14/09/2012
Interview Entretien avec la députée du Front de gauche, Marie George Buffet
Alors que s'ouvre la Fête de l'humanité, Marie-George Buffet, députée Front de gauche de Seine-Saint-Denis, ancienne secrétaire nationale du PCF, revient sur les premiers mois du gouvernement Ayrault et le traité budgétaire européen.
Vous étiez ce vendredi matin au côté de salariés de l’usine PSA d’Aulnay (Seine-Saint-Denis). Dans ce type de dossier, que peut le politique ?
Le politique peut beaucoup. Une proposition de loi contre les licenciements boursiers avait été votée par les socialistes au Sénat [...] mais rejetée à quelques voix), il faut représenter ce texte tout de suite à l’Assemblée. Dans le cas de PSA, qui a distribué des centaines de millions de dividendes à ses actionnaires tout en prévoyant de supprimer des milliers d’emplois, cela permettrait de freiner les choses. Il faut également que les salariés soient davantage associés aux choix stratégiques des entreprises, pour privilégier les investissements industriels à la rémunération de la finance. La fiscalité, aussi, doit servir de levier dans ce sens.
Êtes-vous déçue par l’action du gouvernement Ayrault?
Ce n’est pas une question de déception. Mais les Francais n’ont pas élu un gouvernement de gauche pour qu’il mène la politique actuelle. Tous les économistes, y compris plusieurs Nobel, disent que l’austérité mène à la dépression et au chômage de masse. Hollande et Ayrault se trompent de politique. Et si nous ne sommes pas dans l’opposition, nous combattrons toutes les politiques qui nous mènent dans le mur.
Soutenez-vous une mesure comme les emplois d’avenir, votée cette semaine à l'Assemblée?
Oui, mais il s’agit d’une demi-mesure: ça s’adresse à un public très restreint, les jeunes, et ce sont des contrats de trois ans, quasiment sans pérennisation alors que c’est justement tout l’enjeu. Nous avons réussi à amender un peu le texte, mais ce n’est pas suffisant. D’autant que ces contrats concernent les collectivités locales, dont les dotations sont gelées, et les associations, alors que 22 000 emplois associatifs ont été supprimés en 2011.
Le 30 septembre, le Front de gauche appelle à une grande manifestation contre le traité européen...
Ce traité, c’est l’austérité pour tous les Etats de l’Union européenne. C’est donc la récession généralisée. Nous nous battrons à l’Assemblée et au Sénat mais, comme le dit Pierre Laurent, c’est aussi à chacun de se mobiliser car la bataille va être rude. Le temps joue contre nous et le calendrier est serré. Il faudrait bien sûr que le peuple soit consulté par référendum, mais ceux qui nous gouvernent ont peur de l’avis du peuple. Souvenez-vous de 2005... A nous d’expliquer aux Français, qui sont pris par des luttes quotidiennes pour sauver leurs emplois, que ce traité les concerne directement. La mobilisation du 30 septembre doit envoyer un signal fort et servir de point d’appui pour la suite.
19:19 Publié dans Economie, Entretiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fête de l'huma, marie geoge buffet, front de gauche | |
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05/09/2012
QUEBEC : LES LIBERAUX BATTUS !
Les indépendantistes et les libéraux sont presque à égalité en nombre de voix, obtenant entre 31% et 32% des suffrages.
Mais, en raison du système uninominal majoritaire à un tour, le PQ obtient 54 sièges, le Parti libéral du Premier ministre sortant Jean Charest en a 50, et la Coalition Avenir Québec (centre droit) de François Legault 19.
Pauline Marois (née à Québec le 29 mars 1949 ) du PQ devient nouvelle premier ministre mais avec une majorité relative.
Les deux sièges restants vont aux animateurs d'un petit parti souverainiste de gauche, Québec solidaire.
Amir Khadir candidat du parti Québec solidaire, coalition de la gauche progressiste au Québec, rassemblant notamment le Parti communiste Québécois nous parle de ses ambitions et des enjeux de l’élection.
Il a été brillament élu député dans sa circonscription de Mercier, qui comprend le Plateau Mont-Royal.
La deuxième députée de Québec solidaire est Mme Françoise David nouvelle élue de la circonscription montréalaise de Gouin, où elle était engagée dans une lutte serrée avec le député sortant péquiste Nicolas Girard.
Des élections se sont tenues ce 4 septembre au Québec, plus tôt que prévu. Les étudiants québécois ont-ils entrainé ce mouvement dans la population tel que Jean Charrest, le Premier ministre québécois, a été tenu d’organiser de nouvelles élections ?
Jean Charrest est pris en tenaille entre deux impératifs. L’un, responsable de la tenue un peu plus hâtive d’élections, est la commission d’enquête sur la corruption dans l’administration des contrats publics, attendue depuis deux ans et demi, et que nous avons poussée. Ses travaux ont commencé en mai, et l’essentiel des révélations doivent se produire à partir de la mi-septembre. Ce que voulait faire le gouvernement Charrest, de l’avis de tous les observateurs, c’est déclencher des élections à la fin avril dernier. Le problème, c’est que le mouvement étudiant l’en a empêché.
Le gouvernement était donc pris en tenailles entre ce mouvement étudiant, et les révélations plus compromettantes de la commission d’enquête à venir à partir de la mi-septembre. Ce qui fait que c’est le mouvement étudiant qui a refermé la fenêtre d’opportunité, la dernière dont disposait le gouvernement Charrest, en avril-mai, le repoussant à septembre.
Une question semble revenir au centre du débat : l’indépendance du Québec. Face à la dette du Canada, face à un gouvernement québécois qui s’est discrédité, les Québécois sont-ils en train de se saisir de leur conscience souverainiste ?
Certains, dans le corps souverainiste, aimeraient que ce genre d’automatisme ou de transfert politique s’opère. Malheureusement, pour nombre d’entre nous, ce n’est pas nécessairement de cette manière là que les gens abordent les élections. Je pense que pour l’instant, l’essentiel de l’élection tourne autour des questions d’intégrité, de transparence, de la bonne gestion des fonds publics.
D’autres enjeux comme la santé, l’éducation sont des soucis majeurs, permanents d’une élection à l’autre, surgissent avec force. La question de l’indépendance, bien qu’elle soit brandie par le gouvernement Charrest, n’est pas l’objet de l’élection, tout le monde en est conscient. C’est une des raisons pour laquelle la campagne de M. Charrest, qui veut se poser en défenseur de l’unité canadienne, ne fonctionne pas très bien.
C’est aussi une des raisons qui expliquent la chute constante des libéraux dans les sondages malgré le fait que M. Charrest brandit cette « menace », plusieurs fois par semaine, devant la population disant : si vous élisez le parti québécois, c’est une autre bataille référendaire qui s’engage sur la souveraineté.
Mais ce n’est pas comme ça que la population le perçoit. Bien qu’à mon avis, avec un gouvernement canadien qui adopte des orientations de plus en plus réactionnaires, en porte-à-faux avec les grands consensus sociaux au Québec, le terrain va devenir plus fertile pour les indépendantistes, c’est certain.
Le taux de chômage est de 7,8% au Québec. Charrest a sorti un plan Grand Nord qui comporte une privatisation des biens publics. Les droits de scolarité devaient être augmentés. A votre avis, la population sent-elle une contradiction entre la politique menée et la situation dans laquelle elle est ?
Jusqu’à un certain point. Les problèmes évoqués se rejoignent. On assiste avec le gouvernement Charrest depuis de nombreuses années, à une volonté marquée de diminuer la charge de l’Etat au profit des entreprises, d’alléger la fiscalité des entreprises, mais surtout de faire surgir une fiscalité de plus en plus grande pour les investissements privés. On assiste ainsi, pour la santé, à une privatisation sournoise qui ne dit pas son nom. Le fait de vouloir endetter davantage les étudiants, c’est d’importants bénéfices et marchés captifs solvables pour les institutions prêteuses : il suffit de regarder la manne que cela représente aux Etats-Unis, la 2ème dans les crédits personnels après les hypothèques sur les maisons.
Mais comme le Québec est aussi une espèce de paradis pour les industries extractives, notamment en raison d’une vieille loi excessivement favorable aux investisseurs privés que tous les gouvernements ont échoué à réformer, depuis 150 ans, sauf entre 1874 et 1918 par un Premier ministre Honoré Mercier, très nationaliste. Le gouvernement a tablé majoritairement dessus pour ouvrir un boulevard aux investisseurs privés, pour exploiter le grand Nord à grand frais pour le contribuable puisque cela doit coûter au bas mot 25 millions d’investissements payés par le gouvernement du Québec, donc, par nos poches, pour ouvrir les routes, faire parvenir l’électricité dont ont besoin ses investisseurs pour opérer sur le territoire.
C’est vraiment l’archétype du paradis néolibéral à son mieux ! Autrement dit : un Etat complètement au diapason et au service des fonds publics, des investisseurs privés, pour générer de l’activité économique à profit privé. Jean Charrest est un artisan des politiques néolibérales des plus habiles, car il a réussi à les faire sans les gros sabots d’un Nicolas Sarkozy ou les politiques d’affrontement des autres dirigeants que l’on a connues ces 20 dernières années. C’est un type excessivement habile de ce point de vue.
Dans ce cadre, Québec Solidaire progresse mais son ascension est moins forte que ce à quoi on pouvait s’attendre.
Nous sommes victimes du mode de scrutin !
Malgré tout, quels thèmes, parmi ceux que vous défendez, recueillent le plus l’attention de l’opinion publique ?
D’abord, pour plus du quart des Québécois, leur premier ou deuxième choix est quand même Québec Solidaire. Les grands thèmes que nous avons réussis à mettre en avant, tout le monde en débat au Québec : des ressources naturelles, de la nécessité d’une meilleure réappropriation publique de nos ressources… On le doit grandement à Québec Solidaire. C’est un sujet que nous avons évoqué dès notre premier travail à l’Assemblée nationale en janvier 2009. Ce qui fait qu’aujourd’hui comme jamais au cours des 40 dernières années on parle de la nécessité du renvoi de la loi sur les mines et de se réapproprier les ressources naturelles.
Ensuite, les transports collectifs : l’investissement dans le transport électrique collectif, que nous avons mis en avant et que le PQ [NDLR : Parti Québécois, social démocrate et favori de l’élection] a récupéré sans y associer les budgets nécessaires. Comme c’est improvisé, ça ne tient pas la route dans leurs perspectives budgétaires globales.
Nous avons mis en avant la nécessité d’un régime de pension universel qui soit adéquat et réponde aux besoins de toutes les personnes en difficulté. Nous avons aussi mis en avant la nécessité au Québec d’un revenu minimum garanti. Ces deux sujets ne se sont toutefois pas imposés dans les débats actuels. Enfin, il y a la question de l’éducation où il y a un clivage entre nous qui proposons la gratuité de l’université et différents partis qui, à différents niveaux veulent les augmenter, ou les indexer. Bref, c’est pour ces raisons que le QS a l’appui des jeunes.
Entretien publié par l'Humanité
10:33 Publié dans Actualités, Connaissances, Entretiens, Planète | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : étudiants, privatisation, québec, amir khadir, jean charrest, pauline marois | |
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23/08/2012
Alain Keler "Personne n’a jugé utile de s’intéresser aux roms, ils sont devenus des fantômes"
Des pays d’Europe de l’Est dont ils sont originaires aux bidonvilles de France, Alain Keler parcourt le continent pour photographier les Roms, « minorité des minorités ».
Depuis des années, le photographe reporter Alain Keler se rend en Europe de l’Est à la rencontre des minorités ethniques et en particulier des Roms. Une partie de ses reportages a été publiée dans la revue XXI sous forme de bande dessinée avec Emmanuel Guibert (le photographe), avant de sortir en livre (1) l’an dernier.
Vous avez réalisé de nombreux reportages auprès des Roms dans les villages d’Europe de l’Est. Pourquoi partent-ils ?
Alain Keler. Pour schématiser, il s’est passé la même chose dans tous les pays de l’Est : pendant le régime communiste, les Roms étaient obligés de travailler. À la chute du bloc de l’Est, des tas d’usines pas rentables ont fermé. Les premiers licenciés ont été les Roms, parce qu’ils n’avaient pas fait d’études et, surtout, parce qu’ils étaient roms... Avec la montée du chômage, ils n’ont jamais pu se faire réembaucher. Ils ont été mis à l’écart d’une société qui devenait de plus en plus compétitive. Sans doute, eux, se sont isolés aussi. Au début des années 1990, on a vu apparaître des pogroms contre des villages roms. Ça a été d’autant plus dur qu’il n’y avait aucune politique gouvernementale pour les aider. Notamment pour la scolarisation. En Slovaquie, les enfants roms sont jugés trop turbulents et mis dans des écoles spéciales pour handicapés mentaux. C’est terrible, on leur supprime dès le plus jeune âge toutes les chancesde s’intégrer dans la société.
En ex-Yougoslavie, la situation était un peu différente, non ?
Alain Keler. Au Kosovo, quand les Serbes ont quitté le pays fin 1999, la première chose qu’ont faite les Albanais a été de brûler les maisons des Roms qu’ils accusaient d’avoir collaboré avec les Serbes. Beaucoup sont partis, notamment en Serbie parce qu’ils parlaient la langue. Ils sont devenus des fantômes : sans papiers d’identité, ils vivaient dans des forêts près de Belgrade et travaillaient en récupérant du métal. Personne n’a jamais jugé utile de s’intéresser à eux et ça a duré comme ça une vingtaine d’années dans tous ces pays. Pendant que les gens goûtent aux plaisirs de la société ultralibérale, eux sont mis complètement à l’écart. En Roumanie, ils vivent dans des petits villages, loin de tout et très pauvres. Quelques-uns arrivent à s’en sortir, heureusement.
Comment réagissez-vous aux évacuations de campements menées en France ces dernières semaines ?
Alain Keler. Mal. J’ai été très surpris. Le discours est moins violent, mais on se retrouve dans le même cas de figure que sous Hortefeux et Guéant. Je pensais que le gouvernement aurait la sagesse d’organiser des rencontres entre associations et ministères pour essayer de trouver des solutions. Les Roms vivent dans des conditions épouvantables ; au niveau sanitaire, c’est terrible, il y a des rats, des épidémies. Je pensais qu’il y aurait une vraie réflexion pour supprimer les bidonvilles, pour que les familles soient mieux traitées et puissent se stabiliser.
Et pourtant, 80 % des Français se disent favorables aux expulsions de campements roms…
Alain Keler. L’opinion publique a été beaucoup manipulée par le précédent gouvernement. Quand je dis que je travaille sur les Roms, les gens réagissent souvent en les traitant de voleurs. C’est la fable des romanichels voleurs d’enfants qu’on raconte depuis toujours. Ils ne savent pas de quoi ils parlent et n’essayent pas de savoir pourquoi ces gens vivent ici dans des conditions dramatiques. Si on expulse tous les bidonvilles, ça ne résoudra pas nos problèmes ! De tout temps, les immigrés, qu’ils soient juifs, italiens ou maghrébins, ont été rejetés. Quand on leur laisse leur chance, ils enrichissent la société française.
Comment êtes-vous accueilli par les Roms en tant que photographe ?
Alain Keler. Plutôt bien, surtout dans les endroits où je retourne régulièrement. Il faut du temps, leur donner des photos, faire des échanges... C’est délicat, surtout quand ils sont à la une de l’actualité et que toute la presse y va. Ça les énerve d’être considérés comme des animaux en cage, ce que je peux comprendre. Si quelqu’un venait chez moi prendre des photos, je ne serais pas ravi…
(1) Des nouvelles d’Alain, d’Emmanuel Guibert, Alain Keler et Frédéric Lemercier. Éditions les Arènes, 95 pages, 19 euros.
Entertien publié dans le journal l'Humanité
12:10 Publié dans Actualités, Connaissances, Entretiens, International | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roms, sans-papiers, europe, expulsions, roumanie, entretien, slovaquie | |
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20/08/2012
Quel sens cela a-t-il de se dire «communiste» en 2012 ?
Pierre Laurent est secrétaire national du Parti communiste français (PCF).
Quel sens cela a-t-il de se dire «communiste» en 2012 ?
Le communisme, c’est une mise en commun, un partage. Et la révolte contre l’injustice est toujours autant d’actualité. Tous les systèmes d’aliénation doivent être dépassés pour inventer une autre manière de vivre ensemble. Après plusieurs décennies de mondialisation accélérée, on voit aujourd’hui émerger la question des «biens communs» de l’humanité et revenir celle de la maîtrise sociale des richesses. Pendant une partie du XXe siècle, les idées communistes ont été dogmatisées, jusqu’à être détournées de leur objet dans les pays de l’Est. Mais les idées communistes, au-delà des caricatures et de leurs perversions profondes, restent valables. Cela suppose un effort d’invention extrêmement profond pour penser des solutions dans un monde très différent.
Par exemple ?
L’impasse majeure des expériences communistes a été l’aveuglement démocratique. Il a empêché de dépasser les obstacles rencontrés. Aujourd’hui, les modèles représentatifs touchent leurs limites à cause d’un niveau inédit de savoir dans la société. Les démocraties doivent être profondément renouvelées. Le sens de la production doit être repensé. La question du sens des richesses produites, qu’il s’agisse de leur utilité et de leur finalité, devient décisive pour l’avenir écologique de la planète.
En tant que communiste, êtes-vous toujours opposé à la propriété privée des moyens de production ?
La vision étatiste, centralisée de la propriété collective est dépassée, mais pas l’appropriation sociale des richesses. Le système de la Sécurité sociale, créé en France à la Libération à l’initiative d’un ministre PCF, est une idée profondément communiste ! Prélever à la source une partie des richesses pour la consacrer au bien-être social des populations, c’est communiste ! Mais cela n’est pas contradictoire avec l’existence d’entreprises privées ! Le communisme aujourd’hui est tout sauf un égalitarisme qui s’imposerait de manière administrative et qui nierait le travail. Les individus ont besoin de confronter librement leurs envies de création. Mais, je n’aspire pas à une société idéale.
C’est une révolution chez les communistes de ne plus avoir l’idéal comme horizon !
Je suis animé par le fait de rêver une société, mais ça n’a rien à voir avec définir une société idéale. Je ne crois pas plus au communisme par plans quinquennaux. Le communisme est un mouvement, un chemin de projets partagés, sans cesse remis en discussion. Ce n’est pas une société parfaite à atteindre.
Le communisme d’aujourd’hui ne serait-il pas devenu le socialisme d’hier ?
Entre 1830 et 1917, le Manifeste du Parti communiste de Marx et Engels se décline dans une multitude d’expériences dites socialistes. Mais à partir de 1917, un débat traverse les forces socialistes dans le monde entier, et un très grand nombre d’entre elles choisit la voie communiste. Relisez les textes socialistes de 1936, vous verrez la distance avec ce que dit le PS actuel. Le PCF d’aujourd’hui est l’héritier des traditions socialistes et communistes de la première moitié du XXe siècle, alors que la plupart des sociaux-démocrates ont perdu le fil de cette tradition.
Mais pourquoi garder le nom «communiste» ? Par nostalgie ?
Parce que la gauche française s’est structurée en deux grands courants issus de la même matrice. Les communistes et les socialistes. Cela marque les consciences et les cultures. A partir des années 60, ces deux grands courants ont eu des stratégies communes de conquête du pouvoir à travers un programme commun, la gestion de municipalités, des expériences gouvernementales. C’est une originalité française d’avoir eu en Europe une gauche très à gauche ! Mais on voit aujourd’hui, à rebours de l’histoire, le PS français vouloir faire tardivement une mue sociale-démocrate. Au moment où toute la gauche française doit repenser ses fondamentaux ! Avec la stratégie du Front de gauche, le PCF est engagé dans une transformation très profonde. En tirant les leçons de son histoire et grâce aux nouvelles générations.
Le communisme productiviste et l’écologie sont-ils compatibles ?
Ils sont inséparables. Produire toujours plus sans se poser la question de savoir si on répond à des besoins utiles, cela n’a pas de sens. La réflexion écologique permet de s’interroger sur le sens de l’activité humaine. Mais pour penser la transition écologique, nous aurons besoin d’outils industriels. On peut à la fois défendre notre industrie et défendre le fait qu’elle doit connaître une mutation. Nous sommes bien conscients que si la prévention écologique n’est pas intégrée dans l’activité industrielle, celle-ci va continuer à faire des dégâts environnementaux.
Les déchets nucléaires engagent des générations… Vous êtes toujours pronucléaire ?
Pour certains, le nucléaire est devenu l’alpha et l’oméga de la question écologique. C’est très réducteur. Deux questions se posent : est-ce que la maîtrise de cette technologie dans de bonnes conditions écologiques est possible ? Est-ce que les risques sont supportables et répondent aux enjeux énergétiques ? Si la société répond que le nucléaire ne doit pas être utilisé, les ouvriers du secteur, avec leur haut niveau de qualification, peuvent facilement se reconvertir. Si on considère qu’il reste nécessaire, il faut créer des conditions de sécurité suffisantes pour les salariés comme pour la société.
Par LILIAN ALEMAGNA, JONATHAN BOUCHET-PETERSEN, pour Libération
16:11 Publié dans Actualités, Entretiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pierre laurent, pcf, communisme | |
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