26/12/2018
Fabien Roussel : "Les Français ne sont pas contre l'impôt"
Elu secrétaire national du Parti communiste français fin novembre, Fabien Roussel revient pour Paris Match sur l'année écoulée et se penche sur l'avenir de la gauche.
Depuis son élection à la tête du Parti communiste français, Fabien Roussel a passé plus de temps sur les ronds-points aux côtés des «gilets jaunes» et sur les plateaux de télévision que dans son nouveau bureau, au siège historique du PCF, place du Colonel-Fabien à Paris. Mi-décembre, lui qui jure qu’il ne s’était «jamais imaginé» dans le fauteuil autrefois occupé par Georges Marchais, n’avait pas encore eu le temps de défaire ses cartons. C’est donc dans une salle de réunion qu’il nous a reçus, dans les étages du bâtiment emblématique conçu par l’architecte Oscar Niemeyer, que la lumière traverse de part en part. A la fenêtre, le Sacré-Cœur, symbole haï des communards, semble vous toiser depuis sa butte.
A 49 ans, Fabien Roussel a pris les commandes d’un PCF qui n’est plus que l’ombre de ce qu’il était lorsque, jeune lycéen engagé au milieu des années 1980, il milita contre l’Afrique du Sud de l’apartheid. A l’époque, se souvient-il, Nelson Mandela n’était pas encore devenu un symbole politique universel, courtisé bien au delà des rangs de la gauche révolutionnaire. Cette participation des communistes au combat contre le racisme d’Etat sera rappelée, assure Fabien Roussel, au moment du centenaire du PCF, en 2020. Cet anniversaire «sera l’occasion pour nous de montrer le rôle qu’a joué le parti dans l’Histoire de France», souligne-t-il. Interrogé par Match à l’issue d’une année intense, le nouveau secrétaire national espère trouver, dans le tumulte, le temps pour réfléchir, et pas seulement réagir. L’enjeu est vital, car dans une gauche en mutation, le risque est grand que le PCF ne soit bientôt rien de plus qu’un symbole du passé.
Paris Match. Le mouvement des «gilets jaunes» a bousculé la majorité et l’exécutif. Il a sans doute été un moment de rupture dans le quinquennat d’Emmanuel Macron. Qu’a-t-il signifié pour la gauche?
Fabien Roussel. Il signifie que pour nous à gauche, c'est le moment de montrer que c'est possible de mieux répartir les richesses, de redonner du pouvoir d'achat aux retraités et d'augmenter les salaires. Pour moi, Macron est maintenant identifié comme le président des riches mais aussi comme celui qui mène une politique clairement à droite en faveur du capital. Cette politique-là, ça fait 40 ans qu'on la subit. Il ne faut pas plus de capitalisme, mais un nouveau modèle économique qui respecte l’humain et la planète.
Vous avez soutenu sans ambiguïté les «gilets jaunes». Que répondez-vous à ceux qui, au sein de ce mouvement, réclament un régime plus autoritaire, incarné par exemple par des personnalités militaires?
Je ne crois pas que la réponse soit liée à une personnalité, quelle qu'elle soit. Il faut, là aussi, changer de modèle, car actuellement, on peut changer de président de la République tout en conservant la même politique. Il faut qu’aboutisse une prise de conscience, qui a été accélérée par le mouvement des «gilets jaunes». Certains disent : «Il nous faut un homme d’autorité». Mais il y a aussi une envie d’être entendus et respectés. C’est contradictoire, mais il faut prendre ce mouvement avec ses excès et ses contradictions, même si on ne partage pas tout.
"Il faut découpler les législatives de la présidentielle"
Vous défendez régulièrement le rôle des partis dans la vie politique. La popularité du référendum d’initiative citoyenne, auprès des «gilets jaunes», n’est-elle pas une mise en cause directe de ces partis?
Je défends l'idée d'une démocratie véritable avec des élus représentants du peuple, en lien avec le peuple et respectueux du peuple. Le référendum, ça peut être l'occasion de solliciter l'avis du pays sur une question qui se pose à un moment donné. Mais ça ne résoudra pas tout. Il faut aussi élire des sénateurs et des élus respectueux du choix des Français.
La démocratie ne s’est-elle pas exprimée en juin 2017, lorsqu’après la victoire d’Emmanuel Macron face à Marine Le Pen, les électeurs ont donné à son parti une large majorité à l’Assemblée nationale?
C’est le problème de nos institutions actuelles : il faut découpler les législatives de la présidentielle pour sortir de ce piège. La dernière présidentielle a été l’occasion d’un appauvrissement de la démocratie : ce n’était plus le choix d'un projet de société, mais un vote pour l’un afin de faire barrage à l’autre. Il faudrait qu’après une victoire dans de telles circonstances, le président soit obligé de tenir compte des prochaines élections susceptibles de remettre les compteurs à zéro.
En 2020, à l’occasion du centenaire du Parti communiste français, vous avez l’intention de rappeler la place du parti dans l’Histoire de France. Quelles leçons en tirez-vous pour le présent?
Cette histoire illustre ce qu’est le PCF, notre manière de travailler. Nous ne regardons pas l'étiquette de ceux qui sont en face de nous pour dire : «Travaillons ensemble.» Quand nous avons participé à la Résistance, nous étions avec d'autres forces, car c'était dans l'intérêt du pays. Quand nous avons rebâti la France avec le général De Gaulle, c'est parce qu'il y avait un programme issu du Conseil national de la Résistance, que nous avions construit et écrit ; et avec lui, nous l’avons mis en œuvre. C’est cela aussi, l’héritage du Parti communiste français.
Vous qualifiez parfois le ministre de l’Action et des comptes publics Gérald Darmanin de «camarade». Est-ce l’illustration de cette capacité à travailler avec vos adversaires?
On se connaissait avant. Il connaît la problématique économique du bassin minier : cela permet d’avoir des contacts directs. Par ailleurs, je ne connais pas Bruno Le Maire, mais nous avons travaillé de manière étroite sur le dossier de l’aciérie Ascoval. Je dis toujours que nous ne sommes pas un parti d’opposition mais de propositions. Je n’attaque pas les personnes, je combats les idées. Je soutiens par exemple la suppression de la hausse de la CSG pour une partie des retraités.
Il y a vingt ans, les communistes participaient à la gauche plurielle. Le PCF relevait alors de la «gauche de gouvernement». Aujourd’hui, on peine à imaginer que ce qualificatif, souvent employé pour désigner le centre-gauche ou la gauche libérale, puisse s’appliquer à vous. Comment l’expliquez-vous?
Le Parti socialiste, qui était hégémonique et qui a eu le pouvoir, a déçu. Malgré les 35 heures et les avancées importantes obtenues à l’époque, on n’est pas sorti du modèle économique dominant. La gauche doit se fixer pour objectif d’en inventer un nouveau et ça n’a pas été fait sous Jospin. A l’époque, j'ai été le conseiller de la ministre du Tourisme : je l’ai vécu de l’intérieur. On avait un ministre de l’Economie qui s’appelait DSK et qui, pour bien des grandes mesures, disait : ça n’est pas euro-compatible. Il fallait s'inscrire dans les clous des traités européens et donc dans le modèle libéral.
"L'impôt, c'est le prix à payer pour vivre dans un monde civilisé"
Vous prônez le changement de modèle économique. Au cœur des inquiétudes contemporaines en matière d’économie se trouve le sujet de la dette, souvent présentée avant tout comme un fardeau pour nos enfants. Quelle réponse y apportez-vous?
Une réponse simple. Le déficit de la France, c’est 70 milliards d’euros. Si l’on s’attaque à l’évasion fiscale et si l’on augmente les recettes de l’Etat, on peut faire rentrer 100 milliards d’euros. Et je parle de l’évasion fiscale mais il faut considérer les mesures récentes de ce gouvernement : la suppression de l'ISF, de l’exit tax, la flat tax… Cela représente 12 milliards d’euros de cadeaux fiscaux! Comment voulez-vous qu’ils nous parlent de déficit? Ils le creusent eux-mêmes. Ils ne peuvent plus demander d’efforts aux Français.
Une expression est arrivée dans le lexique politique durant le mandat de François Hollande : le «ras-le-bol fiscal». Cette idée est au cœur du mouvement des «gilets jaunes». N’y a-t-il pas un problème en France autour de la question du consentement à l’impôt?
Il y a un problème à cause de ces grandes fortunes et de ces «grosses têtes», comme on dit dans le peuple, qui ne payent pas l'impôt comme tout le monde. Les Français ne sont pas contre l'impôt. Ils sont pour un impôt juste et pour que tout le monde paie. D'ailleurs, nous disons, nous les communistes, que l'impôt, c'est le prix à payer pour vivre dans un monde civilisé. Les «gilets jaunes» que j'ai reçus récemment m'ont dit : «Mais nous on veut payer l'impôt sur le revenu. On veut gagner suffisamment pour le payer.» Ils ne réclament pas «zéro impôt». Certains réclament une baisse des taxes sur les produits de première nécessité pour augmenter le pouvoir d’achat. Cela, nous le défendons aussi.
Député, vous vous êtes particulièrement attaqué aux paradis fiscaux, au cœur des mécanismes d’optimisation fiscale. Bruno Le Maire a récemment indiqué sa volonté de faire payer les géants du web. N’est-ce pas une avancée?
Il se trouve dans l’impasse! Quand Bruno Le Maire annonce qu’il va taxer les multinationales dont le siège se trouve dans les paradis fiscaux, de quels paradis fiscaux parle-t-il? Sa liste est bidon! Quelle multinationale a son siège au Botswana ou à Niue (île de l'Océan pacifique, Ndlr)? Ce sont pourtant ces Etats qui figurent sur la liste française.
Les relations entre les communistes et la France insoumise sont un des sujets importants pour l’avenir de la gauche. Lorsque Jean-Luc Mélenchon et son parti ont fait l’objet de perquisitions à l’automne dernier, vous lui avez apporté votre soutien. Pourquoi?
Concernant cette perquisition, j’ai trouvé les moyens démesurés par rapport au sujet. C’est donc ce que j’ai dit. Mais je n’aurais pas eu le même comportement que Jean-Luc Mélenchon : nous sommes différents. Sa colère explose, moi j’ai un autre tempérament.
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23/02/2018
Nucléaire : pourquoi les partisans de Mélenchon se trompent
Quelques arguments ici autour du nucléaire civil, alors que sont lancées plusieurs campagnes en France en faveur de la « sortie du nucléaire », notamment par les partisans de Mélenchon (FI, PG). Ces campagnes se font à coup de tracts, d’affiches (ci dessous une illustration) avec pour point d’orgue un « référendum » sur le sujet.
Les argumentaires « antinucléaires » que l’on peut lire sur ces tracts ou dans des livrets du « parfait militant » se contentent de jouer sur les peurs, et expédient en quelques lignes la difficile équation énergétique, équation qui doit pourtant tenir compte des besoins mondiaux, de l’épuisement des ressources, et du grave problème du réchauffement climatique et des pollutions en générales.
Aussi remarquons que ces campagnes émanent toutes de partis politiques ou organisations (PG, ELLV, Greenpeace…) qui consacrent pourtant de longs passages de leurs textes fondateurs sur la menace que fait peser le réchauffement climatique à toute l’humanité et l’urgence et la nécessité de le combattre.
Pourtant, il est contradictoire d’affirmer qu’il faut « sortir du nucléaire » en avançant l’argument de la dangerosité, tout en sachant que le GIEC reconnaît clairement que cette énergie sera un des leviers incontournables pour contrer le réchauffement climatique, et en même temps, répondre à une demande mondiale considérable pour 20501 afin de satisfaire au droit à l’énergie si vital pour des milliards d’être humains. Rappelons qu’un réchauffement global de +5°C prévu pour la fin de ce siècle si rien n’est fait, c’est une planète méconnaissable, et qui pourra difficilement nourrir les 10 milliards d’êtres humains qui s’y trouveront. Difficile de balayer cela d’un revers de main si on est un minimum progressiste et internationaliste.
Précisons un peu mieux les données du problème concernant le niveau de dangerosité du nucléaire mais aussi des autres activités industrielles en général :
L’accident nucléaire
Dans le domaine de l’énergie, le risque d’un accident nucléaire est l’argument le plus fort pour l’arrêt du nucléaire civil. C’est peut-être l’objection la plus sérieuse et la plus fondée à l’utilisation de cette énergie, cela est vrai. Et c’est un point qui revient systématiquement dans les débats, ce qui traduit une vraie préoccupation chez les citoyens.
Le risque qu’un accident majeur se produise en France existe bel et bien, même si sa probabilité est extrêmement faible. Là comme ailleurs, le risque zéro n’existe pas.
Est-ce que, pour autant, cet événement très rare qu’est l’accident majeur, avec des conséquences importantes, doit nous conduire à sortir du nucléaire en France ? Un tel raisonnement, bien que séduisant et somme toute assez confortable, nous conduit à une impasse, et nous amènera à répondre par la négative à cette question.
Tout d’abord, si, parce qu’il y a risque d’un accident, même très faible, il faut sortir du nucléaire, alors il va falloir faire la liste de tous les domaines où il y a des risques comparables, et en sortir aussi si on veut être cohérent et ne pas motiver une telle décision juste pour « surfer » sur une peur. (voir plus loin explication autour de l’accident de Fukushima)
Sortir de l’hydraulique ?
Prenons l’exemple de Grenoble. Cette agglomération est entourée de barrages qui, s’ils venaient à se rompre, produiraient une vague de boue et de débris de la hauteur d’un bâtiment de quatre étages et qui déferlerait sur la ville à près de 200 km/h (scénario catastrophe décrit dans le PPRI2 [Plan de prévention des risques d’inondation]). On disposerait de quelques minutes pour prévenir les 400 000 habitants de l’agglomération. Et cette vague emporterait tout, y compris des usines du secteur de la chimie, avec des produits hautement toxiques qui seraient disséminés.
Le bilan serait catastrophique : des dizaines de milliers de victimes et des vallées polluées à jamais. Bien sûr, on pourra objecter que, pour qu’un barrage se rompe, il faut qu’il y ait de gros défauts de conception et de construction. D’autre part, ce type de rupture donne des signes et prévient, le plus souvent, et donc on aura toujours le temps d’évacuer, et même de réparer le défaut ou de vider le barrage. Mais, comme pour le nucléaire, toutes ces objections ne réduisent pas le risque à zéro. Cela reste malgré tout possible. Alors, faut-il sortir de l’hydraulique ?
Sortir de la chimie ?
Des sites industriels à risque, classés Seveso, sont présents par centaines sur tout notre territoire. Ils touchent essentiellement le secteur de la chimie, crucial dans tous les aspects de nos vies. Sur le Rhône, il en existe qui peuvent déverser des poisons mortels et polluer le fleuve de façon irréversible pour des milliers d’années. Ce sont des scénarios catastrophes qui existent, qui sont très officiels et pris au sérieux par les préfectures. Dans le cas d’une explosion avec déversement de produits hautement toxiques, il y aura des victimes, mais aussi un environnement pollué pour des générations. Et insistons sur ceci : malgré toutes les précautions prises, le risque est réduit mais pas nul. Faut-il pour autant renoncer au secteur de la chimie ?
Arrêter les recherches en biochimie, sur les virus, les bactéries ?
Mettre au point de nouveaux vaccins, comprendre le fonctionnement des virus, faire reculer les maladies, n’est pas sans risque, car la dissémination des germes sur lesquels on travaille pourrait provoquer des catastrophes sanitaires à l’échelle planétaire – cela a inspiré de nombreux films « catastrophes » d’ailleurs. Pour réduire au minimum ces risques, les laboratoires dans lesquels ces recherches s’effectuent sont extrêmement surveillés, avec des protections et des mesures draconiennes. Il y a ainsi de multiples barrières de protection à franchir avant que les virus ne puissent sortir. C’est rassurant, mais, encore une fois, le risque n’est pas nul : il y a toujours une possibilité qu’un supervirus sorte et décime les populations. Ces laboratoires sont dits« P4 »3, il en existe deux en France et une bonne vingtaine dans le monde. Faut-il, au nom du risque d’une possible épidémie mondiale, abandonner pour autant ces recherches, et donc mettre un frein à tout progrès dans le domaine de la médecine ?
Sortir du pétrole, du gaz et du charbon ?
On peut en dire autant de la possible explosion d’un navire transportant du GNL (gaz naturel liquéfié) : une boule de feu de 1 km de diamètre pourrait se former lors d’une telle explosion en plein port (scénario très officiel qui sert de référence aux préfectures). On pourrait aussi parler du risque de marée noire, toujours réel : des millions de tonnes de pétrole avec, plus grave, les métaux lourds contenus dans ce pétrole polluant de façon irréversible des écosystèmes entiers. Nous avons vu également la pollution silencieuse du charbon, qui n’est pas un risque mais une réalité quotidienne. Et ces trois énergies émettent beaucoup de CO2. On pourrait donc aussi parler du risque climatique qui est une catastrophe globale qui pourrait être classée XXL pour ses conséquences en comparaison avec les risques industriels (des centaines de millions de victimes dans un proche avenir ?).
Au nom de tous ces risques, faut-il plutôt prioritairement sortir du pétrole, du gaz, du charbon ?
À partir de ces exemples, on comprend que si on généralise le raisonnement avec le nucléaire, il faudrait alors « sortir de tout », organiser des référendum sur la sortie de l’hydraulique, de la chimie, de la biologie, du gaz, du pétrole, du charbon, ce qui pose tout de même un gros problème.
Et si on reprend la logique de la carte de France imprimé par les partisans de Mélenchon : il n’y aurait plus de place en France où vivre:
Sortir du nucléaire pour entrer dans le charbon et le gaz…
Par ailleurs, il ne faut jamais oublier que sortir de certains risques (par exemple le risque du nucléaire) c’est entrer dans d’autres risques majeurs, qui ne sont d’ailleurs plus vraiment de simples risques, mais des dangers avérés avec des conséquences certaines (les pollutions quotidiennes, le réchauffement climatique, la pénurie d’énergie…). En effet, aujourd’hui, et l’Allemagne le démontre à grande échelle, sortir du nucléaire implique forcément d’entrer dans le charbon et le gaz. Avec le cas allemand, la fable du nucléaire remplacé par de l’éolien et du photovoltaïque, le tout accompagné d’une diminution de la consommation, ne fait plus illusion : ce que les professionnels clament depuis des années finit par s’imposer comme une évidence. On se débarrasse du risque nucléaire pour mieux embrasser les conséquences du charbon et du gaz : les 5°C de réchauffement climatique d’ici 2100, les famines généralisées touchant des milliards d’êtres humains, sans compter l’ empoisonnement par les métaux lourds de la biosphère ainsi que l’acidification des océans .
Tous ces éléments doivent être débattus démocratiquement. Car, après tout, si les citoyens en ont conscience et qu’ils décident malgré tout de « préférer » les risques et pollutions quotidiennes liés aux énergies fossiles, et toutes leurs conséquences à l’échelle planétaire, plutôt que le risque nucléaire, c’est la démocratie qui s’exprime, et ce sera alors une décision légitime. Par contre, ce qui est illégitime, c’est de mettre en avant uniquement les risques du nucléaire, de faire peur en taisant les problèmes que posent les autres alternatives.
Amar Bellal
Amar Bellal, ingénieur de formation (INSA de Lyon), professeur agrégé de génie civil à l'IUT de Rennes, rédacteur en chef de la revue du PCF « Progressistes » et membre du Conseil national du PCF, auteur du livre « Environnement et énergie » (2016). Auteur de « Environnement et énergie, comprendre pour débattre et agir » aux éditions du « Temps des Cerises »
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POUR APPROFONDIR (pour ceux vraiment intéressés par le sujet) :
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Le nucléaire, ses pollutions et ses déchets : une spécificité particulière, par rapport aux autres activités industrielles ? Spécificité qui justifierait de bannir cette activité du champs humain ?
Il est ici fait référence aux pollutions dues aux trois accidents nucléaires et à la production des déchets hautement toxiques et à vie longue (plusieurs centaines de milliers d’années). C’est ce qui fait dire à certains que le nucléaire a une spécificité particulière et qu’il doit être banni des activités humaines.
Mais lorsqu’on compare ces pollutions à celles découlant d’autres accidents, notamment du secteur chimique, il n y a pas lieu de placer ce type de pollution comme un phénomène « à part ». L’accident de Bhopal4 ne nous a pas conduits, par exemple, à un débat pour « sortir de la chimie » et ni même à lancer l’idée d’un tribunal pour juger des « crimes de la chimie » ; cette attitude absurde prévaut pourtant lorsqu’il est question du nucléaire civil5. Bhopal a pourtant un bilan plus lourd, sur le plan sanitaire et humain, que tous les accidents nucléaires réunis. La réaction pour le cas de Bhopal a été autre : refonte des normes de sûreté, campagne contre le comportement des multinationales dans le tiers monde… c’est ce type de réaction qu’il faudrait avoir pour le nucléaire. De même, les 100 t de cyanure rejetées dans la biosphère par l’accident de Tianjin6 en août 2015 n’a pas déclenché la création d’un réseau « sortir de la chimie » ni le déroulement de manifestations un peu partout dans le monde.
Inutile de répéter que les déchets chimiques, rejetés quotidiennement par diverses activités industrielles, ont eux aussi une durée de vie infinie et contaminent toute la biosphère en fonctionnement normal (tous les jours, tous les ans). C’est alors bien plus grave que le nucléaire, activité où les rejets ne se font qu’en cas d’accident ! D’autre part, les volumes ne sont pas du tout identiques. Rappelons que la totalité des déchets nucléaires à vie longue, pour tout le parc nucléaire français, depuis sa création jusqu’à nos jours, a un volume de la taille d’une piscine olympique. Rappelons encore une fois que ces déchets sont confinés et maîtrisés : on se préoccupe de leur devenir, et c’est tout le débat autour du site de stockage Cigéo7 . Les déchets chimiques sont au contraire cent fois plus volumineux et sont, eux, tout simplement rejetés dans la nature.
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Sur l’accident de Fukushima et sur les enjeux de la sureté nucléaire.
Ce qui a entrainé un accident majeur à Fukushima, c’est la perte des systèmes de refroidissement du combustible. Deux scénarios principaux sont alors possibles dans le cas d’une perte de refroidissement, y compris de secours, du réacteur qui conduirait à la fusion du combustible à l’intérieur de l’enceinte de protection.
1. Si l’enceinte de protection remplit son rôle, alors la pollution restera confinée et les populations, après avoir été dans un premier temps évacuées, pourront retrouver leur domicile au bout de quelques jours. Une grosse frayeur, mais pas vraiment de catastrophe : c’est ce qui s’est passé pour l’accident de Three Mile Island (TMI, 1982). Notons que les réacteurs Français sont de ce type, car à l’origine ce sont des réacteurs de conception Etats-uniennes.
2. Si l’enceinte ne remplit pas son rôle, ou le remplit imparfaitement, ou, pis, si elle est inexistante (le cas de Tchernobyl), alors il y a rejet dans l’environnement et on peut s’attendre à des centaines de kilomètres carrés de terre polluée et inhabitable pendant des années, et à de nombreuses victimes si les mesures d’évacuation et de prise de pastilles d’iode n’ont pas été faites rapidement, dès les premiers signes de l’accident. C’est le scénario catastrophe que les autorités de sûreté de tous les pays cherchent à tout prix à éviter.
Il faut donc franchir plusieurs barrières pour en arriver à une catastrophe de type Fukushima : à la fois perte complète de refroidissement (avec des systèmes de secours défaillants) et enceinte qui ne confine pas efficacement la pollution.
En France, il existe une Autorité de sûreté nucléaire indépendante, qui a vraiment le pouvoir de faire arrêter un réacteur si ses prescriptions ne sont pas respectées. Elle a plusieurs fois arrêté le chantier de Flamanville, par exemple. Ajoutons qu’à chaque accident il y a un retour d’expérience.
Attardons-nous sur le cas de Fukushima. Lors de l’accident, l’opérateur japonais, Tepco, a dû procéder à des dégazages, en clair évacuer de l’air fortement pollué de l’intérieur du réacteur vers l’extérieur afin de diminuer la pression de l’enceinte. Si, avant d’évacuer cet air, on l’avait fait passer à travers des filtres à sable8, la pollution à Fukushima (due en partie à ces dégazages) aurait été fortement réduite, car les particules radioactives auraient été piégées par ce dispositif. D’autre part, tout le monde a vu à la télévision les explosions des toits en structures métalliques abritant l’enceinte de protection des réacteurs. Cela est dû à l’accumulation d’hydrogène dégagé à cause des fortes températures dans le réacteur. Avec un simple dispositif qui « piégerait » cet hydrogène, ces explosions auraient été évitées et n’auraient pas endommagé l’enceinte de protection.
Il se trouve que ces deux systèmes – filtres à sable et pièges à hydrogène – ne coûtent que quelques centaines de milliers d’euros, ce qui est, toutes proportions gardées, dérisoire. En France, toutes les centrales disposent de tels systèmes, et ce depuis… les années 1980 ! En effet, à la suite de l’accident de Three Mile Island, les autorités ont imposé de rajouter ces dispositifs sur tous les réacteurs français.
Alors, pourquoi Tepco, en plus de ne pas avoir pris suffisamment au sérieux les conséquences d’un tsunami – les groupes électrogènes de secours, parce que non protégés, ont été inondés par la vague du tsunami –, n’a pas investi dans de tels systèmes connus de tous les opérateurs mondiaux ? Est-ce dû au fait qu’il n’existe pas au Japon d’autorité de sûreté vraiment indépendante qui lui aurait imposé une telle mesure ? En effet, il faut savoir que c’était Tepco qui inspectait les sites de Tepco, avec tous les faux rapports d’inspection et les « arrangements » du fait de la confusion des rôles.
Ce long développement pour bien faire comprendre qu’il n’y a pas de fatalité. La sûreté, cela se construit, cela demande des moyens… et on apprend avec l’expérience. Mais il faut être clair et honnête : le risque nul n’existe pas pour autant, pas même avec des systèmes de sûreté les plus performants. On peut le réduire, et par exemple l’EPR9 est un nouveau réacteur qui divise par dix ce risque par rapport aux réacteurs actuels, mais il ne le réduit pas à zéro. Il subsistera toujours une probabilité qu’un tel événement provoque une catastrophe, y compris en France. Mais comme nous venons de le voir, des catastrophes comparables peuvent avoir lieu dans d’autres secteurs, ce qui nous conduit pas pour autant à prôner la sortie de l’hydraulique, de la chimie etc : la bataille est ailleurs, dans l’entreprise, dans les organisations du travail, dans l’exigence de service public etc…
119 milliards de tep à produire en 2050, voir la contribution du congrès, disponible dans ce blog : « contre l idéologie de la décroissance, pour un nouveau mode développement et l’émancipation de toute l’humanité » A. Bellal
2Document téléchargeable sur http://www.sassenage.fr/sites/default/files/webmaster/SEP...
4. Catastrophe industrielle survenu en Inde en 1984. Le décompte officiel fera état initialement de 3 598 morts, puis de 7 575 en octobre 1995. Les associations de victimes estiment à plus de 20 000 le nombre de décès causés par cet accident (http://www.bhopal.net).
5Un « tribunal d’opinion pour juger les crimes du nucléaire civil » a bien été lancé sous une forme de pétition. Il n y a curieusement pas d’équivalent aussi extrême pour le charbon ou le secteur de la chimie.
7Francis Sorin, « Cigéo : vers un stockage profond pour les déchets nucléaires de forte radioactivité », in Progressistes no 10, octobre-novembre-décembre 2015 (revue-progressistes.org).
8Le filtre à sable est un dispositif de sûreté qui n’est utilisé qu’en situation accidentelle grave. Il permet de décomprimer l’enceinte tout en retenant l’essentiel des produits radioactifs.
9EPR : réacteur pressurisé européen, (initialement European Pressurized Reactor, puis Evolutionary Power Reactor). Quatre réacteurs de type EPR sont en cours de construction dans le monde : un en Finlande, à Olkiluoto ; un en France, à Flamanville ; deux en Chine, à Taishan.
10:16 Publié dans Actualités, Connaissances, Planète | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : nucléaire, insoumis, pcf, bellal | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |
31/05/2017
Josiane Balasko : « J’ai simplement envie que les gens vivent mieux »
Entretien réalisé par Julia Hamlaoui, L'Humanité
La comédienne Josiane Balasko apporte son appui aux candidats PCF pour les législatives, dont elle partage, sans être communiste, de nombreux engagements.
Pourquoi avez-vous décidé de soutenir les candidats communistes aux législatives, en particulier Maxime Cochard, dans la 10e circonscription de Paris ?
Josiane Balasko Leur discours n’est pas un discours de haine ou de démolition, mais de construction, cela m’a intéressée. Je ne suis pas communiste, mais ce sont des gens honnêtes qui font un bon boulot dans les quartiers. Ils se mobilisent pour l’aide aux personnes dans le besoin – et il y en a énormément –, contre le mal-logement, pour le secours aux réfugiés… Ce sont des engagements qui me parlent. Le Parti communiste a toujours été là dans les communes, avec ses militants et ses représentants, pour aider les gens.
C’est pour cela que j’ai eu envie de les soutenir et que j’appelle à voter pour eux. Et puis, il faut qu’il y ait une parité aux législatives. Après le travail que les communistes ont fait, ce serait injuste qu’ils soient réduits à la portion congrue. Pour ma part, j’ai simplement envie que les gens puissent vivre un peu mieux, qu’ils n’aient pas de problème pour boucler leurs fins de mois et remplir leur Caddie. Beaucoup de gens vivent très misérablement.
Je passe mon temps à me balader en tournée, et je vois la désertification gagner les campagnes, les centres-villes. On ressemble maintenant aux villes américaines où il n’y a plus rien dans le centre et où il faut faire dix bornes pour aller s’acheter de la bouffe industrielle.
Après l’élection présidentielle, pour laquelle vous n’avez pas soutenu de candidat, quel regard portez-vous sur la situation politique ?
Josiane Balasko Comme beaucoup de Français j’ai voté Macron, non pas parce que j’étais absolument pour lui, mais parce qu’il fallait impérativement barrer la route au Front national. Il n’y avait pas 36 000 solutions. J’attends de voir ce qui va se passer puisque peu de choses ont été dites ou faites depuis la présidentielle. Mais il est impératif pour la démocratie que plusieurs partis républicains, plusieurs partis du peuple soient représentés à l’Assemblée nationale. Et notamment la gauche.
Le PS est très mal barré, Macron veut réunir tout le monde et Mélenchon tuer toute la gauche à part lui. Pour moi, les législatives sont aussi importantes que l’élection présidentielle. Ce sont elles qui permettent d’avoir une réelle représentation et que chacun puisse s’exprimer.
Pour l’instant on ne parle plus du FN, mais il est toujours là. Ce n’est pas parce qu’ils ont été recalés à la présidentielle qu’ils n’existent plus. En revanche, on parle beaucoup d’un raz-de-marée Macron en juin. Il est très photogénique mais on ne sait pas ce qui va se passer. J’espère qu’il y aura des surprises.
10:08 Publié dans Actualités, Entretiens, Point de vue | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : josiane balasko, pcf, législatives | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |
06/05/2017
COMMUNISTES : L'HUMOUR RAVAGEUR !
Quitte à prendre un procès, autant que ce soit avec Benicio! #Mieuxvautenrire
Toi aussi, fais ton fake #choisistonprocès!
C'est à cet appel de la communiste Anne Sabourin candidate à l'élection législative à Paris que des dizaines de candidats communistes on répondu sur les réseaux sociaux, ridiculisant le mouvement des Insoumis qui a sommé le PCF de ne pas utiliser l'image publique de Jean Luc Mélenchon, une première dans la cinquième république.
Jamais aucun parti même situé à l'extrême droite n'a eu une telle prétention. Imaginons Macron, Le Pen, Hollande avoir la même attitude ? Imaginons ensuite le flot de procès qui suivrait. Le ridicule ne tuant pas, c'est par l'humour que les communistes ont décidé de répondre, et comme l'atteste toutes ces affiches, il est ravageur.
Tout a commencé le jeudi 4 mai où Manuel Bompard, directeur de campagne de l’ex-candidat de La France insoumise, a envoyé un communiqué de presse accusant les communistes de chercher à « semer la confusion chez les électeurs » en « faisant croire que les candidats du PCF aux législatives ont le soutien de Jean-Luc Mélenchon ». « Il n’en est rien », précise-t-il.
En cause : l’utilisation de la photo du député européen sur les tracts de campagne de certains candidats communistes. Même si ce fut parfois du bout des lèvres, le PCF a apporté son soutien à la candidature de M. Mélenchon et nombre de ses élus lui ont accordé leur parrainage. « Nous dénonçons cette usurpation et nous décidons d’engager les poursuites judiciaires afin de faire cesser cette situation, puisque nos rappels à l’ordre répétés ne sont suivis d’aucun effet », écrit M. Bompard.
« L’heure est au rassemblement, pas à la polémique », lui répond Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF, lui aussi dans un communiqué.
Devant la volonté de La France insoumise de présenter des candidats partout, y compris face aux députés communistes sortants, les deux forces tentent en vain, depuis des mois, de négocier un accord. Le score historique de Jean-Luc Mélenchon au premier tour de la présidentielle (19,6 % des voix) peut leur laisser espérer de nouvelles conquêtes aux législatives. Mais, désunis, les chances de remporter la mise sont faibles, d’autant qu’ils vont devoir affronter, outre la droite et le FN, des socialistes, des écologistes et des candidats d’En marche !.
10:34 Publié dans Actualités, Cactus, Médias | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : pcf, mélenchon, affiches, satires, ridicule, sabourin | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |