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21/04/2015

RESURRECTION D'UN TABLEAU DE POUSSIN !

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"La fuite en Égypte", Nicolas Poussin, 1657. Huile sur toile, 97 x 133 cm. Musée des beaux-arts de Lyon.
Restituant l’histoire de la résurrection d’un tableau de Poussin, le dernier livre de Bernard Lahire décrypte le phénomène symbolique.

Flânant dans les musées d’art, les visiteurs sont tenus à distance et admirent plus ou moins en silence. Sur les toiles exhibées, un glacis imperceptible de croyances collectives dans la valeur de la peinture s’est formé avec le temps. On ne touche qu’avec les yeux et le respect dû aux choses sacrées. Et le mystère ne désépaissit pas, malgré les explications pédagogiques des guides, des historiens et des critiques – ou même encore, au cœur de la matière, par les analyses aux rayons X menées à des fins d’authentification.

C’est ce privilège symbolique accordé aux œuvres d’art, se rejouant chaque jour dans des milliers de musées, que le sociologue Bernard Lahire se propose d’ausculter dans son dernier livre. Son propos n’est pas de sacraliser davantage, ni d’ajouter une nouvelle couche de commentaires, mais au contraire de « désévidencer » à la façon de l’ethnologue étudiant des rites exotiques. Car tout cela n’a rien de naturel.

Cette enquête passionnante se lit comme un polar

L’histoire erratique de la Fuite en Égypte, de Nicolas Poussin, sert de toile de fond à une enquête passionnante se lisant comme un polar. Peint en 1657, le tableau disparut des siècles durant, pour réapparaître dans les années 1980. Mais, et c’est l’intérêt de ce fabuleux destin, en trois versions. Des luttes de classement, de reclassement et d’attribution divisèrent publiquement durant des années les différents propriétaires, des historiens renommés et spécialistes de Poussin, des conservateurs…

Deux galeristes, les frères Prado, eurent le nez creux en achetant peu cher (l’équivalent de 240 000 euros) l’une des versions en 1986. Après d’usantes inspections et des confrontations avec les deux autres exemplaires, la toile fut reconnue comme œuvre autographe du peintre. Et, comme par magie, sa cote explosa.

S’estimant lésée, l’ancienne propriétaire de ce qu’elle croyait être une copie se tourna vers la justice afin d’annuler la vente. Après trois ans de procès, elle obtint gain de cause en 2003 et récupéra le tableau, qu’elle remit aussitôt à la vente. Un authentique Poussin venait ainsi d’éclore et pouvait être proposé sur le marché. Les autorités publiques, hantées par la perte d’un trésor national, décidèrent de l’acquérir. En 2007, le musée des Beaux-Arts de Lyon et ses mécènes privés déboursèrent 17 millions d’euros pour l’accrocher. Fin de l’histoire : la Fuite en Égypte est désormais une attraction muséale et un « détour » de dépliant touristique.

« Ceci n’est pas qu’un tableau » est un tour de force. Car on n’envisagera le cas du tableau repêché de Poussin qu’à partir de la page 359, après avoir lu une patiente et rigoureuse décomposition théorique des mécanismes par lesquels l’art pictural se trouve magnifié. Passant « du général au particulier et du structurel à l’individuel », Lahire replace l’objet « peinture d’art » dans un cadre d’analyse général de la domination, de la magie, de la religion, du sacré et de l’art.

L’épiphénomène que constitue la Fuite ne prend ainsi toute sa signification qu’inscrit dans la longue durée d’une histoire structurale des conditions de possibilité de l’art comme monde social relativement autonome. Les innombrables sources et les coups de sonde érudits sur la trajectoire du « sublime Poussin » ou l’autorité des experts dans la controverse sur l’authenticité du tableau donnent chair à ce travail qui fera date.

En résumé, Lahire fait œuvre de désenvoûtement, sans pour autant détruire l’idole Poussin. On apprend beaucoup en s’observant observer les contingences déterminées d’un rapport cultu(r)el à l’art. Et c’est en cela que ce regard sociologique sur la peinture est émancipateur.

Ceci n’est pas qu’un tableau. Essai sur l’art, la domination, la magie et le sacré, par Bernard Lahire. Éditions La Découverte, 2015, 592 pages, 25 euros.

Article publié dans l'Humanité

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07/04/2015

Expo Vélasquez. De l’infant Felipe au pape, un troublant regard

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"Vénus au miroir" (1647-1651). Londres, National Gallery, huile sur toile, 122,5 sur 177 centimètres.
Photo : National Gallery of London
 
Au Grand Palais, à Paris, La Réunion des musées nationaux consacre une exposition remarquable à celui que Manet avait appelé 
le peintre des peintres et à ses contemporains, avec lesquels il n’y a pas photo.

On se gardera de dire que Vélasquez a remarquablement peint les enfants, ce qui prêterait à une regrettable équivoque avec les innombrables mièvreries qui caractérisent le genre.Il s’agit de bien autre chose.

Ainsi du portrait en pied du petit prince Felipe Prosper, peint vers 1659, alors qu’il est âgé de deux ans. Vélasquez est au sommet de son art, il a soixante ans et n’a plus qu’une année à vivre. Le petit prince ne vivra que quelques mois de plus. Est-ce donc cela qui nous retient dans ce tableau, cette pâleur, ces yeux candides mais troublants tant ils ont de vérité.

Derrière, dans l’ombre, il y a cette porte entrouverte vers une autre lumière, celle peut-être déjà que l’on voit dans les Ménines, avec la silhouette d’un homme en noir dans l’embrasure. Vélasquez pouvait-il pressentir la mort prématurée de l’enfant royal que l’on disait fragile, ou bien est-ce le sentiment de l’imminence de la sienne qui passe dans son regard, on ne sait, mais c’est là. Vélasquez est l’un des plus grands portraitistes de toute l’histoire de la peinture et sans doute le premier à aller aussi près de la vérité des êtres.

C’est là ce que l’on peut retenir d’abord de l’exposition exceptionnelle qui est consacrée au Grand Palais à Paris au plus grand des peintres espagnols, avec Goya, cela va de soi. Bien sûr, on regrettera l’absence des Ménines (1656), où le peintre, entouré de l’infante Marguerite, de chiens et de bouffons, nous fait face, comme s’il nous peignait sur la grande toile qui est devant lui, alors que dans le miroir au fond de cette boîte, ou de cette caverne, se reflète le couple royal qu’il est donc censé peindre, à notre place même. Mais ce n’est pas le lieu ici de commenter plus longuement cette toile, d’autres l’ont fait amplement et ce n’est pas fini.

Le baroque fait l’actualité à Paris

Disons simplement qu’elle nous manque quand bien même on comprend que le musée du Prado ait du mal à s’en séparer, comme le Louvre de la Joconde, et qu’en outre ses ­dimensions la rendent sans doute difficilement transportable.

Nous manquent aussi les Lances ou la Reddition de Breda (1635), dont il y aurait tant à dire. En revanche, prêté par la National Gallery, la Vénus au miroir (vers 1647-1651), l’un des chefs-d’œuvre absolus de la peinture occidentale, est bien là, comme le Portrait du pape Innocent X (1650), dont Francis Bacon fera la matrice de sa série de papes hurlants. Mais il faut sans doute faire un rapide détour par l’époque. Le XVIIe siècle et donc le ­baroque qui, singulièrement, fait l’actualité à Paris avec l’expo du Petit Palais sur les bas-fonds de Rome, et une autre, dès la ­semaine prochaine, au musée Jacquemart-André, intitulée « De Giotto à Caravage ».

Le baroque, c’est d’abord l’injonction faite aux artistes par le concile de Trente de rapprocher dans leurs sujets la ­religion du peuple et c’est, du même coup, l’entrée du peuple dans la peinture. C’est sans doute aussi, dans la logique même de la ­peinture, telle qu’elle apparaît déjà dans les Flandres avec Bruegel et d’autres, la force progressive du réel dans la négation des dogmes et des conventions. Regardons déjà, du tout jeune Vélasquez âgé de dix-neuf ans le visage de jeune fille de son Immaculée Conception.

­Regardons, dix ans plus tard, le Christ chez Marthe et Marie, où les deux femmes sont au premier plan. Quelle simplicité, quelle vérité, quelle grandeur du quotidien. Alors, il est bien vrai que Vélasquez sera le peintre du roi, le premier artiste de la cour, honoré de son vivant par Philippe IV dont on dit que c’est lui-même qui aurait tracé la croix rouge de chevalier sur l’orgueilleuse figure du peintre des Ménines. Mais quelle humilité, et surtout quelle humanité quand Vélasquez va vers le visage de l’autre, que ce soit parce qu’il le comprend ou parce qu’il l’interroge, qu’il s’agisse du pape, du portrait en pied d’un homme en noir, sans aucun décor, dont Manet saura se souvenir, de ces portraits d’hommes ou de femmes à nous désormais inconnus mais qui furent de la pensée, de la foi, de la cruauté…

Dans les Lances, à gauche du tableau, un soldat parmi d’autres tourne son visage vers nous. Vélasquez lui-même. Comme le couple royal, nous sommes devant lui et peints.

Du 25 mars au 13 juillet, 
Grand Palais, Paris 8e. Catalogue édité 
par La Réunion des musées nationaux 
et du Musée du Louvre. 410 pages, 50 euros.
 
Maurice Ulrich, L'Humanité
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26/03/2015

CENDRILLON LE FILM !

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Les contes de fées ont le vent en poupe. Après "Blanche-Neige", "Blanche-Neige et le chasseur", Une version gore de "Hansel et Gretel" ("Hansel et Gretel : Witch Hunter" ), Jack le chasseur de géants", "La Belle et la bête", c'est au tour de "Cendrillon" de passer devant la caméra, sous la houlette de Kenneth Branagh, avec Cate Blanchett en belle-mère acariâtre et Lily James dans le rôle-titre.

De Kenneth Branagh (Etats-Unis), avec : Cate Blanchett, Lily James, Richard Madden, Stellan Skarsgård, Holliday Grainger, Sophie McShera, Derek Jacobi, Helena Bonham Carter - 1h44 - Sortie : 25 mars 2015

Synopsis : A la mort de sa femme, le père d'Ella s'est remarié. Son unique fille accueille sa nouvelle belle-mère et ses deux filles. Mais le père meurt à son tour et Ella se retrouve sous l'emprise de sa nouvelle famille qui l'asservie, la surnommant Cendrillon, car continuellement couverte de cendres. Quand elle croise un jeune homme dans la forêt, elle ne sait pas qu'il s'agit du fils du roi et en tombe éperdument amoureuse, croyant qu'il s'agit d'un employé du château. Toutes les jeunes filles du royaume sont bientôt invitées à un grand bal, et Ella espère y revoir son idylle de passage. Mais sa belle mère lui interdit et complote avec le Grand Duc. Seule l'intervention d'une bonne fée dénouera le nœud de vipères… 

La version animée en "live"
Disney ne pouvait pas passer à côté de ces "ripolinage" des contes célèbres que le studio avait déjà adaptés en dessins animés, tels '"Alice au pays des merveilles" (Tim Burton), ou "La Belle aux Bois dormants" ("Maléfique" de Robert Stromberg). C'est donc en toute logique que sort aujourd'hui "Cendrillon", adapté du célèbre conte de Perrault, et de sa version animée de 1950, un des grands classiques maison.
Le film de Kenneth Branagh se réfère directement à cette dernière par nombre de références esthétiques. Lily James renvoie explicitement au physique de la Cendrillon de 1950, blonde et toute de bleu vêtue, tout comme la belle-mère acariâtre (Cate Blanchett) et ses deux filles (Holliday Grainger et Sophie McShera), les souris, la forme du carrosse issu par magie d'une citrouille, ou la pantoufle de "verre", et non de "vair" du conte… Une bonne partie de la critique est tombée à bras raccourcis sur le film, lui reprochant de piètres effets spéciaux en images de synthèse, ce qui est vraiment cracher dans la soupe. On peut compter sur Disney pour ne pas avoir lésiné sur ce chapitre.Si Kenneth Branagh est très inégal dans ses réalisations, il a plus d'une fois montré son intérêt pour le Fantastique (les contes de fées relevant du genre) : "Dead Again", "Frankenstein", "La Flûte enchantée", "Thor". Son approche de "Cendrillon" lui permet de déployer une mise en scène ample, avec moult décors luxueux, très détaillés et forts beaux, en extérieur comme dans les intérieurs. Tout comme les costumes, très nombreux, aux textures et couleurs merveilleuses. Le tout n'est pas "kitsch", comme l'on dit certains, mais en phase avec la plastique des illustrations des contes de fées.Lily James apporte toute sa candeur au rôle-titre, Cate Blanchett, toujours d'une beauté renversante et sophistiquée, cabotine à souhait, mais cela sied à son rôle odieux, tout comme Holliday Grainger et Sophie McShera qui interprètent ses deux filles insupportables. Des morceaux de bravoure traversent le film, comme la transformation de la citrouille en carrosse, ou son retour à l'état premier au dernier coup de minuit, la rencontre avec le cerf… Branagh multiplie par ailleurs les travelings et mouvements de caméra aériens spectaculaires pour en mettre plein la vue. Une belle adaptation qui, évidemment, ne peut que déplaire aux grincheux.

France TV - Culture Box

19:49 Publié dans ACTUSe-Vidéos, Arts, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cendrillon, film, walt disney | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

02/01/2015

Algérie : la révolution des escaliers arc-en-ciel

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Depuis plusieurs mois, une frénésie créatrice a saisi les jeunes qui ont entrepris de repeindre les lieux publics dans plusieurs villes du pays. Une association de Tizi Ouzou, à l’est de la capitale, a repeint l’escalier d’un quartier populaire pour que les enfants jouent dans un environnement agréable.

Quel gosse n’a jamais rêvé d’un monde arc-en-ciel ?

Depuis plusieurs mois, en Algérie, une frénésie créatrice a saisi les jeunes qui ont entrepris de dissiper la grisaille de leurs quartiers en couvrant l’espace public de couleurs vives. Le berceau de cette « révolution des escaliers » se situe à Souk Ahras, dans l’est du pays, où une petite association, Nadhafa (Propreté), a décidé cet été de réagir à l’abandon des lieux communs, livrés à la saleté, défigurés par l’absence d’entretien.

Postées sur Internet, les photographies des escaliers multicolores ont soulevé l’enthousiasme et suscité des émules dans tout le pays. À Alger, à Tiaret, à Aïn Temouchent, à Blida, les fresques rivalisent d’inventivité, dessinant un mouvement citoyen d’un nouveau genre. Ici, à TiziOuzou, un « escalier piano » a pris corps, avec touches noires et blanches, croches et clés de sol échappées d’une portée.
Là, à Mascara, c’est un paon qui arbore une traîne rouge, vert et bleu, comme prêt à faire la roue. Dans la capitale, au seuil d’une école, un escalier remaquillé de pastels s’est changé en ludique table de multiplication. Les marches du Rialto, à Skikda, se sont transformées en vagues azurées sur lesquelles flotte un voilier.
Le peintre Ahmed Zahi a promis aux artistes en herbe d’apporter sa touche à ce paysage maritime avec un dauphin et un goéland. « Ville d’escaliers par excellence, Skikda ne pouvait passer à côté de cette fièvre colorée qui s’est emparée de plusieurs villes du pays. Les initiateurs, tous bénévoles, ont d’abord nettoyé les marches avant de passer à l’action, créant ainsi une belle ambiance au centre-ville et attirant les regards », rapporte le quotidien El Watan. Les compositions colorées semblent entrer en dialogue avec les noms des rues, chargés de poésie : Drouj El bahri (« escaliers de la brise »), Drouj El ghoula (« escaliers de l’ogresse »), Drouj El mouhal (« escaliers de l’impossible »).
 
Un ballon d’oxygène face aux carences de l’État
Encadrées par des associations de quartier ou complètement autogérées, ces initiatives convergentes, sur les réseaux sociaux, en communautés. Comme celles lancées par les groupes 7oumti (Mon quartier) et Algérie propre, qui veulent « essayer de sensibiliser les jeunes Algériens au respect de l’environnement et de l’espace dans lesquels ils vivent ».
 
Cette « révolution des escaliers » est, de fait, un ballon d’oxygène dans un pays où l’urbanisation accélérée et anarchique, les carences des services publics locaux et les déchets générés par l’essor de la société de consommation défigurent les paysages. « Nous sommes conscients des conséquences des négligences environnementales à long terme. La jeunesse algérienne ne manque ni de talent ni d’intelligence, mais juste un peu de volonté. En semant quelques graines d’espoir, nous souhaitons améliorer notre mode de vie. L’incivisme est la gangrène qui ronge nos rues et vole la beauté de nos villes », explique-t-on à l’ACT, une association locale de Tizi-Ouzou engagée dans ce mouvement, mais aussi dans la réhabilitation des espaces verts et la promotion du tri sélectif.
 
Dans l’élan, certains ont troqué les pinceaux contre des râteaux, pour nettoyer les plages, rendre vie aux fontaines publiques ou débarrasser les champs des affreux sacs en plastique dispersés par millions aux quatre vents. Cette année, Alger s’était placée parmi les dix agglomérations les moins vivables au monde dans le classement établi par The Economist. Sans que cela n’émeuve des autorités, locales ou nationales, toujours promptes à rejeter sur le peuple la responsabilité de la pollution et de la saleté. « Echaâb machi m’rabbi ou moussakh » (« La population est sale et mal éduquée »), c’est par cette sentence méprisante que les responsables politiques ont coutume d’éluder les critiques sur leurs propres défaillances.
L’an dernier, une enveloppe de 100 millions de dinars a été allouée, avec force publicité, au nettoyage et à « l’embellissement » de la Ville blanche… Sans effets visibles. « Il faut nettoyer le pays ! » avait clamé le premier ministre, Abdelmalek Sellal, en arrivant au pouvoir, en 2012. Sans conséquences. Sans plus rien attendre de l’État, les jeunes à l’origine de la « révolution des escaliers » se prennent en main, transformant sans moyens, avec un peu de peinture et beaucoup d’imagination leur cadre de vie quotidien.
 
Après les « drouj », les couleurs promettent de se déverser partout : sur les murs, sur le béton des échangeurs d’autoroutes, et même sur les antennes paraboliques qui rendent si tristes les façades des immeubles. À Tébessa, les élèves du collège Abi Moussa El Achaari, lassés d’étudier dans des salles de classe lugubres, ont redonné vie à leur lieu d’étude par la magie de quelques dessins. D’autres adolescents, déjà, les imitent, rivalisant de créativité.
 
Cette belle aventure collective nous remet en mémoire un poème de Bachir Hadj Ali, Rêves en désordre : « Je rêve d’îlots rieurs et de criques ombragées / Je rêve de cités verdoyantes silencieuses la nuit / Je rêve de villages blancs bleus sans trachome / Je rêve de fleuves profonds sagement paresseux / Je rêve de protection pour les forêts convalescentes / Je rêve de sources annonciatrices de cerisaies / Je rêve de vagues blondes éclaboussant les pylônes / Je rêve de derricks couleur de premier mai. »
 
 

10:22 Publié dans Arts, Connaissances, International | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : algérie, art, escalier | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!