27/01/2020
Ils n’ont pas honte !. Soit la réforme, soit une épidémie ?
Tout est décidément permis chez les macronistes pour promouvoir la réforme des retraites. Y compris le recours aux pires arguments. Il serait ainsi strictement impossible de financer la retraite à 60 ans à taux plein et de rejeter le projet gouvernemental, à moins d ’« espérer un coronavirus qui viendrait atteindre les plus de 70 ans », a osé déclarer le député LaREM Dominique Da Silva, sur BFM TV.
En avançant cette idée vaseuse, celui qui fait partie des « ambassadeurs » de la réforme cherche à frapper l’imagination des Français pour les empêcher de réfléchir. Il leur assène qu’il n’y a aucune alternative au projet d’Emmanuel Macron : si le pays n’adopte pas cette réforme, seule une épidémie décimant nos aînés nous sauvera. Seule issue à ses yeux : repousser toujours plus l’âge de départ à la retraite de génération en génération, ce qui revient à… épuiser et envoyer plus vite dans la tombe les personnes âgées qui continueront à travailler plus longtemps.
C’est en réalité la réforme du gouvernement elle-même qui menace l’espérance de vie des Français. Tout comme ce sont ses choix politiques qui empêchent la retraite à 60 ans à taux plein. Après tout, le système actuel n’est pas menacé de déséquilibre, et peut-être largement amélioré. Comment ? Près de 130 milliards d’euros composent actuellement le Fonds de réserve pour les retraites. La Caisse d’amortissement de la dette sociale doit prochainement rapporter 24 milliards par an. Moduler les cotisations sociales comme le propose le PCF permettrait de rassembler 70 à 90 milliards en cinq ans.
Enfin, créer des emplois, lutter contre le chômage, augmenter les salaires dont celui des femmes, plutôt que de dilapider plus de 100 milliards d’euros comme cela a été fait avec le Cice, permettrait d’alimenter les caisses de retraite. Un peu mieux qu’une épidémie comme solution non ?
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09/12/2019
OPA sur Latécoère : un nouveau cas d’école d’absence d’Etat stratège
Sources : *Francis VELAIN est Ingénieur et contributeur de la revue Progressistes.
Latécoère, un nom, une entreprise qui sent bon la grande aventure aéronautique et humaine de notre pays : ses hydravions, son aéropostale, ses Mermoz. Depuis, l’entreprise n’a cessé d’évoluer. Moins visible du grand public qu’hier, elle reste une grande entreprise d’aéronautique, sous-traitante de premier rang d’Airbus.
Elle suit aujourd’hui le chemin dicté par ce maitre d’œuvre. Devenir une référence en se développant par elle-même. « Nous devons être compétitifs sur nos marchés pour gagner de l’argent en répondant aux réductions des coûts de nos donneurs d’ordre. » déclare sa PDG Yannick Assouad.
Elle le fait en ouvrant près de Toulouse une usine 4.0 opérationnelle dès 2020. « On n’oublie pas notre histoire toulousaine » a déclaré Yannick Assouad, l’actuelle PDG. ». Cette usine connectée relèverait d’une « volonté combinée et d’un engagement partagé avec Toulouse Métropole et la Région Occitanie ». Jean-Luc Moudenc, maire de Toulous se dit « fier que le 1er avionneur historique de la ville rose reste ainsi fidèle à Toulouse ». Latécoère « confirme notre stratégie d’attractivité et conforte le statut de Toulouse en tant que capitale mondiale de l’aéronautique ». La Banque Européenne d’Investissement (BEI) a investi de son coté 37 millions d’euros dans ce projet.
L’observateur attentif remarquera quelques zones d’ombres sur ce tableau. Ainsi, la suppression de 200 emplois en France dans le cadre du plan « Transformation 2020 ». En 2016 les activités Latécoère Services (Toulouse– 800 emplois- , Espagne, Royaume-Uni, Canada, Allemagne) furent vendues au Groupe ADF.
Mais une faim de croissance externe et internationale est l’autre face de la stratégie de l’entreprise. Car Latécoère tient son rang aussi de cette manière, en rachetant d’autres entreprises du secteur, en ouvrant des usines au Brésil, en Inde, au Mexique au Tunisie, en Bulgarie, en République Tchèque… sans doute toutes très modernes ! Entre recherche d’un moindre prix de la force de travail et contreparties au titre de quelques contrats de ses donneurs d’ordres (vente des rafales à l’inde etc… ) et autres considérations géopolitiques entre états.
Contreparties et considérations géopolitiques peuvent être la meilleure des choses pour construire un internationalisme économique de Paix, de partage des Progrès économiques et sociaux. Mais restons lucides. Le processus actuel se déploie avant tout au titre des affaires. « Nous ne pourrons jamais être complètement à l’abri de la guerre commerciale car nous ne pouvons pas nous déployer partout, mais nous devons essayer au moins d’être implantés sur chaque continent » confirme Mme Yannick Assouad, patronne de Latécoere. Elle disait en 2017 : « Nous sommes nous-même trop petits ».
Du côté de l’actionnariat bien de ces choses essentielles se décident donc depuis quelques temps avec une direction générale qui n’est pas sans liens avec ce monde actionnarial. La patronne de Latécoère, est désormais vice-présidente du GIFAS. En fait, la structure même de l’actionnariat interroge de plus en plus. C’est un actionnariat essentiellement flottant.
En avril 2019, un fond d’investissement américain, Searchlight Capital Partners racheta les part détenues par 3 autres fonds . Il devint le 1er actionnaire de Latécoère à hauteur de 26% du capital. Il annonça rapidement vouloir monter à 76% du capital via une OPA amicale. Latécoère accueilli favorablement le projet d’opération dès Septembre « L’initiateur de l’offre a en effet affiché son soutien à la stratégie proposée par le management et approuvée par le conseil d’administration ».( La Tribune – 17/10/2019). Or ses commandes dépendent d’Airbus à 68%., à 19% de Boeing, à 5% de Dassault…
Il semblerait que Bercy se contenterait néanmoins de voir le fond d’investissement français Tikehau Capital passer de quelques 5 à 10% du capital (La Tribune – 12/11 2019) avec un siège d’administrateur. Dix-sept députés de la commission de défense nationale ont demandé au gouvernement d’avoir une « approche souveraine » sur la vente de Latécoère (ainsi qu’une autre entreprise Photonis).
Pendant ce temps, la direction de Latécoère continue ses emplettes et propose de racheter l’activité de câblage et d’interconnexion de Bombardier Aviation avec notamment une usine de production au Mexique.
Latécoère est un fantastique exemple du besoin de maitriser les filières industrielles dans leur ensemble par un actionnariat stable, sensible aux enjeux de souveraineté nationale, des maitres d’œuvre à leurs partenaires sous-traitants. Il faut que les salariés de notre pays aient les actionnaires qu’ils méritent.
Le MEDEF est étrangement absent de ce débat, lui qui prétend que ses mandants créent l’emploi. Ce silence suffit à légitimer une appropriation publique des entreprises. Si l’industrie française n’est pas à brader, ce n’est pas seulement pour ses emplois d’aujourd’hui ! Les qualifications des personnels et de ceux des futures doivent et devront nourrir la création locale des richesses de la Nation et tout autant garantir à notre pays sa capacité de choisir son destin.
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09/10/2019
Sanctions contre Airbus par les USA : aux origines d'un dossier politico-industriel
Selon son énoncé de mission, l'Organisation mondiale du commerce (OMC) est l'organisation internationale qui a pour objectif d'assurer l'ouverture du commerce « dans l'intérêt de tous » (sic). Elle se donne notamment pour but de promouvoir la compétitivité, comme expliqué sur son site : « En décourageant les pratiques « déloyales » telles que les subventions à l’exportation et la vente de produits à des prix de dumping, c’est-à-dire à des prix inférieurs aux coûts de production pour gagner des parts de marché ; les questions sont complexes, et les règles tentent d’établir ce qui est loyal et déloyal et d’indiquer comment les gouvernements peuvent réagir, notamment en imposant des droits d’importation additionnels calculés de manière à compenser le dommage causé par le commerce déloyal.»
La décision rendue le 2 octobre, après 14 ans de procédure, rentre dans ce cadre. L’OMC donne raison aux Etats-Unis qui dénonçaient des subventions publiques indues accordées par la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Espagne sur les programmes A380 puis A350 d’Airbus, subventions qui auraient fait perdre des campagnes de ventes à Boeing. Elle autorise les Etats-Unis à appliquer des droits de douanes alourdis de 7,5 milliards d’Euros annuels sur les biens européens importés, ce qui constitue la plus grande sanction jamais imposée.
Suite à cette décision, la situation est désormais ubuesque sur tous les aspects :
- Tout d’abord, l’Union Européenne a riposté en 2005 en ouvrant une procédure similaire contre les subventions américaines versées à Boeing, et une résolution équivalente mais inversée est attendue pour l’an prochain. La fin de l’histoire a donc 2 issues possibles : soit une montée des sanctions douanières de part et d’autre qui irait à l’encontre du dogme du libre-échange – peu probable, avec en arrière-plan la crainte de voir la Chine s’immiscer dans le duopole Airbus/Boeing, soit un statu quo. « Tout ça pour ça ».
- Sur le fond, l’OMC s’attaque aux subventions publiques, épouvantail des libéraux. Pourtant, le marché aéronautique est, historiquement, largement biaisé par bien d’autres aspects de politique internationale. Et au jeu des décisions politiques visant à favoriser son industrie nationale, Washington possède une certaine expérience : interdiction de Concorde sur le sol américain dans les années 70, annulation de l’appel d’offre sur l’avion militaire KC45 remporté par Airbus puis rédaction de nouvelles règles sur-mesure pour Boeing (2008), ou plus récemment embargo sur les équipements américains entraînant le gel des ventes d’Airbus à l’Iran. Sans réaction de l’OMC.
- Sur les sanctions envisagées par les Etats-Unis : outre les Airbus qui seraient surtaxés de 10%, Washington envisage de taxer des produits qui n’ont pas grand-chose à voir avec cette affaire, comme le vin français ou les fromages italiens. Un prétexte pour Trump pour flatter son électorat agricole ?
Il est aussi intéressant de noter l’évolution des sanctions promises contre les Airbus : annoncées de 100%, les taxes supplémentaires retenues sont finalement 10 fois plus faibles. Les compagnies aériennes américaines ont en effet usé de tout leur poids pour raisonner leur gouvernement : avec des centaines d’Airbus en commande et l’impossibilité de les transformer en Boeing (notamment du fait des problèmes du 787 max), elles sont les premières victimes de ces nouvelles taxes : soit elles payent, soient elles renoncent à leurs avions, annulent des vols et suppriment des emplois.
Avec des paramètres difficilement prédictibles, au premier rang desquels les décisions du Président américain, l’issue de ce conflit n’est pas encore évidente. Cependant certaines conclusions peuvent déjà être tirées. Tout d’abord, l’absurdité du rôle de l’OMC et son incapacité à assurer une paix commerciale se révèlent aux yeux mêmes des plus fervents libéraux. Gageons que ce coup d’éclat médiatique était un baroud d’honneur pour cette organisation moribonde depuis la fin des années 2000.
Ensuite, il serait probablement temps de regarder les Etats-Unis pour ce qu’ils sont, un pays qui défend avant tout ses propres intérêts économiques. La candeur de la déclaration de la Représentation Permanente de la France aux Nations Unies semble presque anachronique:
« L’escalade des tensions commerciales avec notre allié et partenaire américain n’est pas souhaitable et aura des impacts négatifs sur nos deux économies, sur le commerce international et sur l’industrie aéronautique.»
Enfin, notons que les grands discours des gouvernements français, allemands et de la direction d’Airbus (EADS à l’époque) au moment du changement de pacte d’actionnaires en 2012/2013 ont fait long feu. Alors que tous se félicitaient de faire d’Airbus une « entreprise normale » qui ne serait plus sous le joug des Etats grâce à un capital flottant passant à 72%, cet épisode de l’OMC montre qu’il n’en est rien. Les dirigeants européens ont été plus prompts encore à réagir que la direction d’Airbus, bien conscients que l’on touche là à une industrie structurante en terme d’emplois, de sécurité et défense nationales, d’aménagement du territoire, de souveraineté. Aux dernières nouvelles, aucun actionnaire d’Airbus ne s’est pourtant plaint de «l’interventionnisme » de l’Etat sur ce sujet.
Par Rut Mat de la web-redaction de Progressistes
12:39 Publié dans Economie, Point de vue | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : air bus, omc | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |
05/07/2019
Économie. « Sur les épaules de Marx », pour comprendre le capitalisme sur son écran
Des tampons hygiéniques représentant « les richesses créées par les travailleurs » transitent dans des bols sur lesquels on peut lire « profits », « salaires », « cotisations » ou « impôts ». La vidéo YouTube de la série « Sur les épaules de Marx », intitulée « Cachez ce brut que je ne saurais voir », s’efforce de vulgariser au maximum la répartition des richesses et de démystifier l’augmentation du Smic promise en décembre 2018 par Emmanuel Macron. En ligne depuis près de quatre mois, l’épisode a depuis rencontré un petit succès, ouvrant la voie à une saison 2 promise pour le 7 juillet.
« On s’est dit qu’il fallait essayer de démonter la supercherie »
« La ruse, c’est de retirer des tampons du bol “cotisations” pour les mettre dans celui du salaire net, mais aussi dans celui des profits », y racontent Léon et Thallia, tous deux assis sur un canapé dans un salon modeste où l’on aperçoit un volume du Capital de Karl Marx dans une bibliothèque et un portrait du ministre communiste Ambroise Croizat au mur. Comment ces deux jeunes professeurs de sciences économiques et sociales en lycée se sont-ils retrouvés là ? Pour le comprendre, il faut remonter aux derniers jours de l’année passée.
Acculé par une mobilisation des gilets jaunes qui prend à ce moment-là une ampleur grandissante, le président de la République annonce plusieurs mesures lors d’une allocution télévisée. Ce 10 décembre 2018, il proclame : « Le salaire d’un travailleur au Smic augmentera de 100 euros par mois dès 2019 sans qu’il en coûte un euro de plus pour l’employeur. » Ce qui fait bondir Fanny, une statisticienne de 27 ans, par ailleurs militante du Parti communiste français. « Quand on a entendu ça, avec des amis, on s’est dit qu’il fallait essayer de démonter la supercherie. » Car, si la nouvelle peut séduire à première vue, le fait d’augmenter les salaires sans mettre à contribution le patronat sent l’entourloupe. À ce moment-là, sur les ronds-points et dans les rues, gilets jaunes et chasubles rouges ne sont pas dupes, mais la démonstration est loin d’être partagée massivement.
Après discussions, les trois amis décident de réaliser des vidéos sur leur temps libre, via une chaîne YouTube, le site hébergeur de vidéos le plus consulté de France. « Nous voulions qu’elles répondent à deux critères, précise Fanny. Qu’elles soient courtes pour être regardées entièrement, et qu’elles parlent de ce qui se passe autour de nous. De nos vies. » Un vrai défi, car l’analyse marxiste, par essence systémique, conduit à ne laisser de côté aucun champ d’étude. « Il faut que le propos aille à l’essentiel et on doit accepter de ne pas tout dire. C’est un bon exercice ! » sourit la jeune femme.
Si l’on en juge par le visionnage des premières vidéos, le pari semble réussi puisque aucune n’excède six minutes. Une prouesse qui n’existerait pas sans les savoir-faire de Benjamin et Lucas à la caméra et au montage. Dans les quartiers où ils vivent et militent, les jeunes vidéastes font face au besoin grandissant de comprendre ce qui se passe, « car les gens se rendent compte que le système économique dans lequel nous sommes est dans l’impasse ».
« Démystifier le réel pour apporter des clés de compréhension »
Alors, à travers ces vidéos, ils ambitionnent de donner « des outils de compréhension » et « des perspectives de lutte ». Mais, pour y parvenir, il faut une méthode rigoureuse. « Par exemple, pour construire la vidéo sur le chômage de la saison à venir, nous avons décrypté plusieurs types de politiques en différentes séquences. On construit ensuite un scénario en s’appuyant sur des données statistiques. » D’où la liste exhaustive des sources dans les informations inscrites sous la vidéo. « Évidemment, ça prend un peu de temps », fait remarquer Fanny. « Notre but, c’est de démystifier le réel pour apporter des clés de compréhension, pas de démystifier le réel pour créer de la confusion », précise-t-elle.
Comme une manière de se différencier de nombreuses chaînes YouTube, qui, du révisionnisme aux théories du complot, cherchent à manipuler les esprits en dévoyant la réalité. Depuis le premier épisode en janvier, « Sur les épaules de Marx » voit son audience s’accroître progressivement pour atteindre le millier de vues et presque autant d’abonnements. À titre de comparaison, les vidéos traitant d’économie et mises en ligne par le quotidien libéral l’Opinion plafonnent à 150 vues sur YouTube. Et ce, alors même qu’elles sont plus courtes et que les moyens dont dispose ce journal dépassent largement ceux des auteurs de la jeune chaîne d’éducation populaire.
Encouragée par des internautes, l’équipe de vidéastes marxistes fait aussi l’objet de l’attention croissante d’économistes, tels que Denis Durand. « Ces vidéos sont une excellente initiative, d’autant que cela permet d’entrer en résonance avec des alternatives », juge le codirecteur de la revue Économie et politique. Et d’ajouter que ces clips peuvent être une réponse aux « leçons de morale que l’idéologie néolibérale assène aux salariés ». « Nous préparons déjà la saison 3, sur l’entreprise et les grands groupes », dévoile Fanny.
De quoi donner des armes pour démêler et défaire la toile capitaliste. Même si, pour Denis Durand, « on comprendra mieux le capitalisme le jour où on l’aura remplacé par un autre système ».
11:52 Publié dans Economie, Point de vue, Pour les nuls | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : economie, marx, vidéos | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |