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13/09/2018

Ian Brossat : "La gauche anti-migrants, ça n'existe pas, c'est comme un lion végétarien"

Ian Brossat, immigration

Le chef de file du Parti communiste aux élections européennes déplore l'évolution du discours de Jean-Luc Mélenchon sur la question des migrants.

La gauche veut-elle toujours accueillir des migrants ? Dans quelles conditions et dans quelles proportions ? En Allemagne, le débat enflamme le parti Die Linke depuis que l'une de ses figures, Sahra Wagenknecht, a lancé "Aufstehen", un mouvement à la tonalité anti-migrants. L'égérie de la gauche radicale allemande dit toujours défendre le droit d'asile et le devoir d'accueillir des réfugiés. Mais alors que l'extrême droite prospère depuis qu'Angela Merkel a ouvert les frontières du pays en 2015, Sahra Wagenknecht appelle à en finir avec la "bonne conscience de gauche sur la culture de l'accueil" et assure que les immigrés concurrencent les travailleurs allemands et tirent leurs salaires vers le bas.

En France, Jean-Luc Mélenchon tient un argumentaire similaire depuis la dernière présidentielle. En matière d'immigration, le leader de La France insoumise propose d'une part "d'assumer le devoir d'humanité" envers les réfugiés et d'autre part de "lutter contre les causes des migrations". Lors de son discours de rentrée à Marseille, il a aussi repris l'idée selon laquelle le recours à l'immigration est un moyen pour le patronat de faire pression sur les salaires : "Oui, il y a des vagues migratoires. Oui, elles peuvent poser de nombreux problèmes aux pays d'accueil. Elles posent de nombreux problèmes quand certains s'en servent pour faire du profit sur le dos des malheureux. [...] Et nous avons toujours réagi de cette manière. Si vous lisez Jean Jaurès et les penseurs du socialisme, ils ont toujours dit : 'Vous vous servez de l'immigration pour abaisser le coût des salaires ; vous vous en servez pour lutter contre les acquis sociaux.'"

Pour l'adjoint au logement à la mairie de Paris et chef de file du parti communiste pour les élections européennes, Ian Brossat, ce discours est ambigu.

Que vous inspire les mots d'ordre du nouveau mouvement lancé en Allemagne par Sahra Wagenknecht ?

J'observe que le parti Die Linke a majoritairement choisi de maintenir une ligne d'accueil des réfugiés. Sahra Wagenknecht est une dissidente, elle a été mise en minorité au dernier congrès. Elle a décidé de créer son propre mouvement qu'elle décrit comme une gauche anti-migrants. Or de mon point de vue, la gauche anti-migrants, ça n'existe pas, c'est comme un lion végétarien.

La solidarité à l'égard des plus déshérités est dans l'ADN de la gauche et ceux qui flanchent et cèdent à l'extrême droite sur un sujet pareil n'ont plus rien à voir avec la gauche. Partout en Europe, l'extrême droite porte son venin xénophobe et raciste. En cet instant, certains nous expliquent qu'il faudrait que la gauche courbe l'échine.

Je suis convaincu que les combats perdus sont ceux qu'on ne mène pas parce qu'on considère qu'ils sont perdus d'avance. Moi je n'ai pas la gauche honteuse sur ce sujet. On a aujourd'hui l'impression d'être dans un match de boxe. Sur le ring, l'extrême droite boxe avec une énergie incroyable et on nous explique que la gauche ne devrait pas porter les coups. Il faut au contraire porter nos valeurs.

En 2012, vous aviez fait campagne derrière Jean-Luc Mélenchon sous le slogan "L'immigration n'est pas un problème". Désormais, le leader de La France insoumise veut mener une "politique raisonnable" conjuguant "devoir d'humanité" et "lutte contre les causes des migrations". Pourquoi jugez-vous cette position ambiguë ?

Disserter sur les causes de l'immigration, c'est une manière d'esquiver le sujet. Evidemment qu'à moyen terme, il faut faire reculer la misère, le réchauffement climatique et abattre les dictatures. Personne ne peut imaginer qu'on résoudra ces problèmes d'un claquement de doigts. On sait que ça prendra du temps.

Il reste que la question qui nous est posée aujourd'hui c'est comment on accueille, quels moyens on se donne pour organiser un accueil digne, équitablement réparti au sein de l'Union européenne. Je crois qu'aujourd'hui toute l'énergie de la gauche devrait être consacrée à ça. Or ceux qui dissertent en permanence sur les causes de l'immigration le font pour ne pas traiter cette question-là.

Dans l'évolution de Jean-Luc Mélenchon, il y a sans doute une part de marketing politique. Je ne peux que le regretter. Mais pour nous les communistes, il n'est pas question de flancher sur une question aussi essentielle, surtout dans le contexte que traverse l'Europe en ce moment.

Les travailleurs immigrés tirent-ils les salaires des travailleurs européens vers le bas ? Faire croire que les immigrés seraient responsables de la paupérisation des Européens est une absurdité totale.

Regardons la réalité : depuis dix ans, le produit intérieur brut des pays de l'Union européenne est passé de 15.000 milliards à 17.000 milliards d'euros. En attendant, le pourcentage de travailleurs pauvres est passé de 7 à 10%. La faute à qui ? Pas aux réfugiés.

Aux actionnaires qui se sont enrichis sur le dos des salariés. Donc faire des immigrés le bouc émissaire dans cette affaire est à la fois injuste et dangereux, c'est une manière de ne pas parler des vrais responsables que sont les actionnaires et un certain nombre de patrons gloutons qui ont fait le choix de s'enrichir au détriment de la grande majorité.

C'était pourtant ce qu'affirmait Georges Marchais au début des années 1980. Dans un discours le 6 janvier 1981, le premier secrétaire du PCF appelait à "stopper l'immigration officielle et clandestine" car elle "constitue pour les patrons et le gouvernement un moyen d'aggraver le chômage, les bas salaires..."

Si certains n'ont rien d'autre à faire que de déterrer des citations des années 1980 sorties de leur contexte, je ne peux rien pour eux et je les laisse vaquer à leur occupation d'archéologues. Le Parti communiste a depuis une vingtaine d'années des positions extrêmement claires sur le sujet et personne ne peut nous faire reproche de ne pas avoir été au cœur de toutes les mobilisations en faveur des réfugiés.

S'ils veulent vraiment regarder la cohérence des uns et des autres, je veux bien qu'on regarde les déclarations de Jean-Luc Mélenchon sur le traité de Maastricht en 1992, mais ça n'a pas grand intérêt.

Concrètement, quelle est cette politique d'accueil que vous défendez ?

Je pars d'un constat concret que je vis à Paris. De toute façon, les réfugiés, ceux qui fuient la misère et la guerre, finiront par arriver.

La question n'est pas de savoir s'il faut accueillir ou pas, c'est de savoir si nous mettons des moyens en place pour que cet accueil se passe correctement. Une bonne politique en matière d'immigration et d'accueil des réfugiés est une politique qui organise d'une part des voies légales de migrations − qui de fait aujourd'hui n'existent pas, ce qui ouvre un marché aux passeurs. Et d'autre part, une clé de répartition à l'échelle de l'Union européenne, qui permette que cet accueil se fasse de manière équilibrée.

Quand on regarde dans le détail : depuis le début des années 2000, les pays de l'Union européenne ont investi 15 milliards d'euros dans la mise en place de frontières extérieures. De fait, ça n'a pas marché puisque les réfugiés sont arrivés quand même. Cet argent serait mieux investi si on s'en servait pour créer des conditions d'accueil sur le territoire européen. Ce qui n'a pas été le cas et qui provoque les campements qu'on voit un peu partout.

Cette politique ne risque-t-elle pas d'entraîner un appel d'air, comme semble le penser le gouvernement ?

Je suis favorable à la régularisation de tous les réfugiés qui sont actuellement sur le territoire français, qu'ils aient l'asile ou non. Ce qui crée l'appel d'air, c'est la situation que vivent ces pays, c'est la misère, la guerre et les dictatures. De toute façon, les réfugiés finiront par arriver. La question est de savoir s'ils dorment sur le trottoir ou si nous créons des conditions pour qu'ils puissent être hébergés chez nous et accompagnés socialement.

Propos recueillis par Rémy Dodet pour le Nouvel Observateur

 

12:24 Publié dans Actualités, Point de vue | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : ian brossat, immigration | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

19/01/2018

L'insolente croissance du Portugal inflige un camouflet au culte de l'austérité de Bruxelles

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Pascal de Lima Chef Economiste d'Harwell Management

La réussite du modèle portugais ne vient pas des politiques de l'offre mais au contraire des politiques de la demande. Bruxelles est dans l'embarras.

Longtemps le modèle de référence en Europe a été le modèle allemand. Bruxelles en a fait régulièrement l'apologie, notamment en raison de l'exceptionnel excédent budgétaire allemand, de la dynamique de sa dette, de ses réformes permettant une exceptionnelle compétitivité. Bruxelles s'est souvent appuyé sur ce modèle pour faire pression sur les Etats.

Historiquement, ce modèle repose sur les réformes hétéroclites de l'épopée du Chancelier Schröder pour dépasser la crise des années 1990 en Allemagne. Réformes de l'assurance maladie, célèbres lois Hartz, accords de compétitivité dans les entreprises ont propulsé l'Allemagne vers l'idéal de l'économie de l'offre. L'abaissement des charges des entreprises et la hausse de la TVA ont déplacé la pression fiscale. En parallèle à cela, c'est tout le poids de l'Etat qui a été nettement diminué. Ce modèle qui repose finalement sur les entreprises, on le trouve en Autriche, aux Pays-Bas mais aussi... en Italie du Nord. Ces politiques pro-entreprises ont connu leur apogée en Europe entre 2005 et 2011, date à laquelle, en particulier, la croissance allemande a été maximale.

Mais qu'à cela ne tienne, l'Allemagne s'est essoufflée en 2013-2014 avec une croissance, certes, toujours positive. Un fait notable et loin d'être anodin, le taux de croissance du Portugal est passé au-dessus de celui de l'Allemagne en 2015-2016 et ce sera le cas probablement en 2017. Cependant, avec des excédents commerciaux qui inquiètent de plus en plus Bruxelles, l'Allemagne aujourd'hui interroge.

L'influence de l'Allemagne sur les politiques d'austérité en Europe a atteint ses limites. Car la locomotive de l'Europe ne roule désormais plus qu'à petite vitesse, en termes de croissance et d'exportations, un comble!

Pas de réforme structurelle du marché du travail pour assouplir les droits des salariés, pas d'abaissement de la protection sociale, pas de programme d'austérité comme celui du gouvernement antérieur de droite. Au contraire.

Car pendant ce temps, le petit poucet de l'Europe, longtemps décrié par Bruxelles, vient bouleverser les grandes certitudes sur les bonnes politiques amères à mener en Europe. Il s'agit du Portugal. Il y a un peu plus d'un an en juillet 2016, la Commission européenne entamait une procédure pour "déficit excessif" contre le gouvernement de Lisbonne. Mais depuis, le Portugal a réduit son déficit à 2,1% en 2016 et devrait le ramener à 1,5% cette année quand on peine en France à passer en-dessous de la barre des 4%.

Après une période historique de privatisations forcées pour obtenir les prêts de la Troïka, c'est finalement la coalition de gauche entrée au pouvoir en 2015 qui allait inverser les choses, mettant Bruxelles dans un grand embarras.

Car le modèle économique portugais qui dépasse les taux de croissance allemand aujourd'hui est totalement contraire à celui prôné par Bruxelles. Depuis 2015, la croissance réelle du Portugal s'est nettement redressée après des années noires, celles de la Troïka, durant lesquelles les taux de croissance étaient même négatifs de 2011 à 2013. Aujourd'hui, les taux de croissance du Portugal dépassent ceux de l'Allemagne. Si le taux de chômage frôlait les 17% avec les politiques d'austérité en 2013, celui-ci a décru fortement depuis 2015 pour atteindre 8% en 2017 selon toute probabilité.

Une baisse remarquable, du jamais vu. Le Portugal bénéficie également d'une forte reprise de la consommation depuis 2 ans, jointe à un excédent de la balance des biens et services. Les investissements productifs en pourcentage du PIB se rapprochent même de ceux de l'Allemagne, c'est à dire 16,5% contre 20% pour l'Allemagne.

Avec une amélioration continue du capital humain, on observe également une belle chute des crédits au secteur privé quand l'épargne est en hausse constante depuis deux années. L'inflation quant à elle est totalement maîtrisée, même plus basse (1,3%) qu'en Allemagne (1,6% en 2016). Certes la dette portugaise avoisine les 146% contre 68% en Allemagne, mais elle diminue depuis deux ans.

Les politiques de demande ne sont donc pas systématiquement des politiques d'accroissement de l'endettement. Par ailleurs les taux d'intérêt à long terme se situent à 3,2% en 2016 contre 0,09% en Allemagne. En 2015 et 2016 ce sont les plus bas qu'ait connu le pays depuis 2010 avec la nouvelle coalition de gauche arrivée en 2015.

Le gouvernement n'a pas lésiné sur le plan de relance du pouvoir d'achat.

Car la réussite du modèle portugais ne provient pas vraiment des politiques de l'offre mais au contraire des politiques de demande: pas de réforme structurelle du marché du travail pour assouplir les droits des salariés, pas d'abaissement de la protection sociale, pas de programme d'austérité comme celui du gouvernement antérieur de droite qui avait notamment gelé le salaire minimum et les pensions de retraite, augmenté les impôts et tout cela sans aucun effet notoire sur l'économie. Au contraire, on a assisté en parallèle à une hausse de la pauvreté.

Ici, rien de tel: le salaire minimum a été augmenté en 2016 puis en 2017. En parallèle à cela nous avons assisté à une baisse des cotisations employeurs de 23 à 22%. Enfin, le gouvernement n'a pas lésiné sur le plan de relance du pouvoir d'achat: hausse des retraites et allocations familiales, renforcement du droit du travail, baisse des impôts pour les salaires les plus modestes, arrêt net des privatisations... Pour clore le tout, le Portugal a compris qu'il ne servait plus à rien d'essayer de concurrencer les pays de l'est à bas coûts, donc, on est monté en gamme, dans l'industrie et dans le tourisme. Un point dont la France devrait s'inspirer: la montée en gamme du pays et des politiques de stimulation de la demande, conjointement à un simple abaissement des charges des entreprises.

Sources Blog

29/08/2017

Le capitalisme est incompatible avec la survie de la planète

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Humanite.fr, Jean-Jacques Régibier

Alors que les études se succèdent pour démontrer la gravité et l’étendue des atteintes à l’environnement, peut-on faire confiance au capitalisme pour réparer ce qu’il a produit ?
Non, répondent des scientifiques, militants environnementaux et eurodéputés réunis à Bruxelles par la Gauche Unitaire Européenne (1). Ils proposent d’autres alternatives.
Les mauvaises nouvelles sur le réchauffement climatique et la dégradation de l’environnement s’accumulent à un rythme alarmant depuis le début de l’été sous forme d’une avalanche d’études scientifiques qui aboutissent toutes au même diagnostic : si des mesures drastiques ne sont pas prises très vite à l’échelle mondiale, une partie de la planète risque de devenir invivable dans un délai assez bref. Certaines études concluent même qu’il est déjà trop tard pour redresser la barre.
 
Florilège non exhaustif de ces chroniques estivales d’une catastrophe planétaire annoncée :
 
- Dans la revue Nature, le climatologue français Jean Jouzel et un groupe de scientifiques, prévoient que si d’ici 3 ans les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas stabilisées, la planète passera dans un autre type climat aux conséquences « catastrophiques » : recrudescence des décès dus à la chaleur ( certaines régions de France connaitraient des températures supérieures à 50° ), des incendies, accroissement des réfugiés climatiques venant de régions particulièrement touchées comme la Corne de l’Afrique, le Moyen-Orient, le Pakistan ou l’Iran ( on compte déjà actuellement 65 millions de réfugiés climatiques sur la planète ), baisse des rendements agricoles, etc...
 
- Un rapport établi par plus de 500 scientifiques dans plus de 60 pays, (2) montre que 2016 aura été l’année de tous les records en matière de températures, d’émissions de gaz à effet de serre, de montée des océans et de terres soumises à la sécheresse.
 
- Selon le climatologue américain Michael Oppenheimer, avec le retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris, les chances de réussir à le mettre en œuvre ne dépassent pas 10% ( d’autres chercheurs parlent de 5% de chances.)
 
- Selon une étude réalisées par les chercheurs du Massachusets Institut of Technology ( MIT ) et de l’Université Loyola Marymount, la chaleur risque de rendre l’Asie du Sud-Est invivable d’ici 2100.
 
- Une évaluation scientifique effectuée en avril dernier par l’Unesco conclut que si les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas réduites très rapidement, les 24 sites coralliens classés au patrimoine mondial  auront disparu d’ici à 2100. C’est déjà le cas pour 20% d’entre eux.
 
- Début juillet, une étude menée par des chercheurs américains et mexicains (3) montre que les espèces de vertébrés reculent de manière massive sur terre, à un rythme inégalé depuis la disparition des dinosaures il y a plus de 60 millions d’années. Les chercheurs parlent de « sixième extinction de masse des animaux » et analysent les conséquences « catastrophiques » de cette « défaunation » aussi bien sur les écosystèmes que sur l’économie et la société en général.
 
- Selon article de la revue Science Advances, la fonte des glaces du Groenland, région qui se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète, va s’accélérer dans les prochaines années. Selon l’un des auteurs de cette étude, Bernd Kulessa ( Collège des sciences de l’université britannique de Swansea ), si les glaces devaient disparaître complètement, le niveau des océans monterait de 7 mètres.
Comme pour le confirmer, il y a quelques jours, un méthanier de 300 mètres battant pavillon du groupe Total, franchit le passage du Nord-Est habituellement obstrué par la banquise, sans l’aide d’un brise-glace. Ce rêve de relier l’Atlantique au Pacifique par le Détroit de Bering que caressaient depuis longtemps les pétroliers, mais aussi des états comme la Russie, est désormais une réalité.
 
- Pour couronner le tout, un institut de recherche international  travaillant sur les données fournies par l’ONU (4), nous apprend que depuis la fin du mois de juillet, la planète vit « à crédit », c’est-à-dire que l’humanité a consommé en 7 mois, toutes les ressources que la terre peut produire en une année. Circonstance aggravante : cette date fatidique arrive désormais de plus en plus tôt.
En prime, toujours au chapitre de la consommation, une autre étude nous indique que si tous les habitants du monde voulaient vivre comme un Français, il faudrait trois planètes terre pour assurer leurs besoins.
 
Le capitalisme responsable
Si toutes ces études se recoupent et se complètent sur les constats, elles s’accordent également sur leurs causes : c’est bien le développement explosif de la production et l’exploitation sans limite des ressources de la planète depuis le début de « l’ère industrielle », qui est la cause de la catastrophe en cours. Le fait que la situation se soit dégradée à très grande vitesse au cours des dernières décennies en est une preuve supplémentaire. Cette accélération est liée directement au développement du capitalisme dans les pays émergents, et plus généralement à l’extension hégémonique de ce mode de production à l’ensemble de la planète. Rappelons que la Chine, premier pays émergent, est aussi le premier pays émetteur de gaz à effet de serre, juste devant les Etats-Unis, première puissance capitaliste mondiale. « La logique de la croissance va vers l’autodestruction du système, voilà ce qui se passe quand on confie la gestion des ressources de l’humanité à des privés », juge le député européen espagnol Xabier Benito ( GUE-GVN .)
C’est également l’avis de Daniel Tanuro qui rappelle que le but du système capitaliste étant de produire de la survaleur, il n’y a pas d’autre solution que de remplacer le travail vivant par du travail mort pour lutter contre la baisse du taux de profit, donc « d’accroître de plus en plus vite la masse des marchandises, ce qui amène à consommer de plus en plus de ressources et d’énergie. » Et l’écosocialiste le répète : « la croissance capitaliste est la cause de la crise écologique, dont le chômage massif permanent est l’autre aspect.» C’est pourquoi, pour Daniel Tanuro, il est indispensable de  lier les combats sociaux et environnementaux.
Pas d’illusion non plus à se faire du côté du « capitalisme vert » promu notamment par l’Union européenne au niveau international. Pour Daniel Tanuro qui y a consacré un livre, « capitalisme vert est un oxymore. » Ce que l’on constate aujourd’hui dans les destructions qu’il opère partout sur la planète, c’est bien au contraire sa violence, dit Eleonera Forenza, qui explique par exemple comment le sud de l’Italie est ainsi devenu la décharge du Nord.
 
Quelles alternatives ?
Une fois reconnu que la voie préconisant la « modernisation » du capitalisme, son « verdissement », est une impasse ( de même que la promotion des valeurs « post-matérialistes » ou « post-classes » qui l’accompagnent ), il faut poser clairement, analyse l’historienne Stefania Barca, que « le capitalisme est le problème, » et pensez la politique a partir de cet axiome, dans des termes nouveaux par rapport à ceux du XXème siècle. « Où est-ce qu’on peut bloquer le capitalisme ? » devient une question politique centrale, explique Dorothée Haussermann, de Ende Gelände, un vaste collectif d’organisations environnementales et de groupes politiques qui concentre ses actions sur le blocage des mines de lignite et de charbon en Allemagne. « Le charbon fait partie du problème du réchauffement climatique, on doit en empêcher la production. Il faut commencer quelque part, c’est à nous de prendre les choses en mains, » explique Dorothée Haussermann.
 
En matière de changement climatique, ce n’est pas l’information qui nous manque, fait remarquer Rikard Warlenhus ( Left Party, Suède ), mais on a l’impression que changer les choses est au delà de nos possibilités. C’est, pour les raisons que l’on vient de voir, parce qu’au fond, remarque l’eurodéputé Ernest Cornelia ( GUE / Die Linke ), « imaginer la fin du capitalisme est impossible. » Pour lui, la question devient donc : « comment passer du stade actuel à l’étape suivante ? » Cette question est d’autant plus centrale que, comme l’explique Rikard Warlenhus, « les dossiers climatiques ont tendance à nous diviser. » Par exemple, explique Dorothée Häussermann, « le mouvement environnemental peut être conçu comme une menace à l’emploi.» C’est la raison pour laquelle une partie du mouvement syndical est converti au « capitalisme vert », bien qu’il soit évident que le chômage continue à augmenter, ou que de nombreux syndicats soutiennent les énergies fossiles. « Une difficulté à mettre sur le compte de 3 décennies de déclin du mouvement ouvrier », analyse l’historienne Stefana Barca, dont il faut être conscient qu’elle provoque des divisions. C’est pourquoi, ajoute-t-elle, il faut concevoir le combat pour l’environnement comme « une forme de lutte des classes au niveau planétaire entre forces du travail et capital. »
 
Constatant la vitalité des combats pour l’environnement menés partout dans le monde sous des formes et par des acteurs très différents, les intervenants insistent tous sur la nécessité de promouvoir des articulations entre tous ces mouvements et des acteurs institutionnels quand ils existent ( des villes, des régions, par exemple ), ou des syndicats, des partis, et ce, au niveau mondial. L’objectif est de se situer « à la même échelle d’action que notre adversaire », explique Rikard Warlenhus « parce que le capital dépasse la structure de l’Etat national. »
 
Le rôle crucial des femmes
De nombreux analystes soulignent également comme un point central, le rôle des femmes dans le combat écologique et social. Il ne s’agit pas de dire qu’il est bien que les femmes y participent à égalité avec les hommes ( l’égalité homme-femme est un leitmotiv  consensuel de nos sociétés, en général jamais respecté ), mais bien de repérer l’apport spécifique, déterminant et innovateur des femmes, en tant que femmes, dans les nouvelles formes de combat. La députée italienne Eleonora Forenza ( GUE-GVN ) voit dans les mobilisations qui ont suivi la catastrophe de Seveso en juillet 1976, l’événement fondateur de cet éco-féminisme. « Ce sont les femmes qui ont joué un rôle essentiel en exigeant que soient menées des études médicales, car les femmes enceintes risquaient de donner naissance à des enfants malformés. Ce sont également elles qui ont lancé les premiers appels pour l’IVG en Italie. » ( L’IVG a été légalisé en 1978, mais il est toujours très difficile de la faire appliquer, ndlr.) Cet apport des femmes au combat écologique est également majeur pour Daniel Tanuro qui explique que « la place que le patriarcat donne aux femmes, leur procure une conscience particulière. » Il rappelle que 90% de la production vivrière dans les pays du Sud est assurée par des femmes, faisant d’elles le fer de lance de tous les combats actuels liés à l’agriculture, à la propriété de la terre, aux pollutions ou au climat.
 
(1) Colloque au Parlement européen, 27 mars 2017, Bruxelles publiées dans les Proceedings of the Natural Academy of Science ( PNAS )
(3) publié en juillet par l’Agence américaine océanique et atmosphérique ( NOAA ) et L’American Meteorological Society ( AMS ),
(4) Le Global Foodprint Network, Oakland ( Californie )
(5) Daniel Tanuro, « L’impossible capitalisme vert », La Découverte.
 

31/05/2017

Josiane Balasko : « J’ai simplement envie que les gens vivent mieux »

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Entretien réalisé par Julia Hamlaoui, L'Humanité

La comédienne Josiane Balasko apporte son appui aux candidats PCF pour les législatives, dont elle partage, sans être communiste, de nombreux engagements.

Pourquoi avez-vous décidé de soutenir les candidats communistes aux législatives, en particulier Maxime Cochard, dans la 10e circonscription de Paris ?

Josiane Balasko Leur discours n’est pas un discours de haine ou de démolition, mais de construction, cela m’a intéressée. Je ne suis pas communiste, mais ce sont des gens honnêtes qui font un bon boulot dans les quartiers. Ils se mobilisent pour l’aide aux personnes dans le besoin – et il y en a énormément –, contre le mal-logement, pour le secours aux réfugiés… Ce sont des engagements qui me parlent. Le Parti communiste a toujours été là dans les communes, avec ses militants et ses représentants, pour aider les gens.

C’est pour cela que j’ai eu envie de les soutenir et que j’appelle à voter pour eux. Et puis, il faut qu’il y ait une parité aux législatives. Après le travail que les communistes ont fait, ce serait injuste qu’ils soient réduits à la portion congrue. Pour ma part, j’ai simplement envie que les gens puissent vivre un peu mieux, qu’ils n’aient pas de problème pour boucler leurs fins de mois et remplir leur Caddie. Beaucoup de gens vivent très misérablement.

Je passe mon temps à me balader en tournée, et je vois la désertification gagner les campagnes, les centres-villes. On ressemble maintenant aux villes américaines où il n’y a plus rien dans le centre et où il faut faire dix bornes pour aller s’acheter de la bouffe industrielle.

Après l’élection présidentielle, pour laquelle vous n’avez pas soutenu de candidat, quel regard portez-vous sur la situation politique ?

Josiane Balasko Comme beaucoup de Français j’ai voté Macron, non pas parce que j’étais absolument pour lui, mais parce qu’il fallait impérativement barrer la route au Front national. Il n’y avait pas 36 000 solutions. J’attends de voir ce qui va se passer puisque peu de choses ont été dites ou faites depuis la présidentielle. Mais il est impératif pour la démocratie que plusieurs partis républicains, plusieurs partis du peuple soient représentés à l’Assemblée nationale. Et notamment la gauche.

Le PS est très mal barré, Macron veut réunir tout le monde et Mélenchon tuer toute la gauche à part lui. Pour moi, les législatives sont aussi importantes que l’élection présidentielle. Ce sont elles qui permettent d’avoir une réelle représentation et que chacun puisse s’exprimer.

Pour l’instant on ne parle plus du FN, mais il est toujours là. Ce n’est pas parce qu’ils ont été recalés à la présidentielle qu’ils n’existent plus. En revanche, on parle beaucoup d’un raz-de-marée Macron en juin. Il est très photogénique mais on ne sait pas ce qui va se passer. J’espère qu’il y aura des surprises.

10:08 Publié dans Actualités, Entretiens, Point de vue | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : josiane balasko, pcf, législatives | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!