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26/12/2015

Barbara Hendricks : «Ne prenons pas le risque de perdre notre humanité»

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On ne présente plus la soprano Barbara Hendricks. Ambassadrice de l'ONU pour les réfugiés depuis près de trente ans, la cantatrice humaniste et engagée évoque pour « l'Humanité Dimanche » le sens de ses combats.

HD. Que peut-on dire à ceux qui ont peur des réfugiés, qui les voient comme une menace ?
 
Barbara Hendricks. Nous vivons une époque très difficile, complexe et même dangereuse. On n'a pas besoin d'avoir honte, d'avoir peur. Mais on peut aussi se confronter à cette peur, la vaincre et aller de l'avant. Je veux dire à ceux qui ont peur : « Imaginez que vous soyez obligés de partir, sans aucun choix, et que, sinon, vous et votre famille seriez décimés. Quel est l'accueil que vous aimeriez avoir ? » Voilà où est la vraie peur : la peur de mourir, la peur que vos enfants soient tués sous vos yeux, que votre fille ou votre femme soit violée... c'est la peur pour la vie. On ne met pas un enfant dans un bateau qui n'est pas sûr, sauf si ce bateau semble plus sûr que la terre que l'on quitte en courant. Les gens fuient, en premier lieu, pour survivre. Si on peut imaginer cela, se mettre à leur place, on peut comprendre qu'ils aimeraient avoir une main tendue vers eux.
 
HD. Comment réagissez-vous au recul des gouvernements en France et en Allemagne sur l'accueil de réfugiés ?
 
B. H. Moi je les appelle les marchands de la peur, de la haine et de l'exclusion. Ils font cela parce qu'ils ont peur de ne pas être réélus, de ne plus être au pouvoir. En réalité ils instrumentalisent la peur des autres.
C'est pire. Il y a aussi les médias qui recherchent la sensation, des mots et des images chocs. Nous savons que les problèmes sont politiques, donc que les solutions doivent être politiques. Pour cela il faut une volonté politique. Voici le message que nous devons transmettre clairement aux opinions publiques afin qu'elles pèsent sur les pouvoirs de décision. Les réfugiés sont nos frères, nos soeurs, nos enfants. Ne prenons pas le risque de perdre notre humanité.
 
« POUR LES RÉFUGIÉS, LES SOLUTIONS DOIVENT ÊTRE POLITIQUES. C'EST LE MESSAGE À TRANSMETTRE AUX OPINIONS PUBLIQUES. »
 
HD. Vous sillonnez le monde comme cantatrice et aussi en mission pour l'ONU. Vous voyez le monde évoluer. Qu'est-ce qui, selon vous, a vraiment changé ?
 
B. H. Le grand changement c'est cette possibilité que l'on a de savoir ce qui se passe un peu partout dans le monde 24 heures sur 24. Malheureusement ce sont souvent les pires choses. On est instantanément dans la crise, dans les attaques terroristes, dans les catastrophes naturelles... C'est ça qui a beaucoup changé et très vite. Là, on ne voit que le mal. Alors qu'il y a beaucoup de gens qui font du bien dans ce monde mais les médias en parlent moins. Je le vois lorsque nous sommes sur le terrain avec le HautCommissariat aux réfugiés (HCR) et ses partenaires. Il y a des gens très dévoués. Certains y laissent leur vie (en 2003, Sergio Vieira de Mello, haut collaborateur du HCR, a été tué dans un bombardement à Bagdad ­ NDLR).
En Irak, l'ONU et le monde ont payé un lourd tribut. Ces guerres inutiles et illégales continuent de prendre tant de vies innocentes et de provoquer la destruction.
 
Hd. vous étiez récemment en Côte d'ivoire où vous êtes très engagée contre l'apatridie. C'est une cause qui vous tient à coeur. pour quelles raisons ?
 
B. H. Être apatride, c'est très dur,c'est quelqu'un qui n'a pas de nationalité du tout, qui est chez lui nulle part dans le monde, qui n'a la protection d'aucun pays. La campagne pour éradiquer l'apatridie a commencé l'année passée. Elle consiste à agir au plan législatif notamment, par exemple en donnant le droit aux femmes d'enregistrer la naissance de leurs enfants alors qu'auparavant seul l'homme pouvait le faire.
 
HD. Dans votre dernier album « Blues Everywhere I Go » (1), vous interprétez des classiques du genre dont « Strange Fruit » de Billie Holiday, qui évoque les Noirs lynchés aux États-Unis. Y trouve-t-on une résonance avec une certaine actualité ?
 
B. H. Oui, malheureusement. On continue à voir aux États-Unis des « strange fruits » (littéralement fruits étranges) : ces jeunes Noirs abattus par la police alors qu'ils ne sont même pas armés. Cela ne veut pas dire que les choses ne se sont pas améliorées pour les droits civiques, mais, depuis quelques années, il y a des reculs. C'est plus facile de dire que quelqu'un est comme il est parce qu'il est né femme, Noir, Blanc, catholique, juif, musulman... On trouve facilement des raisons de repousser l'autre. Et surtout les inégalités ne cessent de se creuser, et les États du Sud, particulièrement, multiplient les combines pour entraver les droits des Afro-Américains. Par exemple, pour voter, il faudrait telle pièce d'identité plutôt qu'une autre.
On ferme des bureaux, poussant les gens à se déplacer à plus de 200 kilomètres. Ce qui exclut de fait beaucoup de citoyens. La liberté n'est pas donnée, elle se gagne avec les luttes que chaque génération doit mener. Elle exige vigilance et constance. Il ne faut pas s'arrêter et se croiser les bras en croyant que c'est acquis. On peut faire la fête mais, le lendemain, il faut continuer la lutte. Je suis convaincue que tous les mouvements importants viennent d'en bas. Par exemple, sur le réchauffement climatique, je ne crois pas que les dirigeants du monde apporteront de solutions. Mais les manifestations partout dans le monde à l'occasion de la COP21 ont été les plus importantes jamais vues, c'est encourageant.
 
HD. En 2008, vous aviez applaudi la victoire d'Obama. Craignez-vous comme beaucoup que Donald Trump devienne le futur président des États-Unis ?
 
B. H. Je ne peux même pas l'imaginer... Mais, pendant les années Obama, les Républicains ont créé un tel climat qu'ils ont préparé Donald Trump. Aujourd'hui, ils ne peuvent pas contrôler le monstre qu'ils ont créé...
C'est partout comme ça, pas seulement aux États-Unis. Mais je reste positive. Avant de recevoir le prix Jean-Pierre-Bloch de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra), je me suis rendue le 7 décembre à Orange pour le 20e anniversaire du collège qui porte mon nom, classé en éducation prioritaire. Les élèves ont réalisé une vidéo qui m'a énormément touchée, car on y voit à quel point les valeurs des droits humains sont défendues. C'est cela la résistance. Face au Front national, il y a des enfants qui apprennent que vivre ensemble en société nous rend plus heureux.
 
(1) Album, livre, disque et édition vinyle chez Arte Verum. Y figure « Oh Freedom », que Barbara Hendricks avait chanté a capella sur la grande scène de la Fête de l'Humanité en 2012.
 

« Bienvenue. 34 auteurs pour les réfugiés », Éditions Points/Seuil. 192 pages, 5 euros.

Ils ont écrit un récit, une fiction, un poème, ils ont livré un témoignage, ils ont dessiné... pour les réfugiés. 34 auteurs engagés sont réunis dans cet ouvrage d'une forte intensité.

Parmi eux, Olivier Adam, Edmond Baudoin, Geneviève Brisac, Sorj Chalandon, Philippe Claudel, Marie Darrieussecq, Mathias Énard, Laurent Gaudé, Jul, Lola lafon, Alain Mabanckou, Lydie Salvayre, Joann Sfar, Abdallah Taïa, Philippe Torreton, Alice Zeniter. Les bénéfices des ventes du livre seront reversés au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. 

Entretien réalisé par LATIFA MADANI
Vendredi, 25 Décembre, 2015
Humanité Dimanche
 
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22/12/2015

Fatéma Hal   : «  La vraie révolution, 
c’est de ne pas laisser nous priver d’espoir  »

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Cheffe du restaurant marocain
 Le Mansouria à Paris, Fatéma Hal privilégie le lien. Pour elle, la cuisine 
a un rôle politique, économique, 
social et culturel.

Quel est pour vous le rôle de la cuisine ?

Fatéma Hal Ce n’est pas qu’une affaire de recettes, ni une affaire de femmes, comme si elles n’étaient intéressantes que dans la cuisine. Ce qui m’intéresse depuis trente ans dans la cuisine, c’est son rôle politique, économique, social et culturel. Je mets culturel à la fin parce que très souvent, on la réduit à ça. Elle a ce rôle de partage et par les temps qui courent, on en a vraiment besoin mais en même temps, on ne dit pas d’oublier le rôle qu’elle joue sur l’économie, la politique, le social. Il fut un temps, des guerres étaient déclenchées pour une poignée de poivre. Dans la balance commerciale, l’agroalimentaire arrive juste après l’armement. Quand on parle de blé, de sucre ou de la famille, c’est économique et politique. On ne peut pas saucissonner tous ces points. Ce qui m’intéresse dans la cuisine, c’est quand elle me parle, me raconte une histoire. Même dans les situations les plus dures, ou même pendant les guerres, la cuisine est l’un des derniers liens qui restent forts. Lorsqu’on mange ensemble, même si l’on n’est pas d’accord, il reste la possibilité du dialogue. Il faut utiliser ce rôle social. L’aspect culturel parle de notre histoire, de notre évolution humaine depuis l’invention du feu, qui est la vraie grande révolution.

Vous êtes ethnologue. Comment êtes-vous passée en cuisine en 1985 ?

Fatéma Hal Très exactement le 31 décembre 1984. En fait, c’était une question de survie. Je n’avais que des contrats à durée déterminée. En ouvrant mon restaurant, je me suis rendu compte à quel point le rapport avec les clients, le rapport avec la mémoire, comme d’aller rechercher des vieilles recettes oubliées, faisaient du restaurant un éclairage sur tout ce qu’il me restait à apprendre. Ce que l’on me donnait, c’était à moi ensuite de le donner. J’ai compris ce rôle comme un jeu de balle : vous lancez la balle, elle rebondit et on vous la relance. J’apprends et je transmets, c’est pour moi fondamental. Mon travail, c’est trouver les recettes qui ont disparu et préserver celles qui risquent de disparaître. J’ai dû en faire une quinzaine de livres. J’espère avoir assez de temps de vie pour finir ce travail pour voir ce qui me lie aux autres dans la cuisine. J’ai ouvert ce restaurant pour être libre, assurer la vie de tous les jours, nourrir mes enfants, payer mon loyer. Quand on règle les problèmes élémentaires, par la suite chacun prend un chemin. Le mien est axé sur la cuisine du lien. Il faut remettre les choses dans le contexte de 1984. J’étais très militante féministe, féministe je le suis toujours. J’ai mis, comme on dit en français, un peu d’eau dans mon vin. Avant, tous les pauvres étaient fantastiques et tous les riches malfaisants. Les gens de gauche d’un côté, ceux de droite de l’autre. Aujourd’hui, ce sont les individus qui m’intéressent et ce qu’ils font, ce qu’ils ont envie de faire. Parfois, je me dis que les associations devraient travailler plus sur la création d’entreprise et la formation. Je pense que par le travail viennent la liberté et le respect de soi.

Que pensez-vous des émissions de cuisine à la télévision ?

Fatéma Hal La cuisine a un côté spectacle quand elle passe à la télé, c’est le côté que j’aime le moins. Les concours ne m’ont jamais intéressée parce que dans la cuisine, c’est ce qui lie les gens entre eux qui m’intéresse, pas de se retrouver les uns contre les autres. Je préfère les uns avec les autres. Bien sûr, cela fait plaisir de voir des gens talentueux, des chefs étoilés quand ils montrent leur savoir-faire à partir de choses simples ou compliquées. Ce qui m’attriste, c’est quand on ne voit pas les côtés que je viens d’évoquer. Et si je participe à une émission ou à un jury, c’est plus pour encourager. Dans la cuisine, nous sommes dans la transmission, l’apprentissage. Celui qui ne sait pas doit comprendre qu’il lui faut travailler. La compétition ne m’ennuie pas dans le sport, elle m’ennuie dans la cuisine. Les deux n’ont pas le même rôle. Si on ne fait pas de sport, on est moins en forme, si on ne mange pas, on meurt.

La malbouffe vous touche-t-elle ?

Fatéma Hal Le travail en cuisine est très dur. Beaucoup de restaurants ouvrent avec des gens peu formés. La plupart ne cuisinent pas. Ils achètent des produits qu’ils assemblent. Je suis maître restaurateur, je défends le métier de cuisinier. On épluche, on coupe et on travaille le produit. Chez moi, pas de congelés hormis la glace et les crevettes, très difficiles à acheter très fraîches, ni de sous-vide, que du frais cuisiné tous les jours. Nous faisons notre pain et nos pâtisseries sans colorants et sans additifs. On ne peut mieux manger que quand on respecte le produit, la provenance, la proximité. Par chance, on trouve tout à Paris. Ce n’est pas une ville, c’est un continent. Il suffit de changer de quartier pour changer de ville, de pays, on a cette chance-là. Je ne suis ni naïve, ni aveugle. Je vois bien que le monde est à l’envers. La seule vraie révolution, c’est de ne pas laisser nous priver d’espoir. Nous, petits restaurateurs, nous pouvons à notre niveau rendre les gens heureux. Quand on fait la cuisine, on ne peut pas manger seul, sinon on ne cuisine pas. Tous les pays sont meurtris. Le rôle de la cuisine et des cuisiniers est dans ce contexte important. Donner un tout petit peu de bonheur tous les soirs, c’est notre utilité.

Fatéma Hal a fait des études de littérature arabe et d’ethnologie. Arrivée en France à 17 ans, elle suit les cours à Paris-VIII, l’université de Vincennes, écoute Bourdieu, Lacan, l’ethnologue Camille Lacoste. Elle apprendra son premier métier avant d’ouvrir son restaurant
de gastronomie marocaine, le Mansouria (en hommage à sa mère), à Paris en 1984. Depuis, elle traque les recettes anciennes et oubliées dans toutes les régions 
du Maroc, carrefour 
des civilisations berbère, africaine, arabo-andalouse, juive, européenne, chinoise… Toujours sur la trace 
des épices qu’elle magnifie dans sa cuisine au 11, rue Faidherbe (Paris, 11e). 
Où l’on découvre que 
la cuisine marocaine, 
ce n‘est pas seulement 
les couscous et les tagines. Elle est l’auteure de nombreux ouvrages dont le Grand Livre de la cuisine marocaine (Hachette, 25 euros) ou les Saveurs et les gestes (Stock, 48 euros).

Les chefs mettent les pieds dans le plat
Entretien réalisé par Claude Baudry
Lundi, 21 Décembre, 2015
L'Humanité
 
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Fatéma Hal, Cheffe restaurant

La recette de la mourouzia

Une recette qui date du XIIe siècle 
(elle a subi quelques changements dans cette belle traversée).

Ingrédients (pour 6 personnes)

  • 1 kg d’agneau coupé en morceaux dans l’épaule.
  • 2 oignons
  • 300 g de raisins secs
  • 150 g d’amandes émondées
  • 2 c. à soupe de smen (beurre clarifié)
  • 2 c. à café de ras el-hanout
  • Une pincée de filaments de safran
  • 2 c. à soupe d’huile
  • 1/2 c. à café de sel
  • 1 c. à soupe d’eau de fleur d’oranger
  • 5 verres d’eau
  • 100 g de miel
  • 6 boutons de rose pour la décoration.

Préparation : 20 minutes

Cuisson : 2 heures

  • Dans un saladier, mettre les raisins secs avec l’eau de fleur d’oranger, couvrir d’eau tiède et les laisser se réhydrater pendant une heure. Émonder les amandes en les plongeant dans l’eau bouillante et les sortir dès qu’elles remontent 
à la surface. Avec du papier absorbant ou une serviette en tissu, enlever la peau.
  • Dans un bol, mélanger le sel, le poivre, le safran, le ras el-hanout et un grand verre d’eau. Enduire la viande de la moitié de ce mélange. Placer les morceaux dans une marmite en fonte avec l’huile et le reste d’eau, l’oignon râpé, le smen (beurre clarifié) et les amandes émondées. Porter à ébullition, goûter et ajuster
le sel à son goût. Laisser cuire à feu doux pendant une heure et vérifier de temps en temps la sauce, ajouter un peu d’eau si nécessaire.
  • Égoutter les raisins secs et les ajouter à la viande ainsi que l’autre moitié
des épices.
  • Laisser cuire encore une heure puis verser le miel et maintenir à petit feu
jusqu’à ce que les amandes et les raisins soient caramélisés.
  • Servir chaud en entourant la viande des amandes et des raisins et planter 
un bouton de rose sur chaque morceau de viande.

11:35 Publié dans Connaissances, Entretiens | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : fatéma hal, cheffe restaurant | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

20/12/2015

« Marine Le Pen, comment avez-vous pu avoir l’idée d’utiliser ces images horribles »

lepen.jpgJe pensais avoir tout vu, tout entendu de votre part Marine Le Pen. Le mensonge, le cynisme, la manipulation, le fiel, l’intolérance mais cette fois j’avoue que la publication sur votre compte de trois photos abjectes de victimes de Daech [acronyme arabe pour l’organisation Etat islamique] dépasse ce que je pouvais imaginer de pire de votre part.

Je suis à la fois révolté et écœuré par cette ignominie. Comment avez-vous pu avoir l’idée d’utiliser ces images horribles diffusées par l’Etat islamique au bénéfice de votre propre propagande ?

Ma réaction est d’abord celle d’un citoyen outré par tant de bassesse. Elle est aussi celle d’un ancien otage prisonnier des talibans pendant dix-huit mois en 2010 et 2011. Je songe à ma famille qui aurait pu découvrir ma photo sur internet prise pendant ma captivité. Quel effroi !

Je pense aujourd’hui aux proches, aux parents du journaliste américain James Foley assassiné par des barbares après vingt et un mois de captivité et au choc qu’ils ont subi lorsqu’ils ont appris l’utilisation à des fins politiques de l’image de leur fils supplicié.

Je me souviens avoir rencontré Diane Foley, la mère du reporter, au printemps 2014. Cette femme digne et courageuse était venue à Paris lorsque James vivait encore. Elle se sentait très seule aux Etats Unis face à son calvaire et voulait comprendre comment fonctionnait un comité de soutien, en l’occurrence celui de quatre otages français qui se trouvaient eux aussi aux mains de Daech, Didier François, Nicolas Hénin, Edouard Elias et Pierre Torres. J’ai admiré le combat qu’elle menait avec son mari pour tenter de convaincre le président Barack Obama d’entamer des négociations afin de faire libérer son fils, hélas sans succès.

L’un se nourrit de l’autre

Avez-vous pensé Madame Le Pen à cette femme, à cette mère qui ne se remettra jamais de la perte de son enfant ? Vous êtes-vous mise une seconde à sa place au moment de diffuser la photo du corps de James Foley ?

En politique, vous estimez certainement que tous les coups sont permis. La provocation est une arme que vous utilisez sans cesse. L’héritage paternel sans doute. Votre tactique est de faire parler de vous, en bien ou en mal, à chaque instant. L’essentiel est de saturer l’espace médiatique.

Après avoir provoqué la polémique, vous jouez à merveille le rôle de l’offensée. Vous contre-attaquez en affirmant avoir été blessée par un journaliste qui selon vous a comparé le Front national et Daech. Puis vous daignez enfin retirer la photo de James Foley à la demande expresse de ses parents. Mais vous laissez deux clichés montrant la mise à mort atroce de deux hommes. Vous craignez peut-être d’être traînée en justice aux Etats Unis alors que pour les autres martyrs, vous vous moquez bien de voir leurs familles un jour s’offusquer de votre indécence.

L’Etat islamique se sert en France du Front national qui prône la division, la suspicion envers les musulmans, les étrangers et classe les citoyens en catégorie. Et le Front national utilise la monstruosité de Daech pour attiser la peur. Finalement, l’un se nourrit de l’autre. L’utilisation de ces photos est une abomination, une atteinte à la dignité humaine et une insulte à toutes les victimes du terrorisme.

Votre terreau Marine Le Pen est la misère du monde, votre moteur la haine des autres. Jusqu’à la nausée.

Hervé Ghesquière, grand reporter et ancien otage.
 
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26/11/2015

Johnny Hallyday à hauteur d’homme

johny.jpgJohnny Hallyday n’est pas du genre à tourner en rond tel un fauve en cage. À 72 ans, il remet ça, habité par une énergie peu commune et une volonté intacte d’en découdre à chaque fois qu’il descend dans l’arène. Johnny reste ce gladiateur qui ne vit qu’au moment où il retrouve son public. Dans quelques jours, il se produira au nouveau Bercy avec comme toujours l’envie de tout donner.

Un an après la sortie de Rester vivant, il revient avec De l’amour, son 50e album, réalisé avec la complicité de Maxim Nucci, alias Yodelice.

Après le formidable accueil critique et public de Rester vivant, il aurait pu s’en tenir là et attendre sagement trois ans avant de sortir un nouveau disque. Mais le temps passe et il n’avait qu’une hâte, intégrer un nouveau registre à sa tournée qui le mènera jusqu’au printemps sur les routes de France.

Passionné, Johnny l’est et le restera pour longtemps encore. Au point de fasciner les auteurs d’aujourd’hui, qui se bousculent pour lui écrire des chansons à la mesure de son talent.

Au casting de son nouvel opus, on retrouve ceux qui ont fait le succès de Rester vivant, Miossec, Pierre Jouishomme, Pierre-Dominique Burgaud, Jeanne Cherhal et deux nouveaux, Aurélie Saada du duo Brigitte (qui signe la très belle L’amour me fusille) et Vincent Delerm, qui a offert à Johnny Une vie à l’envers. Une chanson miroir sur le rapport aux fans avec pour décors Châtellerault et une Ford Escort au péage, « une voiture qui a priori ne fait pas rêver mais chantée par Johnny, ça devient une belle bagnole ! » sourit Bertrand Lamblot, directeur artistique du disque.

De fait, la magie opère de nouveau quand, sans artifice, sa voix nue vibre sur fond de riffs de guitare, d’harmonica, de percussions et de pedal steel : « L’idée était de travailler dans l’esprit du songwriting folk américain, comme l’ont fait des artistes tels Woody Guthrie, Bob Dylan, Neil Young ou Springsteen », confie Bertrand Lamblot. « On voulait quelque chose un peu à la Johnny Cash », a précisé le chanteur lors d’une récente conférence de presse de présentation du disque, à Paris.

Un album blues, country et rock aux ambiances dépouillées qui ramènent à l’Amérique et à ses racines musicales. « Je suis arrivé à un âge où je fais les choses que j’ai envie de faire. La musique que j’aime, c’est le rockabilly, le blues. La variété, il y en a tellement d’autres qui le font bien. » Il n’y a pas mieux que lui pour les chansons sentimentales, en témoigne son émouvante interprétation de Tu es là, « une chanson à la Presley », souligne Johnny. Il y a aussi les sujets sociétaux comme Des raisons d’espérer, sur un homme sortant de prison qui trace sa route, une fois sa dette effacée. Quant au titre De l’amour, il met en scène un personnage qui a perdu son job.

Un répertoire à hauteur d’homme qui fait écho à notre époque au travers de thèmes auxquels on ne s’attendait pas, comme les violences policières de Ferguson et la mort de Michael Brown en 2014, qui a bouleversé l’Amérique (Dans la peau de Mike Brown). Une veine plus engagée où Johnny aborde des sujets renvoyant à l’actualité, comme le sort des migrants dans Valise ou cercueil.

Enfin, il y a la bouleversante Un dimanche de janvier, écrite par Jeanne Cherhal en mémoire de la foule rassemblée à la suite de l’attentat contre Charlie Hebdo, ainsi qu’une chanson cachée, Voyageur clandestin, sur les travailleurs mexicains clandestins. Un registre original teinté de gravité qui ne plombe pas l’atmosphère pour autant, grâce à une interprétation juste et sensible. Du grand Johnny, qui parvient une fois encore à surprendre et à se réinventer après plus de cinquante ans de carrière.

Victor Hache, L'Humanité
 
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17:28 Publié dans Actualités, Musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : johnny hallyday, disque, 50 ème album | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!