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09/12/2025

1905 - 2025 La conquête laïque, héritage du combat républicain et ouvrier

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La loi du 9 décembre 1905 fut l’un des grands actes d’émancipation portés par la République radicale et soutenus par le mouvement ouvrier naissant. Elle mit fin à des siècles de tutelle religieuse sur les consciences et sur la vie publique.

Cent vingt ans après, alors que la laïcité est réinterprétée au gré des batailles idéologiques, revenir à sa genèse permet d’en rappeler la portée profondément sociale et égalitaire.

Le combat anticlérical, un enjeu démocratique et social

À la veille de 1905, le cléricalisme pèse encore lourd : influence scolaire, pression sur les municipalités rurales, résistance aux lois civiles. Les républicains de la IIIᵉ République - à l’image de Gambetta qui proclamait « le cléricalisme, voilà l’ennemi ! » - ont engagé depuis les années 1880 une série de mesures pour desserrer cette emprise : lois Ferry sur l’école publique gratuite, laïque et obligatoire, expulsions de certains ordres comme les Jésuites, fermeture de 2 500 écoles congréganistes.

En face, l’Église catholique se radicalise. Pie X condamne la République française : les relations diplomatiques entre le Vatican et Paris sont rompues. Les catholiques intransigeants, autour de journaux comme La Croix ou L’Univers, dénoncent un risque de schisme. Le camp républicain, quant à lui, voit dans la séparation un acte d’émancipation populaire.

Dans l’hémicycle : compromis républicain et confrontation idéologique

Le cœur de la bataille se déroule à la Chambre des députés, le projet est étudié dès 1904 à la demande du très anticlérical Émile Combes. Aristide Briand, rapporteur de la loi, impose une voie plutôt libérale et propose un équilibre inédit : la liberté de conscience absolue, mais la fin de tout financement public des églises car la République est neutre. Les débats sont denses et houleux.

Le socialiste Jean Jaurès soutient la séparation au nom de la souveraineté du peuple tout en mettant en garde contre toute vindicte envers les croyants populaires, rappelant que la République doit libérer, non humilier. L’adoption finale, par 341 voix contre 233, consacre le principe fondateur : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. »

Entre universalisme républicain et crispations identitaires

Cent vingt ans plus tard, la laïcité continue d’être une référence centrale mais souvent détournée. Certains courants politiques de droite ou d’extrême droite l’agitent comme un outil de suspicion envers la communauté musulmane, réduisant la laïcité à une arme culturelle. Un paradoxe quand on sait qu’historiquement ces courants étaient hostiles à la laïcité au nom d’une France « fille aînée de l’Église ».

À l’inverse, le multiculturalisme anglo-saxon inspire les tenants d’un populisme de gauche où l’État se résignerait à juxtaposer des communautés aux normes divergentes voire clivantes, au risque d’amoindrir le commun républicain.

Pour les communistes, la laïcité n’est pas une neutralité molle, mais un instrument d’émancipation universaliste : affranchir les individus des autorités spirituelles comme des identités assignées, maintenir l’égalité des citoyens et préserver la possibilité d’un horizon commun. Aussi des interprétations, rappeler le sens de 1905, c’est réaffirmer un projet politique : l’unité du peuple, l’autonomie des consciences et l’indépendance du pouvoir civil.

Source Stéphane Bailanger pour Liberté Actus

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03/12/2025

"Il n'y a pas de 'libre choix' derrière le port du voile" : réponse à Nadège Abomangoli députéé LFI

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Ayant affirmé dans une émission du journal « l'Humanité » que le port du voile relevait de la contrainte, la sénatrice PCF de la Loire, Cécile Cukierman, a créé la polémique, accusée de « fémonationaliste », notamment par la député LFI Nadège Abomangoli. Auteur de « Le linceul du féminisme. Caresser l’islamisme dans le sens du voile » (éditions Séramis), Naëm Bestandji explique en quoi l'élue communiste a raison.

La sénatrice PCF Cécile Cukierman déclare être pour l’interdiction du port du voile dans les compétitions sportives officielles, en invoquant la laïcité mais aussi la lutte contre le sexisme et le patriarcat islamiste. Elle remet également en question la notion de « libre choix » pour le port du voile. Un « choix » qu’elle compare à celui exprimé par des femmes battues de rester avec leur mari violent. Il n’en fallait pas plus pour Nadège Abomangoli, députée LFI et première vice-présidente de l’Assemblée nationale, pour apostropher la sénatrice sur X. Elle l’accuse d’être une « fémonationaliste ». C’est-à-dire une militante nationaliste, qui instrumentalise le féminisme à des fins racistes. Rien que ça. La raciste n’est pourtant pas celle que Nadège Abomangoli pointe du doigt, mais le reflet de son propre miroir.

Si nous considérons l’égalité entre les êtres humains comme universelle, des personnes, comme Nadège Abomangoli, considèrent que l’égalité des sexes est adaptable selon le lieu et les circonstances. Au nom du respect des cultures et du droit à la différence, au mépris de toutes les luttes féministes, elles défendent ou ferment les yeux sur l’indéfendable. Cet aveuglement sur le sexisme du voile est un choix motivé par le paternalisme et l'orientalisme.

Un choix, vraiment ?

La députée LFI promeut l’intersectionnalité, qui adopte une conception raciale du monde où les êtres humains sont classés selon leur couleur de peau, leur culture, leur religion et où l’islam est racialisé. À l’intersection des discriminations que peut cumuler un individu (genre, couleur de peau, classe sociale, âge, etc.), la lutte pour l’égalité des sexes cède le passage au respect de la misogynie islamiste et du patriarcat oriental. Le féminisme n’est plus qu’un outil pour justifier la nouvelle lutte des « races ». Le sexisme du voile, créé pour discriminer et inférioriser la moitié de l’humanité en raison de son sexe, se mue en étendard identitaire brandi par les islamistes pour se présenter en éternelles victimes. Il devient le symbole de la résistance face à « l’impérialisme » et au « colonialisme » occidental.

À LIRE AUSSI : Comment les néo-féministes sont devenues pro-voile : on a lu le dernier livre de Naëm Bestandji

Pour justifier le charme exotique ressenti envers cet accessoire misogyne, lui-même justifié par une « pudeur » définie et dictée par des hommes, les intersectionnelles brandissent la parole des « concernées »… enfin, celles qui militent pour le porter, pas celles qui y sont explicitement contraintes. Selon ces défenseurs du voilement, le fait qu’une partie des femmes déclare se voiler par choix, et se sentir mieux ainsi dissimulées du regard des hommes, serait un argument « féministe » pour soutenir ce sexisme.

Or, le voile est présenté, par ses porteuses elles-mêmes, comme une « OBLIGATION religieuse ». S’il y a obligation, alors il n’existe aucun choix. Quelle femme ferait le « libre choix » d’aller brûler en Enfer pour l’éternité ? Selon les prescripteurs du voile, si la musulmane veut suivre sa religion, elle doit se voiler. Elle n’a pas le choix. Si elle veut plaire à son Dieu, elle doit se voiler. Elle n’a pas le choix. Si elle veut être respectée en tant que femme, elle doit se voiler. Elle n’a pas le choix. Ainsi, le « libre choix », slogan marketing, est en réalité une décision conforme à ce qui est attendu par ceux (tous des hommes) qui prescrivent le voilement des femmes.

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Le faux choix n’est donc pas celui de porter ou non le voile, mais de choisir entre la vertu ou le vice, être une femme « bien » ou une femme qui « ne se respecte pas », la pudeur ou l’impudeur, être une bonne musulmane ou pas, la bonne ou la mauvaise pratique, plaire à Dieu ou « lui déclarer la guerre », le Paradis ou les feux de l’Enfer pour l’éternité. Tout est fait pour ne laisser d’autre choix à la musulmane que de faire le faux « libre choix » du voilement. La méthode est si efficace que les concernées sont dans « l’acceptation tacite de leurs contraintes » comme disait Pierre Bourdieu, dont certaines en viennent même à défendre leur servitude plus ou moins volontaire. Le fait de consentir à se plier au sexisme ne confirme en rien une liberté. Militer pour promouvoir et défendre cette servitude patriarcale est encore moins un acte féministe. Par leur ignorance et leur refus de s’informer un minimum, les personnes comme Nadège Abomangoli ne voient que le sommet de l’iceberg à travers des éléments de langage calibrés pour les séduire, comme la notion de « libre choix ».

Faiblesse intellectuelle

C’est là qu’intervient l’analogie avec les femmes battues. Mais contrairement à ce qu’affirme la députée, la sénatrice n’a pas comparé les femmes voilées aux femmes battues. Elle interroge la notion de « libre choix » qui mène les unes à se dissimuler sous un voile par amour de Dieu (mais surtout pour se conformer aux injonctions des hommes qui parlent en leur nom) et les autres à rester au domicile conjugal par amour de leur mari. Elle souligne la faiblesse intellectuelle de brandir un « libre choix » pour le voilement qui n’a pas plus de crédibilité que celui d’une femme battue affirmant vouloir rester auprès de son mari violent. Je fais moi-même cette analogie, dans mon livre et mes interventions publiques que Cécile Cukierman a peut-être lus ou écoutés, pour démontrer qu’il n’existe pas de « libre choix » dans le port du voile, mais un consentement à la soumission patriarcale.

À LIRE AUSSI : "Le voile est sexiste et obscurantiste" : l'appel de 100 musulman(e)s de France

En reprenant le contenu du tweet de Nadège Abomangoli, quand une femme battue déclare vouloir retourner auprès de son mari par choix, parce qu’elle l’aime, la députée invoque-t-elle le libre arbitre pour défendre la décision de cette femme ? Accuse-t-elle les recherches féministes, pour comprendre ce phénomène, de racisme, colonialisme et, par une inversion accusatoire assumée, de sexisme ? Non. On s'interroge. On ne se contente pas de dire « c'est son choix » ou bien « qui sommes-nous pour vouloir comprendre sa décision ? » On cherche à identifier le processus psychologique qui mène à cette soumission conjugale. C'est grâce à cela que nous avons découvert le phénomène d'emprise, et ainsi aider des milliers de femmes à s’émanciper de leur bourreau.

Mais quand il s’agit du voilement, Nadège Abomangoli abdique tout esprit critique pour paraître tolérante envers une idéologie qui ne l’est pas. S’arrêter au discours de la servitude volontaire (renommée « libre choix »), sans chercher à comprendre comment s’est construit ce consentement, n’est pas du féminisme. C’est de l’obscurantisme imbibé de patriarcat dans sa forme la plus pure. Si les féministes avaient appliqué aux femmes battues, désirant rester avec leur mari violent, le raisonnement de Nadège Abomangoli, nous n’aurions jamais découvert le phénomène d’emprise. Nous en serions encore au stade de « c’est leur libre choix ».

Source Marianne

16:35 Publié dans Actualités, Connaissances, Point de vue, Sport | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voile, lfi | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

20/11/2025

Au fait, où nos fortunes « françaises », ces donneuses de leçons fiscales, payent-elles leurs impôts ? L'enquête du journal l'Humanité

paradis fiscaux

Chaque été, le Landerneau politico-médiatique se rue sur le classement des grandes fortunes réalisé par le magazine Challenges. L’Humanité le complète, pour les 60 premiers, avec leur situation fiscale. Mais où nos milliardaires pourfendeurs de tout impôt supplémentaire sur leur fortune payent-ils donc leurs impôts ?

 

C’est un marronnier des médias depuis près de trente ans. Chaque été, le magazine Challenges dévoile son tant attendu classement des 500 plus grandes fortunes de France. De Bernard Arnault à Rodolphe Saadé, en passant par Xavier Niel et Gérard Mulliez, les commentateurs de l’actualité économique scrutent avec passion le rang, le secteur d’activité, l’évolution de la fortune et de la place dans le classement des ultra-riches tricolores.

Mais alors qu’en cette année 2025 la question de la fiscalité des hauts patrimoines est plus que jamais d’actualité, une information, pourtant cruciale, manque à l’appel : celle du domicile fiscal de ces grandes fortunes. Car, face au projet de taxe Zucman – soutenu par la gauche mais rejetée du budget 2026 par la droite et l’extrême droite –, les milliardaires nous ont bien fait comprendre qu’ils étaient farouchement opposés à toute imposition, même minime, de leurs juteuses fortunes.

L’Humanité a donc voulu vérifier si les pourfendeurs du meilleur jeune économiste de France étaient bel et bien des résidents fiscaux français. Sur les 60 premières personnalités du classement, toutes milliardaires, 18 ont établi leur résidence fiscale à l’étranger et deux autres ont ou ont eu un litige avec le fisc français à propos de leur domicile fiscal.

Luxe, grande distribution et industrie pétrolière

Deux pour cent d’imposition annuelle sur les patrimoines à partir de 100 millions d’euros, voici ce qui effraye nos grandes fortunes qui, en plus de vociférer pour affirmer que cela tuerait notre outil de production, font planer la menace d’un exil. Sauf que, dans les faits, une bonne partie du haut du panier de ces ultra-riches a déjà mis à l’abri son patrimoine. Si l’on prend les 25 premières fortunes du classement de Challenges, dix d’entre elles sont établies à l’étranger et deux autres sont en conflit avec Bercy.

Dans le domaine du luxe, les frères Wertheimer – propriétaires de Chanel, et dont la fortune de 95 milliards d’euros les place en troisième position du classement 2025 – ont installé leur résidence fiscale à l’étranger depuis au moins le début des années 2010. Tandis que Gérard Wertheimer s’est contenté de franchir les Alpes pour s’installer à Genève, en Suisse, son frère Alain a, lui, décidé de traverser l’Atlantique pour s’établir aux États-Unis, à New York.

Une pratique qui semble à la mode dans le monde de la haute couture, puisque Nicolas Puech, riche héritier d’Hermès qui détient à lui seul 5,7 % du capital de l’entreprise, est installé dans la petite station de sport d’hiver de La Fouly, en Suisse. L’homme, dont la fortune est estimée à 14 milliards d’euros, y réside depuis 1999.

Sources et méthodologie

À partir de la dernière version du classement publié par le magazine Challenges, nous avons effectué des recherches sur les 60 premières fortunes qui y figurent. Nous nous sommes basés sur des articles de la presse spécialisée ou de projets d’investigation journalistique portant sur les questions d’évasion et d’optimisation fiscale. La liste des sources nous permettant de considérer que certains domiciles fiscaux sont établis à l’étranger est disponible dans l’encadré à la fin de l’article.

Le classement « Challenges » a pour habitude de mentionner une personnalité et d’y ajouter la mention « et sa famille », nous avons fait le choix de nous concentrer sur la personnalité. Lorsque plusieurs personnes sont citées pour une même fortune, nous avons dissocié ces personnes pour faire apparaître d’éventuelles différences de situation fiscale (les propriétaires de l’entreprise Chanel par exemple). Enfin, lorsque après plusieurs recherches approfondies nous n’avons trouvé aucune preuve de résidence fiscale en France ou à l’étranger, nous partons du principe que le domicile fiscal de cette personne se trouve en France.

Autre domaine mais même idée, dans l’agroalimentaire le géant Mulliez a, lui, décidé d’aller beaucoup moins loin. Récemment épinglé par une enquête de « Cash Investigation », Gérard Mulliez – dont la fortune est estimée cette année à 25,9 milliards d’euros – réside dans la petite ville belge de Néchin, située très précisément à 732 mètres de la frontière avec la France. Même si le propriétaire d’Auchan nie tout exil fiscal, une bonne partie de sa famille est elle aussi installée à Néchin, à tel point que la rue de la Reine-Astrid y est communément appelée « boulevard des Mulliez ».

À la tête de Perenco, deuxième plus grand groupe pétrolier français, François Perrodo a installé sa fortune personnelle (9,1 milliards d’euros) au Royaume-Uni, à Londres. Toujours dans la capitale britannique, on retrouve Henri Beaufour, membre du conseil d’administration du laboratoire Ipsen et dont la fortune (partagée avec sa sœur Anne, domiciliée en Suisse à Clarins) est estimée à 4,5 milliards d’euros.

La Suisse : eldorado des riches français ?

Paradis fiscal historique où le secret bancaire est roi, le territoire helvète héberge une bonne partie des grandes fortunes françaises exilées. À ­Genève, par exemple, on peut retrouver Ariane de Rothschild, directrice générale du groupe Edmond de Rothschild depuis 2023, dont la fortune s’élève à 5,3 milliards d’euros. Mais aussi Jean-­Guillaume Despature, président du directoire du groupe de domotique Somfy. Comme en atteste le rapport ­financier du groupe en 2019, l’homme originaire du nord de la France a également installé ses 5,1 ­milliards d’euros au bord du lac Léman.

Certains y ont même des contentieux avec le fisc suisse. Exilé depuis l’arrivée de François Mitterrand à l’Élysée en 1981 et la création de l’impôt sur la fortune (ISF), le propriétaire de l’entreprise de grossiste en vins Castel Frères a dû régler plusieurs centaines de millions de francs suisses pour avoir omis de déclarer une partie de ses revenus et de sa fortune pendant plusieurs années. Sa fortune est actuellement estimée à 13,4 milliards d’euros.

À la tête du groupe Altice et de ses milliards d’euros de dette, Patrick Drahi a lui aussi eu à faire avec le fisc genevois. Des affaires révélées notamment par les « Drahi Leaks », où il est question de fausse domiciliation et de doutes au sujet de son statut marital. En 2025, l’homme qui pèse tout de même 7 milliards d’euros a transféré sa fortune en Israël. D’autres grandes fortunes ont également plié bagage lors de l’arrivée de la gauche au pouvoir dans les années 1980, comme Martine Primat (2,6 milliards d’euros), propriétaire du domaine Primland, qui réside à Genève depuis 1981.

Bernard Arnault et François Pinault : l’art du conflit fiscal

Lui aussi avait quitté la mère patrie pendant l’époque mitterrandienne, Bernard Arnault n’en est pas à son coup d’essai en termes d’exil fiscal. En 2012, lorsque François Hollande est élu président de la République et prévoit d’instaurer une taxe de 75 % sur les très hauts revenus, le magnat du luxe menace de quitter l’Hexagone. Il achète alors une propriété dans la très huppée Uccle, en banlieue de Bruxelles. Il y paie des impôts locaux et prévoit d’y installer sa résidence fiscale, chose à laquelle il renoncera finalement en 2013.

Mais, en 2018, un documentaire diffusé par France 3 révèle un possible redressement fiscal en France de 1 milliard d’euros pour fausse domiciliation. À ce jour, Bernard Arnault s’est acquitté d’une amende de 2,5 millions d’euros en Belgique pour mettre un terme à une enquête sur sa domiciliation, en affirmant qu’il a toujours été résident français mais en ne niant pas un possible redressement fiscal.

Lui avait plutôt choisi Londres pour poser ses valises. À la tête du groupe de luxe Kering, François Pinault a perdu son pari avec Bercy, selon des informations du média l’Informé datant de 2023. En effet, lorsque le milliardaire déménage en 2014, il décide de maintenir sa résidence fiscale en France pour payer ses impôts sur le revenu. Mais dès 2016, le fisc britannique interprète différemment la convention fiscale entre les deux pays et lui réclame à son tour des impôts.

Pour sortir de cet imbroglio, il affirme assurer sa fonction de directeur général depuis Londres et celle de président depuis Paris. Une pirouette inutile aux yeux du tribunal administratif français qui considère que les deux activités sont indissociables du siège français. Débouté en appel en avril 2024, François Pinault devrait s’acquitter d’un redressement d’une valeur de 11,5 millions d’euros.

Notre classement des exilés fiscaux en intégralité

 

2

Bernard Arnault

LVMH

116,7 milliards d'euros

3

Alain Wertheimer

Chanel

95 milliards d'euros

3

Gérard Wertheimer

Chanel

95 milliards d'euros

8

Gérard Mulliez

Groupe Mulliez

25,9 milliards d'euros

9

François Pinault

Kering

15 milliards d'euros

 

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09/11/2025

Shein, c’est quoi ? : 87 % des vêtements achetés par les Français sont importés. La Chine, le Bangladesh, l’Italie et la Turquie sont les principaux fournisseurs pour notre habillement

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La plateforme de vente en ligne Shein est au cœur de l’actualité à la suite de la découverte, vendredi dernier, d’une poupée sexuelle à l’apparence enfantine sur son site. Ce scandale est concomitant avec l’inauguration mercredi d’une boutique de la marque dans un grand magasin parisien. Les poupées signalées ont été depuis retirées de la vente et le gouvernement français a annoncé vouloir suspendre du site.

Stigmatisée dans les médias comme « chinoise » ou « asiatique », l’entreprise dirigée par l’américain Donald Tang est dorénavant accusée de détruire l’industrie textile et les petits commerces en France. Au-delà de l’affaire des poupées, le gouvernement dénonce une « invasion commerciale » de la Chine : on assiste là à une continuation de la guerre commerciale par d’autres moyens.

Capitaux américains, dirigeant américain, ouvriers chinois

« Chinoise », la marque Shein ? Son fondateur, Xu Yangtian, surnommé Chris Xu, est en effet né en Chine, mais il réside à Singapour, où il a d’ailleurs déménagé le siège de sa société. C’est un ancien étudiant de la George Washington University.

S’il reste l’actionnaire majoritaire, il n’en est pas le seul propriétaire. Plusieurs fonds d’investissement sont au capital de Shein : Sequoia Capital (États-Unis), General Atlantic (États-Unis), Mubadala Investment Company (Émirats arabes unis), Tiger Global MGMT (États-Unis), DST Global (îles Caïmans), Coatue Management (États-Unis).

Dans les faits, la marque est dirigée par Donald Tang, un entrepreneur américain, ancien étudiant de la California State Polytechnic University, ancien dirigeant de la banque américaine Bear Stearns rachetée en 2008 par JP Morgan.

Enfin, le principal marché de Shein sont les États-Unis. Cette marque n’est d’ailleurs pas commercialisée en Chine.

Ce sont en fait les fabricants sous-traitants de Shein, au nombre de 7000 ateliers, qui sont chinois. La Chine ne consomme pas les modèles de Shein, elle n’en est pas propriétaire et elle ne le dirige pas : en revanche, c’est l’industrie textile chinoise qui fournit la marque, comme bien d’autres marques internationales.

Shein dans la guerre commerciale

L’offensive médiatique et gouvernementale contre Shein permet en fait de mobiliser l’opinion publique en faveur de mesures protectionnistes contre les industries chinoises.

Quels vêtements les Français peuvent acheter ?

Bien sûr, les Français vont acheter des vêtements bon marché par manque de pouvoir d’achat. Cependant, au-delà du prix, ils doivent de toute manière acheter des vêtements qui ne sont pas produits en France, pour la simple raison que la France ne produit presque plus de vêtements.

La France dépend, pour l’ensemble des secteurs, de productions extérieures. C’est particulièrement le cas pour l’industrie textile : de 765 000 salariés en 1970, 530 000 en 1980, 360 000 en 1990, puis 100 000 en 2010, à autour de 60 000 aujourd’hui. Parallèlement, la production s’est effondrée de 50 % entre 1996 et 2015.

Résultat : 87 % des vêtements achetés par les Français sont importés, en 2021. La Chine, le Bangladesh, l’Italie et la Turquie sont les principaux fournisseurs pour notre habillement. En l’état, sans importation, pas de consommation et donc pas de commerce en France.

Cette situation de dépendance provient de choix industriels délibérés consistant à concentrer la production française sur le luxe et le textile technique, en sous-traitant l’habillement à l’étranger.

« Y a qu’à, faut qu’on » ?

Rebâtir une filière de l’habillement en France ne se fera pas en un claquement de doigts : loin de se limiter à la différence de salaires, les avantages des industries chinoises se trouvent, entre autres choses, dans la proximité entre les centres logistiques et des concentrations d’ateliers, la capacité de produire « à la demande » des petits lots de pièces pour chaque modèle, la réduction des pertes et autres économies d’échelle, le renouvellement permanent des catalogues, des avances technologiques dans l’automatisation, etc.

Il est trop facile d’accuser l’étranger de notre propre sabordage et de s’en prendre à « l’ogre chinois ».

15:37 Publié dans Actualités, Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : shein, vetement, chine | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!