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05/08/2017

Quelle libération ?

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Patrick Le Hyaric, directeur de l'Humanité, député Européen

La guerre idéologique ne prend pas de vacances. Ainsi nous venons d’assister il y a quelques jours à un déferlement de commentaires et d’analyses où l’ignorance crasse était en compétition avec l’imbécilité pour faire adopter l’idée que ce 29 juillet était le jour de… « La libération fiscale ». Ce concept, aussi vieux que les contributions, a émergé aux États-unis en 1948 et a été relancé ici par une sombre association dite «des contribuables associés». Il a été repris en cœur par tous les médias bien pensants ayant en sainte horreur ce que nos concitoyens pourraient posséder en commun, qu’il s’agisse de la protection sociale, des hôpitaux, des écoles comme des chemins de fer. Même Wikipédia se croit obligé de reprendre ces balivernes relancées par des instituts économiques de droite.

De quoi s’agit-il au fond ? Ce jour dit de « la libération fiscale » serait le premier jour où les Français travailleraient enfin pour « eux » et non plus pour une pieuvre anonyme loin d’ici baptisée « l’État ». Ainsi, insidieusement, l’État devient « étranger » au pays, à celles et ceux qui y vivent. L’utilisation de ce mot « libération» est encore plus odieuse puisque qu’il qualifie souvent la fin de l’occupation allemande. L’État est donc assimilé ici, par ces faussaires, à un corps étranger qui, contre notre gré, nous ponctionnerait impôt sur le revenu, impôt local, cotisations sociales. Aucun républicain ne peut laisser sans réagir et sans les combattre ces fausses thèses qui visent à glorifier le laisser faire, l’individualisme et la loi de la jungle qui écrasent d’abord les plus faibles.

On n’a pas entendu ces perroquets de la pensée libérale se plaindre quand ce même État a répondu aux suppliques des institutions financières pour les sauver lors de la récente crise financière dont elles étaient elles-mêmes à l’origine. Ni non plus quand il transfère davantage de valeur issue du travail vers le capital avec les exonérations fiscales et sociales diverses ou des mécanismes comme le CICE ou le pacte de solidarité du précédent quinquennat qui pourtant n’ont pas créé les emplois promis.

Cette rengaine lancée la semaine même où la majorité de nos concitoyens protestaient contre le rabotage de l’aide personnalisée au logement ne doit évidemment rien au hasard. Le projet des libéraux droitiers est de détruire jusqu’à l’idée de « biens communs », voire de l’organisation des sociétés à partir de la justice et de la solidarité.

Il n’est pas question ici de défendre ce qui existe, d’approuver la manière dont l’argent public est utilisé pas plus que l’injustice fiscale, autant d’enjeux qui appellent de profondes transformations progressistes. Mais elles ne pourraient voir le jour si nous laissions l’idéologie libérale transformer la participation de chacune et de chacun au bien commun, la cotisation ou l’impôt en « prélèvements » et en « charges ». C’est l’inégale répartition des richesses, c’est l’injustice, c’est l’État de moins en moins social qui produisent des laissés-pour-compte que nous combattons. Suivre les officines de la pensée libérale voudrait dire moins d’infirmières pour soigner tout le monde dans des hôpitaux publics, pas d’enseignants pour éduquer, former nos enfants, plus de sapeurs pompiers pour aller c

ombattre les feux de forêts ou pour se porter au devant d’un accident de la route, moins de magistrats pour rendre la justice, de policiers pour assurer la sûreté et moins de routes, moins de trains, moins de théâtre, d’écoles de musique ou de clubs de sport.

Laisser prospérer cette folle idée selon laquelle les salariés et les entreprises ne travaillent pas pour eux quand une partie de la valeur créée ou du salaire ne sert pas à la société commune est extrêmement dangereux. Certes, elle permet à ses promoteurs de se dispenser de poser la question cruciale de l’augmentation des salaires en ouvrant la voie à la grande béance des inégalités, à la destruction définitive d’un projet de nouveau contrat social et de nouveau pacte républicain.

Ce dernier devrait porter un processus de justice fiscale et sociale, la lutte contre l’évasion fiscale qui représente un manque à gagner de 80 milliards d’euros pour notre pays, 1000 milliards pour l’Union européenne. On parle bien peu d’un prélèvement privé, celui des taux d’intérêts bancaires qui selon leur niveau sont bien une entrave à l’investissement et à la satisfaction des attentes des particuliers. Or ces taux de prélèvements enrichissent les banques et les fonds financiers. Ils handicapent d’autant le développement des entreprises qui dans ces conditions réduisent les rémunérations du travail ou l’emploi.

En vérité, il y a bien une « libération » à obtenir : celle du carcan vorace de l’argent-roi contre nos concitoyens, de leurs biens publics, du travail, de la production et de la consommation. Telle serait la voie pour concilier le mieux vivre, le projet individuel de chacun avec un grand projet commun de vie en société susceptible de remobiliser nos concitoyens.

 

20:59 Publié dans Cactus, Economie, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : impôts, libération, économie, manipulation | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | | Pin it!

01/08/2017

Une journée ordinaire sans eau et sans électricité à Gaza

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Témoignage de Ziad Medoukh Professeur de français, à l'université Al-Aqsa Gaza Palestine

C'est difficile pour moi citoyen palestinien de Gaza de décrire en deux ou trois pages la situation actuelle dans notre région abandonnée. Une situation catastrophique à tous les niveaux qui s’est aggravée récemment, notamment, avec la crise de l’électricité et ses conséquences dans tous les secteurs vitaux dans cette région sous blocus israélien depuis plus de dix ans.

Mais je vais essayer le plus succinctement possible de narrer une partie de mon vécu pendant des jours et des jours où Gaza était dans le noire total.

Actuellement, nous avons le droit à trois ou quatre heures d’électricité par jour, c’est insuffisant, mais on n' a pas le choix, on s’adapte avec cette situation même insupportable .

Je ne vous cache pas que, je me demande toujours, ainsi que tous les Palestiniens de Gaza: nous sommes nous un peuple anormal pour supporter cette situation inacceptable et cette souffrance qui dure et qui dure , et je me pose souvent les même questions : pourquoi nous à Gaza ? Pourquoi le monde officiel ne bouge-t-il pas? Et jusqu’à quand durera notre souffrance ?

Nous avons vécu des journées terribles dans la moitié du mois de juillet 2017, avec seulement une ou deux heures d'électricité par jour, et quelques fois, deux ou trois jours sans électricité et sans eau.

La crise a commencé en avril dernier, avec la décision israélienne de réduire la quantité d'électricité qui entre la bande de Gaza. Nous sommes passés de huit heures à quatre heures par jour, puis deux heures dès le début du mois de juillet.

Cette crise nous rappelle les événements tragiques de l'été 2014 vécus par la population civile de Gaza, même sans bombardements et sans bombes.

Ce qui aggrave notre souffrance c'est ce silence complice du monde officiel , la chape de silence que les médias entretiennent, et l'indifférence totale des organisations des droits de l'homme qui n'arrivent pas à condamner cette ignominie.

C'est vrai, notre volonté remarquable et notre patience extraordinaire, mais surtout notre adaptation avec ce contexte très difficile est un aspect très positif qui nous aide à supporter cette souffrance. Mais notre situation est de plus en plus délicate dans la bande de Gaza, une région occultée et laissée à son sort par une communauté internationale officielle sourde à nos souffrances!

Pour moi, dans ce contexte particulier, et comme deux millions de Palestiniens, nous avons vécu des jours et des jours très longs sans eau et sans électricité. J’essaie de faire mon devoir, d’envoyer des nouvelles au monde francophone, je résiste par les témoignages et le partage de notre vécu, même si difficile de répondre à tous les messages qui proviennent de beaucoup d'amis et de solidaires, car je tiens beaucoup à la solidarité internationale et le soutien indéfectible de ces solidaires de bonne volonté.

Pendant ces jours terribles, nous étions tous à Gaza sous pression, personnellement, je passais davantage de temps à mon travail à l’université. Car elle dispose d’un générateur, et durant ce temps, j’étais obligé de faire toutes les tâches de mon travail ,car chez moi, la batterie rechargeable a besoin de huit heures minimum par jour pour fonctionner. Mais avec deux heures, elle tombe souvent en panne, et pour la réparer ou en acheter une autre, qu'il faut charger, on a besoin de huit heures par jour.

Parmi les conséquences graves de cette crise, c’est le secteur de l’eau qui a été le plus touché. Ici tous les puits d'eau ont besoin d'un courant électrique pour remplir nos réservoirs qui se trouvent sur le toit de nos maisons. Pour que l'eau arrive dans les robinets à partir des réservoirs, on a besoin d'électricité. Le problème étant que parfois, même pendant le retour du courant électrique, l’eau était coupée!

Il nous est arrivé de rester plus de trois jours sans eau, inimaginable! Dans ce cas, on était obligé d'acheter de l’eau potable pour l’utilisation quotidienne. Auparavant, on achetait l’eau potable pour boire, car l’eau du robinet dans tous les foyers de Gaza n’est pas potable

On est obligé à s'adapter avec cette nouvelle situation, et il y a eu un changement dans les habitudes: par exemple on achète la nourriture au jour le jour, et on ne met rien dans les réfrigérateurs , souvent vides, on a envie de boire de l'eau fraîche avec cette vague de chaleur......mais en vain!

On ne dort pas assez, il fait très chaud, les ventilateurs et les climatiseurs ont besoin d’électricité pour fonctionner, tout est paralysé à Gaza.
Vous n'imaginez pas la joie de toute la famille, quand revient le courant électrique à n’importe quel moment du jour ou de la nuit. A n'importe quel moment, le retour du courant est une fête, tout le monde se réveille, soit pour faire fonctionner les appareils électroménagers, pour charger les portables, soit suivre les nouvelles, utiliser internet et les réseau sociaux! Dans notre contexte d’isolement, nous voulons garder le contact avec le monde!

Quand le courant électrique revient, à n’importe quel moment de la journée, le matin, le soir, à l’aube, même à 2h ou 3h du matin, un état d’urgence est décrété chez moi: personne dans la maison n’a le droit de me parler ou de me demander quoi que ce soit. La priorité est d’envoyer les nouvelles de Gaza aux amis solidaires et aux associations de soutien à la cause palestinienne. J’ai dû laissé tomber beaucoup d’obligations familiales, car je suis convaincu de l’importance de cette solidarité internationale. Je veux informer sur notre quotidien ,je n’avais pas le temps de m’occuper de mes enfants et de ma famille, ils n'osent pas me parler quand l'électricité revient!

J'ai de la peine pour mes enfants, les pauvres, ils ne vivent pas une vie normale. Pas de loisir, pas de vacances, ni de plage. La plupart des journées, ils sont dans leurs maisons ou devant leurs immeubles pour jouer et passer le temps. Bien que leur vacances scolaires aient commencé depuis deux mois, nous n'avons passé aucun jour sur la plage à cause de la pollution de la mer à Gaza.
Un aspect remarquable, est la solidarité familiale et sociale, les voisins s'entraident énormément pour fournir de l'eau, ou recharger les lampes pour les autres.

Le problème dans ce contexte : vous ne pouvez rien faire devant cette injustice, notre impuissance devant de telles souffrances, nous n’avons pas d’autre choix que de supporter et de résister en attendant un changement.

Le sentiment de l'enfermement et de l’isolement est un sentiment terrible! Et les Palestiniens de Gaza sont les mieux placés pour sentir ce sentiment , eux les enfermés dans leur prison à ciel ouvert depuis plusieurs années.

Le seul responsable de notre souffrance est l’occupation israélienne qui vise à briser la volonté remarquable et la patience extraordinaire de cette population civile de Gaza! Une population résistante et attachée à sa terre malgré toutes les mesures atroces de l’occupation contre la bande de Gaza.

On ne peut pas accuser les dirigeants palestiniens de Gaza ou de Ramallah d’avoir un rôle de responsabilité dans cette crise d’électricité, même si la division est une honte, car les deux sont impuissants et leur pouvoir sous occupation est illusoire.

Notre contexte est comme un verre où l’eau se mélange au sel comme pour donner un sens encore à l’espérance, qui nous rend forts comme le roc sur cette terre aux mille et une meurtrissures.

Les Palestiniens de Gaza sont privés de liberté sauf de leur liberté de penser. Leur seul droit est de respirer l'air souvent pollué par l'odeur des bombes de l'occupant.

En dépit de notre vécu tragique pendant cette période où Gaza a supporté l’insupportable, ce qui nous soulage est cette mobilisation et cette solidarité civile et populaire partout dans le monde avec la population de Gaza contre le blocus israélien. Nous sommes quasiment la seule région dans le monde en souffrance permanente; pour laquelle les solidaires organisent des manifestations et des rassemblements de soutien, ça calme notre colère

On peut dire qu’aucun objectif israélien de cette punition collective n' a été réalisé, notre population digne est toujours débout.

Après tout, malgré toute cette souffrance, mon message est toujours simple : c’est un message d’espoir au cœur de la douleur.

Je suis plus que jamais déterminé à continuer ma résistance quotidienne dans la bande de Gaza, comme ma population civile, à travers l’éducation et le travail avec mes jeunes pour une ouverture sur le monde. Avec le soutien des solidaires de notre cause juste, pour une Palestine de liberté et de paix durable, une paix qui passera avant tout par la justice.

27/07/2017

La journée à 1 million d’euros de Muriel Pénicaud

muriel pénicaud stocks options danone

L'Humanité, Sébastien Crépel

80 c’est, en années de smic net, l’équivalent de la plus-value touchée par Muriel Pénicaud sur la revente de ses stock-options.80 c’est, en années de smic net, l’équivalent de la plus-value touchée par Muriel Pénicaud sur la revente de ses stock-options

Muriel Pénicaud a réalisé en 2013 une plus-value de 1,13 million d’euros sur ses stock-options en tant que dirigeante de Danone, profitant de la flambée en Bourse qui a suivi l’annonce de 900 suppressions d’emplois du groupe en Europe.

Plus d’un million d’euros de plus-values boursières par un simple jeu d’écritures : c’est la somme gagnée en une journée par Muriel Pénicaud comme directrice générale des ressources humaines (DGRH) chez Danone, le 30 avril 2013. Et cela alors que le groupe s’apprêtait à supprimer 900 emplois de cadres, dont 230 en France. L’information fait tache sur le CV de la ministre du Travail, au moment où celle-ci défend mordicus au Sénat l’idée que faciliter les licenciements sera in fine bénéfique à l’emploi et donc aux salariés.

Selon les comptes officiels de Danone pour l’année 2013 que l’Humanité a consultés, Muriel Pénicaud a en effet perçu un gros paquet de stock-options pour ses états de service au comité exécutif du groupe alimentaire. Enregistrée par l’Autorité des marchés financiers à la date du 30 avril 2013, la transaction porte sur un lot de 55 120 actions acquises à une valeur de 34,85 euros l’unité, bien en dessous du cours de l’action ce jour-là, et revendues aussitôt pour l’essentiel (52 220 actions) à 58,41 euros l’unité, au cours du marché. Soit 1 920 932 euros à l’achat, et 3 049 966,54 euros à la revente. Bilan de l’opération : une plus-value immédiate de 1 129 034,54 euros, non comptées les 2 900 stock-options restant alors en sa possession

La cagnotte boursière de 1,13 million d’euros de Muriel Pénicaud n’est pas tombée du ciel. Pour réaliser un tel bénéfice de près de 60 % sur sa mise de départ, la ministre a profité de la remontée de l’action qui a suivi l’annonce d’un plan de restructuration du groupe, faisant grimper le cours dans les semaines qui ont précédé la transaction. Dans le cadre d’« économies de fonctionnement » de 200 millions d’euros décidées en 2012, la direction de Danone a, en effet, annoncé, le 19 février 2013, la « suppression d’environ 900 postes managériaux et administratifs répartis dans 26 pays européens ».

Le titre Danone s’envole à 55-60 euros en avril-mai

Un choix immédiatement salué par les marchés financiers par un bond du titre, comme l’a relevé toute la presse à l’époque. « La Bourse achète ce discours : l’action prenait presque 5 % mardi matin (19 février 2013 – NDLR) en début de séance », soulignait ainsi le Figaro. « À court terme, des destructions d’emplois peuvent remonter le cours de l’action et vont donc bénéficier au capital, contre la production et la valeur ajoutée », confirme l’économiste spécialiste des entreprises qui siège au Conseil économique, social et environnemental (Cese), Frédéric Boccara, membre des Économistes atterrés et de la direction du PCF.

À partir de cette date, le cours de l’action marque en effet une césure nette : d’une cotation située au-dessous de 52 euros l’action avant l’annonce du plan de destruction d’emplois, le titre Danone s’envole à 55-60 euros en avril-mai, accélérant plus vite que la moyenne du CAC 40, pour ne plus redescendre avant octobre 2013. Tout bon pour Muriel Pénicaud, qui fait valoir ses stock-options pile à l’expiration du délai de garde de quatre ans exigé par Danone pour en bénéficier.

Quand il procède à cette restructuration, le groupe est pourtant loin d’être au bord de la faillite. Danone vient au contraire de battre le record de son chiffre d’affaires, passant pour la première fois en 2012 le cap des 20 milliards d’euros dans le monde, en hausse de 8 % en un an. Et les perspectives pour 2013 sont bonnes, avec une nouvelle progression escomptée d’au moins 5 %. Mais, pour le PDG du leader mondial des produits laitiers et numéro deux des eaux en bouteilles, Franck Riboud, la marge avant impôts de Danone, déjà très élevée à 14,18 %, soit près de 3 milliards d’euros, est encore insuffisante. L’Europe montre des signes de fléchissement, avec une baisse des ventes de 3 % et une marge de « seulement » 15,66 %, supérieure aux autres continents, mais en recul par rapport à 2011 (17,37 %). Cela, le PDG de Danone, qui vient de proposer un dividende en hausse de 4,3 % à ses actionnaires, ne le supporte pas : « C’est une équation qui n’est pas pérenne, et une situation que nous allons surmonter », grâce à « une adaptation de nos organisations » visant à « redonner de la compétitivité et de l’efficacité en Europe », déclare-t-il. L’idée d’un plan de suppression d’emplois est lancée, à la grande joie de la Bourse… et du porte-monnaie de la future ministre du Travail.

D’autant que celle-ci n’a pas seulement fait une affaire à la revente. Le prix d’achat de ses actions s’est aussi avéré ultrarentable : à 34,85 euros l’unité, elle en a fait l’acquisition au cours proche du plancher de ces dix dernières années. Le mécanisme des stock-options est ainsi fait que le prix d’acquisition est fixé lors de l’attribution des actions plusieurs années avant que son bénéficiaire ne les achète réellement : on parle d’« option d’achat ». Quand vient le moment pour le haut dirigeant de « lever l’option », c’est-à-dire de débourser l’argent pour les acquérir, il le fait au prix fixé à l’avance. Pour Muriel Pénicaud, cela s’est très bien agencé : ses stock-options, et le prix qui leur était attaché, lui ont en effet été attribuées le 23 avril 2009, juste après l’effondrement des valeurs boursières du CAC 40 à la suite du krach de 2008-2009. Entre le 8 janvier 2008 et le 19 mars 2009, l’action Danone a perdu ainsi près de la moitié de sa valeur, passant de 63,71 euros à 33,67 euros. À quelques mois près, la ministre, qui siégeait au comité exécutif du groupe en tant que DGRH depuis mars 2008, aurait peut-être dû mettre ses stock-options à la poubelle !

C’est en effet l’autre avantage de ce mode de rémunération prisé des PDG, à l’instar de ceux de Danone ou de Renault : comme il s’agit d’une « option d’achat », le dirigeant ne court aucun risque, puisqu’il peut tout simplement renoncer à acheter s’il constate que l’action a perdu de sa valeur. Ici, rien de tel : si la terrible crise économique a fait des perdants, elle a aussi fait des gagnants et Muriel Pénicaud en fait partie. La chance lui a souri d’ailleurs jusqu’au bout, puisqu’elle est l’une des dernières dirigeantes de Danone à avoir bénéficié de stock-options avant que l’entreprise ne renonce à ce type de rémunération en 2010, au profit d’attributions d’actions liées à la performance.

Contacté à plusieurs reprises par l’Humanité, le cabinet de la ministre du Travail n’a pas souhaité donner suite à nos demandes de réactions de sa part. Quant à Danone, l’entreprise s’est contentée de confirmer nos informations sur les stock-options dont a bénéficié son ex-DGRH, sans dévoiler d’autres éléments de rémunération.

« Muriel Pénicaud n’a rien à voir avec le monde du travail »

Reste que cela écorne sérieusement le portrait de la ministre, dépeinte dans la presse comme une DRH attentive à la démocratie sociale et au facteur humain. « C’est quelqu’un qui se prétend salarié mais qui se situe objectivement du côté des intérêts du capital, et qui s’est trouvé à ce titre directement intéressé aux destructions d’emplois, estime l’économiste Frédéric Boccara. Elle a peut-être une fibre sociale quand elle va à confesse, mais elle n’a rien à voir avec le monde du travail, celui des salariés, mais aussi celui des artisans et même des petits patrons. » Lors de sa nomination, la fédération CGT de l’agroalimentaire avait d’ailleurs dénoncé les « bons et loyaux services » de l’ex-DGRH qui a « estampillé » le plan social de 2013 déguisé en « départs volontaires », selon le syndicat, une « véritable Bérézina pour les salariés ».

Muriel Pénicaud, qui a cumulé les rémunérations de Danone avec celles perçues au conseil d’administration d’Orange (58 000 euros de jetons de présence perçus en 2013 pour l’exercice 2012) et a occupé les fonctions de directrice générale adjointe de Dassault-systèmes et d’administratrice de la SNCF, ne s’est d’ailleurs pas appliquée à elle-même la recommandation d’un rapport qu’elle a cosigné en 2010, et qui préconisait de prendre en compte la « performance sociale » dans la rémunération variable des dirigeants d’entreprise, plutôt que la seule « performance économique ». En l’occurrence, concernant les stock-options, l’indexation sur le seul cours de la Bourse.

Un amendement propose d’interdire toute suppression d’emploi boursière

Mais le plus embarrassant est sans doute la réponse faite le 12 juillet en présence de la ministre par le rapporteur de la loi travail bis, le député macroniste Laurent Pietraszewski, à un amendement de Sébastien Jumel (PCF). Ce dernier proposait d’interdire « toute suppression d’emploi (…) lorsque l’entreprise a distribué des dividendes ou des stock-options ou des actions gratuites ». Soit exactement ce qui s’est passé chez Danone en 2013. « Nous sommes tous au clair là-dessus, lui a répondu le rapporteur en motivant le refus de l’amendement. Nul ne souhaite en effet qu’une entreprise qui réalise un bénéfice ou distribue des dividendes à ses actionnaires puisse en même temps licencier en toute impunité des salariés pour des raisons d’opportunité financière. » Et la ministre d’ajouter dans l’Hémicycle : « Même avis »…

Des fermetures d’usines très profitables aux actionnaires

Après le plan de restructuration de 2013, le groupe a annoncé en juin 2014 la fermeture pour la mi-2015 de ses usines de Casale Cremasco en Italie, de Hagenow en Allemagne et de Budapest en Hongrie, entraînant la suppression de 325 postes. La faute à une « baisse significative des ventes » en Europe qui a entraîné des « situations de surcapacité locale » de production, a expliqué la direction. En revanche, dans le même temps, la profitabilité de la branche Europe de Danone s’est spectaculairement redressée, passée de 14,42 % de taux de marge avant impôt en 2013 à 17,26 % en 2015, tirant vers le haut toute l a rentabilité du groupe au niveau mondial. Les dividendes servis aux actionnaires ont suivi le même chemin, passant de 1,45 euro par action pour l’exercice 2013 à 1,60 euro en 2015 (+ 10,3 %).

journaliste

25/05/2017

WAT UNESCO EVRY 2017

 

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Du 15 au 24 mai, la ville d’Evry a accueilli des architectes, des urbanistes, des paysagistes et des sociologues du monde entier pour réfléchir ensemble aux futurs aménagements du centre-ville.

Ce projet nommé, Wat Unesco, est le résultat d’un partenariat entre avec la Chaire Unesco en paysage et environnement de l’Université de Montréal (CUPEUM), la ville d’Evry, l’université Evry-Val d’Essonne et l’école spéciale d’architecture de Paris.

Avant Evry, Binzhou en Chine ou encore Sao Paolo au Brésil ont, notamment, déjà bénéficié de la même initiative.

Alors que le centre-ville est en plein développement, avec la sortie de terre de nouveaux logements, la création d’un marché il y a deux ans ou encore la construction d’une école, inaugurée en septembre prochain, la Ville a pris un temps d’avance.

L’objectif de ce partenariat était de concevoir l’aménagement urbain des décennies à venir en imaginant des projets de requalification de certains sites significatifs.

Issus de plus de 20 institutions universitaires, les participants à ce colloque agissent pour résoudre les problèmes urbains en lien avec les grands enjeux sociaux, culturels et environnementaux. L'atelier organisé à Evry a visé à compléter les visions d’aménagement en cours dans le centre-ville.

wat unesco.jpgCinq groupes d'étudiants venus de Tunisie, du Canada, d'Italie, de France ont proposé dans ce cadre des projets innovants et ont participé à un concours fraternel.

Cette rencontre qui c'est déroulé a été une chance pour la ville d'Evry de bénéficier ainsi d’une vision mondiale de l’aménagement, et d'un laboratoire d’idées multi-culturel. 

Reportage exclusif réalisé par Radio Evry pour Chansons Rouges Mosaik Radio avec entretien avec Elodie François Maire adjointe à l'urbanisme d'Evry, et les lauréats de ce concours qui ont obtenu le premier prix : CLIQUEZ SUR CETTE LIGNE OU SUR LA PHOTO POUR ECOUTER CE REPORTAGE