07/11/2010
Hyperaustérité et graves atteintes à la démocratie
L’Interview paru le 30 octobre 2010 dans l’Humanité
Francis Wurtz, député honoraire du Parlement européen, a conduit la bataille contre le traité constitutionnel en 2005.
Que pensez-vous de la décision du Conseil de faire modifier le traité de Lisbonne pour pérenniser le Fonds de stabilisation ?
Francis Wurtz. Quand nous avons dit «non» au traité constitutionnel en 2005, dont celui de Lisbonne est un avatar, nous avions signalé que ce traité interdisait à un État membre de l’UE ou à la Banque centrale européenne (BCE) de venir en aide à un autre État en difficulté. Donc, a priori, on ne va pas se plaindre que cet article soit éventuellement supprimé. Le problème, c’est que le Fonds de stabilisation, ce n’est pas de la solidarité ! Dans le cas de la Grèce, par exemple, l’UE a imposé des conditions draconiennes à ce pays et, pire, certains États, comme la France, ont gagné de l’argent sur le dos du peuple grec !
Quelles sont les autres conséquences ?
Francis Wurtz. Elles sont graves. L’Allemagne n’a accepté la pérennisation de ce Fonds de stabilisation qu’à la condition d’un durcissement des sanctions contre tout État contrevenant à la discipline budgétaire et d’un renforcement du pacte de stabilité. Pour la France, dans l’avenir, en cas de déficit public jugé excessif, la sanction financière pourrait atteindre 10 milliards d’euros. Quant au renforcement du pacte de stabilité, il implique que les budgets nationaux soient soumis au contrôle de la Commission européenne préalablement à leur examen par les Parlements nationaux. Il s’agit là d’une politique d’hyperaustérité et d’une atteinte très grave à la démocratie.
Pourquoi en est-on arrivé là ?
Francis Wurtz. La question est que l’UE n’a tiré aucune leçon de la crise financière. Elle aggrave encore la soumission des États membres aux exigences des marchés. Cette politique a été décidée au moment même où l’Europe est le théâtre de puissantes manifestations contre les politiques actuelles. Les dirigeants européens restent sourds à cette désaffection massive des peuples. Et ce au risque d’encourager le populisme.
Que peut-on faire ?
Francis Wurtz. D’abord, faire converger les actions se déroulant sous différentes formes en Europe contre le démantèlement systématique du modèle social européen. Il faut s’unir à l’échelle européenne contre cette hyperaustérité, les attaques contre les retraites, les services publics, la fermeture des entreprises… Ensuite, mener en même temps un débat partout en Europe sur les causes de cette crise, sur l’extrême dépendance à l’égard des marchés financiers, et montrer qu’on peut s’en émanciper, de sorte à créer les conditions d’une appropriation par les citoyens des vrais enjeux européens. Et aussi aider ces citoyens à faire le lien entre leur difficile quotidien et les orientations néolibérales concoctées par les dirigeants de l’UE. En troisième lieu, il s’agit de faire grandir les alternatives à cette orientation néolibérale en mettant la question sociale et sociétale au cœur du projet européen. En France, par exemple, le PCF préconise une autre mission pour la BCE : racheter les titres publics (la dette publique) à un taux bas ou nul, pour que l’argent puisse être utilisé pour favoriser l’emploi, la création des richesses, les services publics. Autrement dit, nous proposons aussi que la BCE finance des crédits dans des conditions différentes selon qu’il s’agit d’investissements créateurs d’emplois ou destinés à la spéculation. Dans le premier cas, les conditions d’accès au crédit devront être très favorables, dans le second cas, très dissuasives. En conclusion, je pense que, pour soutenir un tel changement, il existe en Europe une aspiration majoritaire. C’est l’un des points qui seront discutés lors du congrès du Parti de la gauche européenne qui se tiendra à Paris au mois de décembre.
Entretien réalisé par Hassane Zerrouky
17:44 Publié dans Entretiens | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : europe, francis wurtz | |
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19/08/2010
SACCAGE DES VIGNES : UNE ATTEINTE A LA LIBERTE DE CHERCHER
Invitée de Bourdin Direct sur RMC, Marion Guillou, présidente directrice générale de l’INRA (Institut national de recherche agronomique), est notamment revenue sur le saccage des vignes OGM d’une unité de l’Inra à Colmar la semaine dernière.
« Le grand public n’a pas l’air de se rendre compte de la situation » a déploré Marion Guillou. « Ce sont huit ans de travail qui sont ainsi piétinés. C’est un acte extrêmement violent. D’abord, il y a franchissement de clôture. Ils sont entrés dans les locaux de l’Inra et ils ont détruit un outil de travail de chercheur. Dire que c’est non violent, ce n’est pas correct du tout. Les chercheurs envisagent de ne pas continuer. Tout notre travail va être de les remotiver pour garder cette compétence en France » a-t-elle déclaré, ajoutant : « Imaginez-vous l’image de la France aux yeux des scientifiques qui savent qu’il est presque impossible en France de faire un essai en champ pour savoir ce qu’il se passe dans un OGM en réalité ».
Pour ces raisons, l’Inra a porté plainte en raison de « l’atteinte à la liberté de chercher ».

« 60% des vignes françaises sont atteintes par la maladie du court-noué. C’est la mort du vignoble sur quelques années si cela continue. Le vignoble français et, plus largement, mondial, est menacé par ce virus. Les viticulteurs le savent bien. Ils ont des pertes très significatives chaque fois que la vigne est atteinte. La maladie gagne inexorablement année après année. On avait un produit de traitement chimique pour la soigner qui est désormais interdit. On explore donc actuellement trois voies de lutte contre le court-noué : l’expérimentation OGM n’était jamais qu’une des expérimentations dans le cadre de cette recherche de solutions. On pensait qu’un bois de vigne génétiquement modifié pouvait éventuellement ralentir le virus. En laboratoire, cela marchait. Nous n’avons pas pu aller au bout de l’expérimentation, ce qui est grave pour l’expertise française. »
15:53 Publié dans Entretiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : inra, vigne, ogm | |
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05/07/2010
POUR UN PARTI COMMUNISTE UTILE
Elu secrétaire national du Parti communiste français le 20 juin, Pierre Laurent succède à Marie-George Buffet. Ancien journaliste économique, directeur de la rédaction du journal L'Humanité, il s'est lancé en politique lors des élections régionales et a été élu conseiller régional en Ile-de-France. Interview.
Comment avez-vous vécu le passage de flambeau entre Marie-George Buffet et vous ?
« Avec beaucoup d'émotion. Ca c'est très bien passé, en bonne intelligence. Il y avait un désir commun de nous deux et des militants d'un rajeunissement et d'un renouvellement de la direction du Parti communiste, la volonté de donner le signal du départ d'une nouvelle époque pour le Parti communiste. »
Quels sont les objectifs que vous vous fixez en prenant la tête du PCF ?
« L'urgence est de faire du Parti communiste un parti utile à la riposte face au gouvernement. Il y a de graves attaques sociales, contre les retraites, les emplois et les dépenses publics. Et nous voulons un Parti communiste qui soit utile à résister, et utile à emporter des victoires contre cette politique.
Nous voulons un Parti communiste de rassemblement, qui travaille à l'unité pour permettre à de nouvelles perspectives de voir le jour dans notre pays. Nous avons la volonté pour cela de rentrer à nouveau en dialogue avec les catégories populaires, le monde ouvrier et les jeunes, qui sont très souvent dans la précarité. Il y a donc un désir de rajeunissement du Parti communiste dans sa direction mais aussi dans ses militants. Nous voulons que les nouvelles générations prennent le pouvoir au Parti communiste. »
Ce rassemblement passe-t-il nécessairement par le Front de gauche, comme aux élections régionales ?
« Nous allons poursuivre le Front de gauche, que nous avons initié avec d'autres forces politiques. Mais nous voulons lui donner une nouvelle dimension ; nous ne voulons pas que le Front de gauche soit un cartel de quelques organisations à la marge de la gauche. Il nous faut une dynamique populaire, autour d'un projet, qui soit au coeur de la gauche et qui offre une perspective pour toute la gauche.
Nous voulons travailler avec les forces actuelles du Front de gauche, mais aussi entrer en dialogue avec toutes les forces de la gauche, que nous appelons à nous rejoindre pour construire le projet de gauche qui convient de mettre en place pour les échéances politiques de 2012. »
Cette volonté d'ouverture peut-elle concerner le NPA, ou encore les écologistes ?
« Oui, nous allons nous adresser à toutes les forces de la gauche. Il y a un besoin d'unité mais cette unité doit se construire autour d'objectifs clairs. Il ne s'agit pas de s'unir dans le flou pour demain ne pas faire des politiques qui répondent aux besoins populaires. Nous voulons construire cette unité à partir d'un débat et d'une clarification des grandes réformes que doit porter la gauche dans son projet. Et ce qui se passe avec les retraites nous montre que ce rassemblement est sûrement possible. »
Comment comptez-vous freiner l'érosion de votre électorat ?
« Nous ne perdons pas des voix à chaque élection. Nous avons eu des résultats difficiles dans les deux dernières élections présidentielles, mais dans les élections locales, régionales, là où nous nous sommes présentés avec le Front de gauche, nous obtenons des résultats plutôt encourageants.
Depuis 2005, depuis la victoire du non au référendum sur le traité constitutionnel européen, il y a plutôt une stabilisation de nos résultats. Maintenant, nous voulons aller beaucoup plus loin : et effectivement retrouver une audience importante, y compris dans les élections nationales comme l'élection présidentielle. Et nous allons travailler à un projet et une candidature de rassemblement pour 2012. »
Vous seriez ce candidat ?
« Nous ne voulons pas entrer dans le débat sur la désignation du ou de la candidate maintenant ; ça n'est pas un problème de personne, l'heure n'est pas au casting de la présidentielle, nous allons d'abord travailler sur le projet. Personnellement, je viens de devenir le secrétaire national du Parti communiste, je viens d'être élu conseiller régional en Ile-de-France, pour le moment tout cela suffit à mon bonheur. »
Cette réforme des retraites qui a beaucoup mobilisé, comment la percevez-vous ?
« La décision que viennent de prendre les syndicats de poursuivre des actions pendant l'été, notamment le 13 juillet, devant les préfectures, et de tenir une première grande journée d'action le 7 septembre, nous paraît être la bonne voie. Il n'y a pas de victoire possible contre le projet gouvernemental sans une mobilisation sociale unitaire accrue à la rentrée.
Nous allons nous-mêmes faire signer tout l'été une pétition pour soutenir les propositions du projet de loi déposé par les députés communistes qui montre qu'un autre financement des retraites est possible, notamment par la création d'une cotisation sur les revenus financiers. »
Quelle sera votre stratégie pour les élections cantonales de mars 2011 ?
« Nous allons présenter des candidats communistes, du Front de gauche, dans le maximum de cantons, avec la volonté du rassemblement du second tour. Nous voulons permettre à la gauche de conserver et même de gagner le maximum de majorité de gestion dans les départements. »
Propos recueillis par Emmanuel Hasle pour le Bien Public, photos E-Mosaïque
10:37 Publié dans Entretiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pierre laurent, pcf | |
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13/03/2010
Rencontre avec Joan Baez

Qui a dit qu’une chanson ne peut pas changer le monde ? Vous, qui avez mis votre art au service de nombreuses causes, êtes-vous consciente d’avoir donné un contre-exemple fulgurant à cette assertion ?
Joan Baez. Je vous remercie du compliment. Je suis en partie d’accord avec vous. Mais, un artiste ne peut faire la révolution dans son coin. à mon avis, il faut une condition : que cette chanson soit en synergie avec une action. Elle ne peut suffire en elle-même, elle doit s’intégrer dans une mobilisation.
Tôt dans votre vie, vous avez consacré votre énergie à la fois à la musique et à l’engagement politique, avec une ténacité surprenante…
Joan Baez. J’ai eu beaucoup de chance, parce que j’aime les deux. J’ai besoin des deux. Jeune déjà, je ne pouvais pas m’endormir tranquillement, sans rien faire, alors que je savais que des gens souffraient sous un coin du ciel. Je n’ai pas vécu mon engagement comme un sacrifice, même s’il m’a souvent conduite à mettre ma carrière au second plan, ce qui m’a maintes fois été reproché dans le milieu professionnel. Pour moi, dès mon enfance, il était clair que je pouvais mener les deux de front, je le faisais aussi naturellement que de respirer. J’ai l’habitude de formuler ça en disant que je n’ai pas choisi l’art et la conscience sociale. Mais ce sont eux qui m’ont choisie comme messagère.
Quand et comment votre conscience politique est-elle née ?
Joan Baez. La première chose extérieure qui m’ait marquée a été la lecture du journal d’Anne Frank. Le sort et le courage de cette jeune fille m’ont secouée, bouleversée. L’autre élément a été d’ordre familial. J’avais huit ans, quand mes parents sont devenus Quakers. Ils m’ont expliqué de bonne heure que, pour cette religion, aucun nationalisme, aucun drapeau ne pouvait compter plus qu’une vie humaine, ni justifier que l’on assassine des gens. Adolescente, j’ai eu le soutien d’un maître spirituel qui était dans la lignée du Mahãtma Gandhi. C’était, pour moi, un véritable choix.
Martin Luther King a marqué votre démarche politique. Comment est-ce advenu ?
Joan Baez. Je l’ai rencontré à l’âge de seize ans. Je m’étais rendue à une grande conférence qu’il donnait auprès des étudiants. L’émotion m’a submergée, parce que je réalisais à quel point son action était en phase avec mes convictions. Il dirigeait la campagne de boycott des bus, dans le Mississipwpi. Les Noirs souffraient terriblement de la ségrégation. Ils affrontaient d’effroyables violences. Mais les actions que Martin Luther King menait étaient résolument non violentes. Je trouvais ça extraordinaire, parce que j’avais beaucoup lu au sujet de la non-violence, mais je ne l’avais encore jamais vu mise en pratique.
A seize ans, vous aviez donc déjà une conscience politique ?
Joan Baez. Oui. J’avais déjà accompli ma première action de désobéissance civile. C’était à l’école. On nous a ordonné d’évacuer l’établissement, en prétextant de nous préparer à un éventuel bombardement de missiles soviétiques. J’ai trouvé ça ridicule. Tout le monde est parti, sauf moi. Je suis restée dans l’enceinte de l’école afin de protester. Le lendemain, les journaux déclaraient que j’étais une fille dangereuse, une communiste !
Ces diatribes médiatiques vous ont-elle découragée ?
Joan Baez. Pas du tout. Les profs étaient déconcertés de ma position non violente. J’ai commencé à discuter avec eux, à leur expliquer. Et j’ai senti quelque chose s’éveiller en eux. C’était ma première action cruciale. Cela a fait du bruit. Je ne me préoccupais pas des conséquences, je me sentais prête à les assumer.
Ce qui frappe chez vous, c’est que l’on ne sent jamais d’amertume. Pourtant, vous avez essuyé des déceptions. Comment expliquez-vous cette absence d’animosité ?
Joan Baez. Quelquefois, bien sûr, je suis en colère. Mais je ne suis pas souvent désappointée, parce que je veille à ne pas entretenir d’attentes trop élevées. Je me concentre sur le présent, sur ce que je décide de faire. J’ai compris assez vite qu’il valait mieux cultiver la force intérieure et délaisser la rancune. J’essayais modestement de suivre l’exemple de Gandhi et de Martin Luther King. Gandhi se levait et, quels que fussent les coups contre lui, il se redressait et recommençait son action. Martin Luther King, lui, savait qu’il allait être assassiné.
C’est ce que l’on a pu entendre, effectivement…
Joan Baez. Oui, il le savait ! En particulier, quand il s’est mis à dénoncer la guerre du Vietnam. Les autorités ont, alors, tenté de le marginaliser. La Maison Blanche ne voulait plus entendre parler de lui. Je suis convaincue que son action contre la guerre du Vietnam lui a coûté la vie. Il savait que ses ennemis possédaient un pouvoir énorme. C’est très dur de prendre les décisions qui ont été les siennes. Et plus dur encore de s’y tenir, comme il l’a fait.
Que s’est-il passé, quand il est venu vous voir en prison, où la police vous avait jetée parce que vous aviez manifesté ?
Joan Baez. Sa venue a été une merveilleuse source de réconfort, non seulement pour moi, mais aussi pour mes compagnes de geôle. Vous imaginez, votre héros vous rend visite ! En fait, ce qui m’a le plus touchée, c’est la réaction des autres prisonnières. Les femmes noires voulaient absolument le voir. Elles ont couru jusqu’à lui, avant même que les gardiens puissent les retenir. L’une d’elle a été si rapide qu’elle a pu s’accrocher à lui. Elle lui a dit : « Je n’ai rien à faire ni des avantages que les matons vont me retirer, ni des sanctions qu’ils vont m’infliger. Le simple fait de vous avoir touché me donne de la force ». Et elle s’est écriée : « J’ai touché Martin Luther King ! J’ai touché Martin Luther King ! » Le moral de toutes les détenues a subitement été regonflé à bloc.
N’aviez-vous pas peur de la répression, ne craigniez-vous pas d’être assassinée ?
Joan Baez. Avec le recul, je m’aperçois que je n’avais pas toujours complètement conscience du danger. Il y a des situations qui m’ont terrorisée. Par exemple, lors d’un concert à Birmingham, dans l’Alabama. Je traversais la scène. Quelqu’un, au balcon, a lancé une chaise. Cela a provoqué un bruit énorme. J’ai sauté en l’air à plus de trente centimètres du sol. Je ne savais même pas que je pouvais devenir à ce point nerveuse. Un silence de mort s’est brutalement abattu, parce qu’on croyait qu’une balle avait été tirée. Mon cœur battait la chamade. Mais, une fois qu’il a été vérifié qu’il n’y avait aucun danger, j’ai recommencé à chanter.
Vous qui avez connu l’âge d’or des luttes. Avez-vous parfois la sensation que, de nos jours, la pression économique est plus forte que la capacité à se mobiliser ?
Joan Baez. C’est vrai que l’on ressent un vide. Les années Bush ont découragé beaucoup de personnes. Aujourd’hui, je perçois encore cette sorte de désespérance. Toutefois l’élection de Barack Obama a suscité de nouveau l’espoir. Je l’appelle le miracle Obama. Mais le chemin sera extrêmement ardu pour lui. La droite le déteste. Elle ne supporte pas d’avoir affaire à cet homme très intelligent et cultivé. Elle va tenter de se débarrasser de lui. C’est à nous de jouer, maintenant. Les progressistes doivent s’organiser. J’ai conscience de n’avoir pas donné toute ma part. Accueillie à la Maison Blanche, j’ai fait un speech. Mais je sais que cela n’est pas suffisant. Nous avons beaucoup à faire.
Que pensez-vous de la situation économique et politique actuelle ?
Joan Baez. Les années Bush ont contribué au vide actuel… La droite a appris à faire des discours. Mais les progressistes n’ont pas appris à lui répondre. Longtemps restée aux manettes du pouvoir, elle est reine de la manipulation. Elle manipule le peuple, la presse, elle manipule ses propres troupes en enjolivant le tableau. Nous devons lui dire : vous racontez n’importe quoi, fermez-la !
Qu’est-ce qui vous préoccupe particulièrement aujourd’hui ?
Joan Baez. Outre la paupérisation mondiale, je pense que la détérioration de la planète va avoir de graves conséquences pour les plus démunis. Le dérèglement climatique aura des conséquences graves sur tous les plans : sanitaire, agricole, etc., sans oublier les réfugiés climatiques qui risquent de devenir de plus en plus nombreux et qui devront affronter des situations catastrophiques. C’est pourquoi, la sauvegarde de la planète m’apparaît comme l’urgence numéro un.
Avez-vous constaté que les droits de l’homme et leurs acquis sont de plus en plus remis en question ?
Joan Baez. Oui. Quand j’ai démarré mon action pour Amnesty International, je ne sais plus exactement si c’était en 1971 ou 1972, mais toujours est-il que nous notions de grandes avancées au sujet des droits humains. De nos jours, le monde est dans le chaos. La raison économique et financière prend de plus en plus le dessus.
Au début des années soixante-dix, vous vous êtes produite à la Fête de l’Humanité. Vous aviez chanté une chanson de Maxime Le Forestier. Quel message aimeriez-vous adresser à nos lecteurs, très sensibles à votre engagement ?
Joan Baez (en riant). Prenez une guitare et chantez avec moi ! Je plaisante. En fait, je ne me sens pas l’âme d’une donneuse de leçons. Je dirais simplement : écoutez votre cœur, car je sais que vous avez un cœur grand comme votre conscience.
Entretien réalisé Fara C, pour l'Humanité
11:42 Publié dans Entretiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : joan baez, chanteuse | |
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