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12/07/2016

Gaza, les vivants et les morts de l’été 2014

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Les journalistes Anne Paq et Ala Qandil proposent un webdocumentaire sur des familles palestiniennes décimées lors de l’offensive israélienne à Gaza, en 2014. Bouleversante plongée dans cette guerre faite aux civils, leur travail livre des pistes pour demander justice.

« Comment se reconstruire quand vous avez perdu une partie voire toute votre famille, que votre maison a été détruite, que vous ne pouvez pas retrouver de travail, le tout dans des conditions matérielles impossibles et sur un territoire soumis au blocus ? »

À cette question que pose Anne Paq, le webdocumentaire #ObliteratedFamilies (Familles décimées) dont elle est la coréalisatrice, n’apporte pas de réponse. Il nous parle des morts et des vivants, des pertes irrémédiables, met des visages et des corps sur la guerre, donne à voir les traumatismes profonds et durables occasionnés par les bombardements, mais aussi la soif de justice du peuple qui les subit. Et c’est déjà beaucoup.

Le tribut des familles

Durant 51 jours, pendant l’été 2014, l’armée israélienne a mené dans la bande de Gaza une offensive militaire – "Bordure protectrice" – qui a coûté la vie à près de 2.200 Palestiniens, très majoritairement des civils, dont plus de 500 enfants, fait plus de 11.000 blessés, dont au moins 1.000 enfants aujourd’hui handicapés à vie, et laissé 100.000 Gazaouis sans-abris.

Après les opérations "Plomb durci" de décembre 2008/janvier 2009 et "Pilier de défense" de novembre 2012, c’était la troisième fois en six ans que le petit territoire subissait la violence (aérienne, terrestre, navale) de l’armée israélienne. « La confrontation armée est le terrain d’Israël, et il y excelle », résume la journaliste Amira Hass, dans son texte d’introduction au webdoc. Un terrain généralement jonché de cadavres lorsque "Tsahal" s’en retire, notamment dans la bande de Gaza. « Au sortir de la confrontation, il y a eu cette statistique effroyable donnée par les Nations Unies, qui m’a vraiment choquée, rappelle Anne Paq :

« En 51 jours de bombardements, 142 familles ont perdu au moins trois membres ou plus. Il y a toujours eu beaucoup de civils tués par l’armée israélienne, mais là c’est vraiment une caractéristique spécifique à cette offensive. C’est cela qui m’a conduit à mener ce travail en partant des familles. »

Journaliste-photographe française membre du collectif Activestills, un collectif établi en 2005 par des photographes et documentaristes pour qui « la photographie doit être un outil de changement social et politique » (à voir ici ), Anne Paq pratique la Palestine depuis une quinzaine d’année et a commencé à se rendre régulièrement dans la bande de Gaza en 2010. « Il m’a semblé important de passer du temps sur place pour parler du siège, des bombardements, documenter la situation ». En 2014, c’est d’Europe qu’elle suit la montée des tensions à l’approche de l’été. Dès que l’offensive militaire est déclenchée, elle se rend sur place. « J’y suis restée trois semaines, jusqu’à mon point de rupture. Je suis ensuite revenue à Gaza en septembre ».

L’histoire des victimes

Sur place, travaillant comme journaliste pour divers médias, elle est happée par la couverture de l’info, plongeant dans une « incessante série d’atrocités ».

« On est à l’hôpital, dans les morgues, il y a les corps qui défilent, les familles ravagées qui débarquent et c’est extrêmement frustrant de ne pas connaître l’histoire de ces personnes. En septembre suivant, pour moi, c’était important de retrouver certaines de ces familles ».

En compagnie de sa collègue Ala Qandil, journaliste palestino-polonaise, et avec le concours du Centre Al Mezan pour les droits humains (à voir ici) qui l’oriente sur d’autre pistes, elle va au final documenter l’histoire d’une cinquantaine de familles. Qui, un jour de juillet ou d’août 2014, en quelques secondes, ont basculé dans l’horreur. Le grondement d’un avion, le sifflement d’un missile, le fracas d’une bombe. Et dans le chaos des ruines fumantes, les corps des enfants, du père, de l’épouse, des frères, de la cousine. Parfois découpés en morceaux, brûlés. Les survivants racontent.

Parmi ces histoires, il y a celle de la famille Suheibar. Le 17 juillet, Afnan, huit ans, ses deux cousins Jihad et Wassim, dix et neuf ans, ont été tués par un missile tiré d’un drone. Ils étaient sur le toit de la maison pour nourrir les oiseaux. Des fragments du projectile ont permis d’identifier le fabriquant d’un composant, la société française Exxelia Technologies. Le 29 juin dernier, la famille Suheibar, soutenue par l’ACAT, a porté plainte en France contre cette société pour complicité de crime de guerre et homicide involontaire. Anne Paq explique pourquoi « Faire écho à de telles démarches fait partie de nos objectifs :

« Leur plainte permet de mettre en lumière les complicités avec Israël, d’établir des liens. Tout cela est important parce que si l’impunité d’Israël perdure, ça recommencera. Aujourd’hui d’ailleurs, la question n’est pas tant de savoir si la bande de Gaza sera de nouveau frappée mais plutôt quand... »

La colère et la justice

En attendant, #ObliteratedFamilies permet aussi de rappeler cette réalité : « Il n’y a jamais de retour à la normale à Gaza. Les attaques, c’est tragique, mais il y a un avant, un après. Durant l’offensive de l’été 2014, les hôtels du territoire étaient plein de journalistes. Lorsque je suis revenue en septembre, il n’y en avait plus un seul. Il faut pourtant montrer la lenteur de la reconstruction et dire que la situation de siège et l’omniprésence dans le ciel de chasseurs ou de drones sont anormale et injuste. Tout le temps. »

« La colère est là, bien sûr mais c’est surtout la soif de justice qui est exprimée, poursuit Anne Paq. Et ce d’autant plus qu’ils ne sont pas reconnus en tant que victimes par Israël, dont le discours est de renvoyer la responsabilité de tous ces morts aux Palestiniens eux-mêmes. Alors que rien ne peut justifier que l’on tue ainsi des civils : les principes de distinction entre civils et combattants et celui de la proportionnalité existent en droit international... »

Des principes évanouis durant l’été 2014, comme le montre ce webdocumentaire très abouti. Alternant textes, vidéos et photos (en arabe, anglais et français), #ObliteratedFamilies propose les histoires de dix familles ; cinq sont déjà accessibles, les suivantes le seront au fil des semaines, d’ici la fin du mois d’août. Un kit d’exposition téléchargeable et donnant des informations sur les autres familles rencontrées dans le cadre du projet devrait bientôt être disponible. Pour que « tous ceux qui le souhaitent puissent se saisir du sujet et l’exposer ».

Article publié dans Regards

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22/04/2016

Le frère du Che : « Votre président est socialiste, ah bon ? »

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mon frère le Che.jpegUn demi-siècle après la mort de Che Guevara, son frère Juan Martin milite pour perpétuer son héritage, et, derrière l’icône, dévoile l’homme dans un livre "Mon frère le Che" (Calmann-Lévy). A l’heure où Cuba se rapproche des USA, où des mouvements de jeunesse secouent l’Europe, le septuagénaire argentin défend encore l’esprit de la « revolucion ». Rencontre.

Pourquoi avoir mis tant de temps à parler publiquement du Che, votre frère aîné de 15 ans ?

Le processus a été long…Au départ, je ne voulais pas parler de mon frère. J’ai commencé à réfléchir après des conférences, la création d’une association, et après avoir rencontré Armelle Vincent ( NDLR : journaliste française qui a co-écrit le livre). Il s’est à la fois passé des choses dans mon for intérieur, et à l’extérieur, dans le monde. Les mouvements sociaux dernièrement à travers le monde m’ont fait réfléchir. C’était le moment de remettre le Che au cœur de la société ! Il y avait aussi la pression des compagnons du Che, ils me poussaient à parler…On me disait, notamment à Cuba, que j’étais égoïste de ne pas vouloir parler du Che.

Etait-il facile de s’attaquer à la fois au mythe et en même temps au grand frère ?
Ce n’est ni une biographie, ni un livre politique. La première chose, c’était de transformer le Che en Ernesto Guevara. Comme il est présenté comme un mythe, il n’aurait pas eu d’enfance, pas de famille, ce serait une statue, un Dieu. Certains ont souvent comparé les deux, beaucoup a été fait pour nuire à leur image, pour manipuler leur histoire et présenter un autre passé, moi je voulais remettre l’authentique contenu dans l’image. Celui du Che, hein, pas du Christ !

«  Je ne veux pas que le mythe du Che se convertisse en religion »

Pourquoi l’esprit du Che a-t-il traversé les décennies ?
Il y a plusieurs raisons, mais fondamentalement son combat contre l’injustice, son désir de changer le monde, sa cohérence politique, une vision à long terme, sa vision de la solidarité.  Pour lui, l’homme ne naissait pas méchant et destructeur. Les guerres ne sont pas le résultat de la folie des hommes, mais dépendent de la défense de certains intérêts. Il y a une vraie différence avec la religion : elle, parle de l’après, de l’au-delà, l’esprit du Che, c’est le concret, c’est la vie terrestre. Mais je ne veux pas que ce mythe du Che ne se convertisse non plus en religion, il faut le ramener à la terre !

Mais lorsqu’on voit le Che sur les tee-shirts du monde entier, son image dépasse tout ça ?
Moi qui étais commerçant de vins et de cigares havanes, de livres, et même de confiture, je peux dire qu’un commerçant vend ce qui se vend. Et le Che, ça fait vendre ! Celui qui le vend est un commerçant, mais celui qui le porte l’achète pour le symbole. Maradona, Mike Tyson, et Renaud que j’ai rencontré l’autre jour à la télévision française, le portent comme tatouage.

Dans les mouvements actuels, l’esprit du Che est-il présent ?
Le «  Che » reste une référence, mais ce ne sont pas ses idées qui sont à la source de ces mouvements. C’est l’injustice, la situation, qui les fait naître. Lui va aider à approfondir les questions politique, économique, sociale. Un peu comme Robespierre avec la Révolution française. Parfois, il y a eu des Révolutions et ils se sont réapproprié l’esprit du Che après, comme chez les Soviétiques. C’est un référent au même titre que Lénine…

« On ne sait plus ce qu’est le socialisme »

Le Cuba de 2016, au moment où il s’ouvre vers les USA, vit-il encore sur les idées du Che ?
Le monde en général ne vit plus sur des principes socialistes aujourd’hui, ce sont les principes capitalistes qui dominent. Il reste quelques endroits rares, où il résiste. Le socialisme est donc dans une position de défense. Les Etats-Unis ont un objectif : transformer Cuba si possible en pays capitaliste. La position des Cubains, elle, est contradictoire : d’un côté, ils veulent continuer à résister, garder leur santé et leur école gratuites, de l’autre ils veulent accéder aux richesses, à la technologie, avoir des écrans plats, des iPods. Ça convient aux deux pays aujourd’hui de se rapprocher. Le système est déjà hybride. Le socialisme ne s’est pas stabilisé, il s’est effondré. On ne sait plus ce qu’est le socialisme. Votre président François Hollande est socialiste ? Ah bon ? Comme ci, comme ça (en français dans le texte). Les bénéfices générés par la production ne reviennent pas en bas, mais en haut, et c’est l’un des problèmes principaux du capitalisme. Sans compter que cette énorme productivité nuit à l’environnement, brise des vies humaines.

Gardez-vous l’âme d’un anti-capitaliste, et l’âme d’un révolutionnaire ?
Oui, définitivement, celle d’un anti-capitaliste. Le capitalisme ne fonctionne pas, produit une société injuste qui ne peut durer comme ça, on doit trouver une alternative qui rétablisse l’équilibre. Le socialisme soviétique ne marche pas, le communisme chinois non plus, les nouvelles générations doivent trouver une nouvelle voie. Quelle révolution peut-on encore espérer ? La Française ? La Russe ? Celle de Mao ? Elles ont toutes eu à se confronter au pouvoir avec plus ou moins de succès.

«  Je n’ai pas vécu dans l'ombre du Che, il a plutôt été une lumière pour moi »

Des révolutions sont-elles encore possibles aujourd’hui ?
Ce système n’est pas possible pour une révolution. Mais le système tel qu’il existe aujourd’hui n’est plus bon. Même si je me dis marxiste, on ne peut appliquer aujourd’hui ce que Marx disait en 1948. Pareil pour la pensée léniniste. Il y a un cheminement à trouver qui peut passer par une révolution ! Mais ce n’est pas un seul pays qui peut aller dans cette voie-là, c’est l’humanité toute entière, car on a tous les mêmes intérêts aujourd’hui.

Si le Che vivait encore aujourd’hui…
…L’Amérique latine serait libre ! Moi, je ne suis pas le même qu’à l’âge de 20 ans, et le Che ne le serait pas non plus. Le Che était par exemple en désaccord avec Fidel sur le rapprochement avec l’Union soviétique. Il pensait que l’Union soviétique utilisait en fait les armes du capitalisme. Comme les pays communistes pensaient qu’ils allaient triompher du capitalisme, ils attendaient que ce système de l’ouest s’effondre. Ces derniers ne devaient pas emprunter ni l’un, ni l’autre, ou attendent qu’ils s’effondrent, mais choisir une troisième voie.

A-t-il été difficile pour vous de vivre dans l’ombre du Che ?
Non, ça n’a pas été une ombre, ça a été une lumière ! Pas seulement comme frère, mais comme référent, comme modèle. Et j’espère qu’il le restera pour les générations futures. Mais les éléments ne sont pas réunis aujourd’hui pour qu’on trouve un nouveau Che, ou une nouvelle Chea ! 

« Mon frère le Che » (éditions Calmann-Lévy) par Juan Martin Guevara avec Armelle Vincent

Article publié par l'Est Républicain

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03/04/2016

Konstantina Kouneva, Femme courage au Parlement européen

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Bulgare immigrée en Grèce pour soigner son fils, cette élue de Syriza, ethnographe de formation, aura connu les petits boulots mal payés, le syndicalisme de combat et une agression à l’acide, avant, aujourd’hui, de siéger à Strasbourg. Portrait de l’eurodéputée Konstantina Kouneva.

Son sourire a résisté au jet d’acide qui lui brûla le visage, une nuit de décembre 2008. Et qui lui ravit à jamais la vue. Konstantina Kouneva était alors déléguée syndicale des femmes de ménage employées par une entreprise sous-traitante dans le métro d’Athènes. «À minuit passé, quand je rentrais du travail, j’ai vu un homme assis sur le pas de la porte, à l’entrée de mon immeuble. Il avait la tête baissée et le bras autour dans une position de souffrance. Je me suis naturellement baissée pour lui venir en aide. C’est sans doute ce qu’il attendait. L’individu s’est soudainement déployé et m’a aspergé le visage… la sensation de brûlure a été instantanée jusqu’au fond de la gorge et ma vue s’est brouillée. J’ai eu à peine le temps de reconnaître la silhouette qui me filait à moto de temps à autre quelques jours auparavant, puis tout est allé très vite…»
Konstantina Kouneva a été hospitalisée durant une année. Elle a subi une trentaine d’interventions chirurgicales sur le visage en sept ans. L’enquête autour de son agression criminelle n’a toujours pas abouti. C’est parce qu’elle avait gardé le souvenir du soutien permanent des militants de Syriza dans son combat syndical qu’elle a accepté d’en être la candidate aux élections européennes de 2014. Élue députée, elle est aujourd’hui en charge de nombreux dossiers dans le domaine social. Elle se livre sur un ton apaisant qui tranche avec son récit de vie accidentée.

Le combat d’une mère

Au commencement, il y a la peine d’une mère confrontée à la maladie de son enfant en bas âge, une affection cardiaque. Puis, très vite, l’envie et la force de se dresser contre la fatalité, de porter un défi aux épreuves, de changer le cours des choses, dans sa vie personnelle et jusque dans son travail. «Je suis née en Bulgarie, au bord du Danube, à la frontière avec la Roumanie, mes parents étaient des villageois, je viens d’un milieu de salariés, de petits employés», précise-t-elle dans une parenthèse. L’étudiante en histoire se passionne pour l’ethnographie et en fait son métier. Quelques années plus tard, la maman du petit garçon né en 1997 est contrainte de quitter son pays pour le soigner. «C’était une question de vie ou de mort. En 2001, il n’y avait pas, dans mon pays, la possibilité de traiter son cas dans de bonnes conditions», explique-t-elle. Konstantina trouve fort heureusement une piste. «Un Bulgare employé dans un hôpital d’Athènes était disposé à m’aider pour l’admission de mon fils.» Elle franchit le pas avec une maigre bourse.
Première épreuve : un tunnel d’attente dans l’angoisse. L’intervention chirurgicale est reportée par prudence, il faut patienter deux longues années. Vivre et surtout travailler à Athènes devient alors incontournable. Konstantina y déniche un job dans un supermarché. «Je travaillais de nuit pour pouvoir rester avec mon fils dans la journée, puis ma mère m’a rejointe en Grèce. À deux, on pouvait ainsi se relayer auprès de lui et rassembler l’argent pour son opération.» Une course contre la montre. Mère et fille triment dur. Le destin leur sourit pour un temps, mais pour un temps seulement.

Apprendre à lire le grec, s’informer, consulter..

L’enfant est sauvé. Reste cependant la contrainte de la convalescence sur les lieux au moment même où Konstantina est licenciée après deux années de travail au supermarché. «Par chance, ma mère était employée dans une entreprise de nettoyage du métro d’Athènes. Comme elle donnait satisfaction, elle a pu m’obtenir un entretien d’embauche pour un poste de femme de ménage.»
C’est alors le début d’une nouvelle bataille. Non plus contre les choses de la vie, le triste sort et la maladie, mais contre le harcèlement des chefaillons, la confiscation des droits et l’exploitation sans limites du travail. Konstantina, qui ose et ne recule pas, gagne la confiance de ses collègues. Elle est élue secrétaire générale du syndicat de personnel d’entretien et d’aides domestiques, et attaque sur tous les fronts. Elle s’inscrit à des cours de grec, se met à le parler couramment et surtout à le lire, pour prendre connaissance de la réglementation. Ordre des avocats, inspection du travail… l’élue s’informe, consulte, multiplie les contacts, ne laisse rien au hasard et, forcément, lève le voile sur des infractions, des atteintes à des droits élémentaires, des injustices. Un sombre tableau. «Pas de primes de pénibilité, le travail de nuit sous-payé, des pauses non respectées, tout juste destinées à réduire les heures payées et les cotisations quand elles étaient réglées. Les employées étaient assurées pour six heures seulement alors qu’elles en effectuaient douze, affectées à plusieurs missions et appointées pour une seule. Le travail au noir était chose courante et les retards de salaires très fréquents.» La direction de l’entreprise constate tout à coup l’émergence d’une syndicaliste qui prend sans cesse de l’envergure, sensibilise ses collègues, impulse des revendications, encourage la fronde… de femmes de ménage !

« Gare à toi si tu n’arrête pas »

Une machine se met aussitôt en branle, sournoisement actionnée. Les obstacles se dressent sur le chemin risqué de Konstantina. On tente avant tout de la couper de ses collègues. Certains d’entre eux détournent la tête pour ne pas la saluer devant les caméras sur le lieu de travail. Puis la pression monte d’un cran. Sa mère est licenciée sans motif. La conspiration ne fait plus de doute, qui se transforme très vite en menaces au bout du fil, puis de vive voix : «Gare à toi si tu n’arrêtes pas !» Dans la nuit du 22 au 23 décembre, un individu lui brûle le visage d’un jet d’acide, à l’entrée de son immeuble.
«Aujourd’hui, tout comme hier, j’ai tout simplement, et malgré tout, le sentiment d’être utile. C’est ma plus grande satisfaction», confie-t-elle en souriant.

Nadjib touaibia
Vendredi, 1 Avril, 2016
Humanité Dimanche
 
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25/03/2016

Son titre en fait le « patron » du Parti communiste, mais Pierre Laurent ne croit en fait qu’à « l’intelligence collective »

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C'est un lapsus qui ne trompe pas. Il a essayé à plusieurs reprises, mais non, Pierre Laurent ne parvient pas à parler d'homme (ou de femme) « providentiel », remplaçant chaque fois ce dernier adjectif par « présidentiel ».

C'est comme ça, chez le secrétaire national du Parti communiste français, invité hier après-midi des Rencontres Sciences Po- « sud Ouest », le collectif est décidément trop fort.

D'ailleurs, il ne s'est pas privé de souligner que, si beaucoup de choses rassemblaient les militants du PCF et du Parti de gauche, une au moins les différenciait : « le rapport au chef ». Jean-Luc, si tu nous écoutes… « On me présente comme le patron du Parti. En fait, j'aime les gens qui prennent leurs responsabilités, mais je n'aime pas les chefs. Pour moi, l'intelligence n'est que collective. »

Autant dire que la posture martiale et autoritaire de Manuel Valls impressionne assez peu Pierre Laurent. « Au Sénat, il a une attitude révélatrice, précise-t-il. Quand il parle, il tourne désormais le dos aux bancs de gauche, il ne regarde que les bancs de droite. » 2017, il en a bien sûr été question dans la bouche des étudiants de Sciences Po et de notre confrère Jefferson Desport. Pierre Laurent a ironisé sur tous ces candidats de gauche, dont Jean-Luc Mélenchon, qui ont déjà loué leurs starting-blocks. « Pas la peine de rajouter d'autres noms, y compris le mien. »

Pour lui, c'est d'abord un programme de gauche qu'il faut élaborer avant de trouver le ou la candidat(e) qui le défendra. Et, selon lui, c'est Myriam El Khomri, à l'insu de son plein gré, qui pourrait rassembler la gauche anti-Hollande, c'est-à-dire tous ceux qui défilent et manifestent contre sa loi.

« Aucun parlementaire de gauche ne pourra la voter », affirme le secrétaire national du PCF, qui parie sur une affluence considérable le 31 mars dans la rue. Une loi qui a, en tout cas, permis aux communistes de se rendre compte qu'ils avaient du retard pour la mobilisation via les réseaux sociaux.

S'il croit toujours à la lutte des classes et à la révolution, sans la voir comme le grand soir mais « en dépassant le système capitaliste qui permet à 1 % de la population mondiale d'être aussi riche que les 99 % restants », Pierre Laurent ne fait pas d'angélisme.

« Le seul boulevard qu'offre la crise économique, c'est le boulevard du racisme, dit-il. Quand il y a le choc des misères, difficile de faire passer le message de la solidarité », ajoute-t-il, reconnaissant avoir « un peu perdu la bataille idéologique contre l'extrême droite ». « Mais, depuis des années, on ne cesse de culpabiliser et dénigrer le monde ouvrier en désignant l'étranger. »

Pierre Laurent, lui, et c'est génétique, croit toujours à la fraternité. Celle qui l'unissait notamment à Charb et à d'autres dessinateurs de « Charlie » et qu'il a évoquée, à sa façon, d'un ton égal, sans effets de manches. « Ils nous ont manqué, à la dernière Fête de ‘‘L'Huma''. »

Benoît lasserre pour Sud Ouest

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11:25 Publié dans Actualités, Connaissances, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pierre laurent, pcf, chef | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!