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05/08/2013

PEDOPHILIE : MAROC / TEMOIGNAGE DE SERGE GARDE, JOURNALISTE

gardeserge.jpgCe matin, lundi 5 août 2013, j'étais invité à l'aube (à 6 h 30) en direct sur le plateau d'I télé, pour commenter la grâce royale accordée au pédocriminel espagnol Daniel Galvan. J'ai avancé les idées suivantes:

1°) C'est une victoire pour les associations de défense des enfants tous les manifestant-es (et notamment celles et ceux de Rabat) au Maroc, ailleurs et sur les réseaux sociaux. S'il n'y avait pas eu cette mobilisation, il n'y aurait pas eu d'annulation de la grâce. Les manifestant-es ont brisé un tabou et cela, c'est un acquis durable!

2°) A propos, je ne sais pas ce qu'est une annulation de grâce. Ce qui est certain, c'est que ce criminel, condamné en 2011 à 30 ans de prison pour le viol de 11 enfants (le plus jeune avait 4 ans!) est sorti de prison et qu'il a disparu dans la nature, ce qui suppose des complicités extérieures.

 3°) Actuellement, on cherche à nous faire croire qu'il s'agit d'une bévue commise par l'entourage de Mohamed VI. L'enquête ouverte vise surtout à trouver le fusible qui va sauter pour sauvegarder l'image royale.

4°) Il ne s'agit hélas pas d'une regrettable erreur, mais d'un symptôme révélateur de la situation au Maroc. Selon les ONG locales, on estime à 26000 les viols d'enfants chaque année. soit 71 viols par jour!

5°) 92% des dérogations demandées pour organiser les mariages de fillettes avec des adultes sont autorisés par les juges marocains, car la loi prévoit de telles dérogations sans avoir fixé de l'imite d'âge. Ce qui revient à une autorisation de vendre ses filles.

6°) On critique Mohamed VI, mais que dire du roi d'Espagne ? C'est tout de même lui qui a demandé à son collègue marocain cette grâce! Et je constate que le récent safari africain de Juan Carlos a provoqué plus de réactions hostiles que cette grâce!

 7°) Tout cela montre l'ambiguité qui subsiste dans nos sociétés à propos de la pédocriminalité.

 8°) Après le tsunami de 2004, dans le sud est asiatique, les circuits du tourisme sexuel se sont sensiblement modifiés et le Maroc est devenu encore plus une terre attractive pour les prédateurs sexuels de mineur-es.

J'ai à peu près pu dire tout cela en direct. Propos que je n'ai plus retrouvés lors des reprises du sujet, dans les journaux télévisés suivants. J'aurais pu ajouter que ce "danielgate" révèle aussi le décalage qui existe entre les "élites auto-proclamées" et l'opinion publique.

maroc-marche-contre-la-pedophilie_200_200.jpgS'il n'y avait pas eu cette mobilisation d'une grande partie de la population (internautes compris) jamais le roi ne serait revenu sur la grâce qu'il avait accordée. Ne serait-ce que pour éviter de créer cet "ojni" (objet juridique non identifié) qui risque de poser d'inextricables complications juridiques. J'aurais pu ajouter que dans un pays dans lequel la pédocriminalité n'est pas lourdement réprimée (Galvan est dans le palmarès des juges, une exception), et dans lequel une bonne partie des familles continuent à vivre avec un euro de revenu par jour, le commerce des enfants et l'inceste ne risquent pas de reculer.

Finalement, c'est la mobilisation des opinions publiques contre la pédocriminalité qui sera déterminante. Bravo aux manifestant-es qui ont bravé les matraques des policiers pour défendre les enfants!

Serge Garde

Journaliste d'investigation, il collabore jusqu'à sa retraite au quotidien L'Humanité où il traite des faits divers. Il a travaillé également pour la télévision (FR3 et M6).

Il a consacré divers ouvrages à la pédocriminalité et à la lutte à son encontre.

30/07/2013

Slavoj Zizek : "Le mariage éternel entre capitalisme et démocratie est fini"

 	communisme, philosophie, entretien, capitalisme, slavoj zizek, séries d'été, penser un monde nouveau,Les séries d'été de l'Humanité : Penser un monde nouveau . Entretien avec Slavoj Zizek, philosophe et psychanalyste slovène. Selon lui, la période historique 
du capitalisme touche à sa fin. Il ne faut 
pas s’interdire d’utiliser le mot communisme comme horizon de nos espoirs.

Formé notamment en France, c’est à Ljubljana, ville qui l’a vu naître en 1949, qu’il s’est installé pour réaliser ses recherches. C’est également dans cette ville que le plus iconoclaste des Slovènes rédige, lorsqu’il n’est pas sollicité à travers le monde, la plupart de ses essais, traduits dans une vingtaine de langues. Son œuvre, polymorphe, puise aussi bien dans Lacan, Hegel que Marx – pensées dont il considère que leur combinaison nous donne une grille de lecture indépassable des antagonismes qui travaillent la société – pour s’attaquer aux réalités contemporaines qui font durablement problème : la mondialisation, le capitalisme, le couple liberté-servitude, le politiquement correct, le marxisme, le postmodernisme, la démocratie, l’écologie…
Personnalité que ses détracteurs (de droite comme de gauche) présentent volontiers comme truculente, incontrôlable, Zizek est surtout un penseur qui ne s’accommode pas des conventions et des modes intellectuelles. Ses constructions conceptuelles sont enracinées dans un marxisme « vivant » (reprenant ici les mots bien trouvés de Sartre), une passion lacanienne et un tropisme hégélien. Cette construction réside pour partie dans les digressions qu’il s’autorise pour approcher au plus près les tensions du réel, ses nœuds et sa complexité.

Vous écrivez dans votre dernier essai que « les prises de pouvoir d’État 
ont misérablement échoué » 
et vous considérez que « la gauche devra se vouer à la transformation directe de la texture même de la vie sociale ». Ces deux mouvements ne peuvent-ils pas
être imbriqués ?

Slavoj Zizek. J’ai de grands conflits avec plusieurs de mes amis, notamment d’Amérique latine, qui considèrent que la prise du pouvoir ne doit plus être à l’ordre du jour, qu’il faudrait abandonner le paradigme bolchevik ou « jacobin » (autrement dit, une prise de pouvoir directe d’État) au profit des bouleversements à opérer au sein des communautés locales. Il y a même l’illusion que l’État disparaîtrait de lui-même. Ma position est tout autre. On doit rester marxiste. L’antagonisme social de base ne se situe pas au niveau du pouvoir, de la gouvernance, c’est l’antagonisme économique qui exprime le plus directement le paradoxe du capitalisme. La solution ne réside pas dans un mouvement de résistance envers l’État. Ce n’est pas le grand ennemi. Il est faux de croire que le salut consiste à se tenir à distance de l’État, le capital est déjà à distance de l’État ! L’ennemi, pour moi, c’est cette société dans son fonctionnement actuel et la domination économique qu’elle met en œuvre.

C’est donc davantage la fonction attribuée à l’État qui vous questionne, plutôt que l’opposition hypothétique entre la société 
civile et l’État ?

Slavoj Zizek. Se priver d’État peut laisser place aux pires dérives. Un théoricien des lois légaliste de gauche m’a raconté qu’il a regardé aux États-Unis toutes les cartes où il y a un conflit entre la société civile et l’État. Le mouvement civil néoconservateur revendique que l’État ne se mêle pas des affaires civiles. Les groupes réactionnaires sont ainsi parvenus à bannir l’homosexualité dans les écoles, pour ne parler que de cela. Y compris aux États-Unis, c’est l’État qui défend quelques libertés fondamentales contre les pressions locales ou civiles néoconservatrices.

Vous entendez par là que la société civile n’est pas nécessairement mue de bonnes intentions, à vocation universaliste… Qu’une des fonctions de l’État peut être de contenir, voire d’outrepasser les dogmatismes autoritaires ?

Slavoj Zizek. Oui, on ne doit pas oublier tous les mouvements fascistes… Aujourd’hui, le grand mouvement antimigrants né du patriotisme est un fait de la société civile. Le conflit le plus radical n’est pas entre les dominés et l’État, c’est un conflit économique qui peut être dominé par l’État. Garder une distance vis-à-vis de l’État cela veut dire qu’on laisse la gestion de l’État à l’adversaire. C’est vrai que, dans la forme même d’État, une domination est inscrite. Cela ne doit pas nous empêcher de considérer qu’on peut faire beaucoup de choses avec. L’instrument est ambigu, il peut être dangereux, mais il peut aussi être un instrument de la transformation sociale.

Vous semblez parfois sceptique vis-à-vis des grandes mobilisations de masse. Pensez-vous que ces « groupes en fusion », pour reprendre l’expression de Sartre, sont incapables de transformer radicalement le cours des choses ?

Slavoj Zizek. Les récents mouvements de masse dont nous avons été spectateurs, aussi bien ceux de la place Tahrir qu’à Athènes… ressemblent pour moi à une extase pathétique. Ce qui m’importe le plus, c’est le jour d’après, le matin qui vient. Ces événements m’évoquent la sensation qu’on éprouve lorsqu’on se réveille avec un mauvais mal de tête après une soirée d’ivresse. La difficulté majeure réside dans ce moment crucial, où les choses retournent à leur état normal, quand la vie quotidienne repart.

Si certaines promesses de révolution ont été confisquées, ne participent-elles pas à faire l’histoire, à la précipiter du moins ?

Slavoj Zizek. Oui, mais que va-t-il rester du grand événement ? Le succès de ces grands mouvements extatiques doit être évalué sur la base de ce qu’il en reste une fois qu’ils sont passés. Sinon nous sommes dans ce romantisme soixante-huitard. L’après, c’est cela qui m’intéresse. L’unique problème est de savoir ce qu’on fait concrètement aujourd’hui ? C’est pourquoi j’ai admiré l’efficacité d’Hugo Chavez. On parle d’auto-mobilisation continue des masses, moi je ne veux pas vivre dans une société dans laquelle je suis obligé d’être mobilisé politiquement en permanence. Nous avons de plus en plus besoin de grands projets sociaux, avec des effets concrets et durables.

Vous juxtaposez au malaise du capitalisme un malaise écologique. Quel est ce « malaise dans la nature » dont vous traitez longuement dans Pour défendre les causes perdues ?

Slavoj Zizek. Je n’aime pas la mythologie du mouvement écologiste qui porte l’idée d’un équilibre naturel qui aurait été ruiné par l’impérialisme humain ou déstabilisé par l’exploitation de la nature. Je préfère le darwinisme de gauche dont la thèse est que la nature n’existe pas comme un ordre homéostatique, cette mère nourricière dont la balance a été perturbée par la main de l’homme. Il faudrait la rétablir, y retourner. Je pense au contraire que la nature est folle, faite de catastrophes naturelles, c’est un grand chaos. Cela ne veut absolument pas dire qu’il ne faille pas se faire de soucis, la situation est au contraire éminemment inquiétante. Mais il faut sortir de la moralisation écologique et son homéostasie. La théologie dans sa forme traditionnelle ne peut plus remplir sa fonction fondamentale qui est de poser des limites fixes. La référence à Dieu ne fonctionne pas, or la référence à la nature commence à remplir ce lieu. Je n’ai pas de grandes réponses positives mais un premier réflexe utile serait de refuser le « way of life » écologique. Cela individualise le souci écologique, comme en attestent les injonctions au recyclage. Comme si cela suffisait à accomplir son devoir ! Cela ne fait qu’aboutir à une culpabilisation permanente. Je me soucie plus de savoir comment on s’organise pour prévenir les futurs mouvements de population liés à l’immigration et au réchauffement climatique ? La réponse à cette question m’importe plus que les bavardages autour du tri sélectif.

La question démocratique, précisément, 
ne cesse de vous travailler. En vous appuyant aussi bien sur Platon qu’Heidegger, vous 
en démontrez le caractère souvent illusoire 
et fumeux. Est-ce l’occasion de penser 
son renouvellement, ou prônez-vous l’abandon pur et simple de cette idée ?

Slavoj Zizek. Tout dépend de ce qu’on entend par démocratie. La démocratie telle qu’elle fonctionne est de plus en plus remise en cause. C’est une des grandes leçons du mouvement Occupy Wall Street. Même si cette contestation s’est dissipée, il y avait deux intuitions correctes. Premièrement, c’était une mobilisation basée contre « one issue mouvement » : la dénonciation d’un problème concret, le fait qu’il y a quelque chose qui cloche dans le système économique actuel. Deuxièmement, ce mouvement a démontré que notre système politique existant n’est pas assez fort pour lutter efficacement contre ces dérèglements économiques. Or si on laisse le système mondial continuer de se développer ainsi, je m’attends au pire : à de nouveaux apartheids, de nouvelles formes de divisions. Je crois que le mariage éternel entre capitalisme et démocratie est fini. Il n’a plus que quelques années à tenir.

Qu’est-ce qui pourrait alors remplacer 
cette « coquille vide » ?

Slavoj Zizek. Nous avons affaire à une démocratie vidée de signification. Mais je ne suis pas pour abandonner brutalement cette idée. Il y a des situations précises où je peux être pro-démocratique. En ce sens, je ne suis pas pour le rejet systématique des élections. Parfois elles peuvent être heureuses, voyez la Commune de Paris, ou imaginez une victoire de Syriza en Grèce. Ce serait un bel événement démocratique. Mais il y a bien un malaise démocratique à dépasser, souvenons-nous du choc qui a soulevé l’Europe quand Papandréou a proposé un référendum. Les choix électoraux sont régulièrement manipulés de diverses manières, mais il peut arriver que nous puissions faire des choix démocratiques véritables. Je ne suis donc pas a priori contre cette idée.

Vous dénoncez une Europe dénuée de toute « passion idéologique ». Quel est ce mal 
qui fait, selon vous, qu’elle n’est pas désirable dans sa forme actuelle ?

Slavoj Zizek. Il y a trois Europe. L’Europe technocratique n’est pas a priori mauvaise. Mais quand elle n’est que cela, c’est une unité de façade qui se donne seulement les moyens matériels de sa survie. L’Europe du populisme xénophobe est violemment antimigrants. Le plus grand danger réside pour moi dans sa troisième forme, qui est la superposition d’un technocratisme économique (pourtant multiculturel et libéral à la base) et d’un patriotisme idiot. L’Italie de Berlusconi en est un sinistre exemple. Pour autant, je trouve que nous avons tort, en tant qu’Européens, de nous auto-flageller en permanence. Il faut savoir défendre et s’enorgueillir de ce qui fonde l’Europe : ses valeurs enracinées dans l’égalitarisme, le féminisme, la démocratisation radicale. Les grands mouvements anticoloniaux ont été d’inspiration européenne. Notre seule chance est d’insuffler une autre idée de l’Europe.

Vous prônez donc un nouveau volontarisme politique européen ?

Slavoj Zizek. La logique immanente de l’histoire n’est pas de notre côté. Si on la laisse incliner vers sa tendance naturelle, l’histoire continuera d’aller vers l’autoritarisme réactionnaire. En cela les analyses de Marx doivent être notre point de départ. Il faut poursuivre cette ligne tout en s’intéressant à d’autres questions, soulevées par exemple par les autonomistes italiens, dont Maurizio Lazzarato, qui défend l’idée que, dans l’idéologie quotidienne, notre servitude nous est présentée comme notre liberté. Il montre comment nous sommes tous traités comme des capitalistes qui investissons dans notre propre vie. L’endettement remplit une fonction disciplinaire, c’est aujourd’hui une des manières nouvelles de maintenir sous contrôle les individus. Tout en nous donnant l’illusion que cela relève de choix libres. Même la fragilité des parcours professionnels, l’insécurité chronique, nous est présentée comme une chance de pouvoir nous réinventer tous les deux ou trois ans. Et ça fonctionne très bien.

Une série d’intellectuels, dont vous faites partie, défendent l’idée que le communisme n’est pas un concept épuisé. L’idée a-t-elle un avenir en dépit des réductionnismes sauvages 
dont elle fait encore régulièrement l’objet ?

Slavoj Zizek. L’axiome commun à accepter est que nous continuons à utiliser le mot communisme comme l’horizon de nos espoirs. Les anticommunistes libéraux contemporains n’ont même pas d’appareil conceptuel propre pour réaliser une critique véritable du communisme. La théorie de la tentation totalitaire, qui serait inhérente au communisme, est un psychologisme ridicule, non théorisé. C’est ce qui m’a fait dire un jour à Bernard-Henri Lévy qu’il n’était pas assez anticommuniste. On attend toujours une critique éclairée de la catastrophe stalinienne. Every Day Stalinism (le stalinisme ordinaire) est le seul ouvrage à ma connaissance qui fasse une démonstration intéressante et instruite. C’est un fait historique que des régimes horribles se sont légitimés de Marx, il serait trop facile d’opposer à cette réalité que ce n’était pas là un marxisme authentique. Il faut quand même poser la question : comment cela a-t-il été possible ? Cette question ne doit en revanche certainement pas être un prétexte pour abandonner Marx. C’est la condition préalable pour le répéter autrement : renouveler ce geste en changeant la forme et non les prémisses. Le socialisme ne marche pas, Hitler s’est réclamé socialiste. « Une idée vraie est une idée qui divise », comme le répète mon ami Alain Badiou. Mais les erreurs passées doivent nous rendre plus exigeants.

Parution chez Flammarion des deux derniers essais 
de Slavoj Zizek : Vivre la fin des temps et Pour défendre 
les causes perdues.

18/07/2013

LES FRERES ENNEMIS !

marchepourlapaix.jpgIl était une fois un homme nommé Abraham, on le disait descendant de Sem, le fils de Noé. Un servent de Dieu: ni chrétien, ni juif, ni musulman, un servent de Dieu.

Cet homme, avait une épouse, Sarah. Il avaient également une servante, Hajar. Sarah lui donne un fils qu’ils nomment Isaac et Hajar un fils appelé Ismaël. Deux frères que tout unit mais que tout opposera. On leur a prédit d’avoir une vaste descendance, chacun devra accomplir son destin et perpétuer une lignée.

Ismaël et Isaac n’étaient pas complètement frères de sang, mais ils étaient frères de sein, mais Sarah, ordonne à son époux de chasser Hajar et son fils, condamnés à errer dans le désert.

Un même père mais deux mères qui vont définitivement troubler les repères. Pourtant, une famille est une famille, quelque soit le caractère légitime ou pas de la filiation.

Les siècles ont passé, la descendance  d’Isaac et Ismaël s’est propagée dans tout le Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Certains sont devenus juifs et les autres musulmans.

Un jour, une arabe tombe amoureuse. Un jour, un juif tombe amoureux.

Ni elle, ni lui ne sait ce que l’autre est, mais ils tombent amoureux l’un de l’autre.

Elle, l’aimait pour son élégance, sa sagesse et son humour. Lui, l’aimait pour son intelligence, sa beauté et sa générosité.

Ils s’aimaient sans se poser de questions, la puissance des corps étaient plus forte que celle des clivages politiques. Mais un jour, il a découvert que sa langue maternelle était l’arabe et elle que la sienne était l’hébreu. Alors que leur seul langage était l’amour, ils se sont rendus compte qu’ils ne se comprenaient plus, ou plutôt qu’ils ne voulaient plus se comprendre. Ils ne cherchaient plus à se comprendre.

Ils partageaient tout, mais surtout, ce qu’ils partageaient, étaient hautement transcendant, mais il lui a dit "tu sais, je suis sioniste" et elle lui a répondu "tu sais les palestiniens aussi ont droit à leur terre". Pour chacun, une confidence bien amère…

Il s’aiment plus que tout et ils ont fini par se haïr pour une simple question de territoire, de convictions politiques, de suprématie.

Quelque chose qui est en contraste total avec ce qu’ils étaient au départ. De servants de l’amour ils sont devenus esclaves de la haine.

laroberouge4.jpgLeurs langues sont cousines, leur histoire est commune, leurs origines sont voisines et ils se vouent aujourd’hui une guerre sans merci.

J’ai bien essayé de comprendre, de remonter aux origines bibliques, ethniques, historiques, rien ne justifie leur défiance les uns à l’égard des autres.

Et ce que j’en conclue, c’est que ce sont ceux qui cultivent cette haine, qui des deux côtés sont antisémites.

Anti eux-mêmes

La Robe Rouge

10/07/2013

BIENTOT : VIVRE 1000 ANS ? PAS IMPOSSIBLE !

cubapa.jpgLa société de biotechnologie française Cellectis annonce  une première mondiale : la possibilité de "se faire une sauvegarde génétique pour se réinitialiser un jour".

25 octobre 2023. Los Angeles. Sur son terrain de golf préféré, Edward, 59 ans, comédien star de Hollywood est terrassé par un infarctus. Il risque de ne plus jamais récupérer une vie normale. Heureusement, ce passionné d’innovation a souscrit, dix ans plus tôt, un contrat avec la société Scéil. Du coup, son chirurgien va pouvoir restaurer ses tissus coronariens, avec des cellules cardiaques contenant l’ADN même d’Edward. Zéro risque de rejet immunitaire...

vie.jpgScience-fiction ? En partie seulement. Car la société de biotechnologie française Cellectis annonce, ce soir, une première mondiale ! Son P-DG André Choulika, est en tournée cette semaine à New York et Los Angeles pour lancer sa nouvelle filiale Scéil, qui propose ce contrat futuriste. Un pari audacieux sur les progrès de la pharmacie et de la médecine, qui demain, affirme-t-il, développeront de manière routinière médicaments personnalisés et thérapies régénératrices.

"C’est un peu comme si l’on pouvait se faire une sauvegarde génétique pendant qu’on est en pleine forme, et la mettre de côté pour se réinitialiser un jour", explique Choulika. Comme on sauvegarde le disque dur d'un ordinateur ! L’argument de vente de Scéil ? "Capitalisez maintenant sur les promesses de demain !"

Prélèvement de peau

Scéil propose un service de base à 60.000 dollars (47.000 euros), plus un forfait de maintenance (500 dollars/an après la 3ème année). Pas à la portée de toutes les bourses… Pour démarrer, le service n’est disponible que dans les régions du monde où la législation le permet : Etats-Unis, Moyen-Orient (Dubaï) et Asie (Singapour). Et demain, sans doute, en Suisse. "La réglementation française, en revanche, rend ce type d’offre impossible, puisqu’elle exige de spécifier l’usage futur de tout prélèvement biologique", explique le secrétaire général de Cellectis, Philippe Valachs.

Une fois la somme acquittée, le client se fait faire un prélèvement de peau d’environ 3 mm de diamètre, qui est ensuite expédié dans le laboratoire de Singapour, où les cellules du derme (fibroblastes) sont cultivées en qualité clinique, puis conservées dans de l’azote liquide (-180°C). Mais - là est la nouveauté - une partie d’entre elles est aussi reprogrammée pour donner naissance à ce qu’on appelle des "cellules souche pluripotentes induites" ou iPS, elles-mêmes cryogénisées.

Thérapies cellulaires régénératrices

Leur particularité ? Inventées par le prix Nobel de médecine 2012, le japonais Shinya Yamanaka, ces iPS ont bien l’ADN du donneur, mais ont retrouvé toutes les caractéristiques de cellules souches embryonnaires. C’est à dire que l’on peut, pour régénérer les organes endommagés, provoquer à nouveau leur différenciation en cellules du cœur, du sang, du foie, du pancréas, du cartilage, du cerveau… Techniques dont Cellectis, un leader mondial de l’ingénierie du génome, est justement spécialiste.

L’un des gros avantages de ces iPS est d’éteindre toute polémique d’ordre religieux. Puisque, contrairement aux vraies cellules souches, elles ne proviennent pas d’embryons surnuméraires de fécondation in vitro, elles sont compatibles à la fois avec la Bible et la Charia ! La semaine sera justement placée sous le sceau du débat bioéthique, puisque l’Assemblée Nationale examine, jeudi 11 juillet, une loi libéralisant l’usage des cellules souche.

Ce qui signifie que si, même dans un lointain avenir, le client de Scéil a un pépin de santé, ses médecins pourront à volonté "commander" l’ingénierie de cellules 100% compatibles (c’est lui le donneur) du tissu souhaité. Ils pourront alors vérifier in vitro l’innocuité de tel ou tel médicament. Et surtout développer des thérapies cellulaires régénératrices.

La "techno médecine" est en marche

Pour l’instant, les iPS commencent seulement à être utilisées pour tester des molécules. Procédé qui peut permettre aux laboratoires pharmaceutiques d’éviter la mise sur le marché de médicaments aux effets secondaires toxiques, voire mortels… Demain peut-être, elles se substitueront aux cellules souche embryonnaires dans des biothérapies très innovantes. Car la "techno médecine" est déjà en marche : partout sur la planète, des chercheurs s’apprêtent à démarrer des essais cliniques pour réparer le cartilage du genou, lutter contre la dégénérescence maculaire de l’œil, greffer les grands brûlés, reconstituer le tissu cardiaque, lutter contre la leucémie…

"Un bébé né cette année a une espérance de vie de 140 ans. Dès 2020 ou 2030, les gens se feront couramment soigner comme cela", affirme André Choulika, qui y voit une source d’innovation et de croissance pour les décennies à venir. Une révolution silencieuse capable de faire reculer la mort, qui posera des problèmes sociétaux et éthiques dont on peine encore à cerner les contours.

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Immortalité : Scéil est "contraire à la philosophie française"

Il est dorénavant possible de sauvegarder ses gènes grâce à un simple prélèvement de peau. L'objectif : être son propre donneur en cas de problème médical. Une médecine du futur réservée aux nantis.Scéil propose un service de base à 60.000 dollars (47.000 euros), plus un forfait de maintenance (500 dollars/an après la 3ème année).

Mettre ses gènes à la banque pour les utiliser plus tard exclut les plus pauvres de ces thérapies comme l'explique Marc Pechansky, directeur scientifique de l’Institut I-Stem, au Genopole d’Evry. 

Une thérapie de luxe qui scandalise Marc Pechansky, directeur scientifique de l’Institut I-Stem, au Genopole d’Evry qui explique sa position au Nouvel Observateur : 

"Je suis profondément attristé par l’initiative Scéil ! C’est grave, car Cellectis, qui est une entreprise française intéressante et scientifiquement respectable, donne ainsi sa caution au concept de 'banque privée' de cellules. Un modèle de 'banques égoïste', qui ne donne accès aux outils médicaux du futur qu’aux riches... C’est déjà ce qui se pratique à l’étranger, en Suisse notamment, sur le sang de cordon ombilical. Et c’est tout à fait contraire à la philosophie française - portée aussi bien par l’agence biomédicale que par le comité d’éthique - qui cherche à promouvoir des 'banques publiques' et solidaires, basées sur le don anonyme.

Par ailleurs, avec Scéil, Cellectis vend pour l’instant du rêve… Parce que cette annonce accrédite auprès du grand public l’idée qu’on peut d’ores et déjà le soigner avec ses propres iPS. C’est une initiative extrêmement déplacée, qui va donner de l’espoir aux malades, alors que les thérapies cellulaires à partir d’iPS ne sont pas encore au point. Oui, je crois au potentiel médical des iPS, mais dans plusieurs années. Tout cela appartient encore au domaine de la recherche, pas au marché.

Je comprends que Cellectis, qui n’est pas une entreprise mercantile, fasse cela pour se financer. Mais je pense que ses dirigeants, naïfs, ne mesurent pas les dégâts que peut provoquer leur initiative. Si je leur fais confiance pour ne pas franchir la ligne jaune eux-mêmes, ils se retrouveront très vite associés à des gens peu recommandables, qui promettent de guérir des centaines de maladies. Avec Scéil, Cellectis légitime l’entrée de machines à fric ukrainiennes ou coréennes sur ce terrain !"

Articles publié dans le Nouvel Obs

18:54 Publié dans Actualités, Connaissances, Planète, Société | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : vie, immortalité, adn, sceil | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!