07/02/2010
Haïti. Marcel Dorigny « Aux origines de la misère haïtienne »
Le terrible séisme qui a frappé Haïti, le 12 janvier dernier, a exposé au monde entier la misère quotidienne qui sévit dans ce pays depuis des siècles… Et pourtant, il s’agit de la première nation à s’être affranchie de l’esclavage et à avoir acquis sa souveraineté, il y a deux cents ans. Comment expliquer qu’une telle situation de pauvreté et d’instabilité persiste dans cette île ?
Marcel Dorigny. Pour comprendre les origines de la misère à Haïti, il faut revenir aux origines de son indépendance. À la fin du XVIIIe siècle, Haïti était l’ancienne colonie française de Saint-Domingue, la plus riche et la plus prospère, au moment de la Révolution française. La Saint-Domingue française concentrait le nombre le plus important d’esclaves de toute l’Amérique ! Elle possédait une main-d’œuvre composée de 550 000 esclaves – ce qui est démesuré pour cette petite île. Dans les dix années précédant la Révolution française, quand la traite négrière a atteint son apogée, 40 000 esclaves débarquaient chaque année sur l’île. Ainsi environ un esclave sur deux qui quittait les côtes d’Afrique était vendu à Saint-Domingue.
C’est énorme… Que faisaient ces esclaves dans cette colonie ?
Marcel Dorigny. Cette main-d’œuvre servile produisait essentiellement du sucre. De ce fait, cette colonie était le premier producteur mondial et la France en tirait évidemment des bénéfices substantiels en exportant cette denrée à travers toute l’Europe. Mais, à entasser autant de personnes pour « travailler » dans des conditions aussi effroyables – l’espérance de vie d’un esclave était au plus de quinze ans sur les exploitations –, cette « machine » à produire du sucre a généré tout le contraire de ce que les colons espéraient : la révolution des esclaves. Le point de départ d’Haïti, c’est donc l’insurrection générale des esclaves.
Dans quel contexte s’est produite la révolution des esclaves ?
Marcel Dorigny. On ne peut séparer cette révolution de la Révolution française. Sans 1789, il est probable que ce soulèvement des esclaves n’aurait jamais été victorieux, car la Révolution française a déstabilisé la société coloniale. Puis les idéaux de la Révolution, portés à leur paroxysme – puisqu’il n’avait jamais été question d’abolir l’esclavage – ont favorisé l’abolition de l’esclavage par les esclaves eux-mêmes, les armes à la main. Cette situation est unique au monde. Les autres formes de suppression de l’esclavage ont été accordées, en quelque sorte, par les grandes puissances, certes de façon plus ou moins forcée par les situations géopolitiques et sociales dans leurs colonies et la diffusion des idéaux abolitionnistes dans les métropoles. Or, Haïti est né d’une première guerre des esclaves, puis d’une seconde, la même en quelque sorte, lorsqu’en 1802 Napoléon a voulu rétablir l’esclavage dans les colonies. Plus de 40 000 soldats ont alors été envoyés à Saint-Domingue pour rétablir l’esclavage mais, vaincus, ils ont été obligés de capituler après la défaite de Vertières, le 18 novembre 1803. C’est ainsi que la République d’Haïti est née, le 1er janvier 1804, dans le contexte de la révolte des esclaves, pour l’abolition de l’esclavage par les esclaves eux-mêmes, d’une guerre de libération contre les troupes napoléoniennes. Cette indépendance acquise par les armes n’a été reconnue par la France qu’en 1825, sous la condition du paiement d’une indemnisation des colons français qui avaient perdu leurs propriétés. Ainsi, l’existence d’Haïti relève de conditions historiques particulières, dont les conséquences perdurent jusqu’à nos jours.
Justement, quel poids a joué la première dette d’Haïti, en 1825, dans son développement économique ?
Marcel Dorigny. La dette de 1825 a contraint Haïti à mettre le doigt dans l’engrenage de l’endettement international. En 1804, lorsque Haïti se proclame indépendant, personne ne reconnaît cette indépendance. De ce fait, en 1818, le président haïtien Alexandre Pétion propose lui-même d’indemniser les colons en échange de la renonciation définitive à l’île par la France ! En avril 1825, le roi de France, Charles X, décide de signer une charte de reconnaissance de l’indépendance d’Haïti. Enfin, plus exactement de la partie française de Saint-Domingue car le mot Haïti n’est pas écrit ; et en contrepartie, il exige le paiement d’une indemnité de 150 millions de francs or, une somme colossale. Craignant un débarquement militaire, le nouveau président d’Haïti, Jean-Pierre Boyer, accepte… Alors que, à l’époque – les Haïtiens n’en avaient pas conscience –, il aurait été impossible pour la France de recoloniser militairement l’île, elle n’avait ni les moyens, ni le soutien international pour le faire ! Ainsi, Haïti signe la charte de Charles X. C’était une somme démesurée que le pays devait payer en cinq ans, soit 30 millions par an. La première annuité a été payée dans les temps grâce à un emprunt international, mais ensuite Haïti n’a plus pu s’acquitter de sa dette.
Pourtant, Haïti a payé sa dette jusqu’au bout ; comment a-t-il fait dans ces conditions ?
Marcel Dorigny. En 1838, le gouvernement de Louis-Philippe a négocié avec Haïti deux traités séparés. Le premier reconnaissait l’indépendance d’Haïti, sans aucune condition ; le second était financier, et ramenait la dette à 90 millions de francs or payables sur trente ans. Donc tout aurait dû être réglé en 1868, mais, en fait, Haïti ne pouvait pas débourser une telle somme sur cette durée. Le pays a continué de payer la France en étant obligé d’emprunter, avec des intérêts, bien sûr, aux banques, dont la majorité étaient françaises ! C’est le serpent qui se mord la queue. Donc, la dette a perduré jusqu’en 1883, mais restait alors à régler les emprunts souscrits auprès des banques pour payer la France ; en 1915, quand les Américains ont débarqué à Haïti, le pays payait encore et toujours une dette extérieure.
Mis à part cette dette originelle colossale, en quoi les conditions de l’indépendance d’Haïti ont-elles influencé durablement l’évolution du pays ?
Marcel Dorigny. Quand Haïti devient indépendant en 1804, une structure étatique s’était déjà mise en place. Elle était aux mains d’une nouvelle bourgeoisie, constituée d’anciens libres de couleur, eux-mêmes propriétaires d’esclaves ayant basculé du côté de l’abolition, et de chefs militaires, officiers et généraux noirs, qui avaient joué un rôle déterminant dans la guerre d’indépendance. Or, le drame d’Haïti découle sûrement de cet éclatement de la société en deux. Puisque d’un côté, il y a la nouvelle classe dirigeante qui se partage le pouvoir, les richesses, les propriétés et continue de développer ses activités vers l’extérieur selon le schéma colonial qui avait fait la richesse de l’île. Son gouvernement ne fait que prolonger celui de la colonisation, même s’il est entre les mains d’anciens dominés. Et, d’un autre côté, il y a la masse des anciens esclaves et leurs descendants, ceux que l’on va appeler, dans le vocabulaire postcolonial, soit les « cultivateurs », soit les « Africains », ce qui est assez révélateur.
Quelle est la place de ces anciens esclaves dans ce nouveau contexte politique ?
Marcel Dorigny. Cette masse de la population va être obligée de travailler dans des conditions misérables dans les campagnes jusqu’à la fin du XXe siècle. C’est le phénomène que l’on appelle, pour reprendre le titre d’un important livre de Gérard Barthélemy, Le Pays en dehors. Une formule qui désigne la masse rurale pauvre, n’ayant pas accès à l’école, à l’alphabétisation, à la société urbaine, qui est celle de Port-au-Prince. Il y a d’un côté la « République de Port-au-Prince », de l’autre, « le pays en dehors », ceux qui sont à l’intérieur des terres, mais à l’extérieur de leur propre nation. Ces anciens esclaves refusent, dès le départ, de travailler contre salaire sur les plantations, où ils étaient esclaves précédemment… Or l’objectif des nouveaux dirigeants est de continuer la production sucrière pour l’exporter vers l’Europe et les grandes puissances ! C’est ainsi que démarre alors un processus essentiel pour comprendre Haïti : les anciens esclaves n’appliquent pas la loi qui les oblige à travailler et désertent les plantations pour aller s’installer dans les montagnes où ils défrichent les terres et créent une agriculture paysanne. Haïti est la seule société des Antilles où s’est constituée une véritable paysannerie.
Comment vivent alors ces nouveaux paysans ?
Marcel Dorigny. L’esclave haïtien, devenu paysan, s’installe avec sa famille sur une terre et la cultive pour subvenir à ses propres besoins. L’abolition de l’esclavage et de la colonie est synonyme pour cette masse rurale d’indépendance économique, d’autosubsistance. Les paysans ne produisent plus pour le marché, ou le moins possible. Ce système agraire unique a permis à la population de vivre pendant au moins un siècle et demi. Mais une croissance démographique extrême a engendré une surpopulation rurale telle que les paysans, devenus misérables avec leurs minuscules lopins de terre, ont dû fuir vers les villes. Or, l’infrastructure n’était pas pensée pour accueillir autant de personnes. Ils ont donc été obligés, pour une grande partie d’entre eux, de s’entasser dans des bidonvilles, et, pour d’autres, d’émigrer vers l’étranger. Le drame d’Haïti, c’est cette fracture dans la société entre une masse rurale misérable, à 80 % analphabète aujourd’hui, qui vit en dehors de la société, n’a pas accès à l’eau, aux soins, à l’école… et son élite dirigeante, branchée sur les grands réseaux mondiaux, qui a un pied aux États-Unis, au Canada, en France…
Quelles sont les autres conséquences de cette dichotomie entre l’élite et la masse rurale pour la situation politique du pays ?
Marcel Dorigny. La conséquence majeure c’est que, en Haïti, l’État n’existe quasiment pas. Certes, il y a un gouvernement, il y a même eu des gouvernements dictatoriaux et corrompus, au XIXe comme au XXe siècle, sous les Duvalier, puis Aristide, mais il n’y a toujours pas d’État : à savoir un État qui assure son rôle dans les domaines des infrastructures routières, des télécommunications, de l’assainissement, de l’électrification, et bien entendu des services publics pour la santé, l’école…
Doit-on compter, comme y a invité le premier ministre haïtien, Jean-Max Bellerive, sur le retour de la diaspora pour (re)construire l’État et le pays ?
Marcel Dorigny. En effet, on peut regretter la fuite des cerveaux. Une bonne partie des Haïtiens formés sont partis, sous les Duvalier et sous le régime d’Aristide, exercer leurs talents ailleurs, en raison d’insécurité quotidienne, de répression politique, mais aussi de mauvaises conditions de vie. Et quand on est parti, le retour est très difficile. Mais le problème est d’autant plus complexe que la diaspora est très utile à Haïti, car elle envoie beaucoup d’argent à la famille restée sur place. Ces capitaux envoyés par la diaspora représentent deux fois l’aide internationale, c’est énorme. On peut toujours inciter cette diaspora à revenir, mais on ne peut la contraindre ! Lors de la chute des Duvalier, en 1986, certains Haïtiens avaient choisi de rentrer pour contribuer à la reconstruction du pays, puis des troubles ont suivi et finalement la dérive du régime d’Aristide les a découragés. Alors la diaspora ne rentrera massivement que si les conditions s’améliorent vraiment, se stabilisent, et si elle peut bénéficier d’un bon cadre de vie. Mais, actuellement, la tendance est inverse : ceux qui le peuvent quittent Haïti. L’idéal serait que ceux qui sont partis reviennent construire leur pays, mais peut-on se mettre à leur place ? Il paraît plus crédible aujourd’hui de compter sur les 10 millions d’habitants présents – dont certains sont tout de même enseignants, médecins, ingénieurs – et sur l’aide internationale pour reconstruire l’État et le pays.
L’annulation de la dette d’Haïti, qui s’élève à plus de 1 milliard d’euros, ne fait-elle pas partie des solutions pour aider à sortir le pays de l’impass ?
Marcel Dorigny. C’est une question complexe. Haïti a toujours payé sa dette, c’est un pays solvable, ce qui lui permet de trouver des prêteurs, que ce soient des États ou des institutions internationales. Donc l’annulation de la dette pose un gros problème à moyen terme : un État dont la dette est annulée se voit considéré comme un État non solvable, or Haïti a besoin de beaucoup de capitaux pour se reconstruire. De plus, une partie de l’aide internationale s’effectuera sous forme de crédit ; donc, si on annule la dette d’Haïti, il lui sera très difficile de souscrire de nouveaux emprunts. Le premier ministre haïtien a d’ailleurs dit lors de la conférence de Montréal, le 25 janvier dernier, que l’annulation de la dette était certes utile mais qu’elle ne constituait pas la solution la plus favorable pour Haïti à long terme. Certes, cette solution paraît simple, mais il ne faut pas oublier qu’ensuite les bailleurs de fonds (États, grandes institutions internationales ou banques) hésiteront beaucoup à prêter.
Entretien réalisé par Anne Musso, pour l'Humanité
Les recherches de Marcel Dorigny portent principalement sur la place de l’esclavage dans les doctrines libérales du XVIIIe siècle et de la première moitié du XIXe siècle. L’historien a également travaillé sur les courants antiesclavagistes et abolitionnistes, de la Société des amis des Noirs (1788-1799) à la Société française pour l’abolition de l’esclavage (1834-1850) et sur les processus d’abolition de l’esclavage dans les colonies d’Amérique. Publications récentes : la Traite négrière coloniale (dir.), Paris, Éditions Cercle d’art, 2009 ; Atlas des esclavages. Traites négrières, sociétés coloniales, abolition de l’Antiquité à nos jours, avec Bernard Gainot, Paris, Éditions Autrement, 2006 (réédition en 2007) ; Haïti, première République noire (dir.), Paris, Société française d’histoire d’Outre-mer, 2004
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04/02/2010
LE DESSIN DU MOIS DE FEVRIER
14:41 Publié dans Le dessin du mois | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : travail, dimanche | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |
25/01/2010
RETRAITES : UN SONDAGE EN CHASSE UN AUTRE
Souvenez vous, dans une récente contribution publiée par Agoravox et qui a suscité un certain intérêt avec près d’une centaine de réactions de votre part, j’avais indiqué à propos du sondage de l’IFOP diffusé par le Journal du Dimanche, qu’il était orienté et qu’il participait à un lancement d’une campagne gouvernementale pour imposer le recul légal du départ à l’âge à la retraite.
L’actualité politique m’a donné raison. La succession dans les médias des hommes politiques de Droite et Socialistes se saisissant des résultats de ce sondage pour justifier cette réforme a été hallucinant.
Pourtant un sondage de CSA, diffusé par le journal l’Humanité du 25 janvier de cette année, contredit largement celui de l’institut de sondage dirigé par Mme Parisot, sans pour cela d’ailleurs avoir les mêmes échos médiatiques ce qui démontre maintenant qu’au sondage orienté s’ajoute aujourd’hui celui de la manipulation de l’opinion publique.
Dans la contribution publié par Agoravox j’avais dit pour rappel :
« L’IFOP a posé une question dite fermée où de toute façon votre réponse est totalement orientée.
La question : Et si vous aviez le choix (les choix imposés de fait par l’institut), concernant votre retraite, préféreriez vous… ?
- cotiser davantage pour partir à la retraite le plus tôt possible…41 %
- Travailler le plus longtemps possible pour garantir une retraite satisfaisante…34 %,
Soit un total de 75 % (91 % pour les plus de 65 ans toujours non concernés mais qui gonflent ces résultats).
La dernière proposition est la suivante :
- Partir le plus tôt possible quitte (bien sûr) à avoir une retraite moindre…23 %.
La seule question qui n’est pas posée et qui bien sûr aurait modifiée l’ensemble des réponses.
- faire cotiser les revenus du capital au même titre que celui des salariés pour maintenir le départ à l’âge de la retraite à 60 et permettre des retraites satisfaisantes pour tous. »
CSA a justement posé cette question et le schéma des réponses a alors était complètement bouleversé.
La question précise posée par CSA était la suivante : « Parmi ces mesures, laquelle ou lesquelles (deux réponses étaient possibles) vous paraissent elles les plus efficaces pour garantir le financement des retraites ? , (entre parenthèse la réponse donnée à l’IFOP) :
- Mettre à contribution les revenus financiers : 50 % (l’IFOP n’a pas posé la question),
- Augmenter les cotisations : 31 % (41 %),
- Allonger la durée des cotisations : 29 % (41 %),
- Diminuer le montant des pensions : 7 % (23 %).
Une autre série de réponses de ce sondage attire également l’attention. A la question suivante posée par CSA « Si le choix ne dépendait que de vous, à quel âge partiriez vous à la retraite ? ». La réponse en moyenne est de 59 ans, elle était de 60 ans en 2006.
L’augmentation de la pénibilité, du stress, les inquiétudes sociales, la montée du chômage expliquent sans doute en partie ces réponses.
Le débat sur les retraites est loin d’être clos. Il n’est pas que purement comptable (le recul du départ à l’âge à la retraite selon les normes actuelles imposées serait alors d’au moins 67 ans comme le dit très justement à ce propos le MEDEF), il est aussi celui du choix d’une civilisation, d’un choix de justice sociale, c'est-à-dire finalement celui avant tout d’un choix politique..
Diaz Diego, Maire adjoint d'Evry, délégué aux Seniors et à 'Intergénération
13:40 Publié dans Actualités | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : retraites, sondage, propositions, csa, ifop | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |
22/01/2010
INFORMATIONS ET MEDIAS
Peut-on avoir globalement confiance dans la qualité de l’information dispensée par les médias tout en doutant de l’indépendance de ceux qui y travaillent, à savoir les journalistes ? Pour paradoxale qu’elle apparaisse, la réponse des Français serait pourtant positive.
La dernière livraison du sondage annuel proposé par La Croixdepuis 1987 montre en effet que beaucoup accordent dans l’ensemble un crédit constant, ou même en légère augmentation, aux « nouvelles » quotidiennement délivrées dans la presse écrite, à la radio et, dans une moindre mesure, à la télévision. Les journaux et la radio accroissent légèrement leur capital de confiance, les ondes restant le média le plus consciencieux aux yeux du public.
Journalistes jugés sensibles aux pressions
Mais, parallèlement, les journalistes sont jugés sensibles aux pressions des partis politiques et du pouvoir (avec 66 % de réponses en ce sens, soit une augmentation de 5 points par rapport à l’an dernier) comme à celles de l’argent (60 %, soit un point de plus). Pour résumer : la fiabilité comme apanage des institutions, la dépendance comme faiblesse des personnes…
Certes, une enquête de ce type se fonde sur des pratiques et impressions parfois diffuses. Le lien entre tel patron de presse ou journaliste et tel responsable public (que l’on pense, par exemple, au couple Christine Ockrent-Bernard Kouchner, celle-ci étant directrice générale de France Monde qui coordonne l’audiovisuel extérieur de la France, ou aux liens amicaux entre Martin Bouygues, propriétaire du groupe TF1, et Nicolas Sarkozy) marque davantage l’opinion que les relations, même étroites, entre entreprises médiatiques et entités politiques ou économiques.
Le cas d’Internet se distingue des supports traditionnels
Ainsi la défiance est plus immédiate parce que plus incarnée à l’égard d’une « personne physique » à la notoriété identifiée que d’une « personne morale »… C’est vraisemblablement pour cela que la télévision reste moins bien notée que la radio et la presse écrite. L’impact de l’image et ses tendances plus manifestes à la « peopolisation » compromettant ses prétentions au sérieux et à l’objectivité informative.
Dans ce paysage, le cas d’Internet se distingue des supports traditionnels. 35 % des personnes sondées font confiance à l’information en ligne (contre seulement 23 % il y a cinq ans). Toutefois 30 % s’en défient, à savoir 6 % de plus que l’an dernier. Alors que, dans le même temps, plus de 22 millions d’internautes ont consulté un site d’actualité, adossé ou non à un média traditionnel (chiffre Médiamétrie pour octobre 2009).
Ce fabuleux Internet, avec sa multitude de sites dont l’origine et la compétence restent complexes à identifier, provoque-t-il dans l’opinion une réserve à laquelle échappent les médias « historiques » ? Question cruciale pour les sondages à venir, tandis que, d’ores et déjà, 77 % des Français estiment que les sites d’information gratuits sur la Toile seront « davantage utilisés dans dix ans »…
Emmanuelle GIULIANI La Croix |
13:39 Publié dans Connaissances | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : informations, médias, journalistes, sondage | | del.icio.us | Imprimer | | Digg | Facebook | |