31/08/2017
Loi travail XXL. Moins de droits pour les salariés, plus de pouvoirs pour les employeurs
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29/08/2017
Le capitalisme est incompatible avec la survie de la planète
Humanite.fr, Jean-Jacques Régibier
(1) Colloque au Parlement européen, 27 mars 2017, Bruxelles publiées dans les Proceedings of the Natural Academy of Science ( PNAS )(3) publié en juillet par l’Agence américaine océanique et atmosphérique ( NOAA ) et L’American Meteorological Society ( AMS ),(4) Le Global Foodprint Network, Oakland ( Californie )(5) Daniel Tanuro, « L’impossible capitalisme vert », La Découverte.
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05/08/2017
Quelle libération ?
Patrick Le Hyaric, directeur de l'Humanité, député Européen
La guerre idéologique ne prend pas de vacances. Ainsi nous venons d’assister il y a quelques jours à un déferlement de commentaires et d’analyses où l’ignorance crasse était en compétition avec l’imbécilité pour faire adopter l’idée que ce 29 juillet était le jour de… « La libération fiscale ». Ce concept, aussi vieux que les contributions, a émergé aux États-unis en 1948 et a été relancé ici par une sombre association dite «des contribuables associés». Il a été repris en cœur par tous les médias bien pensants ayant en sainte horreur ce que nos concitoyens pourraient posséder en commun, qu’il s’agisse de la protection sociale, des hôpitaux, des écoles comme des chemins de fer. Même Wikipédia se croit obligé de reprendre ces balivernes relancées par des instituts économiques de droite.
De quoi s’agit-il au fond ? Ce jour dit de « la libération fiscale » serait le premier jour où les Français travailleraient enfin pour « eux » et non plus pour une pieuvre anonyme loin d’ici baptisée « l’État ». Ainsi, insidieusement, l’État devient « étranger » au pays, à celles et ceux qui y vivent. L’utilisation de ce mot « libération» est encore plus odieuse puisque qu’il qualifie souvent la fin de l’occupation allemande. L’État est donc assimilé ici, par ces faussaires, à un corps étranger qui, contre notre gré, nous ponctionnerait impôt sur le revenu, impôt local, cotisations sociales. Aucun républicain ne peut laisser sans réagir et sans les combattre ces fausses thèses qui visent à glorifier le laisser faire, l’individualisme et la loi de la jungle qui écrasent d’abord les plus faibles.
On n’a pas entendu ces perroquets de la pensée libérale se plaindre quand ce même État a répondu aux suppliques des institutions financières pour les sauver lors de la récente crise financière dont elles étaient elles-mêmes à l’origine. Ni non plus quand il transfère davantage de valeur issue du travail vers le capital avec les exonérations fiscales et sociales diverses ou des mécanismes comme le CICE ou le pacte de solidarité du précédent quinquennat qui pourtant n’ont pas créé les emplois promis.
Cette rengaine lancée la semaine même où la majorité de nos concitoyens protestaient contre le rabotage de l’aide personnalisée au logement ne doit évidemment rien au hasard. Le projet des libéraux droitiers est de détruire jusqu’à l’idée de « biens communs », voire de l’organisation des sociétés à partir de la justice et de la solidarité.
Il n’est pas question ici de défendre ce qui existe, d’approuver la manière dont l’argent public est utilisé pas plus que l’injustice fiscale, autant d’enjeux qui appellent de profondes transformations progressistes. Mais elles ne pourraient voir le jour si nous laissions l’idéologie libérale transformer la participation de chacune et de chacun au bien commun, la cotisation ou l’impôt en « prélèvements » et en « charges ». C’est l’inégale répartition des richesses, c’est l’injustice, c’est l’État de moins en moins social qui produisent des laissés-pour-compte que nous combattons. Suivre les officines de la pensée libérale voudrait dire moins d’infirmières pour soigner tout le monde dans des hôpitaux publics, pas d’enseignants pour éduquer, former nos enfants, plus de sapeurs pompiers pour aller c
ombattre les feux de forêts ou pour se porter au devant d’un accident de la route, moins de magistrats pour rendre la justice, de policiers pour assurer la sûreté et moins de routes, moins de trains, moins de théâtre, d’écoles de musique ou de clubs de sport.
Laisser prospérer cette folle idée selon laquelle les salariés et les entreprises ne travaillent pas pour eux quand une partie de la valeur créée ou du salaire ne sert pas à la société commune est extrêmement dangereux. Certes, elle permet à ses promoteurs de se dispenser de poser la question cruciale de l’augmentation des salaires en ouvrant la voie à la grande béance des inégalités, à la destruction définitive d’un projet de nouveau contrat social et de nouveau pacte républicain.
Ce dernier devrait porter un processus de justice fiscale et sociale, la lutte contre l’évasion fiscale qui représente un manque à gagner de 80 milliards d’euros pour notre pays, 1000 milliards pour l’Union européenne. On parle bien peu d’un prélèvement privé, celui des taux d’intérêts bancaires qui selon leur niveau sont bien une entrave à l’investissement et à la satisfaction des attentes des particuliers. Or ces taux de prélèvements enrichissent les banques et les fonds financiers. Ils handicapent d’autant le développement des entreprises qui dans ces conditions réduisent les rémunérations du travail ou l’emploi.
En vérité, il y a bien une « libération » à obtenir : celle du carcan vorace de l’argent-roi contre nos concitoyens, de leurs biens publics, du travail, de la production et de la consommation. Telle serait la voie pour concilier le mieux vivre, le projet individuel de chacun avec un grand projet commun de vie en société susceptible de remobiliser nos concitoyens.
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27/07/2017
La journée à 1 million d’euros de Muriel Pénicaud
L'Humanité, Sébastien Crépel
80 c’est, en années de smic net, l’équivalent de la plus-value touchée par Muriel Pénicaud sur la revente de ses stock-options.80 c’est, en années de smic net, l’équivalent de la plus-value touchée par Muriel Pénicaud sur la revente de ses stock-options
Plus d’un million d’euros de plus-values boursières par un simple jeu d’écritures : c’est la somme gagnée en une journée par Muriel Pénicaud comme directrice générale des ressources humaines (DGRH) chez Danone, le 30 avril 2013. Et cela alors que le groupe s’apprêtait à supprimer 900 emplois de cadres, dont 230 en France. L’information fait tache sur le CV de la ministre du Travail, au moment où celle-ci défend mordicus au Sénat l’idée que faciliter les licenciements sera in fine bénéfique à l’emploi et donc aux salariés.
Selon les comptes officiels de Danone pour l’année 2013 que l’Humanité a consultés, Muriel Pénicaud a en effet perçu un gros paquet de stock-options pour ses états de service au comité exécutif du groupe alimentaire. Enregistrée par l’Autorité des marchés financiers à la date du 30 avril 2013, la transaction porte sur un lot de 55 120 actions acquises à une valeur de 34,85 euros l’unité, bien en dessous du cours de l’action ce jour-là, et revendues aussitôt pour l’essentiel (52 220 actions) à 58,41 euros l’unité, au cours du marché. Soit 1 920 932 euros à l’achat, et 3 049 966,54 euros à la revente. Bilan de l’opération : une plus-value immédiate de 1 129 034,54 euros, non comptées les 2 900 stock-options restant alors en sa possession
La cagnotte boursière de 1,13 million d’euros de Muriel Pénicaud n’est pas tombée du ciel. Pour réaliser un tel bénéfice de près de 60 % sur sa mise de départ, la ministre a profité de la remontée de l’action qui a suivi l’annonce d’un plan de restructuration du groupe, faisant grimper le cours dans les semaines qui ont précédé la transaction. Dans le cadre d’« économies de fonctionnement » de 200 millions d’euros décidées en 2012, la direction de Danone a, en effet, annoncé, le 19 février 2013, la « suppression d’environ 900 postes managériaux et administratifs répartis dans 26 pays européens ».
Le titre Danone s’envole à 55-60 euros en avril-mai
Un choix immédiatement salué par les marchés financiers par un bond du titre, comme l’a relevé toute la presse à l’époque. « La Bourse achète ce discours : l’action prenait presque 5 % mardi matin (19 février 2013 – NDLR) en début de séance », soulignait ainsi le Figaro. « À court terme, des destructions d’emplois peuvent remonter le cours de l’action et vont donc bénéficier au capital, contre la production et la valeur ajoutée », confirme l’économiste spécialiste des entreprises qui siège au Conseil économique, social et environnemental (Cese), Frédéric Boccara, membre des Économistes atterrés et de la direction du PCF.
À partir de cette date, le cours de l’action marque en effet une césure nette : d’une cotation située au-dessous de 52 euros l’action avant l’annonce du plan de destruction d’emplois, le titre Danone s’envole à 55-60 euros en avril-mai, accélérant plus vite que la moyenne du CAC 40, pour ne plus redescendre avant octobre 2013. Tout bon pour Muriel Pénicaud, qui fait valoir ses stock-options pile à l’expiration du délai de garde de quatre ans exigé par Danone pour en bénéficier.
Quand il procède à cette restructuration, le groupe est pourtant loin d’être au bord de la faillite. Danone vient au contraire de battre le record de son chiffre d’affaires, passant pour la première fois en 2012 le cap des 20 milliards d’euros dans le monde, en hausse de 8 % en un an. Et les perspectives pour 2013 sont bonnes, avec une nouvelle progression escomptée d’au moins 5 %. Mais, pour le PDG du leader mondial des produits laitiers et numéro deux des eaux en bouteilles, Franck Riboud, la marge avant impôts de Danone, déjà très élevée à 14,18 %, soit près de 3 milliards d’euros, est encore insuffisante. L’Europe montre des signes de fléchissement, avec une baisse des ventes de 3 % et une marge de « seulement » 15,66 %, supérieure aux autres continents, mais en recul par rapport à 2011 (17,37 %). Cela, le PDG de Danone, qui vient de proposer un dividende en hausse de 4,3 % à ses actionnaires, ne le supporte pas : « C’est une équation qui n’est pas pérenne, et une situation que nous allons surmonter », grâce à « une adaptation de nos organisations » visant à « redonner de la compétitivité et de l’efficacité en Europe », déclare-t-il. L’idée d’un plan de suppression d’emplois est lancée, à la grande joie de la Bourse… et du porte-monnaie de la future ministre du Travail.
D’autant que celle-ci n’a pas seulement fait une affaire à la revente. Le prix d’achat de ses actions s’est aussi avéré ultrarentable : à 34,85 euros l’unité, elle en a fait l’acquisition au cours proche du plancher de ces dix dernières années. Le mécanisme des stock-options est ainsi fait que le prix d’acquisition est fixé lors de l’attribution des actions plusieurs années avant que son bénéficiaire ne les achète réellement : on parle d’« option d’achat ». Quand vient le moment pour le haut dirigeant de « lever l’option », c’est-à-dire de débourser l’argent pour les acquérir, il le fait au prix fixé à l’avance. Pour Muriel Pénicaud, cela s’est très bien agencé : ses stock-options, et le prix qui leur était attaché, lui ont en effet été attribuées le 23 avril 2009, juste après l’effondrement des valeurs boursières du CAC 40 à la suite du krach de 2008-2009. Entre le 8 janvier 2008 et le 19 mars 2009, l’action Danone a perdu ainsi près de la moitié de sa valeur, passant de 63,71 euros à 33,67 euros. À quelques mois près, la ministre, qui siégeait au comité exécutif du groupe en tant que DGRH depuis mars 2008, aurait peut-être dû mettre ses stock-options à la poubelle !
C’est en effet l’autre avantage de ce mode de rémunération prisé des PDG, à l’instar de ceux de Danone ou de Renault : comme il s’agit d’une « option d’achat », le dirigeant ne court aucun risque, puisqu’il peut tout simplement renoncer à acheter s’il constate que l’action a perdu de sa valeur. Ici, rien de tel : si la terrible crise économique a fait des perdants, elle a aussi fait des gagnants et Muriel Pénicaud en fait partie. La chance lui a souri d’ailleurs jusqu’au bout, puisqu’elle est l’une des dernières dirigeantes de Danone à avoir bénéficié de stock-options avant que l’entreprise ne renonce à ce type de rémunération en 2010, au profit d’attributions d’actions liées à la performance.
Contacté à plusieurs reprises par l’Humanité, le cabinet de la ministre du Travail n’a pas souhaité donner suite à nos demandes de réactions de sa part. Quant à Danone, l’entreprise s’est contentée de confirmer nos informations sur les stock-options dont a bénéficié son ex-DGRH, sans dévoiler d’autres éléments de rémunération.
« Muriel Pénicaud n’a rien à voir avec le monde du travail »
Reste que cela écorne sérieusement le portrait de la ministre, dépeinte dans la presse comme une DRH attentive à la démocratie sociale et au facteur humain. « C’est quelqu’un qui se prétend salarié mais qui se situe objectivement du côté des intérêts du capital, et qui s’est trouvé à ce titre directement intéressé aux destructions d’emplois, estime l’économiste Frédéric Boccara. Elle a peut-être une fibre sociale quand elle va à confesse, mais elle n’a rien à voir avec le monde du travail, celui des salariés, mais aussi celui des artisans et même des petits patrons. » Lors de sa nomination, la fédération CGT de l’agroalimentaire avait d’ailleurs dénoncé les « bons et loyaux services » de l’ex-DGRH qui a « estampillé » le plan social de 2013 déguisé en « départs volontaires », selon le syndicat, une « véritable Bérézina pour les salariés ».
Muriel Pénicaud, qui a cumulé les rémunérations de Danone avec celles perçues au conseil d’administration d’Orange (58 000 euros de jetons de présence perçus en 2013 pour l’exercice 2012) et a occupé les fonctions de directrice générale adjointe de Dassault-systèmes et d’administratrice de la SNCF, ne s’est d’ailleurs pas appliquée à elle-même la recommandation d’un rapport qu’elle a cosigné en 2010, et qui préconisait de prendre en compte la « performance sociale » dans la rémunération variable des dirigeants d’entreprise, plutôt que la seule « performance économique ». En l’occurrence, concernant les stock-options, l’indexation sur le seul cours de la Bourse.
Un amendement propose d’interdire toute suppression d’emploi boursière
Mais le plus embarrassant est sans doute la réponse faite le 12 juillet en présence de la ministre par le rapporteur de la loi travail bis, le député macroniste Laurent Pietraszewski, à un amendement de Sébastien Jumel (PCF). Ce dernier proposait d’interdire « toute suppression d’emploi (…) lorsque l’entreprise a distribué des dividendes ou des stock-options ou des actions gratuites ». Soit exactement ce qui s’est passé chez Danone en 2013. « Nous sommes tous au clair là-dessus, lui a répondu le rapporteur en motivant le refus de l’amendement. Nul ne souhaite en effet qu’une entreprise qui réalise un bénéfice ou distribue des dividendes à ses actionnaires puisse en même temps licencier en toute impunité des salariés pour des raisons d’opportunité financière. » Et la ministre d’ajouter dans l’Hémicycle : « Même avis »…
Après le plan de restructuration de 2013, le groupe a annoncé en juin 2014 la fermeture pour la mi-2015 de ses usines de Casale Cremasco en Italie, de Hagenow en Allemagne et de Budapest en Hongrie, entraînant la suppression de 325 postes. La faute à une « baisse significative des ventes » en Europe qui a entraîné des « situations de surcapacité locale » de production, a expliqué la direction. En revanche, dans le même temps, la profitabilité de la branche Europe de Danone s’est spectaculairement redressée, passée de 14,42 % de taux de marge avant impôt en 2013 à 17,26 % en 2015, tirant vers le haut toute l a rentabilité du groupe au niveau mondial. Les dividendes servis aux actionnaires ont suivi le même chemin, passant de 1,45 euro par action pour l’exercice 2013 à 1,60 euro en 2015 (+ 10,3 %).
09:59 Publié dans Actualités, Economie, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : muriel pénicaud stocks options danone | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |