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14/12/2024

Industrie française : « Il faut légiférer sur les licenciements boursiers et baisser le tarif de l’énergie », plaide Aymeric Seassau (PCF)

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La déconfiture de l’industrie française n’a rien d’une fatalité. Pour Aymeric Seassau, en charge de la nouvelle industrialisation dans le projet du PCF, il est urgent de reprendre au marché le contrôle d’un secteur stratégique, pour l’emploi, notre balance commerciale et l’écologie.

Michelin, Valeo, Vencorex… Les plans de suppression de postes se succèdent dans l’industrie française. Quelles sont les causes profondes, selon vous, de cette crise ?

Ces entreprises témoignent de ce que les filières automobile et chimie sont en effet particulièrement touchées, la sidérurgie aussi, avec les annonces inquiétantes de Mittal, et bien d’autres encore. Partout, les communistes soutiennent de toutes leurs forces les travailleurs de ces entreprises qui résistent avec leurs organisations syndicales… Et il nous appartient de politiser cette situation qui n’est malheureusement qu’une accélération d’un mouvement de long terme orchestré par le capital.

À son écoute, des apprentis sorciers ont théorisé depuis quarante ans qu’il y aurait des pays de « tête d’œuvre » et des pays de « main-d’œuvre ». Le bilan est là : le pays a perdu la moitié de ses usines et la France, vieille nation industrielle, traîne désormais aux toutes dernières places d’Europe. Sa part de l’industrie manufacturière dans le PIB est de 10 % quand la moyenne européenne est de 16 %.

La prédation du capital financier est féroce et nous mettons au défi le RN et son fantasme du bon patronat national : 62 % des emplois des grandes entreprises françaises se trouvent à l’étranger, contre seulement 38 % pour les allemandes et 28 % pour les italiennes. Quant au « made in France », il ne représente plus que 36 % de la consommation nationale. Voilà la réalité de l’affrontement capital-travail de notre temps et l’amer résultat de la désindustrialisation.

La bataille pour une nouvelle industrialisation est donc aussi une bataille politique ! L’industrie et ses métiers ont été si discrédités que nous vivons un paradoxe avec des plans sociaux qui s’accumulent et un nombre d’emplois vacants qui a doublé en trois ans dans l’industrie. Alors, nous ne répéterons jamais assez que la moyenne des salaires est de 20 % supérieure dans l’industrie que dans les services. Défendre une nouvelle industrialisation, c’est une bataille d’avenir pour éradiquer le chômage puisque c’est le seul secteur à générer 3 à 4 emplois dans le reste de l’économie pour 1 emploi créé. C’est l’espoir du redressement face au déclassement.

Sur quels principes devrait se fonder une politique industrielle digne de ce nom ?

Première urgence : mettre un coup d’arrêt à la casse de l’appareil productif avec un moratoire sur les licenciements et une loi contre les licenciements boursiers. Deuxième urgence : baisser les tarifs de l’énergie pour gagner en compétitivité. L’énergie nucléaire le permet au pays, à condition de sortir du marché européen de l’électricité. Sur le temps plus long, il y a besoin d’une reconstruction des filières industrielles stratégiques. Cela implique que l’État joue son rôle mais aussi d’ouvrir des pouvoirs nouveaux pour les salariés et leurs organisations syndicales.

Il faudra pour réussir mobiliser l’argent des banques en permettant à nos entreprises l’accès à des crédits bon marché conditionnés aux investissements dans l’appareil productif, dans la recherche, dans l’emploi. Et puis, il y a besoin de revaloriser les métiers industriels en augmentant les salaires et de soutenir les filières de formation initiale tout au long de la vie. L’extrême droite se contente de verser des larmes de crocodile sur le nombre de travailleurs détachés en France, mais ne dit rien de la nécessité de former plus de soudeurs, de chaudronniers… autant de beaux métiers qu’il faut défendre.

Les États-Unis mènent depuis plusieurs années une politique protectionniste, la Chine décide de se recentrer sur son marché intérieur et de fermer la porte aux importations : faut-il adopter, selon vous, une forme de protectionnisme européen ?

Mettons déjà fin aux traités de libre-échange, qui sont une aberration sociale et écologique. Commençons par protéger les travailleurs du dumping social et des délocalisations à l’intérieur même de l’espace européen ! L’Europe qui protège les capitaux qui circulent librement tandis que des réfugiés meurent en Méditerranée ou dans la Manche est une Europe de la honte. Elle n’a aucun avenir tant qu’elle ne protège pas les travailleurs qui sont l’objet d’une compétition intra-européenne mais aussi sous la menace des forces d’extrême droite, qui veulent encore plus les opposer.

Deuxièmement, avant de songer à limiter les importations, il conviendrait déjà de structurer les filières et les coopérations européennes industrielles pour répondre aux besoins des Européens. Au-delà des mesures protectionnistes mises en place par la Chine ou les États-Unis, n’oublions pas que ces deux pays n’hésitent pas à actionner la politique monétaire. À l’inverse, la Banque centrale européenne a avant tout pour mission de limiter l’inflation pour protéger le capital. Elle pourrait jouer un rôle différent, au service du financement des services publics, de la transition écologique et d’une nouvelle industrialisation dans l’hinterland européen.

En l’état, en effet, nous ne jouons pas à armes égales. Et la question n’est pas tant de limiter les importations que d’empêcher par exemple un industriel comme Mittal de dépecer la sidérurgie française et européenne au profit de ses sites en Asie ou en Amérique du Sud, ce qui serait facilité par un traité comme le Mercosur.

Que répondez-vous à ceux qui estiment qu’avoir une industrie prospère est incompatible avec la prise en compte des enjeux environnementaux ?

Mais c’est tout l’inverse ! La désindustrialisation est aussi une catastrophe écologique en plus d’être une catastrophe économique et sociale. Peut-on affronter la crise climatique quand 92 % des équipements électroniques ou informatiques et 87 % des vêtements achetés en France sont produits à l’étranger ? Et que le développement du e-commerce fait progresser dangereusement le fret aérien. On marche sur la tête. À l’inverse, nous voulons relocaliser des productions et renouer avec les coopérations industrielles européennes. Plus on produit loin, plus les besoins en transports sont importants et ils sont les premiers émetteurs de gaz à effet de serre.

Engager la transition écologique, c’est investir massivement dans la chaîne logistique autour du mix fret maritime et fluvial/fret ferroviaire, c’est rapprocher la production pour répondre aux besoins, c’est construire ou conforter des filières nouvelles au service de la transition écologique (pompes à chaleur, éolien, photovoltaïque etc.). C’est aussi décarboner notre appareil productif et repenser nos modes de production pour les rendre plus économes en ressources.

Source l'Humanité

19:28 Publié dans Actualités, Economie, Point de vue, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : industrie, pcf | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

13/06/2024

De l’électricité pour l’industrie

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Peut-on vraiment décarboner l’industrie, alors qu’elle fonctionne encore pour beaucoup au charbon, au gaz et au pétrole ? L’enjeu est simple : ne pas y parvenir signifierait ne pas atteindre les objectifs climatiques décidés en 2009 et 2015 et donc s’engager dans un réchauffement aux conséquences ingérables, en particulier pour les populations et pays pauvres. Bonne nouvelle, annonce une étude 1 du Fraunhofer Institute, un centre de recherche allemand, électrifier la plupart des procédés industriels les plus émetteurs de gaz à effet de serre utilisés dans l’Union européenne est possible.

Le plus gros paquet à gérer ? La chaleur. Les trois quarts des émissions de gaz à effet de serre de l’industrie européenne proviennent de la combustion d’énergies fossiles pour produire de la chaleur. Usines de la chimie, aciéries, cimenteries, fabrication du papier, agroalimentaire, produits manufacturés… Or, montre cette étude, il est possible d’éviter 90 % des émissions associées d’ici à 2035 par l’utilisation de technologies électriques déjà éprouvées ou démontrées comme les torches à plasma, les arcs électriques, l’induction, etc. Qu’il s’agisse des 200 °C à 500 °C des usines chimiques ou des 2 500 °C nécessaires à la sidérurgie et les forges des aciéries, les technologies électriques sont désormais en capacité de les fournir.

Des politiques publiques nationales et européennes, incitatives ou réglementaires, visant à éradiquer les émissions de gaz à effet de serre des industries sont donc techniquement possibles. Et dans des délais correspondant à l’urgence climatique si les investissements massifs permettant cette conversion à grande échelle sont réalisés.

Il restera à assurer l’alimentation en électricité bas-carbone de ces futurs équipements. Aujourd’hui, environ le tiers de la demande énergétique de ces secteurs est alimenté en électricité, pour environ 1 000 térawattheures par an (le double de la consommation électrique française totale en 2023). Il faudrait donc y ajouter environ 2 000 TWh par an à capacité industrielle inchangée. Un objectif tout sauf marginal, comparé aux 2 600 TWh de la production totale d’électricité de l’Union européenne actuelle. En outre, cette production est encore à près de 40 % réalisée à partir de gaz et de charbon, ce qu’il faut éliminer.

Ces calculs en ordre de grandeur indiquent clairement que le débat qui oppose le nucléaire et les renouvelables est en contradiction totale avec les enjeux climatiques. Seul un développement hardi de ces deux sources d’électricité bas-carbone est susceptible de répondre aux besoins de l’industrie comme de la vie quotidienne des Européens dans le respect des objectifs climatiques.

  1. Fraunhofer ISI (2024) : Direct Electrification of Industrial Process Heat. An Assessment of Technologies, Potentials and Future Prospects for the EU. Study on Behalf of Agora Industry. Alexandra Langenheld et al. ↩︎

11:38 Publié dans Actualités, Connaissances, Planète, Point de vue | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : industrie, nucléaire | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

01/06/2024

Un plan climat pour la France pour 2050 proposé par le Parti Communiste Français dans l'esprit de Diderot, celui de l'esprit critique et de l'intelligence

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NDLR : Une appréciation d’Yves Bréchet sur le plan climat Empreinte2050 du PCF

Yves Bréchet, Membre de l’Académie des Sciences

Le groupe de réflexion « Écologie » du Parti Communiste vient de republier son « plan climat pour la France  pour 2050 » (https://lnkd.in/ePAaJ-wD ) . Dans la sinistrose ambiante et la vacuité pathétique du débat de la campagne des élections européennes, notamment sur la question pourtant essentielle de l’énergie, de ses usages, et de son rôle dans les questions de transition écologiques, voila un texte qui mérite votre attention.

Il mérite votre attention car il n’a pas prétention à être un dogme intouchable, mais il est une base de discussion, élaborée déjà par de très nombreuses consultations dans le monde scientifique et technique, sans exclusive d’appartenance politique, et qui appelle à de nouvelles discussions. Discussions pour une fois, sur les choix de priorités tout en conservant la cohérence, sur les choix politiques qui ne soient pas des petits arrangements entre partis en vue d’alliances d’arrière-cuisine. On avait perdu l’habitude !

 Il n’est pas nécessaire d’être un « compagnon de route du PC » pour en tirer profit. Il n’est pas nécessaire d’adhérer aux option politiques retenues, ni d’avoir la même liste de priorités, mais l’exigence de rigueur de ce texte est exemplaire et peut bénéficier à tous ceux qui ont à cœur le bien de leur pays dans ces périodes économiquement et écologiquement difficiles.  Il n’est pas question pour moi de dire que je suis d’accord avec tout ce qu’il contient. Mais au moins ce document, le premier ( et le seul à ce jour…) de cette qualité issu d’un parti politique  a le mérite de proposer une analyse cohérente et systémique des problèmes. Il a le courage de rappeler la valeur de la notion de service public sur une denrée aussi essentielle à notre économie que l’énergie. Il a le mérite de parler d’industrie et de souveraineté industrielle sans tomber dans une forme d’autisme qui nie la nécessité de collaborations internationales. Il rappelle la nécessité impérieuse d’une recherche forte qui soit au service des exigences nouvelles. Il met en exergue l’importance de la formation à tous les niveaux de la société, et la nécessité vitale d’engager la génération montante à construire le monde qui vient plutôt que de les conforter dans un catastrophisme mortifère et des jérémiades stériles qui justifient l’inaction.

Il met en exergue la nécessité d’électrifier notre économie, les options raisonnables pour décarboner l’électricité, préférant construire des trajectoires qui respectent les lois de Carnot et de Kirchoff (non, ce ne sont pas des députés du siècle dernier !…) plutôt que de se complaire dans des guerres de religion ( Nucléaire vs Renouvelables par exemple…). Il propose une vision construite de la transition écologique dans les transports, dans les bâtiments. Il n’a pas peur de dire franchement, et il est grand temps, que l’adaptation au réchauffement climatique est une nécessité qui n’est pas contradictoire avec la lutte à mener pour le limiter. Il rappelle que tout le monde dans un pays riche a le droit à un logement décent et correctement chauffé, une capacité à se déplacer, l’accès à la nourriture.  Il rappelle à la classe politique qui semble si souvent l’oublier, qu’il y un monde avec des gens au-delà du périphérique. Dans un monde médiatique hypnotisé par les sondages, malgré son contenu pour une fois réfléchi, ou peut-être à cause de cela, il passe totalement inaperçu. Ce qui est révélateur de la pauvreté de notre débat public.

Ce texte devrait pourtant être lu, critiqué, amendé, enrichi, et cela d’autant plus qu’il tranche avec la « pensée par slogans » qu’on nous sert de toute part. Coutumier de l’étiquetage et de l’invective plus que du débat, le microcosme politico-médiatique s’avère incapable de discuter le fond, il est même devenu incapable de le reconnaitre quand il se présente. Il est superbement ignoré par les médias, la cervelle vissée sur l’audimat, et par l’ensemble de la classe politique, trop heureuse que ne paraisse pas au grand jour l’inanité collective de sa réflexion sur ces sujets ( le débat récent entre les différents candidats montrait à quel point le « prêt à penser » fait des ravages https://www.youtube.com/watch?v=t3TmdV7uj6E ). Encore une fois, je ne plaide pas pour une acceptation « en bloc » (seule la commission Attali, avec un secrétaire célèbre depuis, et ses « cent propositions » avait cette outrecuidance… ) , mais je plaide pour une discussion de fond. L’importance du sujet mérite cet effort.

diderot.pngAprès deux décennies de doxa libérale qui a fini par confondre  le progrès et l’innovation, le contenu et l’affichage, la création de richesse et la spéculation, en oubliant au passage  la notion de « bien commun » versé au nombre des vieilles lunes de « l’ancien monde », après deux décennies où une gauche intoxiquée par un Rousseauisme de pacotille mâtiné de calculs électoraliste s’est éloignée de l’héritage des Lumières, ce texte qui engage à réfléchir, qui assume pleinement le progrès scientifique et technique, est un retour heureux de l’esprit de Diderot qui a été trop longtemps oublié y compris par ceux qui se prétendaient ses héritiers.    

le plan climat est en téléchargement sur ce lien : https://revue-progressistes.org/2023/11/07/plan-climat-empreinte-2050/

Les principales propositions du plan climat présentées par Léon Deffontaines (à partir de la 32 ème minute...)

16:23 Publié dans Cactus, Connaissances, Entretiens, Point de vue | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

27/04/2024

Assan Lakehoul (Mouvement de la Jeunesse Communiste) : "Une partie de la gauche s'approprie les méthodes d'intimidation de l'extrême droite"

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Insulté pour avoir dénoncé l'explosion de la violence et les ravages du fondamentalisme religieux, le secrétaire général des Jeunes Communistes (MJCF) détaille dans un entretien à « Marianne » pourquoi, selon lui, la gauche doit se montrer intransigeante sur ces sujets.

Peut-on encore s'attaquer à l'obscurantisme quand on est de gauche ? Il y a de quoi douter, vu le tombereau d'indignations et d'insultes suscité ces derniers jours par le discours laïc d'Assan Lakehoul. Auprès de Marianne, le secrétaire général des Jeunes Communistes (MJCF) revient sur cette affaire, regrettant que sa famille politique ait abandonné l'un de ses piliers : la lutte contre le fondamentalisme religieux.

Marianne : Depuis quelques jours, vous êtes victime d'insultes pour avoir dénoncé les propos rétrogrades d'un influenceur musulman très suivi sur les réseaux. Pouvez-vous revenir sur cette histoire ?

Assan Lakehoul : Tout est parti du plan de lutte contre la montée de la violence chez les jeunes qu'on a dévoilé après les récentes annonces de Gabriel Attal, déconnectées des réalités du terrain. Parmi nos mesures visant à mieux accompagner la jeunesse, il y a notamment la lutte contre le communautarisme et l'obscurantisme religieux.

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C'est en développant ce point sur le plateau de BFMTV [ce mercredi 24 avril, N.D.L.R.] qu'on m'est tombé dessus sur les réseaux sociaux. Dans le lot, il y a des musulmans rigoristes, des cathos tradis et, bien sûr, l'extrême droite. Rien de très étonnant. Mais il y a aussi tout une partie des militants soi-disant de gauche (voire d'extrême gauche), soi-disant insoumis, qui se sont attaqués au discours laïc que je tiens et qui, à mon sens, fait partie de nos piliers.

Quelles sont, justement, vos propositions pour lutter contre la violence chez les jeunes ?

C'est un problème complexe, donc il faut jouer sur tous les tableaux. D'un côté, la droite et l'extrême droite pensent que ce n'est qu'une question d'autorité. Elles mentent. De l'autre, une partie de la gauche estime qu'il suffirait de recruter des profs. Elle se trompe. Nous, on est convaincu qu'aucune mesure choc isolée ne pourra régler ce phénomène.

« Il y a aussi une réponse de gauche à apporter sur le fléau de la drogue. »

Ça passe évidemment par les services publics, mais aussi par la lutte contre le retour en force du fait religieux et le narcotrafic. Un mineur délinquant, c'est avant tout un jeune en danger. Il faut donc plus de moyens pour l'aide sociale à l'enfance, plus d'éducateurs, plus d'assistantes sociales, plus de moyens à l'école. Il faut aussi prendre à bras-le-corps la question des violences sexistes et sexuelles, dont on parle peu quand on traite de l'insécurité.

ll y a aussi une réponse de gauche à apporter sur le fléau de la drogue. S'attaquer à la source, aux gros bonnets, plutôt que de faire la chasse aux petits dealers, ce qui ne change pas le problème. Donner des moyens à la police, à la justice. Retracer les financements… En faisant tout ça, on s'apercevra peut-être qu'il y a des banques trop laxistes si ce n'est complices, mais aussi des pays, comme le Maroc, qui jouent un rôle considérable là-dedans.

Quel genre d'insultes recevez-vous et comment analysez-vous cette situation ?

Je me suis fait traiter « d'Arabe de service », de « collabeur », ce genre de choses. Aujourd'hui, beaucoup de militants ne font plus que de la politique avec de l'outrance et de la provocation. Ces gens s'amusent, prennent tout ça pour un jeu, alors que nous, on se bat pour nos convictions. Ce qui me révolte et me choque, c'est qu'une partie de la gauche s'approprie ces méthodes d'intimidation classiques de l'extrême droite.

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Si cette violence est encore plus relâchée en ligne, elle a des répercussions concrètes dans la vie réelle. Lors de manifestations récentes, on a pu entendre des slogans comme « Tout le monde déteste Fabien Roussel [secrétaire national du Parti communiste français] ». L'année dernière, le 1er-Mai, le stand du PCF (Parti communiste français) avait aussi été pris à partie.

Certains vont même jusqu'à vous comparer à des personnalités d'extrême droite comme Damien Rieu. Comment le prenez-vous ?

Je trouve ça terrible. Ils ont aussi comparé Fabien Roussel à Jacques Doriot… C'est minable, ça les déshonore, eux et la gauche par la même occasion.

N'est-ce pas une preuve que dénoncer les ravages du fondamentalisme religieux, ou encore de la montée de la violence, devient de plus en plus difficile à gauche ?

Je ne vais pas faire dans la langue de bois : je pense surtout que ça devient impossible pour une partie de la direction de La France insoumise. Ils accréditent la fameuse thèse des deux gauches irréconciliables en abandonnant des principes fondamentaux de notre courant politique.

D'ailleurs, vous dénoncez également le fondamentalisme chrétien. A priori, un point de vue pas très Damien Rieu-compatible…

Bien sûr. Et d'ailleurs, les deux influenceurs religieux que j'ai dénoncés m'ont répondu. Le prédicateur musulman a fait une vidéo, tandis que l'abbé Raffray a commenté ma publication. Ce qui est drôle à souligner, c'est que leurs réponses se croisent. Ce qui montre bien que c'est un même sujet. Il y a un lien entre l'extrême droite politique, les catholiques traditionalistes et les fondamentalistes musulmans. Nous, on les dénonce tous pour l'idéologie réactionnaire qu'ils incarnent.

« Ils voudraient nous enfermer dans une société moyenâgeuse. »

Ils prônent une vision du monde sexiste et patriarcale, donnent des leçons sur comment les femmes doivent vivre ou comment les jeunes doivent se comporter… Bref, ils voudraient nous enfermer dans une société moyenâgeuse et là encore, ça a un impact direct sur la vraie vie.

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Récemment, on a eu des groupuscules identitaires qui sont sortis faire une ratonnade au nom des valeurs chrétiennes et françaises. Mais aussi un adolescent tué parce qu'il discutait de sexe avec sa copine ou une jeune femme morte à cause de sa « réputation ». Il faut bien voir que ces discours religieux en ligne permettent de justifier et légitimer cette violence.

Pourquoi votre famille politique et la gauche de manière générale doivent, selon vous, se montrer intransigeantes sur ces sujets ?

Déjà, car la laïcité est une valeur intrinsèquement de gauche. Elle a été récupérée par l'extrême droite, alors que cette dernière est tout sauf laïque et républicaine. Et s'ils peuvent faire croire l'inverse, c'est notamment parce que la nature a horreur du vide et que la gauche a abandonné sa bataille pour l'émancipation et contre toute forme de domination. L'Internationale, c'est : « Ni Dieu, ni César, ni tribun ».

« Leur gauche Tolbiac, leur gauche Rennes-II ou Mirail, elle est toute petite. »

On a aussi un désaccord de fond avec LFI sur la question du rapport de force et du rôle qu'on veut jouer. Nous, on pense qu'une gauche utile, c'est une gauche majoritaire. Eux, au contraire, veulent radicaliser leur électorat, diviser la jeunesse et, finalement, cliver la société sur de mauvaises bases, qui ne sont pas du tout des bases de classe. C'est très dangereux.

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Au PCF, ça ne nous intéresse pas d'incarner une gauche qui ne parle qu'aux centres-villes et aux grandes universités. Leur gauche Tolbiac, leur gauche Rennes-II ou Mirail, elle est toute petite, elle n'ira jamais nulle part. C'est ce que j'appelle aussi la gauche nombriliste, qui n'aspire qu'à prêcher auprès des convaincus. Personnellement, je ne me suis pas engagé pour faire de l'opposition toute ma vie. Je veux pouvoir gagner afin de réellement changer la vie des gens.

Diego DIAZNombre de pages : 449 €
Format(s) : Papier PDF EPUB MOBI
 

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