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21/03/2008

La zone euro entre résilience et risque inflationniste

NOTE DE CONJONCTURE ECONOMIQUE ETABLIE PAR L'INSEE 

57332551.gifAu début de 2008 l’économie mondiale continue de ralentir. La hausse des prix des matières premières ampute le pouvoir d’achat des ménages. L’investissement pâtit de l’élévation des primes de risque et d’une gestion des demandes de financement plus restrictive de la part des banques.

L'ampleur de ce ralentissement n’est pas uniforme et les divergences s’accentuent entre grandes zones. 

L’économie américaine est ainsi quasiment à l’arrêt. La correction des excès passés sur le marché immobilier se poursuit et l’investissement résidentiel continue de chuter. La consommation des ménages et l’investissement des entreprises, qui résistaient jusque-là, ralentissent à leur tour, freinés par la baisse des prix d’actifs, le durcissement des conditions de financement et la hausse des prix des matières premières. 

En revanche, les pays émergents continuent de croître à vive allure. Bénéficiant de la hausse des prix des matières premières ou portés par une dynamique puissante de rattrapage et un boom de l’investissement, ils restent sur une trajectoire fortement ascendante. 

La zone euro se trouve dans une position intermédiaire. Comme les États-Unis, elle souffre de la hausse des prix des matières premières et, dans une moindre mesure, d’un durcissement des conditions de financement. En revanche, dans les pays européens où il s'est matérialisé, l'ajustement du marché immobilier est moins marqué qu'outre-Atlantique et n'entraîne pas de contraction globale de l'investissement résidentiel. Enfin, la consommation bénéficie de la poursuite de l’amélioration du marché du travail. Le ralentissement amorcé début 2007 devrait donc se poursuivre au premier semestre de 2008, mais la croissance de la zone euro devrait encore s’élever à 0,4 % par trimestre.

En France, la croissance s’effriterait quelque peu au premier semestre de 2008 après un second semestre de 2007 en légère accélération. Elle s’établirait ainsi entre 0,3 % et 0,4 % sur les deux premiers trimestres de l'année. Le ralentissement mondial et l’appréciation de l’euro devraient brider les exportations. L’investissement des entreprises, resté dynamique jusqu’à la fin de 2007, devrait commencer à ralentir, comme le laisse augurer la prudence affichée par les chefs d’entreprise dans l’enquête de l’Insee sur les investissements. 

Après une très forte progression en 2007, le pouvoir d'achat du revenu des ménages devrait ralentir et contribuer à modérer la croissance de la consommation. Ce ralentissement de la consommation pourrait être atténué, cependant, car les ménages devraient adopter un comportement de « lissage », en tirant sur le surcroît d'épargne accumulé en 2007.

Les créations d’emploi devraient légèrement faiblir (+96 000 au premier semestre de 2008) et le taux de chômage pourrait se stabiliser à 7,5 %, après deux ans de baisse quasi ininterrompue et une nouvelle forte baisse au quatrième trimestre de 2007.

Le principal aléa qui pèse sur ce scénario porte sur l’évolution conjointe de l’économie américaine et des prix des matières premières. Jusqu’à présent, le ralentissement aux États-Unis n’a pas, comme c’est habituellement le cas, fait baisser les cours des matières premières, qui ont même au contraire continué de monter. Si ce mouvement doublement défavorable à la zone euro et à la France se poursuivait, alors la croissance pourrait y descendre encore d’un cran. À l’inverse, la demande intérieure française pourrait résister mieux que prévu, notamment parce que le taux d’épargne des ménages présente une marge de baisse substantielle, après sa hausse de près d’un point en 2007.


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13/03/2008

La crise financière continue d’étendre ses ravages

315082642.jpgConjoncture . Après les banques, plusieurs sociétés de capital-investissement US sont au bord de la défaillance ce qui risque d’accélérer la diffusion de la crise vers « l’économie réelle ».

Des nuages de plus en plus sombres s’accumulent sur la conjonc- ture internationale. Des enchaînements particulièrement pernicieux s’accélèrent sous l’effet de la formidable financiarisation des économies.

La crise des subprimes (emprunts hypothécaires à risque), qui a accompagné le dégonflement rapide de la bulle immobilière aux États-Unis, n’en finit pas ainsi de se propager. Partie de l’écroulement, tels des châteaux de cartes, des établissements de crédits qui vendaient à prix d’or - avec des taux d’intérêt à deux chiffres - du rêve américain (l’accès de tous à la propriété), elle a contaminé les banques par le jeu de la titrisation sur toutes les places financières de ces dettes - initialement à haut rendement - contractées par les ménages les plus pauvres. Et elle touche maintenant les grands groupes de capital-investissement qui se sont spécialisés dans un certain type de financement des entreprises, très répandu outre-Atlantique et de plus en plus prisé sur le reste de la planète capitaliste.

Selon un principe très simple : les groupes en question s’endettent à bon compte pour racheter ces entreprises industrielles ou de service. Ils placent celles-ci ensuite dans des structures « hors circuit » (private equity) pendant une durée variable (autour de cinq ans généralement) et font la chasse aux coûts et aux « sureffectifs » durant cette période en impliquant les directions. Puis ils revendent les firmes en les remettant dans le circuit boursier, ce qui leur permet de toucher généralement le jackpot en réalisant une super plus-value.

Seulement aujourd’hui le système s’est totalement grip- pé. D’un côté le crédit est devenu plus cher et plus difficile d’accès sous l’effet de la crise financière, cela empêche donc le montage de nouveaux emprunts destinés à la prise de contrôle des entreprises. À l’autre bout de la chaîne la revente des sociétés acquises devient de plus en plus problématique sur un marché des actions en baisse constante depuis quelques mois et ne peut plus rapporter en tout état de cause les gros profits escomptés.

des institutions solides ébranlées

Résultat : des institutions aussi solides en apparence que Carlyle Capital, adossé au célèbre groupe dont la réputation de pilier stratégique du capitalisme états-unien n’est plus à faire, ou encore Blackstone sont aujourd’hui dans le rouge. Les dirigeants de la filiale de Carlyle ont prévenu lundi que leur société pourrait se retrouver très vite à court de liquidités et de nombreux spécialistes estiment, aux États-Unis, qu’elle est déjà de facto en faillite. Quant à Blackstone, il a dû concéder une chute de ses bénéfices de quelque 85 %.

Ces développements montrent à quel point la contamination de la crise à « l’économie réelle » pourrait être rapide. On estime en effet que près du quart des entreprises états-uniennes ont recours à des techniques de financements de type Carlyle ou Blackstone ; techniques dont font partie les trop fameuses LBO, pratiquées aussi de façon croissante en France et en Europe. La défaillance de leurs super mentors financiers expose naturellement ces firmes industrielles ou de service, déjà soumises au régime sec en matière d’investissements pour l’emploi, aux pires menaces.

Voilà qui pourrait bien entendu aggraver encore les enchaînements qui font glisser les États-Unis vers la récession. Comme le prouvent les chif- fres du chômage, rendus publics vendredi dernier outre-Atlantique, indiquant une nouvelle détérioration sensible avec quelque 63 000 suppressions d’emplois en février.

La faiblesse du dollar - que la Fed, la banque centrale des États-Unis, laisse délibérément filer dans l’espoir d’accroître la compétitivité des firmes états-uniennes - pourrait paradoxalement générer, à son tour, des effets pernicieux alimentant la spirale de la récession. Car la baisse du billet vert est en grande partie à l’origine du formidable mouvement spéculatif qui porte les cours du brut vers les sommets (aux alentours hier de 107 dollars le baril).

La consommation fortement pénalisée

En effet, fuyant les autres valeurs libellées dans la devise états-unienne les « investisseurs » sur les marchés financiers misent tout sur les matières premières et en particulier le pétrole qui devient, de fait, un peu comme l’or, une sorte de valeur refuge. Moyennant quoi l’explosion des cours nourrit la hausse des prix et donc le phénomène dit de stagflation. À savoir une activité réduite couplée à une forte inflation (plus de 4 % aujourd’hui en rythme annuel aux États-Unis). Or la flambée des prix contracte le pouvoir d’achat de ménages, d’autant moins enclins à s’endetter pour consommer qu’ils sont aussi confrontés à des difficultés grandissantes d’accès au crédit. La consommation, principal moteur de la croissance outre-Atlantique, s’en trouve fortement pénalisée. Elle a ainsi reculé sensiblement ces trois derniers mois.

Du coup, pour de nombreux observateurs, le débat ne se situe d’ores et déjà plus sur l’émergence ou non de la récession mais sur la profondeur du phénomène. Plusieurs instituts de conjoncture prévoient désormais une croissance négative au premier trimestre outre-Atlantique.

Cette entrée des États-Unis dans la récession ne sera pas sans effet sur le reste de l’économie mondiale et singulièrement sur l’Europe. D’autant que l’Ancien Continent est exposé aussi aux enchaînements générés par une financiarisation qui a été, hélas ! promue par ses dirigeants et ses institutions toutes ces dernières années.

D’où l’urgence d’un vrai débat d’alternative sur le financement de l’économie. Il faudrait pouvoir s’affranchir peu à peu de la funeste tutelle des marchés boursiers, ce qui passe par la promotion d’un crédit de type nouveau. Avec des taux dissuasifs pour les opérations spéculatives et d’autant plus abaissés qu’il finance de l’activité réelle, de l’emploi, de la formation ou de la recherche.

Bruno Odent, l'Humanité

18:12 Publié dans Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : usa, crise économique | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

13/02/2008

40 % D'AUGMENTATION POUR LES PATRONS

de Pascal Junghans

aad5ad74f8f159f51896ddda6e0b253d.jpgLes patrons des plus importants groupes du CAC 40 ont reçu chacun en valeur médiane 6,175 millions d’euros de rémunération totale en 2007, selon une étude HayGroup révélée en exclusivité par latribune.fr et La Tribune.

Le chiffre fait rêver en ces temps de débats sur le pouvoir d’achat : 40% d’augmentation médiane entre 2006 et 2007. C’est la belle envolée des rémunérations qu’ont obtenu 77% des PDG français. Pas mal !

Ces chiffres explosifs, les premiers analysant les salaires 2007 des patrons français, secoueront sûrement les assemblées générales de printemps. Ils figurent dans l’étude de référence sur les rémunérations des comités exécutifs, réalisée par HayGroup, spécialiste mondial des rétributions, que publie en exclusivité latribune.fr et que vous pourrez retrouver en détail dans La Tribune dans son édition de demain (datée de mardi).

Cette augmentation considérable propulse les rémunérations des patrons français à des niveaux jamais atteints. Les PDG des plus importants groupes du CAC 40 ont reçu en 2007 chacun 6,175 millions d’euros de rémunération totale (salaire de base + bonus + stock options et actions gratuites valorisés) en valeur médiane. Les patrons des groupes réalisant un chiffre d’affaire moyen de 20 milliards d’euros et employant 100.000 salariés gagnent chacun 4,518 millions d’euros.

Leurs homologues des entreprises réalisant en moyenne 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires et employant 50.000 salariés, ont été rémunérés 2,679 millions d’euros en 2007. Enfin, les patrons des plus petites entreprises du SBF 120 ont gagné 882.000 euros.

Comment ont été calculé ces chiffres ?

Ces chiffres ont été obtenus en décortiquant les comptes de 135 groupes, dont tous ceux du CAC 40 et du SBF 120, plus quelques quinze entreprises emblématiques (ASF, Colas, Latécoère, Sanef, Airbus, DCNS ....). Ensuite, les mathématiciens qui pilotent les études HayGroup, ont calculé la médiane, la ligne de partage entre les 50% des titulaires les mieux payés et les 50% les moins payés. Ce mode de calcul plus précis est préféré à la simple moyenne qui laisse la part trop belle aux extrêmes. De plus, HayGroup ne prend en compte que l’évolution des salaires des PDG présents en 2006 et en 2007 pour éviter que le départ d’un patron très bien payé fasse plonger l’indice.

Comment en est-on arrivé là malgré les lois de modération votées en 2005 et 2007, malgré les normes comptables de transparence, malgré les revendications des associations d’actionnaires ?

Vous pourrez lire les explications, avec les chiffres sur les augmentations des bonus et des stocks options dans le quotidien La Tribune de demain (édition de mardi). Et aussi comment les patrons français sont devenus les mieux payé en Europe, le passage au crible des parachutes dorés, ces primes de départ qui déclenchent régulièrement la polémique et l’analyse de Denis Lesigne, responsable des stratégies de rémunérations chez HayGroup.

http://www.latribune.fr/info/IDD70A...

17:23 Publié dans Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : patrons, hausse | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

11/01/2008

« Oui, le capitalisme américain est en crise »

L’analyse de Paul Jorion, universitaire à Los Angeles.

d245ddc2d9c5f8e9a910eb8624193595.jpgPaul Jorion est l’auteur d’un livre prémonitoire paru l’année dernière sous le titre Vers la crise du capitalisme américain ? (1). Il annonçait la crise des crédits immobiliers et démontait le mécanisme des « subprimes », des prêts vendus à ceux qui n’avaient pas les moyens de les payer. Depuis plus de dix ans, installé à Los Angeles, où il enseignait, anthropologue, économiste, Paul Jorion, de passage à Paris, répond aux questions de l’Humanité.

Vous aviez mis un point d’interrogation au titre de votre livre, le mettriez-vous aujourd’hui ?

Paul Jorion. Non, bien sûr. C’est la finance dans sa totalité qui plonge dans une crise, qui va s’étendre de l’immobilier aux autres secteurs, dans la mesure où elle est le squelette de l’économie. Les mises en garde n’ont pas été écoutées. Certes, il y a eu l’exemple d’Enron, mais cette entreprise n’était pas plus malhonnête que les autres. Tout le monde a les mêmes pratiques et je m’étais même élevé contre le traitement de bouc émissaire qui lui était appliqué. Enron n’était pas le seul coupable.

J’ai écrit en mars de l’année dernière que les calculs étaient truqués et que la réalité n’était pas encore visible. Il y a neuf mois, la crise était déjà là. Si on défalquait l’argent qui provenait de la bulle, l’économie était déjà en récession. C’est parce que les gens utilisaient le capital qu’ils avaient dans les logements pour consommer que la récession était masquée.

Aujourd’hui, on est au stade des métastases. Les récessions se succèdent, il est vrai, mais celle-ci rappelle ce qu’on a vu en 1929. La plupart des marchés de la finance sont en train de se tarir l’un après l’autre. On a laissé proliférer des mécanismes financiers complexes pour augmenter le profit. La confiance, ou plus exactement la solvabilité s’en va.

Vous disiez dans une récente conférence à l’École normale supérieure que cette crise est accentuée par les disparités qui se sont creusées depuis une vingtaine d’années. Peut-on ajouter à cette cause le budget de guerre ?

Paul Jorion. Non, je pense que ce sont les disparités qui sont plus importantes. Depuis les années soixante-dix, les revenus les plus faibles ont baissé, alors que les hauts revenus étaient à la hausse. Pour combler les dépenses militaires, il suffit de faire marcher la planche à billets et les États-Unis savent très bien surmonter ces situations. Cela coûte énormément, mais à l’échelle de Wall Street, cela peut être absorbé.

Le vrai problème de l’armée, c’est le recrutement. L’Irak a cessé d’occuper la première place dans l’actualité. Aujourd’hui, les gens sont davantage préoccupés par l’économie et, quand ils pensent économie, ils pensent avant tout à l’assurance santé. C’est leur vraie préoccupation. On compte 47 millions de personnes sans couverture médicale et leur nombre augmente chaque jour. Le prix des assurances s’élève constamment. J’y consacre la moitié de mon loyer. Il ne reste que Medicaid et Medicare pour les personnes en état de pauvreté.

Pourquoi la crise économique et l’arrivée de la récession sont-elles absentes des débats des candidats à l’élection présidentielle ?

Paul Jorion. Ce que veulent entendre les gens, c’est essentiellement ce qu’ils proposent pour la santé. Hillary Clinton avait présenté un plan de sécurité sociale à l’arrivée de son mari à la Maison-Blanche, mais elle a totalement échoué. Le pouvoir de l’argent l’a emporté en raison de l’opposition de l’industrie pharmaceutique et des assurances. Celles-ci figurent parmi les principaux donateurs de sa campagne électorale et de celle de son concurrent.

Nous assistons aux conséquences de la disparition programmée de l’État providence par la déréglementation. En renforçant la loi du plus fort, cela a conduit les États-Unis à une catastrophe inédite, que je ne peux que comparer à celle de 1929. Il n’y aura pas d’autre choix que rétablir l’État providence, quel que soit le candidat élu, pour sortir de l’impasse à la manière de Roosevelt. Que dira votre président qui s’inspire de la politique américaine lorsqu’il verra que cette voie est abandonnée en raison de son échec ? Ceux qui pensent que la main invisible du marché apportera la solution oublient qu’elle ne fonctionne que lorsque tout va bien. Les « solutions américaines » ne marchent plus aux États-Unis depuis huit ans. Les détaxations ont mené à la catastrophe. Il est temps d’en tirer les leçons.

(1) Collection « Recherches », La Découverte. Paul Jorion écrit une suite à ce premier ouvrage qui paraîtra au printemps.

Entretien réalisé par Jacques Coubard

09:40 Publié dans Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : capitalisme, crise, USA | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!