration du capital (les quatre premières banques françaises ont un bilan équivalent à 400 % du PIB) et de financiarisation de l’économie.

Enfin, ne nous voilons pas la face. La finitude des ressources naturelles, la hausse inéluctable du prix des énergies fossiles dont notre modèle de production et de consommation est dépendant, la stagnation de nos taux de croissance déconnectés du bien-être humain, nous obligent à imaginer un nouveau modèle de développement. De même, l’évolution des gains de productivité́ rend indispensable de réfléchir à une nouvelle répartition du travail. Mais ce nouveau modèle de développement est par définition antagoniste des logiques libérales, court-termistes, à l’œuvre de nos jours.

Pour nous, la priorité doit donc être la suivante: favoriser l’emploi et l’investissement productif aux dépens de la rente.

Les préconisations avancées jusqu’à présent sont déséquilibrées.

Les socialistes se sont toujours refusés à opposer offre et demande, production et redistribution, bonne gestion des comptes publics et relance de l’économie. Les propositions contenues dans le « pacte de responsabilité́ » semblent s’écarter de cette position d’équilibre.

  • 1) L’objectif de baisse accélérée des dépenses publiques comporte des risques majeurs.

Le Président de la République s’est engagé à ne pas toucher au modèle social français. Néanmoins, la priorité́ accordée aux 50 milliards d’euros d’économies en trois ans, nous fait craindre une réduction du périmètre d’intervention de l’Etat, nuisible aux politiques sociales existantes et au fonctionnement des services publics.

  • 2) le redressement n’est pas possible sans la justice

A trop se focaliser sur « l’offre » et la « baisse des charges », le « pacte de responsabilité́ » risque de comprimer l’activité́ économique.

Par ailleurs, elle réduit considérablement nos marges de manœuvres pour mener à bien des politiques ambitieuses dans le domaine de l’éducation, du logement ou de la culture. Comment continuer à soutenir l’effort de réinvestissement de l’Etat dans le domaine éducatif mené́ depuis le 6 mai, si les baisses de crédits y sont massives ? Comment soutenir l’exception culturelle si, pour la troisième année consécutive nous baissons le budget du ministère de la culture. Enfin, comment les collectivités territoriales pourront-elles continuer à être le premier investisseur public de notre pays, si elles doivent réaliser des coupes budgétaires massives ?

Notre pays doit partir de ses atouts : qualité de la main d’œuvre, de ses services et infrastructures publics. Agir pour notre compétitivité, c’est penser dès maintenant le monde de demain et notre modèle de développement.

C’est donc d’abord agir sur nos capacités productives (montée en gamme, sobriété énergétique de notre appareil productif, investissement dans les énergies renouvelables, utilité́ sociale) et sur nos infrastructures. Ainsi en 2011, les importations énergétiques pesaient 88% du déficit de notre balance commerciale, entamant d’autant la création d’emplois et les capacités d’investissement de nos entreprises.

L’investissement dans l’éducation, la formation, la recherche, la transition énergétique, sont autant de leviers pour une stratégie de développement durable à moyen et long terme. L’enchainement des crises ces vingt dernières années témoigne d’un système court-termiste à bout de souffle, qui ne répond plus au double impératif d’efficacité́ économique et de justice sociale. Cette option volontariste d’investissement que nous proposons est un moyen d’en sortir.

Mais cet effort serait vain si, faute de consommation, bon nombre d’entreprises n’avaient pas de carnets de commande remplis, si faute de « planification » les industriels n’avaient aucune vision de l’avenir, et si faute d’anticipation ils n’étaient pas au rendez-­‐vous d’une reprise française et internationale.

Dès lors, nous pensons que, dans la mobilisation générale pour l’emploi décrétée par l’exécutif, la consommation populaire doit prendre toute sa place. Elle passe notamment par une réforme fiscale de grande ampleur, comme l’a d’ailleurs proposé le Premier ministre. Loin de s’opposer, redressement et justice vont de pair.

Obtenir un compromis social favorable au monde du travail

La social-démocratie suppose que le parti majoritaire à gauche soutienne les syndicats de salariés pour arracher un compromis au patronat.

Si le Président a été́ très clair sur les avantages accordés aux entreprises, les contreparties demandées restent floues. Il faudra plus qu’un « observatoire » pour imposer amélioration des conditions de travail, discussion sur les salaires, partage du travail ou multiplication des embauches. D’autant que le MEDEF, par la voix de son président, refuse de rentrer dans une logique de « donnant-­‐donnant » qui serait pourtant la moindre des choses. En lien avec les déclarations présidentielles, nous insistons sur la double nécessité́ de ne pas alimenter la rente pour servir l’investissement productif et de faire bénéficier les salariés, par le biais de la rémunération notamment, d’une part de cette aide.

Il n’y aura pas de « compromis social » favorable aux salariés sans mobilisation du parti, des parlementaires, du mouvement social. Salaires, embauches, réduction et partage du temps de travail, droits des salariés, contrôle des licenciements abusifs, modalités de remboursement des aides en cas de non-respect des engagements, politique de redistribution des dividendes : dans tous ces domaines nous devons porter des exigences fortes.

Oui, nous devons les porter, et en toute liberté́. Sachons-nous désintoxiquer des institutions de la Vème République. Tout ne peut procéder d’un seul homme. Les débats politiques ne se règlent pas en brandissant la menace de mesures disciplinaires ou en mettant les parlementaires au pied du mur.

Le PS doit jouer pleinement son rôle. Pour la réussite de la gauche au pouvoir, il faut un Parti autonome, force de propositions, relais des aspirations mais aussi des mécontentements. C’est une des conditions de la réussite commune.

Cette réussite passe aussi par l’implication de la gauche dans toute sa diversité́. Il n’y a aujourd’hui de salut pour la gauche française que dans la construction de convergences entre les forces politiques et sociales qui la composent. Au moment où une partie de la droite radicalisée fait jonction avec une extrême droite plus menaçante que jamais, le rassemblement de la gauche est une ardente obligation.

Signataires
27 membres du Bureau National du Parti socialiste (sur 72) : Pouria Amirshahi, Tania Assouline, Guillaume Balas, Marie Bidaud, Sandrine Charnoz, Pascal Cherki, Laurianne Deniaud, Stéphane Delpeyrat, Antoine Détourné, Julien Dray, Henri Emmanuelli, Anne Ferreira, Gérard Filoche, Olivier Girardin, Jérôme Guedj, Liêm Hoang-­‐Ngoc, Frédéric Hocquard, Régis Juanico, Marie Noelle Lienemann, Marianne Louis, Fréderic Lutaud, Delphine Mayrargue, Emmanuel Maurel, Jonathan Munoz, Nadia Pellefigue, Paul Quiles Roberto Romero, Jean-­‐François Thomas, Isabelle Thomas